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10/07/2025 | CJUE | N°C-276/24

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, KONREO, v. o. s. contre Odvolací finanční ředitelství., 10/07/2025, C-276/24


 ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

10 juillet 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 205 – Responsabilité solidaire – Conditions et portée de la responsabilité – Lutte contre la fraude à la TVA – TVA non acquittée par le fournisseur – Refus d’accorder au destinataire de la livraison le droit à déduction de la TVA – Possibilité de tenir le destinataire de la livraison solidairement responsable du paiement de la TVA due par le fou

rnisseur – Principe de
proportionnalité »

Dans l’affaire C‑276/24,

ayant pour objet une demande de dé...

 ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

10 juillet 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 205 – Responsabilité solidaire – Conditions et portée de la responsabilité – Lutte contre la fraude à la TVA – TVA non acquittée par le fournisseur – Refus d’accorder au destinataire de la livraison le droit à déduction de la TVA – Possibilité de tenir le destinataire de la livraison solidairement responsable du paiement de la TVA due par le fournisseur – Principe de
proportionnalité »

Dans l’affaire C‑276/24,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Nejvyšší správní soud (Cour administrative suprême, République tchèque), par décision du 10 avril 2024, parvenue à la Cour le 19 avril 2024, dans la procédure

KONREO, v.o.s., agissant en qualité d’administrateur judiciaire de FAU s. r. o.,

contre

Odvolací finanční ředitelství,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. S. Rodin, président de chambre, M. C. Lycourgos (rapporteur), président de la troisième chambre, faisant fonction de juge de la huitième chambre, et M. N. Fenger, juge,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 mars 2025,

considérant les observations présentées :

– pour KONREO v. o. s., agissant en qualité d’administrateur judiciaire de FAU s. r. o., par M. A. Šrámek, advokát,

– pour l’Odvolací finanční ředitelství, par Mme M. Jasiková et M. T. Rozehnal, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement tchèque, par Mme L. Březinová, MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par MM. M. Herold et J. Hradil, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 205 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1), telle que modifiée par la directive (UE) 2018/1695 du Conseil, du 6 novembre 2018 (JO 2018, L 282, p. 5, et rectificatif JO 2018, L 329, p. 53) (ci-après la « directive TVA »), et du principe de proportionnalité.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant KONREO, v.o.s. (ci-après « Konreo »), administratrice judiciaire de FAU s. r. o., à l’Odvolací finanční ředitelství (direction d’appel des finances, République tchèque) au sujet de l’engagement de la responsabilité solidaire de FAU aux fins d’acquitter la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que son fournisseur, VERAMI International Company s.r.o. (ci-après « Verami »), n’a pas versée au Trésor public.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 L’article 193 de la directive TVA énonce :

« La TVA est due par l’assujetti effectuant une livraison de biens ou une prestation de services imposable, sauf dans les cas où la taxe est due par une autre personne en application des articles 194 à 199 ter et de l’article 202. »

4 Les articles 194 à 200 et 202 à 204 de cette directive disposent, en substance, que d’autres personnes que l’assujetti effectuant une livraison de biens ou une prestation de services imposable peuvent voire doivent être considérées comme étant redevables de la TVA.

5 Aux termes de l’article 205 de ladite directive :

« Dans les situations visées aux articles 193 à 200 et aux articles 202, 203 et 204, les États membres peuvent prévoir qu’une personne autre que le redevable est solidairement tenue d’acquitter la TVA. »

Le droit tchèque

6 La réglementation relative à la responsabilité solidaire en matière fiscale figure aux articles 171 et 172 du zákon č. 280/2009 Sb., daňový řád (loi no 280/2009 établissant le code de procédure fiscale). L’article 171 de cette loi prévoit :

« 1)   Dans la mesure où la loi prévoit un garant, ce dernier est également redevable des arriérés si l’administration fiscale lui communique dans l’appel [à la garantie] le montant établi de la taxe qu’il est tenu d’acquitter et l’invite en même temps à payer les arriérés dans un délai déterminé ; une copie de la décision relative à l’établissement de l’impôt est jointe à cet appel [à la garantie].

[...]

