Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 décembre 1983 et 15 décembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. de X... de LABROUSSE, demeurant ... à Bordeaux 33000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°- annule le jugement, en date du 3 novembre 1983, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à obtenir la réduction de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1975, 1976, 1977 et 1978 dans les rôles de la commune de Coutras,
2°- lui accorde la réduction des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Sur les traitements et salaires :
Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts, le montant net du revenu imposable dans la catégorie des traitements et salaires "est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent et en nature accordés : 3- Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut... ; elle est fixée à 10 p. 100 du montant de ce revenu... Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels..." ;
Considérant que les frais de transport que les contribuables exposent pour se rendre à leur lieu de travail ou en revenir sont, en règle générale, inhérents à leur fonction ou à leur emploi et doivent donc, à ce titre, être admis en déduction en vertu des dispositions précitées de l'article 83 du code ; que, toutefois, il en va autrement lorsque, eu égard aux circonstances, l'installation ou le maintien du domicile dans un lieu éloigné du lieu de travail présente un caractère anormal ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. de X... de LABROUSSE, célibataire, résidait en 1975 et en 1976 à Coutras Gironde alors qu'il avait pour seule activité professionnelle celle de chargé des fonctions de maître de conférences à l'université de Poitiers, qui lui avaient été confiées pour une période d'un an renouvelable ; que s'il demande que les frais afférents à ses déplacements entre ces deux localités distantes de 200 km soient déduits de ses revenus imposables, ni la circonstance que ses parents mettaient gratuitement une maison à sa disposition à Coutras, ni le caractère prétendûment précaire de son emploi, ne justifient, au regard des dispositions précitées de l'article 83, unerésidence aussi éloignée de son lieu de travail ;
Considérant, d'autre part, qu'au cours des années 1977 et 1978 M. de X... de LABROUSSE, tout en occupant le même emploi que pendant les deux années précédentes à l'université de Poitiers, a en outre exercé à Coutras une activité dans une entreprise artisanale créée par lui le 1er octobre 1977 ; qu'il résulte de l'instruction que pendant ces deux années, ses fonctions universitaires ont constitué son activité prépondérante ; que, dès lors, l'activité qu'il exerçait à Coutras n'est pas de nature à faire regarder ses frais de transport entre cette localité et Poitiers comme des frais inhérents à son emploi, déductibles de ses revenus imposables dans la catégorie des traitements et salaires ;
Considérant, enfin, que si l'administration a admis un certain nombre de dépenses de M. de X... de LABROUSSE à titre de frais professionnels, c'est à bon droit qu'elle n'a pas accepté la déduction de frais d'entretien et de chauffage de son bureau qui ne sont assortis d'aucune justification ; qu'en revanche, les frais d'un montant non contesté de 5 065,27 F exposés par M. de X... de LABROUSSE pour faire réimprimer sa thèse en 1976 en vue de se présenter à un concours universitaire, sont des frais professionnels déductibles, alors même que les frais d'impression de cette thèse auraient été déduits de ses revenus de 1975 ;
Sur les bénéfices commerciaux :
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. de X... de LABROUSSE n'a pas, dans le délai de trente jours conformément à l'article 267 quinquies III de l'annexe II du code général des impôts, opté pour le régime d'imposition sur les bénéfices réels pour l'entreprise artisanale qu'il a créée le 1er octobre 1977 ; que l'administration devait, comme elle l'a fait à bon droit en application de l'article 302 ter du code, l'imposer selon le régime du forfait dont le montant a été régulièrement fixé par la commission départementale des impôts, le requérant n'ayant pas accepté les propositions de l'administration ; que M. de X... de LABROUSSE n'apportant aucune justification à l'appui de sa contestation du chiffre de 10 000 F retenu par ladite commission, sa requête sur ce point ne peut qu'être rejetée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. de X... de LABROUSSE est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration n'a pas admis la déduction de la somme de 5 067,27 F de ses revenus au titre de 1976 et à demander la réformation sur ce point du jugement attaqué ;
Article ler : La base imposable des revenus de M. de X... de LABROUSSE au titre de l'année 1976 est réduite de la somme de 5 067,27 F.
Article 2 : M. de X... de LABROUSSE est déchargé de la différence entre l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1976 qui lui a été assigné et celui résultant de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement en date du 3 novembre 1983 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. de X... de LABROUSSE est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. de X... de LABROUSSE et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.