ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
12 décembre 2024 ( *1 )
« Pourvoi – Fonction publique – Statut des fonctionnaires de l’Union européenne et régime applicable aux autres agents de l’Union européenne – Agents temporaires – Procédure disciplinaire – Enquête administrative – Notion de “plagiat” – Désignation, par l’autorité investie du pouvoir de nomination, d’un enquêteur avec lequel elle entretient une relation d’affaires – Conflit d’intérêt – Article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Impartialité objective –
Article 17 bis – Liberté d’expression du fonctionnaire – Articles 11, 12 et 21 – Respect des principes de loyauté et d’impartialité »
Dans l’affaire C‑680/22 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 novembre 2022,
DD, représenté par Me N. Lorenz, Rechtsanwältin,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant :
Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA), représentée initialement par M. M. O’Flaherty, puis par Mme S. Rautio, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, Rechtsanwalt,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. I. Jarukaitis, président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la cinquième chambre, MM. E. Regan et Z. Csehi (rapporteur), juges,
avocat général : M. P. Pikamäe,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 décembre 2023,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, DD demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 7 septembre 2022, DD/FRA (T‑470/20, ci-après l’ arrêt attaqué , EU:T:2022:511), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) du 12 novembre 2019 par laquelle celle-ci lui a infligé une sanction disciplinaire de révocation (ci-après la « décision de révocation ») et de la décision du 15 avril 2020
portant rejet de la réclamation contre la décision de révocation (ci-après la « décision de rejet de la réclamation ») et, d’autre part, à la réparation du préjudice matériel et moral qu’il aurait prétendument subi.
Le cadre juridique
2 L’article 11, premier alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») dispose :
« Le fonctionnaire doit s’acquitter de ses fonctions et régler sa conduite en ayant uniquement en vue les intérêts de l’Union [européenne]. Il ne sollicite ni accepte aucune instruction d’aucun gouvernement, autorité, organisation ou personne extérieure à son institution. Il remplit les fonctions qui lui sont confiées de manière objective et impartiale et dans le respect de son devoir de loyauté envers l’Union. »
3 L’article 12 du statut prévoit :
« Le fonctionnaire s’abstient de tout acte et de tout comportement qui puissent porter atteinte à la dignité de sa fonction. »
4 L’article 17 bis du statut énonce, à son paragraphe 1 :
« Le fonctionnaire a droit à la liberté d’expression, dans le strict respect des principes de loyauté et d’impartialité. »
5 Aux termes de l’article 21 du statut :
« Le fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est tenu d’assister et de conseiller ses supérieurs ; il est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées.
Le fonctionnaire chargé d’assurer la marche d’un service est responsable à l’égard de ses chefs de l’autorité qui lui a été conférée et de l’exécution des ordres qu’il a donnés. La responsabilité propre de ses subordonnés ne le dégage d’aucune des responsabilités qui lui incombent. »
6 Le titre VI du statut est intitulé « Du régime disciplinaire ». Sous ce titre VI figure l’article 86 du statut, aux termes duquel :
« 1. Tout manquement aux obligations auxquelles le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire est tenu, au titre du présent statut, commis volontairement ou par négligence, l’expose à une sanction disciplinaire.
2. L’autorité investie du pouvoir de nomination [(ci-après l’“AIPN”)] ou l’Office européen de lutte antifraude [(OLAF)] peuvent ouvrir une enquête administrative, en vue de vérifier l’existence d’un manquement au sens du paragraphe 1, lorsque des éléments de preuve laissant présumer l’existence d’un manquement ont été portés à leur connaissance.
3. Les règles, procédures et sanctions disciplinaires, ainsi que les règles et procédures régissant les enquêtes administratives, sont établies à l’annexe IX. »
7 Aux termes de l’article 1er de l’annexe IX du statut, intitulée « Procédure disciplinaire » :
« 1. Dès qu’une enquête de l’[OLAF] révèle la possibilité qu’un fonctionnaire ou un ancien fonctionnaire d’une institution est personnellement impliqué dans une affaire, ce dernier en est tenu informé pour autant que cette information ne nuise pas au déroulement de l’enquête. En toute circonstance, des conclusions se rapportant nommément à un fonctionnaire ne peuvent être tirées à l’issue de l’enquête sans que ce dernier ait été en mesure de présenter ses observations sur les faits le
concernant. Les conclusions font état de ces observations.
2. Dans les cas nécessitant le maintien d’un secret absolu aux fins de l’enquête et impliquant le recours à des procédures d’enquête relevant de la compétence d’une autorité judiciaire nationale, l’exécution de l’obligation d’inviter le fonctionnaire à présenter ses observations peut être différée en accord avec l’[AIPN]. Dans ce cas, aucune procédure disciplinaire ne peut être ouverte avant que le fonctionnaire n’ait été en mesure de présenter ses observations.
3. Si, à la suite d’une enquête de l’OLAF, aucune charge ne peut être retenue contre un fonctionnaire faisant l’objet d’allégations, l’enquête le concernant est classée sans suite par décision du directeur de l’[OLAF], qui en informe par écrit le fonctionnaire et son institution. Le fonctionnaire peut demander que cette décision figure dans son dossier personnel. »
8 L’article 2 de l’annexe IX du statut dispose :
« 1. Les règles définies à l’article 1er de la présente annexe s’appliquent mutatis mutandis aux autres enquêtes administratives effectuées par l’[AIPN].
2. L’[AIPN] informe l’intéressé de la fin de l’enquête et lui communique les conclusions du rapport d’enquête et, sur sa demande et sous réserve de la protection des intérêts légitimes de tierces parties, tous les documents qui sont en rapport direct avec les allégations formulées à son encontre.
[...] »
9 L’article 3 de l’annexe IX du statut est rédigé en ces termes :
« Sur la base du rapport d’enquête, après avoir communiqué au fonctionnaire concerné toutes les pièces du dossier et après l’avoir entendu, l’[AIPN] peut :
a) décider qu’aucune charge ne peut être retenue contre le fonctionnaire concerné, auquel cas ce dernier en est alors informé par écrit ; ou
b) décider, même en cas de manquement ou de manquement présumé aux obligations, qu’il convient de n’adopter aucune sanction disciplinaire et, le cas échéant, adresser au fonctionnaire une mise en garde ; ou
c) en cas de manquement aux obligations, conformément à l’article 86 du statut,
i) décider de l’ouverture de la procédure disciplinaire prévue à la section 4 de la présente annexe, ou
ii) décider de l’ouverture d’une procédure disciplinaire devant le conseil de discipline. »
10 L’article 22 de l’annexe IX du statut dispose :
« 1. Après avoir entendu le fonctionnaire, l’[AIPN] prend sa décision conformément aux articles 9 et 10 de la présente annexe, dans un délai de deux mois à compter de la réception de l’avis du conseil. Cette décision doit être motivée.
2. Si l’[AIPN] décide de classer l’affaire sans prononcer de sanction disciplinaire, elle en informe le fonctionnaire concerné par écrit et sans délai. Le fonctionnaire concerné peut demander que cette décision figure dans son dossier individuel. »
Les antécédents du litige
11 Les antécédents du litige sont exposés aux points 2 à 36 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :
« 2 Le requérant a été recruté le 1er août 2000 par l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’“AHCC”) d’un organisme de l’Union européenne, l’Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes (EUMC), devenu la FRA, en qualité d’agent temporaire au sens de l’article 2, sous a), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci‑après le “RAA”). Engagé initialement sous contrat à durée déterminée, il a bénéficié d’un contrat à durée indéterminée à
partir du 16 décembre 2006.
3 Par lettre du 13 juin 2013, le directeur de la FRA alors en fonction a informé le requérant de sa décision de résilier son contrat.
4 Par l’arrêt du 8 octobre 2015, DD/FRA (F‑106/13 et F‑25/14, [ci‑après l’arrêt d’annulation,] EU:F:2015:118), le Tribunal de la fonction publique a annulé la décision de résiliation au motif que, préalablement à l’adoption de celle-ci, le directeur de la FRA n’avait pas expressément informé le requérant que, sur la base de divers incidents, il envisageait de résilier son contrat et ne l’avait pas invité à formuler d’observation à ce sujet.
5 Le 29 février 2016, la FRA, dirigée par un nouveau directeur, a réintégré le requérant dans ses fonctions, dans le cadre de l’exécution de l’[arrêt d’annulation].
6 Par courriel du même jour, le requérant s’est vu demander par son chef de département de préparer un exposé interne de 15 à 20 pages, au plus tard pour le 18 mars 2016, sur les normes relatives aux droits de l’homme et la jurisprudence liée à la liberté de pensée, de conscience et de religion, au niveau international et au niveau de l’Union.
7 Par courriel du 18 mars 2016, le requérant a envoyé à son chef de département un document de 31 pages qualifié de “toute première ébauche de l’exposé sur la liberté de religion”, intitulé “Note d’informations interne sur d’éventuels projets pertinents de la FRA concernant la liberté de pensée” (ci-après l’“exposé litigieux”).
