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27/06/1986 | FRANCE | N°49787

France | France, Conseil d'État, 10/ 6 ssr, 27 juin 1986, 49787


Vu 1°, sous le n° 49787 la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril 1983 et 5 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES HAUTES-ALPES, agissant poursuites et diligences de son président en exercice, domicilié en cette qualité à l'Hôtel du Département, B.P. 100 à Gap Hautes-Alpes , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 23 novembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Marseille :
- l'a déclaré responsable des conséquences dommageables des travaux de d

éviation du CD n° 937 sur la propriété de M. Robert X... sise à Montmaur,
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Vu 1°, sous le n° 49787 la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril 1983 et 5 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES HAUTES-ALPES, agissant poursuites et diligences de son président en exercice, domicilié en cette qualité à l'Hôtel du Département, B.P. 100 à Gap Hautes-Alpes , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 23 novembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Marseille :
- l'a déclaré responsable des conséquences dommageables des travaux de déviation du CD n° 937 sur la propriété de M. Robert X... sise à Montmaur,
- a ordonné une expertise aux fins de déterminer le coût des travaux nécessaires pour rétablir l'accès à la propriété de M. X... et de chiffrer le préjudice subi par ce dernier,
2° rejette la requête de M. X...,
Vu 2°, sous le n° 60 596, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juillet 1984 et 9 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES HAUTES-ALPES, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 1er mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser à M. X... la somme de 343 634 F en réparation des conséquences dommageables pour sa propriété à la suite des travaux réalisés sur le lit de la Béoux,
2° rejette la demande de M. X...,
3° prononce le sursis à exécution,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Terquem, Conseiller d'Etat,
- les observations de S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat du Département des HAUTES-ALPES et de Me Goutet, avocat de M. Robert X...,
- les conclusions de M. Massot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes formées par le département des HAUTES-ALPES sous les numéros 49 787 et 60 596 portent l'une et l'autre sur l'indemnisation des conséquences dommageables imputées à une même opération de travaux exécutés par le département des HAUTES-ALPES ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer sur une seule décision ;
Sur la responsabilité
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise, qu'à la suite d'un glissement de terrain survenu le 1er mars 1978 sur la rive gauche du torrent de la Béoux longée par le chemin départemental n° 937, le département des HAUTES-ALPES a fait exécuter à la fin de l'année 1978, au droit de la ferme située au lieu-dit le Coussac sur la rive droite de la Béoux, des travaux qui ont modifié l'assiette du chemin départemental en reportant celle-ci vers le lit majeur du torrent dont la largeur en ce point a été réduite de 350 à 75 mètres ; que la construction dans le cadre de ces travaux d'un radier btonné situé à l'emplacement du rétrécissement maximum du nouveau lit du torrent n'a pas permis, compte tenu de la concentration des eaux de la Béoux le long de la rive droite et de l'affouillement des berges qui en résultait, de maintenir l'accès à la ferme de Coussac, qui se faisait auparavant, notamment pour les véhicules, en passant à gué les divers bras de la Béoux répartis sur toute la largeur de son ancien lit ; que M. X..., qui a acquis la ferme de Coussac le 24 mars 1978, avant la réalisation de la déviation définitive du chemin départemental, a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner le département à réparer l'ensemble des préjudices résultant pour lui de la modification des conditions d'accès à sa propriété ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le département des HAUTES-ALPES il appartient à la juridiction administrative de connaître de la demande formée par M. X..., qui tend à la réparation de dommages imputables à une opération de travaux publics entrepris dans l'intérêt de la voirie départementale ; que le département n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont mis hors de cause la commune de Montmaur qui n'avait pas, pour cette opération de travaux publics, la qualité de maître de l'ouvrage ; que M. X..., qui était propriétaire du domaine de Coussac avant la réalisation de travaux et qui a la qualité de tiers par rapport au chemin départemental, est en droit d'obtenir du département, dès lors qu'il y a un lien de causalité entre les travaux susvisés et les dommages invoqués, la réparation du préjudice que lui cause la modification des conditions d'accès à sa propriété, sans qu'y fasse obstacle la circonstance, alléguée par le département, qu'il aurait exécuté des travaux de rénovation de ses bâtiments sans avoir obtenu la délivrance d'un permis de construire ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que ces conditions d'accès, déjà difficiles, ont été sensiblement aggravées par l'effet des travaux routiers exécutés par le département ; qu'il suit de là que le département des HAUTES-ALPES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement susvisé du 23 novembre 1982, le tribunal administratif de Nice l'a déclaré responsable, à l'égard de M. X..., des conséquences dommageables de ces travaux ;
Sur l'indemnité :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, notamment des pièces produites en appel par le département des HAUTES-ALPES, que les conditions d'accès à la propriété de M. X... peuvent être rétablies dans un état comparable à leur état antérieur aux travaux exécutés par le département en 1978 en reportant vers l'aval, à un emplacement où le lit du torrent n'a pas été modifié, le passage à gué existant antérieurement et que le coût de ces travaux peut être évalué à 30 000 F, somme inférieure à la valeur vénale de la propriété de M. X... ;
Considérant, d'autre part, qu'eu égard tant aux constatations faites par les experts qu'aux justifications apportées par M. X..., il sera fait une juste appréciation des pertes d'exploitation subies par M. X... et de l'ensemble des troubles apportés dans ses conditions d'existence à la suite de la modification des conditions d'accès à sa ferme du Coussac en lui allouant à ces titres une indemnité de 60 000 F ;
Considérant enfin que, dans les circonstances de l'affaire, c'est à bon droit que les premiers juges ont mis les frais des expertises à la charge du département ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le département des HAUTES-ALPES est fondé à demander que l'indemnité qu'il a été condamné à verser à M. X... par le jugement attaqué du tribunal administratif de Nice en date du 1er mars 1984 soit ramenée de 343 634 F à 90 000 F ;
Sur les intérêts des intérêts :

Considérant que la capitalisation des intérêts dont le point de départ a été fixé par les premiers juges au 2 octobre 1980, a été demandée par M. X... le 4 mars 1985 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, par suite, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

Article 1er : La requête susvisée du département des HAUTES-ALPES, enregistrée sous le n° 49 787, est rejetée.

Article 2 : L'indemnité que le département des HAUTES-ALPES a été condamné par le jugement susvisé du tribunal administratif de Marseille en date du 1er mars 1984 à verser à M. X... est ramenée de 343 634 F à 90 000 F.

Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Marseille en date du 1er mars 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête susvisée dudépartement des HAUTES-ALPES, enregistrée sous le n° 60 596 est rejeté.

Article 5 : Les intérêts dus à M. X... le 4 mars 1985 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 6 : La présente décision sera notifiée au département des HAUTES-ALPES, à M. X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10/ 6 ssr
Numéro d'arrêt : 49787
Date de la décision : 27/06/1986
Type d'affaire : Administrative

Analyses

67-02-01 TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - NOTION DE DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 1986, n° 49787
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Terquem
Rapporteur public ?: Massot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:49787.19860627
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