3)   Le garant peut être appelé à la garantie si les arriérés n’ont pas été acquittés par le contribuable, bien que celui-ci ait été mis en demeure sans succès de les acquitter, et que les arriérés n’ont pas non plus été acquittés en dépit d’une exécution à l’encontre du contribuable, dans la mesure où il n’a pas été clairement démontré que l’exécution serait infructueuse ; le garant peut également être appelé à la garantie après l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’encontre du
contribuable. »

7 La garantie légale à charge d’un contribuable au titre de la TVA est régie par l’article 109 du zákon č. 235/2004 Sb., o dani z přidané hodnoty (loi no 235/2004 relative à la taxe sur la valeur ajoutée, ci-après la « loi sur la TVA »). Cet article 109, intitulé « Garantie à charge du destinataire d’une prestation imposable », prévoit :

« 1)   Un assujetti qui reçoit une prestation imposable, dont le lieu de fourniture est situé sur le territoire tchèque et qui est effectuée par un autre assujetti, ou qui fournit une rémunération en contrepartie d’une telle prestation (ci-après le “destinataire de la prestation imposable”), est tenu d’acquitter la taxe non acquittée sur cette prestation si, au moment de l’exécution de cette prestation, il savait ou aurait dû et aurait pu savoir que

a) la taxe mentionnée sur le document fiscal concerné ne serait pas payée de manière délibérée,

b) l’assujetti qui fournit la prestation imposable ou reçoit une rémunération en contrepartie de ladite prestation (ci-après le “fournisseur de la prestation imposable”) s’était mis ou se mettra délibérément dans une situation l’empêchant d’acquitter la taxe, ou

c) qu’il y aurait une fraude fiscale ou qu’un avantage fiscal serait frauduleusement soutiré.

2)   Le destinataire de la prestation imposable est également tenu d’acquitter la taxe non acquittée sur cette prestation, si la rémunération versée en contrepartie de la prestation

a) s’écarte manifestement et sans raison économique du prix normal,

b) a été effectuée en tout ou en partie par virement sur un compte ouvert auprès d’un prestataire de services de paiement situé en dehors du territoire tchèque, ou

c) a été effectuée en tout ou en partie par virement sur un compte autre que celui du fournisseur de la prestation imposable, qui est publié par l’administration fiscale d’une manière permettant l’accès à distance. »

Le litige au principal et la question préjudicielle

8 Konreo est l’administratrice judiciaire de FAU, une société de droit tchèque qui fait l’objet d’une procédure d’insolvabilité. Du mois de mai au mois d’octobre 2013, FAU a acheté du carburant à Verami, une autre société de droit tchèque.

9 À la suite de contrôles fiscaux, l’administration fiscale a constaté des faits de fraude fiscale dans la chaîne commerciale impliquant Verami et FAU. Le 5 janvier 2015 et le 2 février 2015, cette administration a émis des avis de recouvrement complémentaires à l’encontre de Verami, par lesquels elle a procédé à un redressement de la TVA due par cette dernière, en lui refusant le droit de déduire la TVA sur l’achat du carburant qu’elle avait ensuite livré à FAU. Verami ne s’est cependant pas
acquittée de cette TVA auprès du Trésor public.

10 Verami et FAU ont été déclarées en faillite, respectivement, le 27 février 2015 et le 14 décembre 2016, et deux procédures d’insolvabilité ayant pour objet les actifs de ces sociétés ont été ouvertes. Ces deux procédures étaient toujours en cours à la date à laquelle la demande de décision préjudicielle dans la présente affaire a été transmise à la Cour.

11 Le 7 février 2017, l’administration fiscale a procédé à un redressement de la TVA due par FAU en lui refusant le droit de déduire la TVA figurant sur les factures de carburant au motif qu’il y aurait eu une fraude à la TVA dans la chaîne commerciale dont faisait partie la transaction effectuée par cette société. La direction d’appel des finances a, par décision du 25 septembre 2017, rejeté le recours de FAU contre ce refus. Le Krajský soud v Brně (cour régionale de Brno, République tchèque) a
rejeté le recours introduit contre cette dernière décision. Konreo a introduit un pourvoi en cassation contre l’arrêt de cette juridiction devant le Nejvyšší správní soud (Cour administrative suprême, République tchèque), qui est la juridiction de renvoi.