8 Au début du mois d’avril 2016, l’exposé litigieux a été enregistré dans le système de gestion de documents (ci-après le “SGD”) de la FRA, auquel tous les collègues du requérant avaient accès.
9 Le 7 avril 2016, le chef de département du requérant a informé ce dernier qu’il avait communiqué l’exposé litigieux au directeur de la FRA et l’a invité à envoyer à l’un de ses collègues le lien vers ce document enregistré dans le SGD, pour qu’il puisse prendre connaissance dudit document et de l’analyse qu’il comportait.
10 Par courriel du 16 octobre 2017, le chef de département du requérant lui a demandé de revoir l’exposé litigieux et d’approfondir l’analyse consacrée à la liberté de religion du point de vue de l’Union, compte tenu d’une éventuelle publication.
11 Par ailleurs, le 7 novembre 2017, le requérant a introduit un recours interne contre son rapport d’évaluation pour l’année 2016 (ci-après le “rapport d’évaluation 2016”), en faisant valoir que l’appréciation de son efficacité, de sa capacité et de sa conduite aurait dû être “très bonne”, au lieu de “satisfaisante”. Dans ce cadre, en ce qui concerne l’exposé litigieux, d’une part, le requérant a fait valoir qu’il était regrettable que, alors qu’au cours du dialogue d’évaluation, son chef de
département, en sa qualité d’évaluateur, avait confirmé que cet exposé était très utile et atteignait son objectif, il ait critiqué celui-ci dans ses observations ultérieures. D’autre part, le requérant a avancé que les commentaires de l’évaluateur, sur le fait que l’exposé litigieux était majoritairement composé de références jurisprudentielles, étaient imprécis, étant donné que l’exposé contenait également une analyse légale, conceptuelle et politique.
12 Le 1er décembre 2017, le requérant a transmis une version révisée de l’exposé litigieux.
13 Le 5 décembre 2017, le directeur de la FRA a rejeté le recours interne introduit contre le rapport d’évaluation 2016. À cette occasion, le directeur de la FRA a indiqué qu’il avait appris que l’exposé litigieux était, pour une très large part, une copie directe de plusieurs sources, notamment de documents du Conseil de l’Europe, lesquelles n’étaient pas référencées dans ledit exposé, et que le requérant n’avait pas informé son chef de département de cet état de fait, lui faisant croire que cet
exposé était le résultat de son propre travail.
14 Le 9 février 2018, le directeur de la FRA a consulté l’[OLAF] quant à la possible ouverture d’une enquête administrative au sujet du comportement du requérant.
15 Le 20 mars 2018, l’OLAF a décidé de ne pas ouvrir une enquête, en l’absence “d’éléments suffisants indiquant l’existence d’une fraude, d’une corruption ou d’autres activités illégales”.
16 Le 23 mars 2018, le directeur de la FRA a ouvert une enquête administrative concernant le comportement du requérant relatif à l’exposé litigieux (ci-après la “décision d’ouverture de l’enquête”). L’enquêteur désigné [(ci-après l’“enquêteur”)] a déclaré une absence de conflit d’intérêts. L’objectif de ladite enquête était de déterminer, premièrement, dans quelle mesure précise l’exposé litigieux avait été présenté par le requérant comme étant le résultat de son propre travail, et reprenait des
extraits de documents externes à la FRA qui n’étaient ni cités ni référencés, deuxièmement, quels étaient, parmi ces documents, ceux qui étaient éventuellement couverts par des droits d’auteur, troisièmement, s’il existait d’autres documents rédigés par le requérant dans le cadre de son travail au sein de la FRA, dans le domaine de la liberté de pensée, de conscience et de religion, qui remplissaient les deux conditions précitées et, quatrièmement, le cas échéant, si le [statut] ou le droit de
la propriété intellectuelle avaient été violés.
17 Les 23 et 24 avril 2018, l’enquêteur a interrogé sept témoins et le requérant, qui a remis à l’enquêteur des observations écrites.
18 Le 17 juin 2018, l’enquêteur a transmis au requérant ses conclusions préliminaires.
19 Le 2 juillet 2018, le requérant a formulé des observations sur les conclusions préliminaires de l’enquêteur.
20 Le 23 juillet 2018, l’enquêteur a remis son rapport définitif (ci‑après le “rapport d’enquête”), qui concluait à un manquement du requérant aux articles 11, 12 et 21 du statut ainsi qu’à ses devoirs de loyauté et de coopération. L’enquêteur a relevé, en substance, premièrement, que le copiage et l’usage du travail d’autrui sans le référencer et en le faisant passer pour sien constituait une forme de tromperie, de malhonnêteté et d’appropriation frauduleuse contraire non seulement à
l’article 12 du statut, mais aussi à presque toute norme morale, deuxièmement, que le requérant avait délibérément trompé les membres de son département et avait caché une information importante, ce qui violait les articles 11 et 12 du statut, troisièmement, que le fait que le requérant avait pris trois semaines pour rédiger l’exposé litigieux, étant majoritairement une copie, constituait une autre infraction, relativement mineure, à l’article 12 du statut, quatrièmement, que la mention de
l’exposé litigieux comme un accomplissement, dans le cadre de son évaluation pour l’année 2016, était trompeuse et représentait également une violation de l’article 12 du statut, cinquièmement, que l’usage de matériel protégé par des droits d’auteur sans en informer l’auteur, à savoir le Conseil de l’Europe, violait encore l’article 12 du statut, sixièmement, que le requérant avait agi de façon trompeuse et/ou malhonnête et, en conséquence, ne s’était pas comporté en ayant uniquement en vue
les intérêts de l’Union, en violation de l’article 11 du statut et du devoir de loyauté, et, septièmement, que l’usage du travail d’autrui sans le référencer et sans en informer ses supérieurs violait l’article 21 du statut et le devoir de coopération du requérant.
21 Le 15 octobre 2018, le requérant a été entendu par le directeur de la FRA au titre de l’article 3 de l’annexe IX du statut [...] et a transmis ultérieurement une déclaration écrite, datée du même jour.
22 Par une décision du 23 octobre 2018, le directeur de la FRA a ouvert une procédure disciplinaire devant le conseil de discipline contre le requérant (ci-après la “décision d’ouverture de la procédure disciplinaire”). Cette décision a été notifiée au requérant le 7 novembre 2018.
23 Le 26 février 2019, le conseil de discipline a été formé par décision du directeur de la FRA.
24 Le 27 février 2019, le directeur de la FRA a établi le rapport destiné au conseil de discipline, en application de l’article 12 de l’annexe IX du statut (ci-après le “rapport du directeur de la FRA”).
25 Le 21 mars 2019, le requérant a soumis son mémoire en défense au président du conseil de discipline.
26 Le 22 mars 2019, l’audition du requérant devant le conseil de discipline a eu lieu.
27 Le 7 mai 2019, le conseil de discipline a émis un avis motivé (ci‑après l’“avis du conseil de discipline”), conformément à l’article 18 de l’annexe IX du statut, estimant fondées les accusations de comportement contraire aux obligations du requérant au titre des articles 11, 12 et 21 du statut, à savoir la présentation d’écrits d’autrui comme son propre travail, sans en mentionner les sources. Le conseil de discipline a recommandé une rétrogradation du requérant de deux grades, soit au grade
AD 7. Le conseil de discipline n’a pas fait état de circonstances atténuantes.
28 Le conseil de discipline a relevé, en substance, premièrement, que le requérant avait agi en ayant en vue non pas uniquement les intérêts de l’Union, mais ses propres intérêts en demandant crédit pour un texte dont il n’était pas l’auteur, deuxièmement, qu’il n’avait pas adopté le comportement responsable attendu de la part d’un agent de la FRA, troisièmement, que ses actions auraient pu causer un dommage à la réputation de la FRA et, quatrièmement, qu’il n’avait pas assisté ses supérieurs,
voire avait agi à l’encontre de ceux-ci, en présentant le travail d’autrui comme étant le sien.
29 Ainsi, le conseil de discipline a constaté que le requérant avait violé, premièrement, l’article 11 du statut, en présentant délibérément un travail copié comme son propre travail, deuxièmement, l’article 12 du statut, pour autant que présenter le travail d’autrui comme son propre travail aurait eu une influence fâcheuse sur la réputation du requérant, et, troisièmement, l’article 21 du statut, dans la mesure où le requérant n’avait pas exécuté les tâches qui lui avaient été confiées, mais
avait présenté le travail d’autrui comme étant le sien et où il existait un risque que l’exposé litigieux, ou des passages de celui-ci, fussent intégrés dans un ou plusieurs documents publiés par la FRA, ce qui aurait pu nuire à la réputation de celle-ci.
30 Le 11 juillet 2019, le requérant a été entendu par le directeur de la FRA, conformément à l’article 22 de l’annexe IX du statut (ci‑après l’“audition du 11 juillet 2019”), et a présenté sa déclaration écrite.
