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19/03/1982 | FRANCE | N°19348

France | France, Conseil d'État, 3ème - 5ème ssr, 19 mars 1982, 19348


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 31 juillet 1979 et le mémoire complémentaire enregistré le 22 janvier 1980 présentés pour la société anonyme Charles RAMELLI dont le siège est 97, 99 rue du Maréchal Ney à Jarnille (Meurthe-et-Moselle), représentée par ses représentants légaux en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1° annule le jugement en date du 23 mai 1979 par lequel le tribunal administratif de Nancy l'a condamnée à verser à l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe-et-Moselle une indemnité de 1

92 780 F en réparation des désordres survenus dans l'ensemble immobilier ...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 31 juillet 1979 et le mémoire complémentaire enregistré le 22 janvier 1980 présentés pour la société anonyme Charles RAMELLI dont le siège est 97, 99 rue du Maréchal Ney à Jarnille (Meurthe-et-Moselle), représentée par ses représentants légaux en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1° annule le jugement en date du 23 mai 1979 par lequel le tribunal administratif de Nancy l'a condamnée à verser à l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe-et-Moselle une indemnité de 192 780 F en réparation des désordres survenus dans l'ensemble immobilier édifié pour son compte au lieudit Procheville à Pont-à-Mousson; 2° rejette la demande de l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe-et-Moselle tendant à obtenir une indemnité;

Vu le code des tribunaux administratifs;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu la loi du 30 décembre 1977.

Considérant que l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe et Moselle a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner MM. B... et C..., architectes, et la société anonyme RAMELLI, entrepreneur, à l'indemniser du préjudice qu'il a subi du fait des désordres survenus dans deux immeubles d'habitation construits pour son compte à Pont à Mousson; que la société RAMELLI, fait appel du jugement qui l'a déclarée responsable de 60 % du préjudice résultant de certains de ces désordres et l'a condamnée à verser à l'office une indemnité de 192.780 F; que, par la voie de l'appel provoqué, l'office demande la condamnation solidaire des architectes et de l'entreprise et subsidiairement, au cas où la part de responsabilité mise à la charge de l'entreprise serait réduite, que la part de responsabilité des architectes soit augmentée à due concurrence;

Sur le fondement de la responsabilité de la société RAMELLI:

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les immeubles ont fait l'objet de réceptions définitives les 27 octobre 1970 et 19 janvier 1972; que c'est, dès lors, à bon droit que par le jugement attaqué le tribunal administratif a décidé que les désordres qui n'étaient pas apparents lors de ces réceptions et dont l'office a demandé réparation le 10 novembre 1977 ne pouvaient engager que la responsabilité décennale de la société RAMELLI;

Sur les désordres de nature à engager la responsabilité décennale de la société RAMELLI:

Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise établi en première instance, que les désordres affectant le réseau d'évacuations des eaux fluviales et usées et les affaissements de certains perrons d'entrée ne sont pas de nature à rendre les immeubles impropres à leur destination ou à en compromettre la solidité; qu'il suit de là que le tribunal administratif a, à bon droit, décidé qu'ils n'engageaient pas la responsabilité décennale de la société RAMELLI;

Considérant, en revanche, que les infiltrations d'eau constatées dans plusieurs appartements trouvent leur origine dans la fissuration des abouts de planchers sur la totalité des façades et murs pignons des immeubles; que de tels désordres, qui sont de nature à rendre les immeubles impropres à leur destination et à en compromettre la solidité, engagent la responsabilité décennale des constructeurs; qu'il résulte de l'instruction que ces désordres sont en partie imputables à la société RAMELLI qui n'est, dès lors, pas fondée à demander à être déchargée de toute responsabilité à l'égard de l'office;

Sur la part de responsabilité incombant à la société RAMELLI:

Considérant que, dans le dernier état de ses conclusions devant le tribunal administratif, l'office a demandé que la responsabilité des désordres soit partagée entre les architectes et l'entreprise selon les proportions définies par l'expert; qu'il a ainsi abandonné ses conclusions initiales qui tendaient à obtenir leur condamnation solidaire et n'est, dès lors, pas recevable à demander en appel que la société RAMELLI soit condamnée solidairement avec les architectes;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le procédé retenu pour le revêtement des façades des immeubles ait joué un rôle dans les infiltrations d'eau constatées ni que ce procédé ait été choisi et imposé par le maître de l'ouvrage; que la société RAMELLI n'est donc pas fondée à soutenir que sa responsabilité doit être atténuée par celle qui incomberait de ce chef à l'office;