12 Avant de procéder au redressement de la TVA due par FAU, l’administration fiscale avait, par six décisions du 22 avril 2015 et du 7 août 2015, obligé cette société, en tant que garant légal, au titre de l’article 109, paragraphe 2, sous b), de la loi sur la TVA, à s’acquitter de la TVA que Verami n’avait pas versée au Trésor public.

13 Par décisions du 22 septembre 2016, la direction d’appel des finances a rejeté les recours de FAU contre ces six décisions de l’administration fiscale. Par arrêt du 9 mai 2019, le Krajský soud v Brně (cour régionale de Brno) a annulé les décisions rejetant les recours de FAU au motif que la direction d’appel des finances n’avait pas correctement appliqué la jurisprudence de la Cour et du Nejvyšší správní soud (Cour administrative suprême) en ce qui concerne les conditions d’application de la
garantie légale au titre de la TVA non acquittée par le fournisseur.

14 À la suite du renvoi de ces affaires devant la direction d’appel des finances, celle-ci a rejeté, une seconde fois, le 26 mai 2020, les recours de FAU. Konreo ayant introduit un recours contre ces décisions de rejet de la direction d’appel des finances, le Krajský soud v Brně (cour régionale de Brno) a annulé lesdites décisions au motif, en substance, que la garantie légale faisait peser sur FAU une double imposition. Le 10 février 2023, la direction d’appel des finances a introduit un pourvoi
contre l’arrêt de cette cour devant la juridiction de renvoi.

15 Cette dernière juridiction indique que, à la date du 26 mai 2020 à laquelle doit être appréciée la légalité des décisions de rejet de la direction d’appel des finances, les redressements fiscaux en matière de TVA prononcés tant à l’encontre de Verami que de FAU, fondés sur le refus du droit à déduction de la TVA en raison de faits de fraude, étaient devenus définitifs. La juridiction de renvoi précise que FAU a été appelée à verser au Trésor public, pour le compte de Verami, la taxe qu’elle avait
déjà versée à cette société lors du paiement des factures de carburant émises par celle-ci en sa qualité de fournisseur.

16 Devant la juridiction de renvoi, la direction d’appel des finances fait valoir que le principe de neutralité fiscale ne peut pas être invoqué par des assujettis qui ont délibérément participé à une fraude fiscale. Dans un tel cas, l’administration fiscale serait, en effet, tenue de refuser le droit à déduction de la TVA, dès lors que ces assujettis savaient ou auraient dû savoir que la chaîne commerciale était entachée d’une fraude fiscale. La direction d’appel des finances soutient que
l’obligation fiscale que supporte l’assujetti à raison d’un tel refus est distincte de son obligation, au titre de la garantie légale, d’assurer le paiement de la TVA due par son fournisseur. Rien ne s’opposerait donc à ce qu’un assujetti se voie, simultanément, refuser le droit à déduction de la taxe sur une livraison entachée de fraude fiscale et obliger, au titre de la garantie légale, d’acquitter la TVA due par son fournisseur sur cette livraison. Il serait, en effet, paradoxal que la
garantie légale ne s’applique qu’aux assujettis qui ont agi de bonne foi et qui ont fait valoir leur droit à déduction de la taxe sur les opérations qu’ils ont effectuées.

17 Konreo fait valoir que le refus du droit à déduction de la TVA et la garantie légale doivent être considérés comme étant exclusifs l’un de l’autre, leur application concomitante violant le principe de neutralité fiscale et d’égalité de traitement des contribuables. En effet, les décisions de la direction d’appel des finances obligeraient FAU à s’acquitter trois fois de la TVA sur la même opération, d’abord, en la versant à son fournisseur, ensuite, en l’« acquittant » à la suite du refus du droit
de déduire cette taxe et, enfin, en la versant en application de la garantie légale au titre de la TVA due par son fournisseur.