31 Le 11 octobre 2019, le requérant a reçu une note du directeur, datée du 10 octobre 2019, exprimant son intention de lui infliger la sanction de révocation et l’invitant à communiquer ses observations à ce sujet par écrit sous dix jours ouvrés.
32 Le 24 octobre 2019, le requérant a transmis ses observations au directeur de la FRA.
33 Le 12 novembre 2019, le directeur de la FRA, en tant qu’AHCC, a adopté la décision de révocation, prenant effet le 15 novembre 2019. Par cette décision, le directeur de la FRA a entériné les conclusions du conseil de discipline, sauf en ce qui concernait la sanction proposée, ayant estimé que la rétrogradation ne reflétait pas suffisamment la gravité des violations des obligations professionnelles prévues aux articles 11, 12 et 21 du statut. Le directeur de la FRA a relevé, en particulier,
d’une part, que le conseil de discipline n’avait pas fait état de circonstances atténuantes, mais avait mentionné des circonstances aggravantes, à savoir le fait que la conduite du requérant était délibérée, qu’il avait essayé d’obtenir personnellement crédit pour un travail constituant un plagiat, qu’il n’avait pas reconnu la gravité de sa conduite et qu’il y avait eu un risque réel d’atteinte à la réputation de la FRA et, d’autre part, que le lien de confiance avait été gravement remis en
question.
34 En outre, le directeur de la FRA a considéré que le conseil de discipline n’avait pas suffisamment tenu compte de la gravité des violations du statut en ce qui concernait, d’une part, le comportement du requérant, que le directeur de la FRA a qualifié de “violation de la plus haute gravité” et, d’autre part, les effets d’un tel comportement sur la réputation de la FRA, puisque, selon lui, le requérant, agissant seul, avait délibérément créé un risque grave d’atteinte à cette réputation pendant
un laps de temps considérable. Le directeur de la FRA a approuvé la constatation du conseil de discipline selon laquelle le lien de confiance avait été gravement remis en question, tout en considérant que ledit lien avait été irrévocablement rompu et, en conséquence, que la rétrogradation n’était pas une sanction adéquate.
35 Le 16 décembre 2019, le requérant a introduit une réclamation contre la décision de révocation.
36 Le 15 avril 2020, le directeur de la FRA a rendu la décision de rejet de la réclamation. »
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
12 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 juillet 2020, le requérant a introduit le recours visé au point 1 du présent arrêt.
13 Par son recours, le requérant demandait au Tribunal, premièrement, d’annuler la décision de révocation, deuxièmement, le cas échéant, d’annuler la décision de rejet de la réclamation, troisièmement, de réparer les préjudices matériel et moral qu’il avait subis et, quatrièmement, de condamner la FRA aux dépens. À l’appui de ses deux premiers chefs de conclusions, le requérant invoquait huit moyens à titre principal et un moyen à titre subsidiaire, tirés :
– le premier, de la violation du principe de sécurité juridique, d’erreurs de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, du Bundesgesetz über das Urheberrecht an Werken der Literatur und der Kunst und über verwandte Schutzrechte (Urheberrechtsgesetz) (loi sur le droit d’auteur sur les œuvres littéraires et artistiques et sur les droits voisins), du 9 avril 1936 (BGBl. 1936, 111/1936), et de la violation de l’article 11 de la charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), en ce que, premièrement, le plagiat a été considéré comme constituant une infraction au statut, deuxièmement, les textes copiés n’étaient pas protégés par la loi sur le droit d’auteur sur les œuvres littéraires et artistiques et sur les droits voisins et, troisièmement, il a été porté atteinte à sa liberté d’expression ;
– le deuxième, d’une violation du devoir de diligence ou du devoir de sollicitude par l’enquêteur et par le directeur de la FRA lors de l’ouverture de la procédure disciplinaire, par la décision de révocation et par le conseil de discipline ainsi que d’une violation de la présomption d’innocence et de l’exigence d’un niveau de preuve élevé dans les enquêtes administratives et dans les procédures disciplinaires ;
– le troisième, de l’absence de neutralité, d’impartialité et d’objectivité du directeur de la FRA en tant qu’AHCC, de la violation de la présomption d’innocence et d’un abus de pouvoir ;
– le quatrième, d’erreurs manifestes d’appréciation concernant la violation par le requérant des articles 11, 12 et 21 du statut ;
– le cinquième, de l’ouverture irrégulière de l’enquête administrative en l’absence d’un commencement de preuve et de l’ouverture irrégulière de la procédure disciplinaire ;
– le sixième, du non-respect du cadre de l’enquête par l’enquêteur et de la violation de l’article 4, paragraphe 2, et de l’article 7, paragraphe 6, de la décision 2013/01 du conseil d’administration de la FRA, du 22 mai 2013, sur la conduite des enquêtes administratives et des procédures disciplinaires, de l’article 4, paragraphe 1, sous a) à d), et de l’article 5, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2018, relatif à la protection
des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et à la libre circulation de ces données, et abrogeant le règlement (CE) no 45/2001 et la décision no 1247/2002/CE (JO 2018, L 295, p. 39), et, antérieurement à l’applicabilité du règlement 2018/1725, de l’article 4, paragraphe 1, sous a) à d), et de l’article 5, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du
18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1), et de la violation des effets d’un arrêt d’annulation ;
– le septième, du défaut d’impartialité, de neutralité et d’objectivité de l’enquêteur ;
– le huitième, de la violation des droits de la défense, en particulier du droit d’être entendu, de la violation des articles 1er et 2 ainsi que de l’article 12 de l’annexe IX du statut, et
– le neuvième, présenté à titre subsidiaire, de la violation du principe de proportionnalité dans l’imposition de la sanction de la révocation au regard des faits reprochés au requérant.
14 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté dans leur intégralité les conclusions en annulation et en indemnité présentées par le requérant. Le Tribunal a également décidé qu’il n’y avait pas lieu de donner suite aux demandes de mesure d’organisation de la procédure sollicitées.
Les conclusions des parties au pourvoi
15 Le requérant demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué ;
– par conséquent, d’annuler la décision de révocation et, le cas échéant, d’annuler la décision de rejet de la réclamation ;
– de réparer les préjudices matériel et moral qu’il aurait subis, et
– de condamner la FRA aux entiers dépens.
16 La FRA demande à la Cour :
– de rejeter le pourvoi et
– de condamner le requérant aux entiers dépens.
Sur le pourvoi
Sur le premier moyen
17 Par son premier moyen, le requérant reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis, aux points 179 à 193 de l’arrêt attaqué, plusieurs erreurs de droit lors de ses appréciations concernant l’impartialité objective de l’enquêteur et de ne pas avoir fourni une motivation suffisante à cet égard. Ce moyen se divise en deux branches.
Argumentation des parties
18 Par la première branche de son premier moyen, le requérant allègue, premièrement, que le Tribunal, en considérant, aux points 179 à 185 de l’arrêt attaqué, que les éléments de preuve présentés par celui-ci n’étaient pas suffisants pour conclure à un manque d’impartialité subjective de l’enquêteur, a omis d’examiner, au regard de ces éléments de preuve, un éventuel manque d’impartialité objective dans son chef. Or, un examen des faits à la lumière du manque d’impartialité objective suffirait, même
s’il n’existe pas d’éléments permettant d’établir le manque d’impartialité subjective.
19 Deuxièmement, contrairement à ce que le Tribunal aurait jugé aux points 186 à 192 de l’arrêt attaqué, pour constater un manque d’impartialité objective, il suffirait qu’un doute légitime à cet égard existe et ne puisse pas être dissipé. Le requérant avance, en outre, que, en l’espèce, le doute quant à l’impartialité de l’enquêteur serait légitime du point de vue des tiers observateurs. Selon lui, tout doute relatif à l’indépendance ou à l’impartialité d’un consultant externe, dont il s’avère
qu’il délivre également des conseils juridiques et reçoit des paiements répétés de l’employeur, est légitime du point de vue d’un tiers observateur. Par ailleurs, les constatations figurant aux points 189 à 191 de l’arrêt attaqué confirmeraient l’existence d’un doute légitime, le Tribunal ayant, toutefois, procédé à une qualification erronée de ces faits. En outre, le Tribunal aurait commis une autre erreur de droit au point 187 de l’arrêt attaqué, dès lors qu’il aurait incombé non pas au
requérant, mais bien à la FRA de dissiper ce doute.
20 Il soutient, troisièmement, que la conclusion du Tribunal, au point 191 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les montants payés à l’enquêteur étaient justifiés par la quantité de travail qui lui avait été confié est dénuée de pertinence dans la présente affaire, dès lors qu’elle ne dissipe pas le doute légitime quant à l’existence d’un conflit d’intérêts dans le chef de l’enquêteur pour des raisons financières. Or, un conflit d’intérêts de ce type constituerait l’un des cas d’illégalité les plus
graves et, en tant que tel, tout conflit d’intérêts pour des raisons financières devrait être considéré comme étant pertinent, nonobstant le montant concerné. Par conséquent, le requérant fait valoir que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal au point 192 de l’arrêt attaqué, la jurisprudence issue de l’arrêt du 18 septembre 2012, Allgeier/FRA (F‑58/10, EU:F:2012:130), est pertinente en l’espèce.
