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06/03/2025 | CJUE | N°C-471/23

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Obshtina Veliko Tarnovo et Obshtina Belovo contre Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Regioni v rastezh » 2014-2020 et Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Okolna sreda » 2014-2020., 06/03/2025, C-471/23


 ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

6 mars 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Cohésion économique, sociale et territoriale – Ressources propres de l’Union européenne – Protection des intérêts financiers de l’Union – Règlement (UE) no 1303/2013 – Article 2, point 10 – Notion de “bénéficiaire” – Correction financière pour violation d’une réglementation nationale en matière de marchés publics – Destinataire d’une décision de correction financière – Détermination de la responsabilité relative à cette correction

et répartition contractuelle de cette
responsabilité entre le bénéficiaire d’une aide d’État et le gestionnaire de celle-c...

 ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

6 mars 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Cohésion économique, sociale et territoriale – Ressources propres de l’Union européenne – Protection des intérêts financiers de l’Union – Règlement (UE) no 1303/2013 – Article 2, point 10 – Notion de “bénéficiaire” – Correction financière pour violation d’une réglementation nationale en matière de marchés publics – Destinataire d’une décision de correction financière – Détermination de la responsabilité relative à cette correction et répartition contractuelle de cette
responsabilité entre le bénéficiaire d’une aide d’État et le gestionnaire de celle-ci – Participation aux procédures administrative et juridictionnelle relatives à cette décision – Articles 41 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »

Dans les affaires jointes C‑471/23 et C‑477/23,

ayant pour objet deux demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême, Bulgarie), par décisions du 13 juillet 2023, parvenues à la Cour le 25 juillet 2023, dans les procédures

Obshtina Veliko Tarnovo (C-471/23),

Obshtina Belovo (C-477/23)

contre

Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Regioni v rastezh » 2014-2020 (C‑471/23),

Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Оkolna sreda » 2014-2020 (C‑477/23),

en présence de :

Varhovna administrativna prokuratura,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. N. Jääskinen, président de la neuvième chambre, faisant fonction de président de la huitième chambre, MM. M. Gavalec (rapporteur) et J. Passer, juges,

avocat général : Mme T. Ćapeta,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour l’Obshtina Belovo, par Mme A. A. Kecheva,

– pour le Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Оkolna sreda » 2014-2020, par Mme G. Simeonova,

– pour la Commission européenne, par Mmes D. Drambozova, C. Ehrbar et M. J. Hradil, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de l’article 2, points 10, 36 et 37, du règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds
européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 320, et rectificatif JO 2016, L 200, p. 140), tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018 (JO 2018, L 193, p. 1) (ci-après le « règlement no 1303/2013 »), ainsi que des articles 41 et 47 de la charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2 Ces demandes ont été présentées dans le cadre de deux litiges opposant, le premier, l’Obshtina Veliko Tarnovo (commune de Veliko Tarnovo, Bulgarie) au Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Regioni v rastezh » 2014-2020 (chef de l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020) (C‑471/23) et, le second, l’Obshtina Belovo (commune de Belovo, Bulgarie) au Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Оkolna sreda »
2014-2020 (chef de l’autorité de gestion du programme opérationnel « Environnement » 2014-2020) (C‑477/23) au sujet des modalités d’adoption de décisions de correction financière à la suite d’irrégularités constatées lors de la mise en œuvre de projets cofinancés par les fonds de l’Union européenne.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement (CE) no 1370/2007

3 Aux termes des considérants 5, 33 et 36 du règlement (CE) no 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007, relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) no 1191/69 et (CEE) no 1107/70 du Conseil (JO 2007, L 315, p. 1) :

« (5) [...] Si, conformément au présent règlement, des États membres choisissent d’exclure certaines règles générales de son champ d’application, le régime général en matière d’aides d’État devrait s’appliquer.

[...]

(33) Aux points 87 à 95 de son arrêt [du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, EU:C:2003:415)], la Cour de justice des Communautés européennes a jugé que la compensation de service public ne constitue pas un avantage au sens de l’article [107 TFUE], sous réserve que quatre conditions cumulatives soient réunies. Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, et que les critères généraux d’applicabilité de l’article [107, paragraphe 1, TFUE] sont satisfaits, la
compensation liée à des obligations de service public constitue une aide d’État et relève des articles [93, 106, 107 et 108 TFUE].

[...]

(36) [...] Toute compensation accordée en liaison avec la fourniture de services publics de transport de voyageurs autres que ceux visés par le présent règlement qui risque de constituer une aide d’État au sens de l’article [107, paragraphe 1, TFUE], devrait respecter les dispositions des articles [93, 106, 107 et 108 TFUE], y compris toute interprétation pertinente par la Cour de justice des Communautés européennes, en particulier dans son arrêt [du 24 juillet 2003, Altmark Trans et
Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, EU:C:2003:415)]. [...] »

Le règlement no 1303/2013

4 Aux termes des considérants 65 et 66 du règlement no 1303/2013 :

« (65) Les États membres devraient prendre des mesures adéquates pour garantir la bonne mise en place et le bon fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle, de manière à pouvoir donner l’assurance que les Fonds [structurels et d’investissement européens (ESI)] sont utilisés de manière légale et régulière. [...]

(66) Conformément au principe de la gestion partagée, les États membres et la Commission [européenne] devraient être responsables de la gestion et du contrôle des programmes. Il convient que la responsabilité de la mise en œuvre et du contrôle des opérations menées dans le cadre des programmes incombe en premier lieu aux États membres, qui l’exercent par l’intermédiaire de leurs systèmes de gestion et de contrôle. [...] »

5 L’article 1er de ce règlement, intitulé « Objet », est libellé comme suit :

« Le présent règlement arrête les règles communes applicables au Fonds européen de développement régional (FEDER), au Fonds social européen (FSE), au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), relevant d’un cadre commun (ci-après dénommés “fonds structurels et d’investissement européens” – “Fonds ESI”). [...]

[...] »

6 L’article 2 dudit règlement, intitulé « Définitions », prévoit :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

10) “bénéficiaire”, un organisme public ou privé ou une personne physique, chargés du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations et :

a) dans le cadre des aides d’État, l’organisme qui reçoit l’aide, sauf lorsque l’aide accordée par entreprise est inférieure à 200000 [euros], auquel cas l’État membre concerné peut décider que le bénéficiaire est l’organisme octroyant l’aide, sans préjudice des règlements (UE) no 1407/2013 [de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif à l’application des articles 107 et 108 [TFUE] aux aides de minimis (JO 2013, L 352, p. 1)], (UE) no 1408/2013 [de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif
à l’application des articles 107 et 108 [TFUE] aux aides de minimis dans le secteur de l’agriculture (JO 2013, L 352, p. 9),] et (UE) no 717/2014 de la Commission[, du 27 juin 2014, concernant l’application des articles 107 et 108 [TFUE] aux aides de minimis dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture (JO 2014, L 190, p. 45)] ; et

b) dans le cadre d’instruments financiers relevant du titre IV de la deuxième partie du présent règlement, l’organisme qui met en œuvre l’instrument financier ou le fonds de fonds, selon le cas ;

[...]

