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07/11/1986 | FRANCE | N°39851

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 07 novembre 1986, 39851


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er février 1982 et 1er juin 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant ... , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule un jugement, en date du 3 décembre 1981, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge de rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des périodes successives du 1er janvier 1969 au 31 août 1978,
2° lui accorde la décharge des

impositions contestées,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code géné...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er février 1982 et 1er juin 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant ... , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule un jugement, en date du 3 décembre 1981, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge de rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des périodes successives du 1er janvier 1969 au 31 août 1978,
2° lui accorde la décharge des impositions contestées,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Teissier du Cros, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de M. Yves X...,
- les conclusions de M. Y.... Martin, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le tribunal administratif, a suffisamment motivé son refus de prescrire la mesure d'instruction sollicitée par M. Yves X... ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que ledit jugement est entaché sur ce point d'une irrégularité de nature à en entraîner l'annulation ;
Sur les impositions établies au titre de la période du 1er janvier 1969 au 31 octobre 1974 :
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans la rédaction de ce texte en vigueur au cours de la période d'imposition : "1° Les affaires faites en France... sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité de nature industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats" ; qu'aux termes de l'article 257 : "Sont également passibles de la taxe sur la valeur ajoutée... 4° les opérations réalisées par les exploitants agricoles dont les activités sont, en raison de leur nature ou de leur importance, assimilables à celles exercées par des industriels ou des commerçants, même si ces opérations constituent le prolongement de l'activité agricole" ;
Considérant que M. Yves X... exerçait, au cours des années susmentionnées, l'activité de "magnétiseur" ; que pour justifier devant le juge de l'impôt que M. Yves X... avait procédé à des ventes à ses clients de "gelée royale" achetée à des apiculteurs qui étaient passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration se fonde sur la comptabilité occulte que contiendrait, selon elle, un carnet saisi, lors d'une visite domiciliaire effectuée le 26 juin 1973, par des agents du service régional de police judiciaire de Toulouse agissant sur instruction du parquet à fins d'enquête sur des pratiques qui auraient été constitutives du délit d'exercice illégal de la médecine ; que M. Yves X... conteste la signification insi donnée aux mentions du carnet saisi et soutient que la "gelée royale" prétendument vendue, et non cédée gratuitement, aux clients de sa pratique du magnétisme serait en réalité provenue du produit d'un élevage d'abeilles donné par lui en métayage, dans des conditions qui ne seraient pas de nature à rendre ces opérations assimilables à l'exercice d'une activité de nature commerciale taxable sur le fondement des dispositions précitées de l'article 256 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le carnet saisi n'a pas été communiqué à l'intéressé ; que le ministre reconnaît ne pas être en mesure de produire ce carnet devant le Conseil d'Etat ; que si l'administration, pour suppléer au défaut de production de ce document, se réfère à un rapport établi par des agents du service régional de police judiciaire de Toulouse en date du 11 octobre 1973, il ne ressort des termes de ce rapport -lequel ne fait, notamment état d'aucune déclaration par laquelle le contribuable aurait reconnu avoir vendu de la "gelée royale"- aucun élément permettant de justifier que les livraisons de ce produit enregistrées sur le carnet saisi et dont fait état le rapport proviendraient d'achats à des tiers ; que, dans ces conditions, la preuve que les conditions exigées pour que le contribuable soit redevable de la taxe sur la valeur ajoutée, n'est pas rapportée par l'administration ;
Considérant, toutefois, que l'administration se prévaut, par voie de substitution de base légale, des dispositions du 4° de l'article 257 du code général des impôts, pour soutenir que les opérations réalisées par M. Yves X... provenant de son élevage d'abeilles, étant assimilables à celles qui sont effectuées par un commerçant, sont passibles de la taxe ;
Considérant que si l'administration doit être regardée comme établissant à partir des constatations faites par les agents du service régional de police judiciaire de Toulouse corroborées par les attestations de certains clients figurant dans leur rapport, que M. Yves X... cédait de la "gelée royale" aux clients de sa pratique du magnétisme dans des conditions assimilables à une vente, elle ne justifie pas pour autant que ces cessions, ont revêtu en l'espèce un caractère commercial les rendant taxables à la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions précitées de l'article 257 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. Yves X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratfif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1969 au 31 octobre 1974 à raison des opérations susmentionnées ;
Sur les impositions établies au titre de la période du 1er mars 1975 au 31 août 1978 :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 265-1 et 302 ter-1 du code général des impôts, applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée, que le chiffre d'affaires taxable est fixé forfaitairement en ce qui concerne les redevables dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 500 000 F s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ; qu'aux termes de l'article 302 ter du même code :".... 5. Les forfais de chiffre d'affaires... sont fixés pour l'année civile et pour une période de deux ans... 8. Ils peuvent faire l'objet d'une reconduction tacite pour une durée d'un an renouvelable. Dans ce cas, le montant du forfait retenu pour l'application de l'impôt est celui qui a été fixé pour la seconde année de la période biennale... 9. Les forfaits peuvent être dénoncés : par l'entreprise avant le 16 février de la deuxième année qui suit la période biennale pour laquelle ils ont été conclus et, en cas de reconduction, avant le 16 février de la deuxième année qui suit celle à laquelle s'appliquait la reconduction..." ;