21 Enfin, quatrièmement, le requérant fait valoir que le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve et commis une erreur manifeste d’appréciation au point 189 de l’arrêt attaqué. Il allègue à cet égard qu’il ressortait des éléments de preuve qui avaient été soumis à l’appréciation du Tribunal que le service fournit par l’enquêteur, pour lequel il a été rémunéré, consistait en fait en des conseils juridiques.
22 Par la seconde branche de son premier moyen, le requérant soutient que le Tribunal n’a pas examiné à suffisance de droit les preuves et les faits soumis à son appréciation et qu’il aurait commis une erreur de droit aux points 187 à 193 de l’arrêt attaqué en rejetant, aux points 292 à 296 de cet arrêt, les première et deuxième demandes de mesure d’organisation de la procédure du requérant.
23 La FRA fait valoir, à titre liminaire, que le pourvoi constitue, dans une large mesure, une répétition des points de vue et des arguments présentés par le requérant dans la requête et dans le mémoire en réplique en première instance. En conséquence, selon elle, plusieurs arguments prétendument juridiques, avancés dans le pourvoi, sont en réalité des tentatives de contester des faits.
24 La FRA estime que le premier moyen est en partie irrecevable et, en tout état de cause, manifestement non fondé.
Appréciation de la Cour
25 Par la seconde branche du premier moyen, qu’il convient d’analyser d’emblée, le requérant critique les points 292 à 296 de l’arrêt attaqué en ce que, par ceux-ci, le Tribunal aurait erronément refusé de faire droit aux mesures d’organisation de la procédure qu’il avait sollicitées afin de démontrer l’existence d’une prétendue absence d’impartialité de l’enquêteur et, par conséquent, n’aurait pas examiné adéquatement les éléments de preuve soumis à son appréciation. En outre, il aurait dénaturé
ces derniers aux points 187 à 193 de cet arrêt.
26 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie de la Cour, le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (arrêt du 4 mars 2021, Liaño Reig/CRU, C‑947/19 P, EU:C:2021:172, point 98 et jurisprudence citée).
27 Partant, le requérant ne saurait utilement contester, au stade du présent pourvoi, la décision du Tribunal de ne pas avoir pris les mesures d’organisation de la procédure dont il a suggéré l’adoption dans ses écritures en première instance.
28 S’agissant de la première branche du premier moyen, tirée, en substance, de l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal en excluant l’existence d’un doute légitime quant à l’impartialité objective de l’enquêteur, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les institutions, les organes et les organismes de l’Union sont tenus de respecter les droits fondamentaux garantis par le droit de l’Union, parmi lesquels figure le droit à une bonne administration, consacré à
l’article 41 de la Charte. Cet article énonce notamment que toute personne a le droit de voir ses affaires traitées de manière impartiale par ces institutions, organes et organismes de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 11 janvier 2024, Hamers/Cedefop, C‑111/22 P, EU:C:2024:5, points 44 et 45 ainsi que jurisprudence citée).
29 À cet égard, la Cour a précisé que l’exigence d’impartialité, qui s’impose aux institutions, aux organes et aux organismes de l’Union dans l’accomplissement de leurs missions, vise à garantir l’égalité de traitement qui est à la base de l’Union. Cette exigence vise, notamment, à éviter des situations de conflits d’intérêts dans le chef de fonctionnaires et d’agents agissant pour le compte de ces institutions, organes et organismes. Compte tenu de l’importance fondamentale de la garantie
d’indépendance et d’intégrité en ce qui concerne tant le fonctionnement interne que l’image extérieure des institutions, des organes et des organismes de l’Union, l’exigence d’impartialité couvre toutes circonstances que le fonctionnaire ou l’agent amené à se prononcer sur une affaire doit raisonnablement comprendre comme étant de nature à apparaître, aux yeux des tiers, comme étant susceptibles d’affecter son indépendance en la matière (arrêt du 11 janvier 2024, Hamers/Cedefop, C‑111/22 P,
EU:C:2024:5, point 46 et jurisprudence citée).
30 Cette exigence d’impartialité comporte une composante subjective, en vertu de laquelle aucun membre de l’institution concernée ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel, et une composante objective. Conformément à cette dernière composante, dont se prévaut le requérant, chaque institution, organe et organisme de l’Union doit offrir des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à un éventuel préjugé (arrêt du 14 mars 2024, D & A Pharma/Commission et EMA,
C‑291/22 P, EU:C:2024:228, point 73 et jurisprudence citée).
31 Plus particulièrement, afin de démontrer que l’organisation de la procédure administrative n’offre pas de garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à un éventuel préjugé, il n’est pas requis d’établir l’existence d’un manque d’impartialité. Il suffit qu’un doute légitime à cet égard existe et qu’il ne puisse pas être dissipé (arrêt du 11 janvier 2024, Hamers/Cedefop, C‑111/22 P, EU:C:2024:5, point 47 et jurisprudence citée).
32 Il s’ensuit qu’il ne saurait être exigé de la part des personnes dont les affaires sont traitées par une institution, un organe ou un organisme de l’Union, qu’elles apportent, à l’appui de leur argumentation selon laquelle l’exigence d’impartialité objective n’a pas été respectée lors d’une procédure administrative, la preuve d’indices concrets de partialité. En effet, l’impartialité objective s’apprécie indépendamment du comportement spécifique de la personne concernée (arrêt du 14 mars 2024, D
& A Pharma/Commission et EMA, C‑291/22 P, EU:C:2024:228, point 80).
33 Ayant, en substance, rappelé cette jurisprudence, au point 186 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé, au point 187 de cet arrêt, que le requérant n’avait pas établi que la relation existant entre la FRA et l’enquêteur était susceptible de créer un doute légitime quant à l’impartialité objective de l’enquêteur. À cet égard, le Tribunal a relevé, aux points 188 à 191 dudit arrêt, que, premièrement, il ressortait des éléments de preuve fournis par le requérant que l’enquêteur avait eu une relation
de travail non pas avec la FRA, mais avec la Commission européenne, deuxièmement, que les éléments de preuve apportés par le requérant concernant la qualité de conseiller juridique de la FRA de l’enquêteur n’étaient pas suffisants pour étayer un doute légitime quant à l’existence d’un éventuel préjugé, en particulier en raison du fait que le rôle de l’enquêteur avait été limité à celui d’un consultant externe, et, troisièmement, s’agissant des intérêts financiers existant entre l’enquêteur et la
FRA, que le montant des contrats conclus entre eux était raisonnable et justifié au regard de la quantité de travail requise pour la réalisation de ces tâches.
34 Il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence constante de la Cour, il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. Il s’ensuit que
l’appréciation des faits ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 25 avril 2024, NS/Parlement, C‑218/23 P, EU:C:2024:358, point 58 et jurisprudence citée).
35 Une telle dénaturation existe lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée ou manifestement contraire à leur libellé. Toutefois, cette dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves. Par ailleurs, lorsqu’un requérant allègue une dénaturation d’éléments de preuve, il doit indiquer de façon
précise les éléments qui auraient été dénaturés par le Tribunal et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit celui-ci à cette dénaturation (arrêts du 27 avril 2023, Fondazione Cassa di Risparmio di Pesaro e.a./Commission, C‑549/21 P, EU:C:2023:340, point 74 ainsi que jurisprudence citée, et du 11 janvier 2024, Foz/Conseil, C‑524/22 P, EU:C:2024:23, point 38 ainsi que jurisprudence citée).
36 Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté comme étant irrecevable, pour autant que, par ses arguments, le requérant fait valoir que les éléments de preuve avancés devant le Tribunal étaient de nature, dans la mesure où ils feraient ressortir le rôle de conseiller juridique de la FRA joué par l’enquêteur et le montant élevé des rémunérations lui ayant été versées par la FRA dans le cadre des contrats de consultance externe conclus entre eux, à faire naître un doute légitime quant à
l’impartialité objective de cet enquêteur. En effet, par une telle argumentation, le requérant vise à obtenir une nouvelle appréciation de ces éléments de preuve. Si, certes, le requérant reproche formellement au Tribunal d’avoir dénaturé certains desdits éléments de preuve, en particulier ceux relatifs à la qualité de conseiller juridique de la FRA de l’enquêteur, force est de constater que, sous couvert d’une allégation de dénaturation, le requérant vise, en réalité, à obtenir un réexamen des
arguments déjà avancés à cet égard en première instance, sans cependant exposer en quoi le Tribunal aurait effectué une appréciation manifestement inexacte des faits et des éléments de preuve.