36) “irrégularité”, toute violation du droit de l’Union ou du droit national relatif à son application résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique participant à la mise en œuvre des Fonds ESI, qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget de l’Union européenne par l’imputation au budget de l’Union d’une dépense indue ;

37) “opérateur économique” désigne toute personne physique ou morale ou toute autre entité participant à la mise en œuvre de l’assistance des Fonds ESI, à l’exception d’un État membre qui exerce ses prérogatives en tant qu’autorité publique ;

[...] »

7 L’article 143 du règlement no 1303/2013, intitulé « Corrections financières effectuées par les États membres », énonce :

« 1.   Il incombe en premier lieu aux États membres de rechercher les irrégularités, de procéder aux corrections financières nécessaires et d’entamer des procédures de recouvrement. En cas d’irrégularité systémique, l’État membre étend ses investigations à toutes les opérations susceptibles d’être affectées.

2.   Les États membres procèdent aux corrections financières requises en rapport avec les irrégularités individuelles ou systémiques détectées dans les opérations ou les programmes opérationnels. Les corrections financières consistent à annuler tout ou partie de la participation publique pour une opération ou un programme opérationnel. L’État membre tient compte de la nature et de la gravité des irrégularités et de la perte financière qui en résulte pour le Fonds ou pour le FEAMP et applique une
correction proportionnée. Les corrections financières sont inscrites dans les comptes de l’exercice comptable au cours duquel l’annulation a été décidée.

[...] »

Le droit bulgare

Le ZUSEFSU

8 Aux termes de l’article 70 du Zakon za upravlenie na sredstvata ot evropeyskite fondove pri spodeleno upravlenie (loi relative à la gestion des ressources des fonds européens en gestion partagée, DV no 101, du 22 décembre 2015, dont l’intitulé antérieur à la modification parue au DV no 51 de 2022, entrée en vigueur le 1er juillet 2022, était libellé comme suit : Zakon za upravlenie na sredstvata ot evropeyskite strukturni i investitsionni fondove [loi relative à la gestion des ressources des fonds
structurels et d’investissement européens – ZUSESIF]), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « ZUSEFSU ») :

« (1)   Le soutien financier provenant des ressources des Fonds ESI peut être annulé en totalité ou en partie en effectuant une correction financière pour les motifs suivants :

[...]

9. en raison d’une irrégularité constituant une violation des règles de désignation d’un adjudicataire au titre du chapitre quatre, résultant d’un acte ou d’une omission du bénéficiaire, qui a ou aurait pour effet de porter préjudice aux Fonds européens structurels et d’investissement ;

[...]

(2)   Les cas d’irrégularité donnant lieu à des corrections financières visées au paragraphe 1, point 9, sont indiqués dans un acte normatif du conseil des Ministres. »

9 L’article 73, paragraphe 1, du ZUSEFSU est libellé comme suit :

« La correction financière est déterminée, quant à son fondement et à son montant, par une décision motivée du chef de l’autorité de gestion ayant approuvé le projet. »

La loi sur les marchés publics

10 En vertu de l’article 2, paragraphe 2, du Zakon za obshtestvenite porachki (loi sur les marchés publics, DV no 13, du 16 février 2016), lors de la passation de marché public, les pouvoirs adjudicateurs ne sont pas autorisés à restreindre la concurrence en incluant des conditions ou des exigences qui procurent un avantage injustifié ou restreignent indûment la participation d’opérateurs économiques aux marchés publics et qui ne sont pas conformes à l’objet, à la valeur, à la complexité, à la
quantité ou à l’étendue du marché public.

Les litiges au principal et les questions préjudicielles

L’affaire C‑471/23

11 À l’issue d’une procédure d’attribution s’inscrivant dans le cadre du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020, faisant partie de l’accord de partenariat de la République de Bulgarie pour la période de programmation 2014-2020, la subvention « Mise en œuvre de plans intégrés de relance et de développement urbain 2014-2020 » a été attribuée directement à la commune de Veliko Tarnovo.

12 Le 24 août 2018, cette commune a conclu une convention de partenariat avec « Organizatsia na dvizhenieto, parkingi i garazhi » EOOD (organisme de la circulation, des parkings et des garages, ci-après la « société communale »). Cette convention de partenariat prévoit que ladite commune et la société communale sont désignées respectivement « partenaire chef de file » et « partenaire » dans le projet « Transport urbain intégré de la ville de Veliko Tarnovo » dans le cadre de ce programme
opérationnel.

13 Conformément à ladite convention de partenariat, le partenaire chef de file et le partenaire sont tenus, en cas d’approbation de ce projet, de conclure un contrat administratif. Le partenaire, à savoir, en l’occurrence, la société communale, est obligé de mener, en sa qualité de pouvoir adjudicateur, une procédure de passation de marché public, conformément à la loi sur les marchés publics, ayant pour objet la fourniture de matériel roulant. La même convention stipule, en outre, que, si, lors de
cette procédure, des violations justifiant qu’il soit procédé à une correction financière sont commises, les ressources concernées par cette correction sont, à hauteur de celle-ci, à la charge du pouvoir adjudicateur, qui est partie au contrat ayant donné lieu à ladite correction.

14 Le 19 juillet 2019, la commune de Veliko Tarnovo, en tant que bénéficiaire de la subvention « Mise en œuvre de plans intégrés de relance et de développement urbain 2014-2020 », a conclu un contrat administratif avec l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020 en vue de la mise en œuvre de la proposition dudit projet, d’une valeur totale de 11133732,51 leva bulgares (BGN) (environ 5700000 euros), dont ladite subvention d’un montant de 10409573,31 BGN
(environ 5300000 euros) et une contribution propre du bénéficiaire de 724159,20 BGN (environ 370000 euros).

15 Ce contrat administratif stipule qu’une partie du montant de la subvention en cause constitue une aide d’État en faveur de l’opérateur de service de transport public de voyageurs sous la forme d’une compensation de service public, conformément au règlement no 1370/2007. L’administrateur de cette aide est la commune de Veliko Tarnovo, laquelle est tenue de garantir l’exécution du régime applicable en conformité avec les exigences découlant de ce règlement, y compris l’instauration et l’application
de mécanismes adéquats de contrôle de leur respect.

