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07/05/1986 | FRANCE | N°58807

France | France, Conseil d'État, 7 / 8 ssr, 07 mai 1986, 58807


Vu, sous le n° 58 807, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 avril 1984 et 4 juin 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL", dont le siège est ... 58000 , représentée par son gérant en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement, en date du 28 février 1984, par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente sa demande en réduction du versement pour dépassement du plafond légal d

e densité qui lui a été réclamé au titre du permis de construire un ensemb...

Vu, sous le n° 58 807, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 avril 1984 et 4 juin 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL", dont le siège est ... 58000 , représentée par son gérant en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement, en date du 28 février 1984, par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente sa demande en réduction du versement pour dépassement du plafond légal de densité qui lui a été réclamé au titre du permis de construire un ensemble immobilier à Nevers qui lui a été délivré le 24 juillet 1981 ;
2° lui accorde la décharge dudit versement à concurrence de 237 448 F ;

Vu, sous le n° 58 890, la requête du directeur départemental de l'équipement de la Nièvre, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 2 mai 1984 et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement susvisé en date du 28 février 1984, par lequel le tribunal administratif de Dijon s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande présentée par la société civile immobilière "Résidence de Port-Royal" et tendant à la réduction du versement pour dépassement du plafond légal de densité qui lui a été réclamé au titre du permis de construire délivré le 24 juillet 1981 ;
2° rejette la demande de la société ;

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Leclerc, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Pradon, avocat de la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL",
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête n° 58 807 et la requête n° 58 890 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne le n° 58 807 :
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que l'article L.333-1 du code de l'urbanisme dispose que : "Lors du dépôt de la demande de permis de construire relatif à une construction excédant le plafond légal de densité, le demandeur doit déclarer la valeur du terrain sur lequel la construction doit être édifiée... L'administration peut contester la valeur qui lui est soumise. Elle doit notifier par écrit au constructeur la valeur qu'elle estime devoir être retenue. En cas de désaccord persistant entre l'administration et le constructeur, la valeur du terrain est fixée par la juridiction compétente en matière d'expropriation saisie par la partie la plus diligente" ; qu'en vertu du premier alinéa de 'article L.333-14 de ce code, les litiges relatifs au versement résultant du dépassement du plafond légal de densité "sont, à l'exception de ceux relatifs à la détermination de la valeur vénale, de la compétence des tribunaux administratifs" ; qu'aux termes, enfin, de l'article R.333-4 du même code : "... si l'administration retient une valeur différente de celle déclarée par l'intéressé, celui-ci en est informé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit par le directeur départemental de l'équipement, soit par le maire en cas d'application de l'article R.421-22, au plus tard avant la délivrance du permis de construire" ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que tous les litiges relatifs aux versements pour dépassement du plafond légal de densité relèvent de la compétence de la juridiction administrative, à la seule exception de ceux qui peuvent naître, avant la délivrance du permis de construire, au sujet de la valeur du terrain ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" a déposé, en février 1981, une demande de permis de construire en vue de l'édification à Nevers d'un immeuble qui comportait un dépassement du plafond légal de densité ; qu'en réponse à une demande de l'administration en date du 4 mai 1981, elle a indiqué, par une lettre en date du 1er juin 1981, que la valeur du terrain sur lequel elle envisageait de construire s'élevait, selon elle, à 155,50 F le m2 ; que le permis de construire sollicité a été accordé à la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" par une décision du préfet de la Nièvre en date du 24 juillet 1981 ; que le directeur départemental de l'équipement de la Nièvre a fait connaître à la société, par une lettre en date du 23 septembre 1981, que le versement pour dépassement du plafond légal de densité serait calculé sur une valeur du terrain fixée, à 400 F le m2, puis, par une lettre en date du 21 octobre 1981, à 311 F le m2 ; que, par une lettre en date du 24 décembre 1981, le directeur départemental de l'équipement de la Nièvre a rejeté la réclamation, en date du 30 octobre 1981, dirigée par la société contre cette dernière décision ;
Considérant que la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler cette décision du 24 décembre 1981 en faisant valoir que l'administration n'avait pu, sans méconnaître les prescriptions de l'article R.333-4 précité, lui opposer, après la délivrance du permis de construire, en vue du versement dû au titre du dépassement du plafond légal de densité, une valeur différente de celle qui avait été déclarée par elle et qu'elle n'avait pas contestée avant l'octroi de ce permis ; qu'ainsi, à défaut d'un désaccord sur la valeur du terrain entre l'administration et la société, qui serait né avant la délivrance du permis de construire et qui, en pareille hypothèse, eût relevé de la compétence du juge de l'expropriation, les prétentions de la société requérante étaient de la compétence de la juridiction administrative ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon les a rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; que ce jugement doit, par suite, être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" devant le tribunal administratif de Dijon ;
Sur le montant du versement :
Considérant que l'administration ne pouvait pas, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article R.333-4 du code de l'urbanisme, opposer à la société, après la délivrance du permis de construire, une valeur vénale du terrain différente de celle qui avait été déclarée par la demanderesse et que l'administration ne justifie pas avoir contestée avant l'octroi du permis de construire ;
Considérant que, si l'administration soutient que la valeur vénale sur laquelle a été calculé le montant du versement est, non pas celle qui a été fixée par les services fiscaux et qu'elle a dû renoncer à retenir faute pour elle d'avoir contesté, avant la délivrance du permis de construire, la valeur déclarée par la société, mais celle de 311 F le m2 qui aurait été déclarée par cette dernière, il ressort des pièces du dossier que, par sa lettre en date du 1er juin 1981, la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" a déclaré comme valeur vénale du terrain non la valeur de 311 F le m2 mais une valeur de 155,50 F le m2 ; que, dès lors, le moyen tiré par l'administration de ce que la méthode suivie par la société pour aboutir à cette valeur de 155,50 F serait erronée, est inopérant ; qu'il suit de là que la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" est fondée à soutenir que le versement pour dépassement du plafond légal de densité qui lui a été réclamé devait être calculé sur la base de la valeur du terrain, déclarée par elle, soit 155,50 F le m2, et à demander la réduction dudit versement ;
Sur la requête n° 58 890 :

Considérant qu'il découle de ce qui précède, d'une part, que les conclusions de la requête du directeur départemental de l'équipement de la Nièvre qui tendent à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 28 février 1984 sont devenues sans objet et, d'autre part, les conclusions de cette requête qui tendent à ce que le versement contesté soit remis à la charge de la société civile immobilière "Résidence de Port-Royal" ne peuvent être que rejetées ;

Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Dijon en date du 28 février 1984 est annulé.

Article 2 : Le versement pour dépassement du plafond légal de densité auquel a été assujettie la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" sera calculé sur la base d'une valeur de terrain au m2 de 155,50 F.

Article 3 : Il est accordé à la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" la décharge de la somme de 237 448 F représentant la différence entre le versement auquel elle a été assujettie et celui qui résulte de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Il n'y a lieu de statuer sur les conclusions de la requête du directeur départemental de l'équipement de la Nièvre tendant à l'annulation du jugement susvisé du tribunal administratif de Dijon en date du 28 février 1984.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête du directeur départemental de l'équipement de la Nièvre est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière "RESIDENCE DE PORT-ROYAL" et au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-03-05-07 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES ET TAXES ASSIMILEES - TAXES ASSIMILEES - AUTRES TAXES


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 mai. 1986, n° 58807
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Leclerc
Rapporteur public ?: Fouquet

Origine de la décision
Formation : 7 / 8 ssr
Date de la décision : 07/05/1986
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 58807
Numéro NOR : CETATEXT000007622658 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1986-05-07;58807 ?
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