37 Par ailleurs, pour autant que, par le premier moyen, le requérant reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit, au point 191 de l’arrêt attaqué, en ne considérant pas que le seul fait de l’existence d’une relation financière entre l’enquêteur et la FRA suffisait, indépendamment du montant des rémunérations versées, à faire naître un doute légitime quant à l’impartialité objective de cet enquêteur, son argumentation doit être rejetée comme étant non fondée. En effet, ce seul fait ne
saurait suffire à créer une situation de conflit d’intérêts dans le chef d’un enquêteur de nature à vicier la procédure disciplinaire, sous peine de priver l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union concerné de la possibilité de recourir au même enquêteur dans le cadre de missions différentes. Par ailleurs, aucun conflit d’intérêts ne peut résulter du fait qu’un enquêteur a déjà effectué des activités de consultance externe pour la FRA lorsque ces autres activités ne concernent pas l’objet
de l’enquête en cause. Or, il ne ressort pas des points 189 et 190 de l’arrêt attaqué que tel serait le cas.
38 Enfin, pour autant que le requérant reproche au Tribunal d’avoir jugé, au point 192 de l’arrêt attaqué, que la présente affaire n’est pas analogue à celle ayant donné lieu à l’arrêt du 18 septembre 2012, Allgeier/FRA (F‑58/10, EU:F:2012:130), son argumentation doit être rejetée comme étant inopérante, dès lors que, d’une part, le seul fait que le Tribunal se serait, le cas échéant, écarté, dans l’arrêt attaqué, de la solution retenue dans un arrêt rendu par le Tribunal de la fonction publique ne
saurait constituer une erreur de droit et, d’autre part, ce motif revêt un caractère surabondant.
39 Il s’ensuit que le premier moyen du pourvoi doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen
Argumentation des parties
40 Par son deuxième moyen, le requérant reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis, aux points 67 à 98 de l’arrêt attaqué, plusieurs erreurs de droit, une dénaturation des éléments de preuve et des erreurs manifestes d’appréciation dans le cadre de son examen du comportement reproché au requérant par la FRA, à savoir de s’être livré à un « plagiat » en vue de la rédaction de l’exposé litigieux, et de ne pas avoir fourni une motivation suffisante à cet égard.
41 Premièrement, il critique, en substance, l’interprétation de la notion de « plagiat » retenue par le Tribunal aux points 58 à 61, 70, 72, 79 et 81 de l’arrêt attaqué. À cet égard, d’une part, le Tribunal aurait proposé une définition dénuée de pertinence juridique d’un terme qui relève non pas du droit de l’Union, mais plutôt du langage courant, pour l’utiliser aux fins d’apprécier et de condamner le comportement du requérant, alors que l’appréciation de la conduite du requérant aurait dû être
effectuée uniquement à l’aune des obligations découlant du statut.
42 D’autre part, le Tribunal aurait à tort fait référence, au point 60 de l’arrêt attaqué, aux conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Pelham e.a. (C‑476/17, EU:C:2018:1002), concernant l’interprétation de la portée de l’exception dite de « citation » prévue par la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (JO 2001, L 167, p. 10), permettant
de distinguer les citations licites des violations des droits d’auteur, qui ne sauraient être pertinentes en l’espèce. Le requérant avance, à cet égard, que la directive 2001/29 concerne l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur. En outre, il ressortirait du libellé et du contexte de ces conclusions que le terme « plagiat » y figurant viserait une violation du droit d’auteur dans le cadre du dépassement des limites de l’exception de citation. Or, la FRA considérerait elle-même que la
réglementation en matière de droits d’auteur n’aurait pas une grande importance dans le cadre de la présente affaire. Par ailleurs, le requérant maintient que le point de vue développé dans le cadre desdites conclusions n’est pertinent que si les textes copiés sont protégés par la réglementation en matière de droits d’auteur en Autriche. Dès lors, l’arrêt attaqué serait entaché d’une autre erreur de droit, le Tribunal ayant à tort considéré, au point 81 de cet arrêt, que le droit national
applicable en matière de droits d’auteur n’était pas pertinent en l’espèce.
43 Il soutient, deuxièmement, que le Tribunal semble à tort rejeter l’applicabilité de l’article 11 de la Charte. Or, en se référant à la jurisprudence de Cour européenne des droits de l’homme, le requérant fait valoir que la liberté d’expression s’applique à la réception et à la communication de toutes informations et idées, sans considération de leur teneur.
44 Le requérant allègue, à cet égard, que le Tribunal a commis une erreur de droit, au point 57 de l’arrêt attaqué, en se référant au libellé de l’avis consultatif du conseil de discipline, alors que seul celui de la décision de l’AIPN serait pertinent pour apprécier la légalité de cette décision. En outre, les considérations du Tribunal figurant aux points 90, 91 et 97 de l’arrêt attaqué, selon lesquelles, en substance, l’obligation de mentionner ses sources ne saurait être considérée comme
constituant une restriction excessive à la liberté d’expression, seraient entachées d’une erreur de droit, dans la mesure où, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, une atteinte à la liberté d’expression pourrait également résulter du fait que des formalités, des conditions, des restrictions ou des sanctions sont imposées ou infligées à l’intéressé. Or, l’obligation de dévoiler ses sources serait une formalité ou une condition liée à l’exercice de la liberté
d’expression et d’information. Ainsi, le Tribunal aurait manqué à l’obligation découlant de l’article 52, paragraphe 3, de la Charte selon laquelle les juridictions de l’Union doivent tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme lorsqu’elles interprètent la Charte.
45 Le Tribunal n’aurait pas non plus pris considération de l’arrêt de la Cour EDH du 25 novembre 1999, Hashman et Harrup c. Royaume Uni, (CE:ECHR:1999:1125JUD002559494), en ce qui concerne l’interprétation de l’exigence, visée à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, selon laquelle toute limitation de l’exercice des droits et des libertés reconnus par celle-ci doit être « prévue par la loi ». Le Tribunal aurait ignoré cet argument du requérant et n’y aurait donc pas répondu adéquatement, de sorte
que l’arrêt attaqué ne serait pas motivé à suffisance de droit.
46 Selon le requérant, lorsqu’il a rédigé et partagé l’exposé litigieux, il était couvert par la liberté d’expression et d’information garantie par l’article 11 de la Charte. Or, d’une part, il résulterait de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qu’un licenciement pour motif disciplinaire serait susceptible de violer une telle liberté et, d’autre part, les conditions d’une limitation valable à celle-ci, conformément à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, ne seraient pas
remplies en l’espèce. Le Tribunal aurait donc omis d’interpréter l’article 11 de la Charte à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, conformément à l’obligation résultant de l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, en n’expliquant pas en quoi le comportement reproché au requérant, qui devrait être protégé par l’article 11 de la Charte et qui ne serait soumis à aucune limitation légale valable, devait être considéré comme étant inapproprié et sanctionnable.
47 Troisièmement, en ce qui concerne cette absence de limitation légale valable, dans l’ensemble de l’arrêt attaqué et, plus particulièrement, aux points 67 à 69 et 95 à 98 de celui-ci, le Tribunal se serait livré à une interprétation erronée des articles 11, 12 et 21 du statut. Le requérant fait valoir, à cet égard, que le Tribunal a ignoré le contexte découlant de la réforme du statut de 2004 qui aurait tenu compte de la liberté d’expression établie à l’article 11 de la Charte et de la
jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme relative à l’article 52 de celle-ci. En effet, l’article 11 de la Charte aurait motivé la réforme de l’article 17 du statut et l’insertion d’un article 17 bis dans ce dernier, dans la mesure où les dispositions générales des articles 11, 12 et 21 du statut n’auraient pas été suffisamment claires et précises quant aux limitations apportées à la liberté d’expression du fonctionnaire ou de l’agent de l’Union.
48 Quatrièmement, le Tribunal aurait commis une erreur de droit, dénaturé les preuves et motivé insuffisamment l’arrêt attaqué aux points 72 et 218 de celui-ci. À cet égard, le requérant soutient que, certes, la FRA dispose de règles internes en matière d’édition et de production des résultats de recherche. Toutefois, ces règles garantiraient un référencement correct à un stade ultérieur à la première ébauche d’un travail de recherche, comme c’était le cas de l’exposé litigieux. Le requérant fait
valoir que, contrairement à ce qui ressort, en substance, des points 73, 74 et 95 de l’arrêt attaqué, le fait de ne pas avoir fait figurer des références et des notes en bas de page dans cette « toute première ébauche » que constituait l’exposé litigieux, fournie en tant qu’aperçu de la structure et du contenu du travail de recherche qui lui était demandé de réaliser, ne saurait être considéré comme étant un comportement inapproprié ou un acte déloyal de sa part. Le requérant se serait conformé
aux règles internes de la FRA et il ne saurait, dès lors, être sanctionné à ce titre.
49 La FRA excipe, en substance, de l’irrecevabilité des arguments soulevés par le requérant dans le cadre du deuxième moyen et, en tout état de cause, elle les estime manifestement non fondés.