18 La juridiction de renvoi explique que, en droit fiscal tchèque, la garantie légale a un caractère subsidiaire, en ce sens que, en vertu de l’article 171, paragraphe 3, de la loi no 280/2009 établissant le code de procédure fiscale, le garant ne peut être appelé en garantie que lorsque l’administration fiscale n’a pas réussi à recouvrer la dette auprès du débiteur en dépit d’une mesure d’exécution ou lorsqu’une procédure d’insolvabilité a été ouverte à l’encontre de celui-ci. Si le garant légal a
effectivement exécuté l’obligation principale à la place du débiteur, il dispose d’une action récursoire à l’encontre de ce dernier. Or, compte tenu des conditions dans lesquelles peut être invoquée la garantie légale, cette juridiction considère que cette action récursoire a peu de chances de succès.

19 Tel serait le cas en l’occurrence, dès lors que Verami était en faillite au moment de l’émission des appels en garantie de FAU. La juridiction de renvoi part donc de la prémisse selon laquelle FAU, en tant que garant légal, ne récupérera pas auprès de Verami, en tant que débiteur principal, la somme qu’elle versera à l’administration fiscale au titre des arriérés de TVA de ce débiteur.

20 Cette juridiction indique que deux mesures relatives à l’application du régime de la TVA sont en cause dans l’affaire au principal, à savoir, d’une part, le refus du droit à la déduction de la TVA et, d’autre part, la mise en œuvre de la responsabilité solidaire du destinataire des opérations concernées aux fins du paiement de la TVA grevant les prestations imposables effectuées par le fournisseur. À cet égard, une interprétation systématique du droit tchèque ferait apparaître que l’application
simultanée de ces deux mesures n’est pas exclue.

21 Or, la Cour ne se serait pas encore prononcée sur la question de savoir s’il est conforme au principe de proportionnalité d’appliquer, de manière concomitante et pour les mêmes opérations commerciales, une responsabilité solidaire pour le paiement de la TVA impayée et le refus du droit à déduction de la TVA en raison d’une participation à une fraude fiscale.

22 Dans ces conditions, le Nejvyšší správní soud (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 205 de la directive [TVA], lu en combinaison avec le principe de proportionnalité, s’oppose-t-il à une pratique nationale qui permet de faire valoir que le destinataire d’une prestation imposable est [légalement] tenu d’acquitter la [TVA] due par le fournisseur de cette prestation, bien que le destinataire de cette prestation imposable se soit déjà vu refuser le droit de déduire la taxe au motif qu’il a été impliqué dans une fraude fiscale ? »

Sur la question préjudicielle

23 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 205 de la directive TVA, lu à la lumière du principe de proportionnalité, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une pratique nationale qui impose à l’assujetti, destinataire d’une livraison de biens effectuée à titre onéreux, une obligation solidaire d’acquitter la TVA due par le fournisseur de ces biens, alors même que le droit à déduction de la TVA due ou acquittée en amont a été refusé au destinataire de
cette livraison de biens au motif qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il participait à une fraude à la TVA.

24 Il convient, en premier lieu, de rappeler que, aux termes de l’article 205 de la directive TVA, dans les situations visées aux articles 193 à 200 et 202 à 204 de cette directive, les États membres peuvent prévoir qu’une personne autre que le redevable est solidairement tenue d’acquitter la TVA.

25 Les articles 193 à 200 et 202 à 204 de ladite directive, qui font partie de la section 1 du chapitre 1 du titre XI de celle-ci, intitulée « Redevables de la taxe envers le Trésor », déterminent les personnes redevables de la TVA. Si l’article 193 de la même directive prévoit, comme règle de base, que la TVA est due par l’assujetti effectuant une livraison de biens ou une prestation de services imposable, il précise toutefois que d’autres personnes peuvent ou doivent être redevables de cette taxe
dans les situations visées aux articles 194 à 199 ter et 202 de la directive TVA.

26 Les dispositions de la section 1 du chapitre 1 du titre XI de cette directive, parmi lesquelles figure également l’article 205 de celle-ci, visent à identifier le redevable de la TVA en fonction de diverses situations. Ce faisant, ces dispositions ont pour but d’assurer au Trésor public une perception efficace de la TVA auprès de la personne la plus adéquate au regard de la situation envisagée (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 28, et du 12 décembre 2024, Dranken Van
Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 20).