Considérant qu'à défaut de dénonciation par M. Yves X... antérieurement au 16 février 1976, date d'expiration du délai dans lequel pouvait être dénoncé, en vertu de l'article 302 ter-9 du code général des impôts, le forfait de la période biennale 1973-1974, ledit forfait a été tacitement reconduit, en vertu de l'article 302 ter-8 du même code, et qu'à défaut de dénonciation par l'intéressé antérieurement aux 16 février 1977, 1978, 1979 et 1980, dates d'expiration du même délai imparti au redevable pour dénoncer les forfaits ainsi reconduits des années 1975, 1976, 1977 et 1978 respectivement, le forfait primitivement assigné à celui-ci pour la période biennale 1973-1974 a été tacitement reconduit, en vertu des textes précités, pour les années successives 1975, 1976, 1977 et 1978 ; que la circonstance que le forfait de la période biennale 1973-1974 aurait été irrégulièrement établi et reposerait sur des bases exagérées ne saurait être utilement invoquée par le requérant à l'encontre des impositions qui lui ont été assignées à raison des forfaits ainsi tacitement reconduits, lesquels revêtent un caractère distinct du forfait primitif ;
Considérant que le forfait prévu par les articles 265-1 et 302 ter-1 précités du code général des impôts étant un régime d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, et, M. Yves X... ayant été régulièrement assujetti à ce régime, ainsi qu'il a été dit, pour la période d'imposition litigieuse, par voie de tacite reconduction, l'administration justifie par cet assujettisement de ce que le redevable entrait dans le champ d'application de ladite taxe pendant ladite période ; que, dans ces conditions, il incombe au redevable de prouver tant la qualification étrangère à ce champ d'application qu'il donne aux recettes taxées suivant le régime du forfait de la taxe sur la valeur ajoutée que l'exagération de ce forfait ;

Considérant que, pour contester le caractère d'affaires assujettissables à la taxe, en vertu de l'article 256 du code général des impôts, des cessions de "gelée royale", à raison desquelles il a été imposé pendant la période litigieuse, M. Yves X... se borne à soutenir que ces cessions n'auraient pas été effectuées à ses clients dans des conditions assimilables à une vente, et ne provenaient pas, en tout état de cause, d'achats faits à des tiers ; que, cependant, ses allégations, sur le premier point, sont contredites, ainsi qu'il a été dit, par les constatations des agents de police judiciaire, et, sur le second point, ne sont pas établies par les pièces produites ;
Considérant que si M. Yves X... soutient que les forfaits reconduits seraient exagérés, il n'apporte pour autant aucune justification que les montants des forfaits n'auraient pas correspondu au chiffre d'affaires d'une exploitation de la nature de celle à laquelle il se livrait ;
Considérant que, de ce qui précède, il résulte que M. Yves X... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté, pour la période d'imposition du 1er mars 1975 au 31 août 1978 les conclusions de sa demande ;
Article 1er : Il est accordé à M. Yves X... la décharge des rapppels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquels il a été assujetti au titre de la période du1er janvier 1969 au 31 octobre 1974.

Article 2 : Le jugement, en date du 3 décembre 1981, du tribunaladministratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire à laprésente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Yves X... est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Yves X... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des financeset de la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 39851
Date de la décision : 07/11/1986
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILES - T.V.A.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 1986, n° 39851
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Teissier du Cros
Rapporteur public ?: Ph. Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:39851.19861107
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