16 Conformément aux conditions générales dudit contrat administratif, le bénéficiaire est responsable, à l’égard de l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020, des actes des partenaires et des contractants externes dans l’exécution du projet concerné et assume « pour son propre compte tous les risques, y compris les dépenses inéligibles et les corrections financières imputées sur la subvention du budget du projet ».

17 Après avoir engagé une procédure de passation de marché public en sa qualité d’opérateur de service d’intérêt économique général et de personne identifiée comme étant celle qui reçoit une aide d’État provenant des ressources des Fonds ESI, la société communale a, le 31 mars 2020, conclu avec l’adjudicataire « Excelor-Alfa » DZZD un contrat de marché public ayant pour objet la fourniture de trois autobus électriques.

18 À la suite d’un signalement d’irrégularité, le 11 mai 2022, l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020 a adopté une décision de correction financière à l’égard de la commune de Veliko Tarnovo (ci-après la « décision de correction financière du 11 mai 2022 ») en raison d’une irrégularité, au sens de l’article 70, paragraphe 1, point 9, du ZUSEFSU, commise par la société communale. Cette correction financière s’élevait à 25 % des ressources éligibles à un
financement par les Fonds ESI au titre de ce contrat de marché public.

19 La commune de Veliko Tarnovo a formé un recours contre cette décision devant l’Administrativen sad Veliko Tarnovo (tribunal administratif de Veliko Tarnovo, Bulgarie).

20 Par un jugement du 1er novembre 2022, cette juridiction a rejeté ce recours au motif que cette commune était le seul bénéficiaire de la subvention en cause dans la mesure où elle était partie au contrat administratif visé au point 14 du présent arrêt et que, en sa qualité de partie à ce contrat, ladite commune pouvait légitimement être réputée destinataire de l’acte administratif fixant la correction financière concernée. Ladite juridiction a également relevé que la circonstance que la même
commune, en qualité de bénéficiaire de cette subvention, a conclu des conventions de partenariat pour certaines activités ne la dispense pas de sa responsabilité en tant que partie audit contrat ayant une relation directe avec l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020. La même juridiction a enfin constaté que la clause relative à la responsabilité pour des violations et des risques, y compris pour des corrections financières, avait un caractère
récursoire en ce sens qu’elle visait à déterminer, dans les relations internes entre les partenaires, à qui incomberait la responsabilité relative à de telles corrections.

21 La commune de Veliko Tarnovo a introduit un pourvoi en cassation contre ce jugement devant le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême, Bulgarie), qui est la juridiction de renvoi.

22 Selon cette juridiction, tout d’abord, afin de répondre à la question de savoir si la commune de Veliko Tarnovo est l’unique bénéficiaire de la subvention en cause et si elle a commis, en cette qualité, une violation du droit bulgare ayant donné lieu à une correction financière, il y a lieu d’interpréter la notion de « bénéficiaire », au sens de l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013.

23 Ensuite, la question se poserait de savoir si la commune de Veliko Tarnovo peut être considérée comme étant le destinataire de la décision de correction financière du 11 mai 2022 en raison d’une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013, commise par la société communale, et comme devant assumer ainsi la responsabilité de violations commises lors de la procédure de passation de marché public engagée par cette société, alors que cette commune n’utilise pas les
ressources provenant de Fonds ESI au titre du contrat de marché public conclu à la suite de cette procédure.

24 Enfin, s’il était établi que la société communale est le bénéficiaire de la subvention qui a fait l’objet de cette correction financière, en sa qualité de personne ayant reçu cette subvention ainsi que d’organisme public responsable du lancement et de l’exécution de l’opération spécifique d’acquisition de matériel roulant, la question se poserait également de savoir pourquoi le droit de participer à la procédure de détermination de ladite correction financière ne lui a pas été garanti et si elle
aurait dû pouvoir intervenir en tant que partie à la procédure d’annulation de celle-ci devant l’Administrativen sad Veliko Tarnovo (tribunal administratif de Veliko Tarnovo).

25 Dans ces conditions, le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’administrateur d’une aide d’État consistant en des ressources provenant des [Fonds ESI], qui n’est pas celui qui reçoit l’aide, relève-t-il de la notion de “bénéficiaire” de l’aide dans le cadre des aides d’État, au sens de l’article [2], point 10, du [règlement no 1303/2013] ?

2) L’administrateur d’une aide d’État consistant en des ressources provenant des Fonds ESI[,] qui n’est pas la personne utilisant l’aide sur la base d’un marché public[,] peut-il être valablement un destinataire d’une décision de détermination d’une correction financière en raison d’une violation de la législation nationale/du droit de l’Union lors de la passation du marché public ?

3) La personne destinataire de la mesure administrative que constitue la “correction financière” en raison de la commission d’une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013, doit-elle, dans l’hypothèse d’aides d’État dont les ressources proviennent des Fonds ESI, remplir deux exigences cumulatives, à savoir être la personne qui a reçu l’aide consistant dans les ressources concernées par l’irrégularité et être celle qui a utilisé ces ressources ?

4) La responsabilité pour la violation de la loi dans l’utilisation d’une aide d’État consistant en des ressources provenant des Fonds ESI peut-elle être déterminée ou redistribuée par un contrat entre celui qui a reçu l’aide et l’administrateur de celle-ci, ou bien est-ce celui qui reçoit l’aide et qui l’utilise illégalement qui doit assumer cette responsabilité ?

5) Y a-t-il une responsabilité solidaire de celui qui reçoit l’aide et de l’administrateur de celle-ci et cette solidarité doit-elle être prévue dans le contrat d’octroi de l’aide ?

6) L’article 41 et l’article 47 de la [Charte] s’opposent-ils à une pratique des autorités nationales ou à une jurisprudence nationale selon lesquelles, dans une situation telle que celle au principal, un “opérateur de service d’intérêt économique général” tel que [la société communale], ayant prétendument enfreint la loi sur les marchés publics dans le cadre d’une passation de marché public lié à une procédure de dépense de sommes issues des Fonds ESI [qui constituent] une aide d’État, ne se
voit garantir ni le droit de participer à la procédure déterminant une correction financière dans un contrat qu’il a conclu ni le droit de participer à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de cet acte administratif, au motif que cet opérateur supporte une responsabilité civile récursoire en sa qualité de partenaire de la commune en vertu de la convention de partenariat ? »

L’affaire C‑477/23

26 L’affaire C‑477/23 concerne l’utilisation de Fonds ESI pour la période 2014-2020 dans le cadre d’une « procédure combinée pour la conception et la construction d’installations de compostage et d’installations de prétraitement des déchets ménagers », dont l’objectif est de réduire la quantité de déchets mis en décharge en fournissant des capacités supplémentaires pour le prétraitement des déchets indifférenciés ainsi que pour la collecte séparée et le recyclage par compostage des déchets verts
et/ou biodégradables.

