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12/03/1986 | FRANCE | N°55890

France | France, Conseil d'État, 10/ 3 ssr, 12 mars 1986, 55890


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 décembre 1983 et 22 février 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Y... DEMANGE, demeurant route de Dissay Saint-Georges-Les-Baillargeaux à Jaunay-Clan 86130 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement, en date du 25 mai 1983, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 9 448,50 F, qu'il estime insuffisante, en réparation des préjudices, autres que le renchérissement du coût de la construction,

que lui a occasionnés la décision du préfet de la Vienne, en date du ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 décembre 1983 et 22 février 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Y... DEMANGE, demeurant route de Dissay Saint-Georges-Les-Baillargeaux à Jaunay-Clan 86130 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement, en date du 25 mai 1983, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 9 448,50 F, qu'il estime insuffisante, en réparation des préjudices, autres que le renchérissement du coût de la construction, que lui a occasionnés la décision du préfet de la Vienne, en date du 9 août 1974, opposant à sa demande de permis de construire un sursis à statuer,
2° condamne l'Etat à lui payer les sommes de 18 300, 16 626, 3 996 et 25 000 F au titre respectivement du supplément de frais financiers, de la perte de loyers, du renchissement de la prime d'assurance-vie et des troubles dans les conditions d'existence, assortis des intérêts de droit,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Marimbert, Auditeur,
- les observations de Me Henry, avocat de M. Y... DEMANGE,
- les conclusions de M. Delon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une décision en date du 14 octobre 1977, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé la décision en date du 9 août 1974 par laquelle le préfet de la Vienne a sursis à statuer sur la demande de permis de construire présentée par M. X... ; que ce dernier n'a obtenu un permis de construire que le 16 août 1976 ; que par jugement du 15 juin 1979, devenu définitif, le tribunal administratif de Poitiers a déclaré l'Etat responsable du préjudice subi par M. X... du fait du retard apporté par l'administration à la délivrance du permis de construire ; que par jugement du 17 décembre 1980, il a condamné l'Etat à payer à M. X... une indemnité de 33 055 F, assortie des intérêts de droit, du chef de l'augmentation du coût de la construction enregistrée entre le 9 août 1974 et le 16 août 1976 ; que M. X... demande la réformation du jugement du 25 mai 1983, par lequel le tribunal administratif lui a accordé une indemnité de 9 448,50 F seulement à raison du préjudice résultant de l'augmentation des charges financières des emprunts, et lui a refusé toute indemnité pour les autres chefs de préjudice allégués ;
Sur l'accroissement des charges financières :
Considérant que si M. X... est fondé à demander une indemnité au titre de l'augmentation des charges financières consécutives à l'évolution des conditions de crédit pratiquées par les organismes prêteurs entre août 1974 et août 1976, cette indemnité ne saurait couvrir que l'accroissement des charges d'intérêts pour un même capital emprunté, à l'exclusion du supplément de charges lié à l'augmentation du montat du prêt, lequel est déjà couvert par la somme productive d'intérêts que le jugement du 17 décembre 1980 a accordée à M. X... du chef de l'augmentation du coût de la construction ; que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du préjudice subi à raison de l'accroissement des charges d'emprunt en retenant l'évaluation de l'expert, soit 9 448,50 F ;
Sur la perte de loyers :

Considérant que si le retard consécutif à la décision illégale du 9 août 1974 a contraint M. X... et sa famille à demeurer pendant deux années supplémentaires dans leurs locaux d'habitation avant d'y entreprendre des travaux de réfection susceptibles d'en permettre la location, il n'est pas établi que M. X... eût été en mesure de louer ces locaux entre le 9 août 1974 et la date à laquelle il les a effectivement loués ; que, par suite, le préjudice résultant de la perte de loyers ne présente pas un caractère certain ;
Sur les autres chefs de préjudice :
Considérant qu'il ne résulte de l'instruction ni que M. X... aurait bénéficié en 1974 de la prime à la construction qui lui a été refusée en 1976, ni qu'il ait subi dans ses conditions d'existence des troubles de nature à lui ouvrir droit à indemnité ;
Considérant, en revanche, que M. X... est fondé à demander à être indemnisé du chef de l'augmentation des primes du contrat d'assurance-vie qu'il était tenu de souscrire pour obtenir son prêt ; qu'il sera fait une exacte appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 3 996 F ; qu'il y a lieu de réformer dans cette mesure le jugement attaqué, en date du 25 mai 1983, par lequel le tribunal administratif de Poitiers lui a accordé une indemnité de 9 448,50 F seulement ;
Article ler : L'indemnité que l'Etat a été condamné à verser à M. X... par le jugement du tribunal administratif de Poitiers, en date du 25 mai 1983, est portée de 9 448,50 F à 13 444,50 F.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers, en date du 25 mai 1983, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de l'urbanisme, du logement et des transports.


Synthèse
Formation : 10/ 3 ssr
Numéro d'arrêt : 55890
Date de la décision : 12/03/1986
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE CERTAIN DU PREJUDICE - ABSENCE - Retard apporté par l'administration à la délivrance d'un permis de construire - Pertes de loyers subies par le pétitionnaire.

60-04-01-02-01, 60-04-03-02[1], 60-04-03-02[2] Etat déclaré responsable, par un jugement devenu définitif, du préjudice subi par M. D. du fait du retard apporté par l'administration à la délivrance du permis de construire qu'il avait sollicité.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - Préjudice correspondant à des frais et charges - [1] Augmentation des charges financières consécutives à l'évolution des conditions de crédit à la construction - dans le cas d'un retard apporté par l'administration à la délivrance d'un permis de construire - [2] Augmentation du montant des primes d'assurance-vie nécessaire à l'obtention d'un prêt à la construction - dans le cas d'un retard apporté par l'administration à la délivrance d'un permis de construire.

60-04-03-02[1] L'intéressé est fondé à demander une indemnité au titre de l'augmentation des charges financières consécutives à l'évolution des conditions de crédit pratiquées par les organismes prêteurs entre août 1974 et août 1976 ; mais cette indemnisation ne saurait couvrir que l'accroissement des charges d'intérêts pour un même capital emprunté, à l'exclusion du supplément de charges lié à l'augmentation du montant du prêt, lequel est déjà couvert par la somme productive d'intérêts que le tribunal administratif lui a accordée du chef de l'augmentation du coût de la construction.

60-04-01-02-01 Si le retard consécutif à la décision illégale par laquelle le préfet a sursis à statuer sur la demande de permis de construire a contraint l'intéressé et sa famille à demeurer pendant deux années supplémentaires dans leurs locaux d'habitation avant d'y entreprendre des travaux de réfection susceptibles d'en permettre la location, il n'est pas établi qu'il eût été en mesure de louer ces locaux entre le jour de la décision en cause et la date à laquelle il les a effectivement loués. Par suite le préjudice résultant de la perte de loyers ne présente pas un caractère certain.

60-04-03-02[2] L'intéressé est fondé à demander à être indemnisé du chef de l'augmentation des primes du contrat d'assurance-vie qu'il était tenu de souscrire pour obtenir son prêt à la construction.


Publications
Proposition de citation : CE, 12 mar. 1986, n° 55890
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. M. Bernard
Rapporteur ?: M. Marimbert
Rapporteur public ?: M. Delon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:55890.19860312
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