Appréciation de la Cour
50 En premier lieu, en ce qui concerne l’argumentation du requérant relative à l’interprétation, par le Tribunal, de la notion de « plagiat », et visant en substance les considérations figurant aux points 58 à 61, 70, 72, 79 et 81 de l’arrêt attaqué, il convient de relever qu’une telle argumentation ne saurait prospérer.
51 Certes, comme le soutient à juste titre le requérant, la notion de « plagiat » n’est pas une notion de droit de l’Union et les questions relatives aux droits d’auteur relèvent, en principe, du droit des États membres.
52 Toutefois, en l’espèce, ainsi qu’il ressort notamment des points 55 et 56 de l’arrêt attaqué, lesquels n’ont pas été critiqués par le requérant dans le cadre du présent pourvoi, le Tribunal a considéré que, afin de répondre à la première branche du premier moyen du recours en première instance, tirée de ce que le plagiat n’aurait pas constitué une infraction au statut, il convenait de tenir compte du fait que le principe de sécurité juridique exige que les règles de droit soient claires, précises
et prévisibles dans leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir des conséquences défavorables sur les individus. Dans ces conditions, le Tribunal a estimé, à juste titre, que, en vue de déterminer si le comportement reproché au requérant avait pu être valablement sanctionné en tant que violation des articles 11, 12 et 21 du statut, applicables aux agents temporaires en vertu de l’article 11, premier alinéa, du RAA, et si le requérant avait été en mesure de connaître avec exactitude
l’étendue des obligations que le statut lui imposait au regard de la conduite reprochée, il était nécessaire de définir la nature de cette conduite.
53 Il en va de même s’agissant de la critique, par le requérant, du point 57 de l’arrêt attaqué, dès lors que le Tribunal a seulement affirmé audit point qu’il existait une différence dans la formulation, d’une part, de la décision de révocation, dans laquelle la FRA avait constaté que le requérant avait commis un plagiat, et, d’autre part, de l’avis du conseil de discipline, selon lequel le comportement reproché au requérant, incompatible avec les articles 11, 12 et 21 du statut, consistait, en
substance, en une présentation délibérée d’un document résultant d’un copiage comme étant le résultat de son propre travail. Ayant ainsi identifié l’objectif de son examen, le Tribunal a procédé, aux points 58 à 76 de l’arrêt attaqué, à l’appréciation de la question de savoir si le comportement reproché au requérant, à savoir la présentation délibérée d’un document résultant en grande partie d’un copiage comme étant le fruit de son propre travail, relevait de la notion de « plagiat » à laquelle
faisait référence la décision de révocation et, partant, était susceptible de constituer une violation des obligations découlant des articles 11, 12 et 21 du statut.
54 Par ailleurs, le Tribunal a jugé à juste titre, au point 80 de l’arrêt attaqué, que, lorsqu’un fonctionnaire ne se conforme pas aux obligations découlant du statut, le fait d’agir en conformité avec la loi nationale ne confère pas à l’intéressé une immunité à l’égard de l’application des dispositions du statut. C’est donc à bon droit, et sans commettre une dénaturation des faits, que le Tribunal a pu considérer, au point 81 de l’arrêt attaqué, que, du point de vue des dispositions statutaires,
les références au droit autrichien n’étaient pas pertinentes en l’espèce, de sorte qu’il n’y avait pas lieu d’examiner la portée de ce droit.
55 En deuxième lieu, le grief tiré de ce que le Tribunal aurait rejeté à tort, aux points 90 et 91 de l’arrêt attaqué, l’argument du requérant tiré de ce que la FRA l’aurait empêché d’exercer, de manière absolue, son droit à la liberté d’expression garanti par l’article 11 de la Charte et aurait omis d’analyser, aux points 86 à 98 de cet arrêt, les arguments tirés d’une violation de l’article 52, paragraphes 1 et 3, de la Charte, repose également sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué.
56 En effet, contrairement à ce que le requérant affirme, le Tribunal n’a, à aucun point de l’arrêt attaqué, constaté que le contenu de l’exposé litigieux n’aurait pas été couvert par la liberté d’expression, de sorte qu’il y aurait eu lieu d’écarter l’application de l’article 11 de la Charte ni, a fortiori, n’a estimé qu’une sanction disciplinaire pour cause de plagiat ne pourrait pas être considérée, le cas échéant, comme étant une restriction à cette liberté et, dès lors, ne devrait pas être
prévue par la loi, conformément à la condition établie à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte.
57 Au contraire, ainsi qu’il ressort, en particulier, des points 86 à 94 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, en vertu de l’article 11, premier alinéa, de la Charte, le droit à la liberté d’expression comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières. Il a jugé également que, ainsi qu’il résulte de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte,
pour être tenue pour conforme au droit de l’Union, une limitation à ce droit doit être « prévue par la loi », viser un objectif d’intérêt général, reconnu comme tel par l’Union, et ne doit pas être excessive. À cet égard, le Tribunal a estimé, à bon droit, que les articles 11, 12 et 21 du statut constituent des restrictions légitimes à l’exercice dudit droit, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, et que cette limitation ne saurait être considérée comme étant excessive.
58 Par ailleurs, dans la mesure où le requérant fait valoir que le Tribunal a omis d’analyser les conséquences de l’arrêt de la Cour EDH du 25 novembre 1999, Hashman et Harrup c. Royaume Uni (CE:ECHR:1999:1125JUD002559494), il y a lieu de rappeler qu’un moyen tiré d’un défaut de réponse du Tribunal à des arguments invoqués en première instance revient, en substance, à invoquer une violation de l’obligation de motivation qui découle de l’article 36 du statut de la Cour de justice de l’Union
européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, de ce statut, et de l’article 117 du règlement de procédure du Tribunal (arrêt du 9 novembre 2023, XC/Commission, C‑527/21 P, EU:C:2023:850, point 98 et jurisprudence citée).
59 Or, l’obligation de motivation n’impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige, la motivation du Tribunal pouvant être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 9 novembre 2023, XC/Commission, C‑527/21 P,
EU:C:2023:850, point 99 et jurisprudence citée).
60 En l’espèce, dans sa requête en première instance, le requérant a fait valoir qu’une restriction au droit fondamental de la liberté d’expression « prévue par la loi », au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, exige un certain degré de clarté et de prévisibilité de la loi en question. Il soutenait, à cet égard, qu’il résultait de l’arrêt de la Cour EDH du 25 novembre 1999, Hashman et Harrup c. Royaume Uni (CE:ECHR:1999:1125JUD002559494), que ne saurait être considérée comme étant « une
loi », au sens de cette disposition de la Charte, une norme particulièrement imprécise et ne donnant pas d’indications à la personne concernée quant au type de conduite qui contreviendrait à l’injonction.
61 Or, après avoir rappelé la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme selon laquelle une norme ne peut valablement imposer des restrictions à la liberté d’expression si elle n’est pas énoncée avec assez de précision pour permettre au citoyen de régler sa conduite, ce que commande au demeurant aussi le principe de sécurité juridique, le Tribunal a jugé, aux points 94 à 98 de l’arrêt attaqué, que les articles 11, 12 et 21 du statut constituaient des limitations légales suffisamment
précises du droit à la liberté d’expression. Partant, il ne saurait être reproché au Tribunal d’avoir violé l’obligation de motivation à cet égard.
62 Ainsi, pour autant que le requérant reproche au Tribunal une violation de l’obligation de motivation qui lui incombe, les arguments qu’il avance en ce sens doivent être jugés comme étant non fondés.
63 En troisième lieu, s’agissant de l’argumentation selon laquelle le Tribunal aurait fait, aux points 67 à 69 et 95 à 98 de l’arrêt attaqué, une interprétation erronée des articles 11, 12 et 21 du statut en tant que dispositions instaurant une limitation du droit à la liberté d’expression, il convient de rappeler que l’article 17 bis, paragraphe 1, du statut reconnaît expressément ce droit au fonctionnaire ou à l’agent de l’Union, dans les limites du strict respect des principes de loyauté et
d’impartialité.
64 Il découle, à cet égard, de la jurisprudence de la Cour qu’il y a lieu de tenir compte du fait que, quand la liberté d’expression des fonctionnaires se trouve en jeu, leurs devoirs et responsabilités revêtent une importance particulière qui justifie de laisser à l’institution ou à l’organisme de l’Union concerné une certaine marge d’appréciation pour juger si l’ingérence dans l’exercice de cette liberté est proportionnée (arrêt du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C‑274/99 P, EU:C:2001:127,
point 49).
65 Plus particulièrement, l’obligation de loyauté, consacrée à l’article 12 du statut, impose non seulement que le fonctionnaire concerné s’abstienne de conduites attentatoires à la dignité de la fonction et au respect dû à l’institution et à ses autorités, mais également qu’il fasse preuve, d’autant plus s’il a un grade élevé, d’un comportement au‑dessus de tout soupçon, afin que les liens de confiance existant entre cette institution et lui-même soient toujours préservés (arrêt du 12 novembre
2020, Fleig/SEAE, C‑446/19 P, EU:C:2020:918, point 100).