27 Dans le cadre de la procédure visant à obtenir une subvention directe, pour la région de Pazardzhik (Bulgarie), plusieurs communes, comprenant notamment celles de Pazardzhik et de Belovo, ont préparé une proposition de projet commune en vue de l’octroi d’une telle subvention. Les communes concernées devaient signer un contrat administratif relatif à l’octroi d’une subvention dans le cadre du programme opérationnel « Environnement » 2014-2020. Ce contrat stipule que les communes qui sont parties à
celui-ci désignent la commune de Pazardzhik « commune chef de file ». En outre, ledit contrat prévoit que toutes les communes visées par celui-ci sont bénéficiaires, nonobstant la circonstance qu’à côté du nom de chacune de ces communes soit également inscrite leur qualité de « partenaire ».

28 Il ressort des modalités de mise en œuvre du projet approuvé dans le cadre de cette procédure, qui font partie intégrante du contrat administratif mentionné au point précédent, que la commune de Pazardzhik, en tant que « commune chef de file », est responsable de la gestion de ce projet et dispose du pouvoir de recevoir sur son compte bancaire des fonds visés et de les distribuer aux communes partenaires, tandis que ces dernières participent conjointement avec la commune chef de file à la
préparation ainsi qu’à la mise en œuvre technique et financière dudit projet. Dans ce contexte, la commune de Belovo était tenue de mener et d’attribuer le marché public portant sur la conception, la supervision à titre d’auteur, la construction, la livraison et la réalisation d’une installation de compostage des déchets verts et/ou biodégradables collectés séparément, d’une capacité de 2000 tonnes par an.

29 Dans le cadre de la procédure de passation de ce marché public, la commune de Belovo, en sa qualité de pouvoir adjudicateur, a conclu un contrat de marché public avec « Delchev Engineering » EOOD.

30 Par une décision du 21 mars 2022, l’autorité de gestion du programme opérationnel « Environnement » 2014-2020 a imposé à la commune de Pazardzhik une correction financière de 10 % sur les dépenses éligibles à un financement par les Fonds ESI au titre de ce contrat de marché public (ci-après la « décision de correction financière du 21 mars 2022 »). Cette correction financière a été imposée en raison d’une irrégularité, au sens de l’article 70, paragraphe 1, point 9, du ZUSEFSU, commise par la
commune de Belovo.

31 La commune de Belovo, qui n’est pas le destinataire de la décision de correction financière du 21 mars 2022, a introduit un recours contre celle-ci devant l’Administrativen sad Pazardzhik (tribunal administratif de Pazardzhik, Bulgarie). Par un jugement du 26 octobre 2022, cette juridiction a rejeté ce recours en considérant que, bien que cette décision ait indiqué uniquement la commune de Pazardzhik comme étant destinataire de celle-ci, la commune de Belovo, en tant que pouvoir adjudicateur,
avait signé le contrat de marché public et avait un intérêt juridique à introduire ledit recours. Toutefois, ladite juridiction a conclu que ladite décision avait été adoptée en conformité avec le droit bulgare.

32 La commune de Belovo a formé un pourvoi en cassation contre ce jugement devant le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême), qui est la juridiction de renvoi.

33 Selon cette juridiction, il existerait une divergence dans la jurisprudence nationale relative à des situations factuelles analogues à celle en cause dans la présente affaire, concernant la même procédure de financement par des Fonds ESI.

34 En effet, d’une part, il ressortirait de certaines décisions nationales que seule la commune chef de file du projet concerné a le statut de « bénéficiaire », au sens de l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013, et qu’elle est le destinataire de la décision de correction financière, les autres communes partenaires n’ayant pas cette qualité. Ainsi, dans les affaires ayant donné lieu à ces décisions nationales, les communes partenaires, autres que la commune chef de file, n’avaient été
admises comme parties ni à la procédure visant à déterminer la correction financière en cause, ni à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de l’acte procédant à celle-ci, même lorsque ces communes partenaires étaient à l’origine de l’irrégularité ayant donné lieu à cette correction financière.

35 D’autre part, certaines juridictions nationales considéreraient que, en cas de violation des règles de passation des marchés publics commise par une commune dépensant des sommes provenant des Fonds ESI, cette commune devrait être considérée comme étant destinataire de l’acte de correction financière en cause ainsi que comme ayant le droit de participer à la procédure visant à déterminer la correction financière concernée et de se défendre devant une juridiction.

36 Par ailleurs, la juridiction de renvoi émet des doutes sur la manière dont il convient de déterminer la responsabilité liée à des corrections financières découlant de la commission d’infractions aux règles de passation des marchés publics dans le cadre de l’utilisation des Fonds ESI.

37 Dans ces conditions, le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’interprétation de l’article 2, points 10, 36 et 37, du règlement no 1303/2013 s’oppose-t-elle à des règles ou à des pratiques nationales relatives à l’interprétation et à l’application de cette disposition selon lesquelles, dans une situation telle que celle en cause au principal, parmi les communes (parties au contrat administratif de subvention) faisant partie d’un partenariat, seule celle ayant signé le contrat administratif de subvention en tant que chef de file doit être considérée
comme étant le bénéficiaire de l’aide provenant des ressources des Fonds ESI ? Quelles sont les conditions requises dans une hypothèse telle que la présente pour qualifier une organisation de “bénéficiaire” au sens de l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013 ?

2) L’interprétation de l’article 2, points 10, 36 et 37, du règlement no 1303/2013 s’oppose-t-elle à des règles ou à des pratiques nationales relatives à l’interprétation et à l’application de cette disposition selon lesquelles, dans une situation telle que celle en cause au principal, la correction financière pour infraction aux règles de passation des marchés publics commise par un opérateur économique est déterminée par un acte adressé à un autre opérateur économique qui n’a pas commis la
prétendue infraction, mais qui figure en tant que chef de file dans le contrat administratif de subvention ?