Considérant que pour condamner les architectes et l'entreprise à réparer respectivement 40 et 60 % des dommages résultant pour l'office des désordres affectant l'étanchéité des façades et murs pignons des immeubles, le tribunal administratif s'est fondé sur ce qu'aucun vice de conception n'était imputable aux architectes quxquels on pouvait seulement reprocher une surveillance insuffisante du chantier et sur ce que les désordres étaient principalement dus à des malfaçons dans l'exécution des travaux par l'entreprise;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les fissurations des abouts de planchers qui ont causé les infiltrations d'eau trouvent leur origine non seulement dans des malfaçons imputables à l'entreprise et dans une surveillance insuffisante du chantier par les architectes mais également dans le choix, pour la réalisation des planchers, d'un procédé qui a favorisé les fissurations; que ce choix engage la responsabilité des architectes; qu'il suit de là que la société RAMELLI est fondée à soutenir qu'en ne tenant pas compte de la responsabilité incombant de ce chef aux architectes, le tribunal administratif a fait une appréciation exagérée de sa propre responsabilité; qu'il sera fait une exacte appréciation des circonstances de l'affaire en ramenant à 50 % la part de responsabilité que doit supporter l'entreprise;

Sur le montant de l'indemnité due par la société RAMELLI à l'office public d'habitations à loyer modéré de la Meurthe et Moselle:

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que le coût des travaux nécessaires pour assurer l'étanchéité des façades et murs pignons des immeubles s'élève à 312.300 F;

Considérant, d'autre part, qu'il n'est pas contesté que les infiltrations d'eau qui se sont produites ont rendu nécessaire la réfection des peintures intérieures de plusieurs appartements; que ce préjudice dont l'office est en droit d'obtenir réparation, doit être évalué compte tenu de la vétusté, à 10 000 F;

Considérant que compte tenu de la part de responsabilité incombant à la société RAMELLI, il y a lieu de fixer à 161.150 F le montant de l'indemnité qu'elle doit à l'office;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts:

Considérant que l'office a droit aux intérêts au taux légal afférents à l'indemnité de 161.150 F qui lui est due par la société RAMELLI à compter du 10 novembre 1977 date d'enregistrement de sa demande introductive d'instance devant le tribunal administratif; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 8 octobre 1980; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil il y a lieu de faire droit à cette demande;

Sur les conclusions de l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe et Moselle dirigées contre MM. B... et C...:

Considérant que les conclusions de l'office public d'habitations à loyer modéré tendant à l'augmentation de l'indemnité mise à la charge des architectes au titre des travaux nécessaires pour assurer l'étanchéité des façades et murs pignons des immeubles sont provoquées par l'appel principal de la société RAMELLI et sont recevables dans la mesure où cette société obtient une réduction de la condamnation prononcée à son encontre pour ce chef de préjudice; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus les désordres qui rendent ces travaux nécessaires sont en partie imputables non seulement, comme l'a jugé le tribunal administratif, à une surveillance insuffisante du chantier par les architectes mais également à un vice de conception; qu'il y a lieu, en conséquence, de porter à 50 % la part de responsabilité qui leur incombe et de fixer à 156 150 F le montant de l'indemnité mise à leur charge;

Considérant, en revanche, que les conclusions de l'office tendant à ce que les architectes soient condamnés solidairement avec la société RAMELLI à l'indemniser de la totalité de son préjudice, à ce que l'indemnité mise à leur charge porte intérêts et à ce que ces intérêts soient capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts n'ont pas été provoquées par l'appel principal de la société RAMELLI; que, par suite, elles sont irrecevables;

Sur les frais d'expertise exposés en première instance:

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de mettre les frais d'expertise pour moitié à la charge de la société RAMELLI et pour moitié à la charge de MM. B... et C....

DECIDE

Article 1er. - Le montant de l'indemnité due par la société RAMELLI à l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe-et-Moselle est ramené à 161 150 F. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 1977. Les intérêts échus le 8 octobre 1980 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 - Le montant de l'indemnité due par MM. B... et C... à l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe-et-Moselle est porté à 156 150 F.

Article 3 - Les frais d'expertise exposés en première instance sont mis pour moitié à la charge de la société RAMELLI et pour moitié à la charge de MM. B... et C....

Article 4 - Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 23 mai 1979 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 5 - Le surplus des conclusions de la requête de la société RAMELLI et du recours incident de l'office public d'habitations à loyer modéré de Meurthe-et-Moselle est rejeté.


Synthèse
Formation : 3ème - 5ème ssr
Numéro d'arrêt : 19348
Date de la décision : 19/03/1982
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 19 mar. 1982, n° 19348
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Aubin
Rapporteur public ?: M. Labetoulle

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1982:19348.19820319
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