66 En l’espèce, le Tribunal a constaté, aux points 27, 33 et 60 à 62 de l’arrêt attaqué, en s’appuyant sur les motifs de la décision de révocation et de l’avis du conseil de discipline, que le comportement reproché au requérant consistait en une présentation délibérée d’un document comme étant le fruit de son propre travail, alors qu’il était en grande partie le résultat d’un copiage, dans la mesure où, contrairement à une citation, d’une part, il n’y avait eu aucune interaction entre l’exposé
litigieux et les documents copiés et, d’autre part, les passages copiés n’apparaissaient pas clairement, dans cet exposé, comme constituant autant d’éléments étrangers à celui-ci.
67 Ces considérations du Tribunal laissent clairement apparaître que le requérant n’a pas été sanctionné parce qu’il avait exprimé une opinion personnelle ou discordante dans l’exposé litigieux, mais parce qu’il avait présenté des écrits d’autrui comme étant le résultat de son propre travail, et sans mentionner ses sources. Or, sur la base de telles constatations de fait, que le requérant ne conteste pas, le Tribunal a pu valablement déduire, aux points 95 et 96 de l’arrêt attaqué, que ce
comportement du requérant était susceptible de contrevenir au devoir de loyauté, dont la base légale est constituée par les articles 11, 12 et 21 du statut, qui relèvent des restrictions légitimes à l’exercice du droit à la liberté d’expression en poursuivant, notamment, le but de préserver la relation de confiance qui doit exister entre une institution et ses fonctionnaires.
68 Partant, le Tribunal a pu, à bon droit, juger, au point 96 de l’arrêt attaqué, que cette limitation du droit à la liberté d’expression ne saurait être considérée comme étant excessive en l’espèce, dès lors que le requérant demeurait en mesure d’exprimer librement ses opinions dans l’exposé litigieux, sans pour autant avoir le droit de présenter le travail d’autrui comme étant le résultat de son propre travail et en ne mentionnant pas ses sources.
69 En jugeant ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit.
70 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme étant non fondé.
Sur le troisième moyen
Argumentation des parties
71 Par son troisième moyen, le requérant reproche au Tribunal, en substance, d’avoir, dans la description qu’il a faite du litige au point 9 de l’arrêt attaqué, dénaturé les éléments de fait et de preuve qu’il lui avait soumis, en particulier un message adressé au requérant par le chef du département par lequel ce dernier lui demandait d’envoyer à l’un de ses collègues le lien donnant accès à l’exposé litigieux enregistré dans le SGD. Le requérant soutient que, contrairement à ce qu’a affirmé le
Tribunal à ce point de l’arrêt attaqué, il n’aurait pas simplement été « invité » à envoyer, mais il aurait ainsi reçu une instruction en ce sens de la part du chef du département. Ce faisant, le Tribunal aurait erronément qualifié une instruction provenant d’un supérieur hiérarchique de simple « invitation », que le requérant n’aurait pas été en mesure d’ignorer. Or, conformément à l’article 21 bis du statut, il ne saurait être juridiquement tenu responsable des conséquences de s’être conformé à
l’instruction en question, pour autant que cette instruction n’était pas manifestement illégale ou contraire aux normes de sécurité applicables.
72 La FRA excipe de l’irrecevabilité du troisième moyen en faisant valoir que le requérant se borne à contester des constatations de fait opérées par le Tribunal.
Appréciation de la Cour
73 Il y a lieu de constater que, par son troisième moyen, le requérant se borne à contester la description des faits, telle qu’elle a été effectuée par le Tribunal au point 9 de l’arrêt attaqué, dans la partie de ce dernier exposant les antécédents du litige, sans indiquer en quoi la prétendue qualification juridique erronée du message adressé au requérant par le chef de son département serait de nature à vicier les appréciations de droit effectuées par le Tribunal dans cet arrêt. Il en ressort que,
sous couvert d’une telle qualification juridique erronée des faits, celui-ci conteste, en réalité, des appréciations factuelles du Tribunal, sans, par ailleurs, exposer en quoi ces appréciations seraient manifestement erronées ou contraires à leur libellé.
74 Par conséquent, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 31 et 32 du présent arrêt, le troisième moyen est irrecevable.
Sur le quatrième moyen
Argumentation des parties
75 Par son quatrième moyen, le requérant reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis, aux points 101, 106, 107, 111 à 113 et 122 de l’arrêt attaqué, plusieurs erreurs de droit, une dénaturation des éléments de preuve et des erreurs manifestes d’appréciation dans le cadre de son analyse de la régularité de l’ouverture de l’enquête administrative, et de ne pas avoir fourni une motivation suffisante à cet égard.
76 Le requérant soutient, premièrement, que le Tribunal a dénaturé les preuves et commis une erreur manifeste d’appréciation au point 107 de l’arrêt attaqué, dans la mesure où la consultation de l’OLAF était uniquement annexée au rapport du directeur de la FRA et que le requérant n’a reçu celui-ci qu’après le 27 février 2019. Par conséquent, le requérant n’aurait pas été informé du contenu de la consultation de l’OLAF lors de l’ouverture de l’enquête le 23 mars 2018 ni, d’ailleurs, lors de
l’ouverture de la procédure disciplinaire, le 23 octobre 2018. Le Tribunal aurait donc commis une erreur de droit en jugeant que le requérant avait été suffisamment informé lors de l’ouverture de l’enquête et en appliquant par analogie la jurisprudence issue de l’arrêt du 5 octobre 2005, Rasmussen/Commission (T‑203/03, EU:T:2005:346).
77 Le requérant fait valoir, deuxièmement, que le Tribunal a omis d’apprécier le contexte juridique dans lequel s’inscrit l’ouverture d’une enquête administrative. Selon lui, pour s’assurer que le critère du « commencement de preuve », visé à l’article 86, paragraphes 1 et 2, du statut, est vérifié lors de l’ouverture d’une enquête administrative, il convient de prendre en considération le libellé de cette disposition. À cet égard, le seul objectif légitime d’une enquête administrative viserait à
établir, sur la base d’un commencement de preuve, qu’il peut être raisonnablement suspecté qu’un fonctionnaire ou un agent de l’Union a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du statut.
78 Par ailleurs, le requérant estime qu’une enquête administrative constitue en soi, par définition, un traitement de données qui, selon l’article 4 du règlement no 45/2001, doit avoir « des finalités déterminées, explicites et légitimes ». Le requérant ajoute que le Tribunal a commis une erreur de droit en affirmant que les articles 1 et 2 de l’annexe IX du statut n’exigent pas que l’AIPN précise les dispositions spécifiques du statut qui auraient été enfreintes, dès lors que cette question relève
plutôt de l’article 86, paragraphe 2, du statut et du règlement no 45/2001. Enfin, le requérant fait valoir que l’article 86, paragraphe 2, du statut dispose qu’une enquête administrative ne peut être ouverte que pour vérifier une violation, par le fonctionnaire ou l’agent de l’Union concerné, non pas du droit en matière de propriété intellectuelle, mais uniquement du statut.
79 Le requérant soutient, troisièmement, que le Tribunal a commis une erreur de droit au point 111 de l’arrêt attaqué en écartant l’application de la jurisprudence issue de l’arrêt du 8 juillet 2008, Franchet et Byk/Commission (T‑48/05, EU:T:2008:257), confirmée par l’arrêt du 12 juillet 2012, Commission/Nanopoulos, (T‑308/10 P, EU:T:2012:370), qui exige de disposer d’éléments suffisamment précis et pertinents avant d’ouvrir une procédure disciplinaire.
80 La FRA excipe de l’irrecevabilité du quatrième moyen et ajoute que, en tout état de cause, il est manifestement non fondé.
Appréciation de la Cour
81 D’emblée, il y a lieu d’observer que, en vertu de l’article 86, paragraphe 2, du statut, l’AIPN peut ouvrir une enquête administrative en vue de vérifier l’existence d’un manquement, au sens du paragraphe 1 dudit article, lorsque des éléments de preuve laissant présumer l’existence d’un tel manquement ont été portés à sa connaissance. Il ressort, par ailleurs, d’une lecture combinée des paragraphes 1 et 2 de cet article 86 que le statut confère à l’administration le pouvoir d’ouvrir une enquête
fondée sur un prétendu manquement aux obligations statutaires.
82 Si l’administration dispose, ainsi que l’a relevé le Tribunal au point 103 de l’arrêt attaqué, d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne l’ouverture d’une enquête administrative, elle doit néanmoins, comme celui-ci l’a, en substance, jugé au point 104 dudit arrêt, être en mesure de se fonder, à ces fins, sur l’existence d’un soupçon raisonnable qu’une infraction disciplinaire a été commise. Il s’ensuit que, afin de protéger les droits du fonctionnaire ou de l’agent de l’Union concerné,
l’administration doit s’assurer qu’elle dispose, avant d’ouvrir une enquête, d’indices permettant de suspecter, dans le chef de ce fonctionnaire ou de cet agent, un manquement à ses obligations statutaires et, avant d’ouvrir la procédure disciplinaire à son égard, d’éléments suffisamment précis et pertinents pour étayer ses suspicions.