3) Le règlement no 1303/2013 s’oppose-t-il à des règles ou à des pratiques nationales relatives à l’interprétation et à l’application de cette disposition selon lesquelles la responsabilité de la correction financière peut être redistribuée contractuellement entre les partenaires de la procédure, ou bien chaque opérateur économique doit-il supporter la responsabilité des corrections financières résultant des irrégularités qu’il a commises lors de la dépense des sommes issues des Fonds ESI dans le
cadre de contrats auxquels il est partie ?

4) L’article 41 et l’article 47 de la [Charte] s’opposent-ils à une pratique des autorités nationales ou à une jurisprudence nationale selon lesquelles, dans une situation telle que celle de l’affaire au principal, la commune ayant prétendument enfreint la loi sur les marchés publics dans le cadre d’une passation de marché public lié à une procédure de dépense de sommes issues des Fonds ESI ne se voit garantir ni le droit de participer à la procédure déterminant une correction financière dans un
contrat qu’elle a conclu ni le droit de pouvoir participer à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de cet acte administratif, au motif que, en tant que partenaire, elle bénéficie d’une voie de recours au civil au titre de la convention de partenariat avec le chef de file ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question dans l’affaire C‑471/23 et la première question dans l’affaire C‑477/23

38 Par sa première question dans l’affaire C‑471/23 et sa première question dans l’affaire C‑477/23, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013 doit être interprété en ce sens que peut relever de la notion de « bénéficiaire », au sens de cette disposition, un organisme qui est chargé du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations concernées, mais qui ne reçoit pas une aide d’État visée à
cet article 2, point 10, sous a), ainsi qu’un organisme qui n’a pas signé un contrat administratif de subvention en tant que « chef de file ».

39 L’article 2, point 10, de ce règlement définit, dans un premier temps, la notion de « bénéficiaire » comme étant un organisme public ou privé ou une personne physique, chargés du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations. Dans un second temps, cette disposition précise, sous a) et b), que cet organisme est, respectivement, dans le cadre des aides d’État, celui qui reçoit l’aide, sauf lorsque l’aide accordée par entreprise est inférieure à 200000 euros, auquel cas l’État
membre concerné peut décider que le bénéficiaire est l’organisme octroyant l’aide, sans préjudice des règlements no 1407/2013, no 1408/2013 et no 717/2014, et, dans le cadre d’instruments financiers relevant du titre IV de la deuxième partie du règlement no 1303/2013, celui qui met en œuvre l’instrument financier ou le fonds de fonds, selon le cas.

40 Il ressort du libellé de la première partie de la définition de cette notion prévue à cet article 2, point 10, que les États membres disposent d’une certaine marge d’appréciation pour déterminer si le bénéficiaire, en sa qualité d’organisme public ou privé ou de personne physique, est chargé uniquement du lancement des opérations concernées ou tant du lancement que de la mise en œuvre de celles-ci.

41 En ce qui concerne la seconde partie de cette disposition, celle-ci prévoit des règles relatives à la détermination du bénéficiaire dans les cas concernant des aides d’État et des instruments financiers relevant du titre IV de la deuxième partie du règlement no 1303/2013.

42 À cet égard, il y a lieu de relever que les conditions prévues à la première partie de l’article 2, point 10, de ce règlement et celles prévues à cet article 2, point 10, sous a) et b), sont séparées par la conjonction « et ». Toutefois, l’emploi de celle-ci ne signifie pas pour autant que ces conditions sont de nature cumulative. Au contraire, les dispositions figurant à cette première partie prévoient une règle générale, tandis que celles énoncées audit article 2, point 10, sous a) et b),
constituent des règles complémentaires relatives à des situations spécifiques.

43 Ainsi, il convient de constater que le libellé de l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013 n’exclut aucunement l’existence de plusieurs bénéficiaires pour une même opération.

44 À cet égard, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du considérant 66 de ce règlement, la responsabilité de la mise en œuvre des opérations menées dans le cadre des programmes incombe en premier lieu aux États membres qui sont ainsi libres de déterminer notamment l’organisme responsable du lancement des opérations concernées ou du lancement et de la mise en œuvre de celles-ci tout comme l’organisme recevant l’aide en cause.

45 Une interprétation contraire pourrait donner lieu à des situations dans lesquelles aucun organisme ne pourrait être qualifié de bénéficiaire, au sens de l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013, dans la mesure où il ne serait pas en mesure de remplir les deux conditions prévues à la première partie de cet article 2, point 10, et point 10, sous a) ou b).

46 Par ailleurs, ainsi que la Commission l’a relevé, en substance, dans ses observations écrites, s’agissant de la situation spécifique prévue à l’article 2, point 10, sous a), du règlement no 1303/2013, dès lors qu’une subvention peut en inclure différentes formes dont certaines constituent des aides d’État, une telle interprétation exigerait, pour les parties d’une opération concernées par une aide, que l’organisme recevant cette aide soit le bénéficiaire, au sens de cet article 2, point 10,
sous a), tandis que, pour les autres parties de la même opération, l’organisme responsable du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre de celle-ci soit le bénéficiaire, au sens de la première partie dudit article 2, point 10. Or, cette interprétation pourrait se heurter aux difficultés pratiques liées au caractère souvent interdépendant des subventions et à l’identification de celles d’entre elles pouvant prendre la forme d’aides d’État.

47 En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que, dans l’affaire C‑471/23, en vertu du contrat administratif conclu avec l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020 en vue de la mise en œuvre de la proposition du projet en cause dans cette affaire, la commune de Veliko Tarnovo a été désignée comme étant responsable de la mise en œuvre de ce projet, alors que la société communale a été identifiée comme personne recevant une aide d’État. À
cet égard, une partie de la subvention au titre dudit projet constituerait une aide d’État, mais la juridiction de renvoi ne précise pas si le montant de cette aide est inférieur à 200000 euros. Dans l’affaire C‑477/23, la commune de Pazardzhik, en tant que commune « chef de file », qui est responsable de la gestion du projet en cause dans cette dernière affaire, participe conjointement avec d’autres communes, y compris celle de Belovo, à la préparation et à la mise en œuvre technique et
financière de ce dernier projet.

48 À cet égard, il appartiendra à la juridiction de renvoi, qui est seule compétente pour apprécier les faits du litige au principal et pour interpréter la législation nationale concernée, de déterminer si, dans l’affaire C‑471/23, la commune de Veliko Tarnovo ainsi que, dans l’affaire C‑477/23, les communes de Pazardzhik et de Belovo sont chargées du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations concernées, au sens de l’article 2, point 10, première partie, du règlement
no 1303/2013, si l’aide reçue par la société communale dans l’affaire C‑471/23 relève de la notion d’« aides d’État », au sens de cet article 2, point 10, sous a), de ce règlement et, le cas échéant, le montant de cette aide.