27 L’article 205 de la directive TVA permet, en principe, aux États membres d’adopter, en vue d’une perception efficace de la TVA, des mesures en vertu desquelles une personne autre que celle qui est normalement redevable de cette taxe en vertu des articles 193 à 200 et 202 à 204 de cette directive est solidairement tenue d’acquitter ladite taxe (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 29, et du 12 décembre 2024, Dranken Van Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 21).

28 Cet article 205 ne précisant cependant ni les personnes que les États membres peuvent désigner comme débitrices solidaires ni les situations dans lesquelles une telle désignation peut être effectuée, il appartient aux États membres de déterminer les conditions et modalités de mise en œuvre de la responsabilité solidaire prévue audit article dans le respect, notamment, des principes de sécurité juridique et de proportionnalité (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, points 31 et 32,
ainsi que du 12 décembre 2024, Dranken Van Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 22).

29 S’agissant de ce dernier principe, à la lumière duquel la juridiction de renvoi interroge la Cour sur l’interprétation de l’article 205 de la directive TVA, s’il est légitime que les mesures adoptées par les États membres tendent à préserver le plus efficacement possible les droits du Trésor public, elles ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire à cette fin (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 33, et du 12 décembre 2024, Dranken Van Eetvelde, C‑331/23,
EU:C:2024:1027, point 23).

30 Dans ce contexte, l’exercice de la faculté reconnue aux États membres de désigner un débiteur solidaire autre que le redevable de la taxe afin d’assurer une perception efficace de cette dernière doit être justifié par la relation factuelle et/ou juridique existant entre les deux personnes concernées au regard des principes de sécurité juridique et de proportionnalité. Il appartient aux États membres de préciser les circonstances particulières dans lesquelles une personne telle que le destinataire
d’une opération imposable doit être tenue pour solidairement responsable du paiement de la taxe due par son cocontractant (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 34, et du 12 décembre 2024, Dranken Van Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 24).

31 Dans ce cadre, il y a lieu de rappeler que la lutte contre la fraude, l’évasion fiscale et les abus éventuels est un objectif reconnu et encouragé par la législation de l’Union européenne concernant le système commun de TVA et que le principe d’interdiction d’abus de droit conduit à prohiber les montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, effectués à la seule fin d’obtention d’un avantage fiscal (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 35, et du 12 décembre
2024, Dranken Van Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 25).

32 La Cour a ainsi dit pour droit que l’article 205 de la directive TVA permet à un État membre de tenir une personne pour solidairement redevable de la TVA lorsque, au moment de l’opération effectuée en sa faveur, elle savait ou aurait dû savoir que la taxe due sur cette opération ou une opération antérieure ou postérieure resterait impayée, ainsi que de se fonder sur des présomptions à cet égard, à condition que de telles présomptions ne soient pas formulées de manière telle qu’il deviendrait
pratiquement impossible ou excessivement difficile pour l’assujetti de les renverser par la preuve contraire et qu’un système de responsabilité sans faute, allant au-delà de ce qui est nécessaire pour préserver les droits du Trésor public, serait ainsi établi. En effet, les opérateurs qui prennent toute mesure pouvant raisonnablement être exigée d’eux pour s’assurer que leurs opérations ne font pas partie d’une chaîne abusive ou frauduleuse doivent pouvoir se fier à la légalité de ces opérations
sans risquer d’être solidairement tenus d’acquitter cette taxe due par un autre assujetti (arrêts du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 36, et du 12 décembre 2024, Dranken Van Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 26).

33 En l’occurrence, la juridiction de renvoi précise que l’article 109 de la loi sur la TVA transpose l’article 205 de la directive TVA. Elle indique que l’administration fiscale a considéré que FAU, en tant que responsable solidaire, était tenue d’acquitter la TVA que Verami n’avait pas versée au Trésor public. L’administration fiscale a fondé cette responsabilité sur l’article 109, paragraphe 2, sous b), de la loi sur la TVA, qui prévoit que le destinataire de la prestation imposable est tenu
d’acquitter la taxe non acquittée sur cette prestation, si la rémunération versée en contrepartie de la prestation a été effectuée en tout ou en partie par virement sur un compte ouvert auprès d’un prestataire de services de paiement situé en dehors du territoire tchèque.