83 Ayant relevé, à bon droit, ces principes, le Tribunal a rejeté, au point 106 de l’arrêt attaqué, l’argument du requérant selon lequel la décision d’ouverture de l’enquête administrative ne faisait pas mention de l’article 21 du statut et l’AHCC n’avait pas su exactement, au moment de cette ouverture, quelles dispositions du statut le requérant pouvait avoir violées.
84 À cet égard, le Tribunal a jugé à juste titre, au même point 106, que l’article 1er de l’annexe IX du statut, auquel renvoie son article 2 s’agissant des enquêtes administratives effectuées par l’AIPN, n’exige pas que cette autorité, ou le cas échéant l’AHCC, précise les dispositions spécifiques du statut qui auraient été enfreintes, pour autant que, comme le Tribunal l’a considéré, au point 107 de l’arrêt attaqué, dans le cadre de son appréciation souveraine des faits, le requérant disposait de
suffisamment d’éléments d’information pour comprendre qu’il lui était reproché d’avoir violé les dispositions du statut exigeant des fonctionnaires un comportement loyal, et cela, en particulier, eu égard au contenu de la décision d’ouverture de l’enquête, qui précisait notamment que le comportement reproché au requérant avait consisté à avoir fait figurer dans l’exposé litigieux des parties purement et simplement copiées d’autres sources, sans avoir mentionné de références ni en avoir informé
son chef de département, en faisant croire que cet exposé était le résultat de son propre travail.
85 Dans ces conditions, le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit ou de dénaturation et au terme d’une motivation suffisante, considérer, aux points 108 et 111 de l’arrêt attaqué, que la procédure visant le requérant avait été ouverte de manière régulière, dès lors que l’AIPN disposait, lors de l’ouverture de l’enquête administrative, d’indices suffisants permettant de suspecter l’existence d’une violation par celui‑ci de ses obligations statutaires et, d’autre part, lors de l’ouverture de
la procédure disciplinaire, d’éléments suffisamment précis et concordants confirmant les soupçons qui avaient justifié l’ouverture de cette enquête.
86 Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.
Sur le cinquième moyen
Argumentation des parties
87 Par son cinquième moyen, le requérant fait valoir, en substance, que le Tribunal, aux points 16, 114, 119 à 131 ainsi que 135 et 136 de l’arrêt attaqué, a commis plusieurs erreurs de droit, une dénaturation des éléments de preuve, fourni une motivation insuffisante et procédé à un examen incomplet de son recours en première instance, dans le cadre de son appréciation de la « signification juridique » de la décision d’ouverture de l’enquête.
88 Selon le requérant, la FRA n’a pas transféré ses compétences disciplinaires à l’enquêteur, contrairement à ce qu’affirme le Tribunal, mais a confié à ce dernier une enquête spécifique ayant une finalité et une portée spécifiques. Le Tribunal aurait fait également une appréciation erronée du contexte juridique de cette décision. Le requérant rappelle, à cet égard, que le règlement no 45/2001 dispose qu’un traitement de données, tel qu’une enquête administrative, doit avoir « des finalités
déterminées, explicites et légitimes » et que les données traitées doivent être « adéquates, pertinentes et non excessives » au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées.
89 La FRA soutient que le cinquième moyen est irrecevable.
Appréciation de la Cour
90 Par son cinquième moyen, le requérant reproche, en substance, au Tribunal de procéder à une qualification erronée de la « signification juridique » de la décision d’ouverture de l’enquête. Toutefois, sous le couvert d’un moyen tiré d’erreurs de droit, notamment, d’une prétendue violation des règles régissant le traitement de données lors de la procédure administrative, d’une dénaturation des éléments de preuve, d’une motivation insuffisante et d’un examen incomplet de son recours, le requérant
demande, en réalité, à la Cour de substituer sa propre appréciation des éléments de preuve à celle qui a été effectuée par le Tribunal aux points 16, 114, 119 à 131 ainsi que 135 et 136 de l’arrêt attaqué, ce qui, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée aux points 31 et 32 du présent arrêt échappe à sa compétence dans le cadre d’un pourvoi.
91 En outre, pour autant que le requérant fait valoir que le Tribunal aurait dénaturé le libellé de la décision d’ouverture de l’enquête administrative, il se limite à réitérer les arguments déjà, soumis au Tribunal, ainsi qu’il ressort des points 122 à 135 de l’arrêt attaqué, sans expliciter en quoi ceux-ci seraient entachés d’erreur de droit.
92 Il s’ensuit qu’il convient de rejeter le cinquième moyen comme étant irrecevable.
Sur les sixième, septième et huitième moyens
Argumentation des parties
93 Par son sixième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal a procédé à un examen incomplet de son recours en première instance, dans la mesure où il n’a pas répondu à l’argument du requérant selon lequel le conseil de discipline ne s’était pas limité aux faits mentionnés dans le rapport du directeur de la FRA et qu’il avait donc violé le statut.
94 Par son septième moyen, le requérant soutient que, aux points 194 et 200 à 205 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas eu égard au fait qu’il avait présenté des éléments de preuve de nature à établir que l’AIPN avait déjà décidé de prononcer la sanction de révocation avant l’audition du 11 juillet 2019. À défaut d’avoir examiné ces éléments, le Tribunal les aurait dénaturés, commis une erreur manifeste d’appréciation, procédé à un examen incomplet du moyen invoqué en première instance et violé
son obligation de motivation.
95 Par son huitième moyen, le requérant allègue qu’il ressort de l’ensemble du pourvoi que le Tribunal a méconnu l’article 47 de la Charte en ne lui octroyant pas un recours juridictionnel effectif.
96 La FRA rétorque que le point de vue du requérant concernant le sixième moyen reste vague et n’indique pas les points de l’arrêt attaqué auxquels il se rapporte.
97 En ce qui concerne le septième moyen, elle soutient que, contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal a fait état de son argumentation au point 202 in fine de l’arrêt attaqué et y a répondu aux points 203 et 204 de celui-ci.
98 Enfin, selon la FRA, le huitième moyen est manifestement irrecevable.
Appréciation de la Cour
99 Il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les points critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du
pourvoi ou du moyen concerné (arrêt du 18 janvier 2024, Jenkinson/Conseil e.a., C‑46/22 P, EU:C:2024:50, point 60 ainsi que jurisprudence citée).
100 Ne répond notamment pas à ces exigences et doit être déclaré irrecevable un moyen dont l’argumentation n’est pas suffisamment claire et précise pour permettre à la Cour d’exercer son contrôle de légalité, notamment parce que les éléments essentiels sur lesquels le moyen s’appuie ne ressortent pas de façon suffisamment cohérente et compréhensible du texte de ce pourvoi, qui est formulé de manière obscure et ambiguë à cet égard (arrêt du 18 janvier 2024, Jenkinson/Conseil e.a., C‑46/22 P,
EU:C:2024:50, point 61 ainsi que jurisprudence citée). La Cour a également jugé que devait être rejeté comme étant manifestement irrecevable un pourvoi dépourvu de structure cohérente, se limitant à des affirmations générales et ne comportant pas d’indications précises relatives aux points de la décision attaquée qui seraient éventuellement entachés d’une erreur de droit (arrêt du 15 décembre 2022, Picard/Commission, C‑366/21 P, EU:C:2022:984 point 53 et jurisprudence citée).
101 En l’espèce, s’agissant des sixième et huitième moyens, il suffit de relever que ceux-ci n’identifient pas avec précision les points de motifs de l’arrêt attaqué contre lesquels ils sont dirigés ni les erreurs de droit dont ils seraient entachés. De surcroît, ces moyens sont formulés de manière très générale, sans fournir d’argumentation suffisante qui permettrait à la Cour d’apprécier leur bien-fondé.
102 De même, en ce qui concerne le septième moyen, si le requérant précise que ce moyen vise les points 194 et 200 à 205 de l’arrêt attaqué, en reprochant au Tribunal d’avoir omis de mentionner et d’examiner les preuves attestant que l’AIPN avait déjà décidé de prononcer la sanction de révocation avant l’audition du 11 juillet 2019, il n’en reste pas moins que le pourvoi ne contient pas d’arguments de droit étayant un prétendu défaut de motivation.
103 Par conséquent, les sixième, septième et huitième moyens doivent être écartés comme étant manifestement irrecevables.
104 Aucun des moyens soulevés à l’appui du pourvoi n’ayant été accueilli, celui-ci doit être rejeté dans son intégralité.
Sur les dépens
105 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui‑ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
106 Le requérant ayant succombé en ses moyens, il y a lieu, conformément aux conclusions de la FRA, de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la FRA.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) DD est condamné à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA).
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.