49 À cet égard, il convient de rappeler, à l’instar de la Commission, qu’il ressort des considérants 5, 33 et 36 du règlement no 1370/2007 ainsi que de la jurisprudence constante de la Cour que la compensation de service public octroyée dans le respect de toutes les conditions établies dans ce règlement ne constitue pas une aide d’État.

50 Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du point 43 du présent arrêt, si, en vertu de l’article 2, point 10, sous a), du règlement no 1303/2013, dans le cadre des aides d’État, l’organisme qui reçoit l’aide doit être considéré comme étant bénéficiaire, au sens de cette disposition, rien n’exclut qu’un organisme qui remplit les conditions prévues à la première partie du même article 2, point 10, puisse être également considéré comme étant bénéficiaire, au sens de cette dernière disposition.

51 En ce qui concerne l’interrogation de la juridiction de renvoi, dans l’affaire C‑477/23, sur le point de savoir si seul un organisme public ayant signé un contrat administratif de subvention en tant que « chef de file » doit être considéré comme étant bénéficiaire de la subvention concernée, il convient de constater que l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013 ne prévoit pas de catégories spécifiques de bénéficiaires potentiels.

52 Partant, dans la mesure où un organisme est chargé du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations, celui-ci peut être considéré comme étant « bénéficiaire », au sens de cette disposition, et cela indépendamment du point de savoir si un tel organisme a été désigné « chef de file ».

53 Il ressort de ce qui précède qu’il convient de répondre à la première question dans l’affaire C‑471/23 et à la première question dans l’affaire C‑477/23 que l’article 2, point 10, du règlement no 1303/2013 doit être interprété en ce sens que peut relever de la notion de « bénéficiaire », au sens de cette disposition, un organisme qui est chargé du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations concernées, mais qui ne reçoit pas une aide d’État visée à cet article 2, point 10,
sous a), ainsi qu’un organisme qui n’a pas signé un contrat administratif de subvention en tant que « chef de file ».

Sur les deuxième à cinquième questions dans l’affaire C‑471/23 ainsi que les deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑477/23

54 Par ses deuxième à cinquième questions dans l’affaire C‑471/23 ainsi que par ses deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑477/23, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, points 36 et 37, du règlement no 1303/2013 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose, d’une part, à une réglementation nationale selon laquelle une décision de correction financière pour infraction aux règles de passation des marchés publics peut être
adressée à un opérateur économique autre que celui qui a commis cette infraction et, d’autre part, à ce que la responsabilité de cette correction financière soit solidaire ou à ce que cette responsabilité puisse être répartie contractuellement entre cet opérateur économique et celui ayant commis ladite infraction ou à ce que ladite responsabilité soit assumée par ce dernier.

55 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013, constitue une irrégularité, au sens de cette disposition, toute violation du droit de l’Union ou du droit national relatif à son application résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique participant à la mise en œuvre des Fonds ESI, qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget de l’Union par l’imputation à celui-ci d’une dépense indue.

56 En outre, l’article 143, paragraphe 1, de ce règlement prévoit notamment qu’il incombe en premier lieu aux États membres de rechercher les irrégularités, de procéder aux corrections financières nécessaires et d’entamer des procédures de recouvrement. À cette fin, ainsi que le paragraphe 2 de cet article l’énonce, les États membres procèdent aux corrections financières requises en rapport avec les irrégularités individuelles ou systémiques détectées dans les opérations ou les programmes
opérationnels.

57 Toutefois, aucune disposition dudit règlement ne prévoit de règles relatives à la définition des destinataires d’un acte de correction financière.

58 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’obligation de restituer un avantage indûment perçu au moyen d’une irrégularité ne constitue pas une sanction, mais est la simple conséquence de la constatation que les conditions requises pour l’obtention de l’avantage résultant de la réglementation de l’Union n’ont pas été respectées, rendant indu l’avantage perçu (arrêt du 1er octobre 2020, Elme Messer Metalurgs, C‑743/18, EU:C:2020:767, point 64 et jurisprudence citée).

59 Il s’ensuit que la restitution d’un avantage indûment perçu au moyen d’une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013, ne doit pas nécessairement être réclamée à l’organisme ayant commis une telle irrégularité.

60 En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que, dans l’affaire C‑471/23, la commune de Veliko Tarnovo a signé le contrat administratif de subvention concerné avec l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020 et était le destinataire de la décision de correction financière du 11 mai 2022, nonobstant le fait que la société communale a prétendument commis l’irrégularité en cause. Dans l’affaire C‑477/23, les communes concernées, y compris
celles de Belovo, ayant prétendument commis l’irrégularité en cause, et de Pazardzhik, en tant que « commune chef de file », ont toutes signé le contrat administratif de subvention concerné et cette dernière commune était le destinataire de la décision de correction financière du 21 mars 2022.

61 Or, force est de constater que, ainsi qu’il ressort du point 59 du présent arrêt, des organismes de droit public tels que les communes en cause dans les affaires au principal peuvent être destinataires d’un acte de correction financière, et cela nonobstant le fait que ceux-ci n’ont pas commis d’irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013.

62 En ce qui concerne la question de la responsabilité des corrections financières découlant de la commission d’infractions aux règles de passation des marchés publics dans le cadre de l’utilisation des Fonds ESI, il convient de rappeler que les litiges relatifs à la récupération de montants indûment versés en vertu du droit de l’Union doivent, en l’absence de dispositions de l’Union, être tranchés par les juridictions nationales, en application de leur droit national, sous réserve des limites
qu’impose le droit de l’Union (arrêt du 17 novembre 2022, Avicarvil Farms, C‑443/21, EU:C:2022:899, point 37 et jurisprudence citée).

63 Ainsi, en l’absence de disposition concernant cette responsabilité dans le règlement no 1303/2013, celle-ci est déterminée par le droit national et les engagements contractuels des participants à une opération donnée.

64 Partant, et en fonction du contenu de ces engagements contractuels, bien que chaque opérateur économique concerné puisse, à l’égard de l’autorité nationale compétente, être tenu solidairement responsable pour une même opération, une telle responsabilité financière peut être également répartie entre les opérateurs économiques concernés ou assumée par le seul opérateur économique ayant commis l’irrégularité en cause.

65 Toutefois, la Cour a également jugé que le principe de sécurité juridique exige, d’une part, que les règles de droit soient claires et précises et, d’autre part, que leur application soit prévisible pour les justiciables, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir des conséquences défavorables. Ce principe requiert notamment qu’une réglementation permette aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’elle leur impose et que ces derniers puissent connaître sans ambiguïté
leurs droits et leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence [arrêt du 4 octobre 2024, Lituanie e.a./Parlement et Conseil (Paquet mobilité), C‑541/20 à C‑555/20, EU:C:2024:818, point 158 ainsi que jurisprudence citée].