34 Selon cette juridiction, la responsabilité solidaire au titre de l’article 109, paragraphe 2, sous b), de la loi sur la TVA, tel qu’interprété par les juridictions nationales, est subordonnée au fait que, outre le versement effectif sur un compte ouvert auprès d’un prestataire de services de paiement à l’étranger, il doit exister d’autres circonstances dont il ressort clairement que l’assujetti qui a effectué le versement sur ce compte savait ou aurait dû savoir que le versement ainsi effectué à
l’étranger visait précisément à éluder le paiement de la taxe. Tel serait le cas en l’occurrence en ce qui concerne le paiement effectué par FAU à son fournisseur, Verami.

35 Il convient, en outre, de relever qu’il ne ressort pas des éléments du dossier dont dispose la Cour que FAU aurait été privée de la faculté d’établir qu’elle avait pris toute mesure pouvant être raisonnablement exigée d’elle pour s’assurer que les opérations qu’elle avait réalisées ne faisaient pas partie d’une chaîne abusive ou frauduleuse.

36 Dans ces conditions, l’article 205 de la directive TVA ne s’oppose pas à ce que, dans la situation décrite aux points 33 à 35 du présent arrêt, l’administration fiscale applique une disposition nationale qui, en vue d’assurer la perception efficace de la TVA, impose au destinataire de la livraison de biens à titre onéreux en cause au principal une obligation solidaire d’acquitter la TVA due par le fournisseur de ceux-ci.

37 Il importe d’ajouter que, ainsi que l’indique, en substance, le gouvernement tchèque, la mise en œuvre d’une telle responsabilité solidaire est sans préjudice de l’application éventuelle des règles nationales de droit civil régissant la relation de l’assujetti, solidairement tenu d’acquitter la TVA, et de l’assujetti normalement redevable de cette taxe. La juridiction de renvoi confirme, à cet égard, que le droit tchèque prévoit que, en cas de paiement de la taxe due par le redevable, le
responsable solidaire peut exercer une action récursoire contre celui-ci.

38 À cet égard, compte tenu des éléments du dossier dont dispose la Cour, dont il ressort que Verami, redevable de la taxe, fait l’objet d’une procédure d’insolvabilité, il convient de relever que la décision de l’administration fiscale d’appliquer le mécanisme de la responsabilité solidaire, au titre de la disposition nationale transposant l’article 205 de la directive TVA, ne saurait dépendre des chances de succès de l’action récursoire que pourrait intenter le responsable solidaire. En effet,
dans le cas contraire, l’application de ce mécanisme pourrait être rendue difficile au point de porter atteinte à une perception efficace de la TVA, dès lors que l’administration fiscale serait tenue d’évaluer en amont si l’assujetti qu’il est envisagé de désigner comme responsable solidaire obtiendra le remboursement du montant de la taxe payée à la place du redevable.

39 En deuxième lieu, selon une jurisprudence constante, dès lors que la lutte contre la fraude, l’évasion fiscale et les abus éventuels est un objectif reconnu et encouragé par la directive TVA, il appartient aux autorités et aux juridictions nationales de refuser le bénéfice du droit à déduction de la TVA s’il est établi, au vu d’éléments objectifs, que ce droit est invoqué frauduleusement ou abusivement [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2022, Finanzamt M (Étendue du droit à déduction de la
TVA), C‑596/21, EU:C:2022:921, point 34 et jurisprudence citée].

40 La Cour a jugé que le bénéfice du droit à déduction de la TVA doit être refusé non seulement lorsqu’une fraude est commise par l’assujetti lui-même, mais également lorsqu’il est établi que l’assujetti, auquel les biens servant de base pour fonder le droit à déduction ont été livrés, savait ou aurait dû savoir que, par l’acquisition de ces biens, il participait à, ou à tout le moins facilitait, une opération impliquée dans une fraude à la TVA. En effet, un tel assujetti doit, pour les besoins de
la directive TVA, être considéré comme participant à la fraude ou comme facilitant celle-ci, indépendamment de la question de savoir s’il tire ou non un bénéfice de la revente des biens dans le cadre des opérations taxées effectuées par lui en aval, cet assujetti, dans une telle situation, prêtant la main aux auteurs de cette fraude et devenant complice de celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2022, Finanzamt M (Étendue du droit à déduction de la TVA), C‑596/21, EU:C:2022:921,
points 25 et 35 ainsi que jurisprudence citée].

