Vu, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 8 septembre 1982, la requête présentée par la société KRAFTCO, société anonyme de droit belge, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 6 mai 1982 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur le revenu, auxquelles elle a été assujettie, au titre de la retenue à la source prévue par les articles 182 et 1671 du code général des impôts, pour les années 1971, 1972, 1973 et 1974 et des pénalités y afférentes ;
2° lui accorde la décharge de ces impositions et pénalités,
3° lui accorde le remboursement des frais exposés tant en première instance qu'en appel,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la convention franco-américaine du 28 juillet 1967, publiée au Journal Officiel de la République Française le 11 septembre 1968 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Groux, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. de Guillenchmidt, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles la SOCIETE KRAFTCO a été assujettie pour les années 1971, 1972, 1973 et 1974, au titre de la retenue à la source prévue par les articles 182 et 1671 du code général des impôts, ainsi que des pénalités dont ces impositions ont été assorties :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que la SOCIETE KRAFTCO, dont le siège est en Belgique, utilise, pour ses fabrications, des brevets concèdés, contre paiement de redevances, par la KRAFT Corporation, société établie aux Etats-Unis, dont elle est la filiale ; qu'au cours des années 1971, 1972, 1973 et 1974, la SOCIETE KRAFTCO a exploité à Haubourdin Nord un établissement chargé d'importer et de vendre sur le marché français des produits du "groupe Kraft" ; qu'à l'occasion d'une vérification des comptes de cet établissement, l'administration a constaté que le siège de la SOCIETE KRAFTCO lui avait imputé, à titre de charge, une quote-part, égale à 1 % du montant de ses ventes, des redevances qu'elle est tenue, par contrat, de verser à la Kraft Corporation ; qu'estimant que les sommes dont l'établissement a été débité de ce chef au cours des années susindiquées avaient constitué, pour la Kraft Corporation, des revenus de source française visés à la fois par les dispositions alors en vigueur des article 4 bis - 1° et 92 du code général des impôts et par les stipulations de l'article 11 de la convention franco-américaine du 28 juillet 1967 entrée en vigueur le 11 avril 1968 et publiée au Journal Officiel de la République Française le 11 septembre de la même année, l'administration a réclamé pour les sommes dont s'agit à la SOCIETE KRAFTCO le paiement, au taux de 5 % autorisé par le 2 dudit article 11, de la retenue à la source prévue par les dispositions, alors en vigueur des articles 182 et 1671 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte tant de ces articles que des stipulations claires de l'article 11 de la convention franco-américaine que l'impôt dont sont passibles les redevances provenant de sources situées sur le territoire français n'est dû qu'à la condition que celles-ci aient été effectivement payées au créancier résidant aux Etats-Unis ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la Kraft Corporation ait obtenu le paiement effectif, au cours des années d'imposition en litige, des sommes correspondant à la quote-part de redevances imputée à l'établissement français de la SOCIETE KRAFTCO, qui a donné lieu aux mouvements de fonds, constatés par l'administration, entre cet établissement et le siège de ladite société ; que, dès lors, la SOCIETE KRAFTCO n'a pu, en tout état de cause, être légalement assujettie au paiement, à raison de ces sommes, de retenues à la source ; qu'elle est, en conséquence fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge desdites impositions et des pénalités dont elles ont été assorties ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés tant en première instance qu'en appel :
Considérant que la SOCIETE KRAFTCO n'indique ni la nature ni le montant des frais dont elle sollicite le remboursement ; qu'à défaut de ces précisions, ses conclusions sont irrecevables ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 6 mai 1982 est annulé.
Article 2 : La SOCIETE KRAFTCO est déchargée des cotisations d'impôt sur le revenu, auxquelles elle a été assujettie, pour les années 1971, 1972, 1973 et 1974, au titre de la retenue à la source prévue par les articles 182 et 1671 du code général des impôts, ainsique des pénalités dont ces impositions ont été assorties.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE KRAFTCO est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE KRAFTCO et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.