66 Par ailleurs, le principe de sécurité juridique s’impose avec une rigueur particulière en présence d’une réglementation susceptible de comporter des conséquences financières (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2021, Banco de Portugal e.a., C‑504/19, EU:C:2021:335, point 52 ainsi que jurisprudence citée).

67 En l’occurrence, il ressort des décisions de renvoi que, dans l’affaire C‑471/23, la commune de Veliko Tarnovo assume pour son propre compte tous les risques, y compris, notamment, les corrections financières imputées sur la subvention du budget du projet en cause, tandis que la société communale ne paraît pas avoir une telle responsabilité financière envers l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020. En revanche, dans l’affaire C‑477/23, les communes
concernées participent ensemble notamment à la mise en œuvre financière du projet en cause et la commune de Pazardzhik, en tant que « commune chef de file », dispose du pouvoir de recevoir sur son compte bancaire des fonds visés et de les distribuer aux communes partenaires.

68 À cet égard, il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier, d’une part, quels opérateurs économiques assument la responsabilité financière envers les autorités de gestion concernées conformément au droit national et aux stipulations des contrats en cause et, d’autre part, si ces opérateurs économiques financièrement responsables étaient en mesure de savoir que, en cas d’irrégularité dans l’exécution du projet concerné, ils seraient responsables, que ce soit seuls, solidairement ou selon
d’autres modalités, de la correction financière envers ces autorités de gestion.

69 Il ressort de ce qui précède qu’il convient de répondre aux deuxième à cinquième questions dans l’affaire C‑471/23 ainsi qu’aux deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑477/23 que l’article 2, points 36 et 37, du règlement no 1303/2013 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose ni à une réglementation nationale selon laquelle une décision de correction financière pour infraction aux règles de passation des marchés publics peut être adressée à un opérateur économique autre que celui
qui a commis cette infraction, ni à ce que la responsabilité de cette correction financière soit solidaire, à ce que cette responsabilité puisse être répartie contractuellement entre cet opérateur économique et celui ayant commis ladite infraction ou à ce que ladite responsabilité soit assumée par ce dernier, sous réserve que les opérateurs économiques financièrement responsables soient en mesure de savoir que, en cas d’irrégularité dans l’exécution du projet en cause, ils seraient ainsi
responsables de ladite correction financière envers l’autorité de gestion concernée.

Sur la sixième question dans l’affaire C‑471/23 et la quatrième question dans l’affaire C‑477/23

70 Par sa sixième question dans l’affaire C‑471/23 ainsi que par sa quatrième question dans l’affaire C‑477/23, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 41 et 47 de la Charte doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une pratique nationale selon laquelle un opérateur économique qui a commis une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013, ayant donné lieu à une correction financière, n’a le droit
de participer ni à la procédure déterminant cette correction financière, ni à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de celle-ci, au motif que cet opérateur économique dispose d’une voie de recours civil au titre d’une convention de partenariat.

71 À titre liminaire, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du considérant 65 de ce règlement, les États membres devraient prendre des mesures adéquates pour garantir la bonne mise en place et le bon fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle, de manière à pouvoir donner l’assurance que les Fonds ESI sont utilisés de manière légale et régulière, et que, conformément à l’article 143, paragraphe 1, dudit règlement, il incombe en premier lieu aux États membres notamment de
rechercher les irrégularités et de procéder aux corrections financières nécessaires.

72 En adoptant de telles mesures de mise en œuvre du droit de l’Union, les États membres sont tenus de respecter les principes généraux de ce droit ainsi que les dispositions de la Charte [arrêt du 30 janvier 2024, Agentsia « Patna infrastruktura » (Financement européen d’infrastructures routières), C‑471/22, EU:C:2024:99, point 40 et jurisprudence citée].

73 Dès lors que, dans ce contexte, la juridiction de renvoi se réfère, en particulier, à l’article 41 de la Charte, relatif au droit à une bonne administration, il importe de souligner que cet article s’adresse aux institutions, aux organes et aux organismes de l’Union et non aux organes ou aux entités des États membres, si bien qu’un particulier ne peut invoquer ledit article à l’égard des autorités nationales. Toutefois, dès lors qu’un État membre met en œuvre le droit de l’Union, les exigences
découlant du principe de bonne administration, en tant que principe général du droit de l’Union, notamment le droit de toute personne de voir ses affaires traitées impartialement et dans un délai raisonnable, trouvent à s’appliquer dans le cadre de la procédure conduite par l’autorité nationale compétente [arrêt du 30 janvier 2024, Agentsia  Patna infrastruktura  (Financement européen d’infrastructures routières), C‑471/22, EU:C:2024:99, point 41 et jurisprudence citée].

74 Dans la mesure où cette juridiction se réfère également au droit de participer à la procédure, il y a lieu de préciser qu’un tel droit, en ce qu’il permet d’exercer le droit d’être entendu, fait partie intégrante des droits de la défense, dont le respect constitue un principe général du droit de l’Union. Le droit d’être entendu garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de
toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts, y compris lorsqu’une telle formalité n’est pas prévue par la réglementation applicable. La règle selon laquelle le destinataire d’une décision faisant grief doit être mis en mesure de faire valoir ses observations avant que celle-ci ne soit prise a pour but de permettre à l’autorité compétente de tenir utilement compte de l’ensemble des éléments pertinents [arrêt du 30 janvier 2024, Agentsia  Patna infrastruktura 
(Financement européen d’infrastructures routières), C‑471/22, EU:C:2024:99, point 42 et jurisprudence citée].

75 Cette règle est applicable à une procédure administrative de détermination d’une correction financière, menée par les autorités nationales en raison de la commission d’une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013.

76 Par ailleurs, le droit à une protection juridictionnelle effective garanti à l’article 47 de la Charte est constitué de divers éléments, parmi lesquels figurent les droits de la défense, le principe d’égalité des armes, le droit d’accès aux tribunaux ainsi que le droit de se faire conseiller, défendre et représenter [arrêt du 30 janvier 2024, Agentsia  Patna infrastruktura  (Financement européen d’infrastructures routières), C‑471/22, EU:C:2024:99, point 46 et jurisprudence citée].