41 L’obligation pesant sur les autorités et les juridictions nationales de refuser le droit à déduction lorsqu’un assujetti savait ou aurait dû savoir que l’opération participait à une fraude a notamment pour objectif d’obliger les assujettis à accomplir les diligences pouvant être raisonnablement requises lors de toute opération économique afin de s’assurer que les opérations qu’ils effectuent ne les conduisent pas à participer à une fraude fiscale [arrêt du 24 novembre 2022, Finanzamt M (Étendue
du droit à déduction de la TVA), C‑596/21, EU:C:2022:921, point 39 et jurisprudence citée].

42 Il s’ensuit que, dans une situation telle que celle au principal, dans laquelle, ainsi qu’il est indiqué par la juridiction de renvoi, le destinataire de la livraison de biens savait ou aurait dû savoir que, dans le cadre des opérations d’achat, il participait à une fraude fiscale, l’administration fiscale était tenue de refuser à celui-ci le droit à déduction de la TVA payée en amont.

43 Il reste à apprécier, en troisième lieu, s’il est possible d’appliquer, de manière concomitante, les deux mesures consistant, d’une part, à imposer à un assujetti destinataire d’une livraison de biens à titre onéreux, tel que FAU, l’obligation solidaire, au titre d’une disposition nationale transposant l’article 205 de la directive TVA, d’acquitter la TVA non acquittée par l’assujetti fournisseur de ces biens et, d’autre part, à refuser le droit à déduction de la TVA que cet assujetti
destinataire a payée à ce fournisseur.

44 À cet égard, étant donné que, conformément à la jurisprudence de la Cour citée aux points 39 et 40 du présent arrêt, l’assujetti redevable de la TVA ne peut faire valoir aucun droit à déduction de la TVA dans des cas de fraudes, un tel droit à déduction ne saurait, a fortiori, être transféré à l’assujetti qui est solidairement tenu d’acquitter ladite taxe en vertu de la disposition nationale transposant l’article 205 de la directive TVA (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2024, Dranken Van
Eetvelde, C‑331/23, EU:C:2024:1027, point 45).

45 Il s’ensuit que, dans une telle situation de fraude fiscale, le système prévu par la directive TVA permet à l’administration fiscale d’appliquer de manière autonome le refus du droit à déduction de la TVA et la responsabilité solidaire en vertu de cet article 205, sans qu’elle soit tenue d’opérer un choix entre chacune de ces deux mesures.

46 Par conséquent, la directive TVA n’empêche pas l’administration fiscale d’appliquer lesdites mesures à l’égard du même assujetti, dont il est constant qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il participait à une fraude à la TVA, dès lors que leur application ne porte pas atteinte au principe de proportionnalité.

47 En effet, d’une part, ainsi qu’il ressort des points 39 à 42 du présent arrêt, le refus du droit à déduction de la TVA qu’un assujetti, en tant que destinataire d’une livraison de biens, a payée au fournisseur de ces biens constitue une application correcte du système commun de TVA dans le cas où cet assujetti savait ou aurait dû savoir que, par l’opération concernée, il participait à une fraude fiscale.

48 D’autre part, la mise en œuvre de la responsabilité solidaire, au titre de l’article 205 de la directive TVA, dans le chef dudit assujetti destinataire de cette livraison, conduit à ce que celui-ci acquitte la taxe normalement due par le fournisseur des biens concernés, dans une situation où, en présence d’une telle fraude fiscale, l’administration fiscale considère que l’application de cette responsabilité permettra d’assurer une perception efficace de cette taxe.

49 Il importe de relever, à cet égard, que l’administration fiscale peut désigner, en tant que responsable solidaire au titre de l’article 205 de la directive TVA, un assujetti qui a déjà acquitté la TVA en payant le prix de l’opération grevée par celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2021, ALTI, C‑4/20, EU:C:2021:397, point 34). Il s’ensuit que la désignation d’une personne, autre que l’assujetti normalement redevable de la taxe, comme étant solidairement tenue d’acquitter cette taxe, en
vertu de cet article, ne dépend pas du fait que cette personne a payé la TVA que lui a facturée cet assujetti et, par conséquent, n’est pas tributaire du fait que ladite personne a ou non obtenu le droit à déduction de la TVA.

50 En outre, le refus du droit à déduction de la TVA et la responsabilité solidaire en vertu de cet article 205 poursuivent deux objectifs distincts et complémentaires, consistant, respectivement, à lutter contre la fraude fiscale et à assurer au Trésor public une perception efficace de la TVA auprès des personnes les plus adéquates au regard de la situation envisagée, notamment dans une situation de fraude. Exiger de la part de l’administration fiscale qu’elle applique alternativement l’une ou
l’autre de ces mesures la conduirait à renoncer, du moins partiellement, à l’un de ces deux objectifs, ce qui ne saurait se justifier dans le cas d’assujettis qui savaient ou auraient dû savoir qu’ils participaient à une fraude fiscale.

51 Ainsi que l’ont indiqué la direction d’appel des finances et le gouvernement tchèque, la solution inverse, consistant à ne pas pouvoir tenir pour solidairement responsables, en vertu de l’article 205 de la directive TVA, les assujettis auxquels le droit à déduction de la TVA a été refusé, impliquerait que seuls les assujettis agissant de bonne foi, qui ont le droit de bénéficier de la déduction de la TVA sur leurs opérations imposables, pourraient être désignés, au titre de cet article, comme
étant solidairement tenus d’acquitter la taxe due par l’assujetti normalement redevable de celle-ci. Il en découlerait que les assujettis ayant agi de bonne foi seraient traités de manière moins favorable que les assujettis qui savaient ou auraient dû savoir qu’ils participaient à une fraude fiscale.

52 Enfin, ainsi que la Commission européenne l’a indiqué lors de l’audience devant la Cour, le fait d’imposer à l’assujetti destinataire d’une livraison de biens à titre onéreux une obligation solidaire d’acquitter la TVA due par l’assujetti fournisseur de ces biens, dans une situation telle que celle au principal, n’a pas pour conséquence un enrichissement sans cause de l’administration fiscale. En effet, en refusant, d’une part, au premier assujetti, le droit à déduction de la TVA dans une
situation où celui-ci savait ou aurait dû savoir qu’il participait à une fraude fiscale, et en désignant, d’autre part, ce premier assujetti comme étant solidairement tenu d’acquitter la TVA due par le second assujetti, l’administration fiscale se contente de prendre des mesures susceptibles de lui permettre d’obtenir le versement des montants de TVA distincts qui lui seraient dus par ces deux assujettis.

53 Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 205 de la directive TVA, lu à la lumière du principe de proportionnalité, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une pratique nationale qui impose à l’assujetti, destinataire d’une livraison de biens effectuée à titre onéreux, une obligation solidaire d’acquitter la TVA due par le fournisseur de ces biens, alors même que le droit à déduction de la TVA due ou
acquittée en amont a été refusé au destinataire de cette livraison de biens au motif qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il participait à une fraude à la TVA.

Sur les dépens

54 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

  L’article 205 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive (UE) 2018/1695 du Conseil, du 6 novembre 2018, lu à la lumière du principe de proportionnalité,

  doit être interprété en ce sens que :

  il ne s’oppose pas à une pratique nationale qui impose à l’assujetti, destinataire d’une livraison de biens effectuée à titre onéreux, une obligation solidaire d’acquitter la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) due par le fournisseur de ces biens, alors même que le droit à déduction de la TVA due ou acquittée en amont a été refusé au destinataire de cette livraison de biens au motif qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il participait à une fraude à la TVA.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le tchèque.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : C-276/24
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Nejvyšší správní soud.

Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 205 – Responsabilité solidaire – Conditions et portée de la responsabilité – Lutte contre la fraude à la TVA – TVA non acquittée par le fournisseur – Refus d’accorder au destinataire de la livraison le droit à déduction de la TVA – Possibilité de tenir le destinataire de la livraison solidairement responsable du paiement de la TVA due par le fournisseur – Principe de proportionnalité.


Parties
Demandeurs : KONREO, v. o. s.
Défendeurs : Odvolací finanční ředitelství.

Composition du Tribunal
Avocat général : Kokott
Rapporteur ?: Lycourgos

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2025:554

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