77 En l’occurrence, ainsi qu’il a été relevé au point 67 du présent arrêt, et sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, dans l’affaire C‑471/23, la société communale ayant prétendument commis l’irrégularité n’avait pas de relation contractuelle avec l’autorité de gestion du programme opérationnel « Régions en développement » 2014-2020 et n’apparaît pas être financièrement responsable, envers cette autorité, de la mise en œuvre du projet en cause. En ce qui concerne l’affaire
C‑477/23, cette juridiction n’indique pas laquelle des communes concernées assume une telle responsabilité financière.

78 À cet égard, il y a lieu de relever que, dans la mesure où ladite juridiction parvient à la conclusion selon laquelle l’opérateur économique ayant commis l’irrégularité n’est pas financièrement responsable, envers l’autorité de gestion concernée, de la mise en œuvre du projet en cause, les principes généraux du droit de l’Union de bonne administration et du respect des droits de la défense ainsi que l’article 47 de la Charte ne s’opposent pas à ce que cet opérateur économique n’ait le droit de
participer ni à la procédure déterminant la correction financière, ni à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de celle-ci.

79 Dans un tel cas de figure, dans lequel une décision de correction financière affecterait directement les intérêts non pas dudit opérateur économique, mais de celui qui est financièrement responsable, envers l’autorité de gestion concernée, de la mise en œuvre de ce projet, c’est ce dernier opérateur qui doit se voir accorder le droit de participer à la procédure de détermination de cette correction financière et à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de celle-ci.

80 En revanche, dans la mesure où la juridiction de renvoi constate que l’opérateur économique ayant commis l’irrégularité est financièrement responsable, envers l’autorité de gestion concernée, de la mise en œuvre du projet en cause et que ses intérêts sont donc directement affectés par la décision de correction financière résultant de la constatation de cette irrégularité, les principes généraux du droit de l’Union de bonne administration et du respect des droits de la défense ainsi que
l’article 47 de la Charte s’opposent à ce que cet opérateur économique ne puisse ni faire valoir son point de vue dans la procédure de détermination de cette correction financière ni avoir accès à un tribunal pour contester celle-ci.

81 À cet égard, la circonstance évoquée par cette juridiction selon laquelle ledit opérateur économique supporte une responsabilité civile récursoire et peut disposer de droits dans une procédure civile à part à l’égard du bénéficiaire chef de file en vertu de la convention de partenariat avec le partenaire chef de file n’apparaît pas pertinente, dans la mesure où une telle voie de recours de nature civile ne permet pas au même opérateur économique de contester l’adoption même d’une telle décision
de correction financière lui faisant grief.

82 Il ressort de ce qui précède qu’il convient de répondre à la sixième question dans l’affaire C‑471/23 ainsi qu’à la quatrième question dans l’affaire C‑477/23 que les principes généraux du droit de l’Union de bonne administration et du respect des droits de la défense ainsi que l’article 47 de la Charte doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une pratique nationale selon laquelle un opérateur économique qui a commis une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement
no 1303/2013, ayant donné lieu à une correction financière, n’a le droit de participer ni à la procédure déterminant cette correction financière, ni à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de celle-ci, au motif que cet opérateur économique dispose d’une voie de recours civil au titre d’une convention de partenariat, dans la mesure où ledit opérateur économique est financièrement responsable, envers l’autorité de gestion concernée, de la mise en œuvre du projet en cause.

Sur les dépens

83 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

  1) L’article 2, point 10, du règlement (UE) no 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et
au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil, tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018,

doit être interprété en ce sens que :

peut relever de la notion de « bénéficiaire », au sens de cette disposition, un organisme qui est chargé du lancement ou du lancement et de la mise en œuvre des opérations concernées, mais qui ne reçoit pas une aide d’État visée à cet article 2, point 10, sous a), ainsi qu’un organisme qui n’a pas signé un contrat administratif de subvention en tant que « chef de file ».

  2) L’article 2, points 36 et 37, du règlement no 1303/2013, tel que modifié par le règlement 2018/1046,

doit être interprété en ce sens que :

il ne s’oppose ni à une réglementation nationale selon laquelle une décision de correction financière pour infraction aux règles de passation des marchés publics peut être adressée à un opérateur économique autre que celui qui a commis cette infraction, ni à ce que la responsabilité de cette correction financière soit solidaire, à ce que cette responsabilité puisse être répartie contractuellement entre cet opérateur économique et celui ayant commis ladite infraction ou à ce que ladite
responsabilité soit assumée par ce dernier, sous réserve que les opérateurs économiques financièrement responsables soient en mesure de savoir que, en cas d’irrégularité dans l’exécution du projet en cause, ils seraient ainsi responsables de la correction financière envers l’autorité de gestion concernée.

  3) Les principes généraux du droit de l’Union de bonne administration et du respect des droits de la défense ainsi que l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

doivent être interprétés en ce sens que :

ils s’opposent à une pratique nationale selon laquelle un opérateur économique qui a commis une irrégularité, au sens de l’article 2, point 36, du règlement no 1303/2013, tel que modifié par le règlement 2018/1046, ayant donné lieu à une correction financière, n’a le droit de participer ni à la procédure déterminant cette correction financière, ni à la procédure juridictionnelle tendant à l’annulation de celle-ci, au motif que cet opérateur économique dispose d’une voie de recours civil au
titre d’une convention de partenariat, dans la mesure où ledit opérateur économique est financièrement responsable, envers l’autorité de gestion concernée, de la mise en œuvre du projet en cause.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le bulgare.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : C-471/23
Date de la décision : 06/03/2025
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demandes de décision préjudicielle, introduites par le Varhoven administrativen sad.

Renvoi préjudiciel – Cohésion économique, sociale et territoriale – Ressources propres de l’Union européenne – Protection des intérêts financiers de l’Union – Règlement (UE) no 1303/2013 – Article 2, point 10 – Notion de “bénéficiaire” – Correction financière pour violation d’une réglementation nationale en matière de marchés publics – Destinataire d’une décision de correction financière – Détermination de la responsabilité relative à cette correction et répartition contractuelle de cette responsabilité entre le bénéficiaire d’une aide d’État et le gestionnaire de celle-ci – Participation aux procédures administrative et juridictionnelle relatives à cette décision – Articles 41 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Cohésion économique, sociale et territoriale

Fonds de cohésion


Parties
Demandeurs : Obshtina Veliko Tarnovo et Obshtina Belovo
Défendeurs : Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Regioni v rastezh » 2014-2020 et Rakovoditel na Upravlyavashtia organ na Operativna programa « Okolna sreda » 2014-2020.

Composition du Tribunal
Avocat général : Ćapeta
Rapporteur ?: Gavalec

Origine de la décision
Date de l'import : 11/03/2025
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2025:155

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