ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
5 décembre 2024 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Procédure européenne d’injonction de payer – Règlement (CE) no 1896/2006 – Injonction de payer européenne déclarée exécutoire – Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale – Règlement (CE) no 1393/2007 – Absence de signification ou de notification valide constatée lors de l’exécution – Réglementation nationale prévoyant une voie de recours permettant au défendeur de demander
l’annulation d’une injonction de payer européenne – Conséquences juridiques – Obligation du juge saisi de déclarer la nullité de l’injonction de payer européenne »
Dans l’affaire C‑389/23,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Amtsgericht Wedding (tribunal de district de Berlin-Wedding, Allemagne), par décision du 19 mai 2023, parvenue à la Cour le 27 juin 2023, dans la procédure
Bulgarfrukt – Fruchthandels GmbH
contre
Oranzherii Gimel II EOOD,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. F. Biltgen (rapporteur), président de la première chambre, faisant fonction de président de la deuxième chambre, Mme M. L. Arastey Sahún, présidente de la cinquième chambre, et M. J. Passer, juge,
avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour Bulgarfrukt – Fruchthandels GmbH, par Mes W. Kreuzer et F. Sturm, Rechtsanwälte,
– pour Oranzherii Gimel II EOOD, par Me W. Hoffmann, Rechtsanwalt,
– pour la Commission européenne, par M. S. Noë et Mme J. Vondung, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du règlement (CE) no 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction de payer (JO 2006, L 399, p. 1), et du règlement (CE) no 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (« signification ou
notification des actes »), et abrogeant le règlement (CE) no 1348/2000 du Conseil (JO 2007, L 324, p. 79).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Bulgarfrukt – Fruchthandels GmbH, une société à responsabilité limitée établie en Allemagne, à Oranzherii Gimel II EOOD (ci‑après « Oranzherii »), une société à responsabilité limitée unipersonnelle établie en Bulgarie, au sujet de l’exécution d’une injonction de payer européenne.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
Le règlement no 1896/2006
3 Aux termes des considérants 9, 10, 24 et 26 du règlement no 1896/2006 :
« (9) Le présent règlement a pour objet de simplifier, d’accélérer et de réduire les coûts de procédure dans les litiges transfrontaliers concernant des créances pécuniaires incontestées en instituant une procédure européenne d’injonction de payer, et d’assurer la libre circulation des injonctions de payer européennes au sein de l’ensemble des États membres en établissant des normes minimales dont le respect rend inutile toute procédure intermédiaire dans l’État membre d’exécution préalablement à
la reconnaissance et à l’exécution.
(10) La procédure instituée par le présent règlement devrait constituer un instrument complémentaire et facultatif pour le demandeur, qui demeure libre de recourir à une procédure prévue par le droit national. En conséquence, le présent règlement ne remplace ni n’harmonise les mécanismes de recouvrement de créances incontestées prévus par le droit national.
[...]
(24) Une opposition formée dans le délai imparti devrait mettre un terme à la procédure européenne d’injonction de payer et entraîner le passage automatique du litige à la procédure civile ordinaire, sauf si le demandeur a expressément demandé l’arrêt de la procédure dans cette éventualité. Aux fins du présent règlement, le concept de “procédure civile ordinaire” ne devrait pas nécessairement être interprété au sens du droit national.
[...]
(26) Les frais de justice visés à l’article 25 ne devraient pas comprendre, par exemple, les honoraires d’avocat ou les frais de signification ou de notification des documents lorsque celle-ci est effectuée par une entité autre qu’une juridiction. »
4 L’article 1er de ce règlement dispose :
« 1. Le présent règlement a pour objet :
a) de simplifier, d’accélérer et de réduire les coûts de règlement dans les litiges transfrontaliers concernant des créances pécuniaires incontestées en instituant une procédure européenne d’injonction de payer ;
et
b) d’assurer la libre circulation des injonctions de payer européennes au sein de l’ensemble des États membres en établissant des normes minimales dont le respect rend inutile toute procédure intermédiaire dans l’État membre d’exécution préalablement à la reconnaissance et à l’exécution.
2. Le présent règlement n’empêche pas le demandeur de faire valoir une créance au sens de l’article 4 en recourant à une autre procédure prévue par le droit d’un État membre ou par le droit communautaire. »
5 L’article 12 dudit règlement, intitulé « Délivrance d’une injonction de payer européenne », prévoit, à ses paragraphes 3 et 5 :
« 3. Dans l’injonction de payer européenne, le défendeur est informé de ce qu’il a la possibilité :
a) de payer au demandeur le montant figurant dans l’injonction de payer ;
ou
b) de s’opposer à l’injonction de payer en formant opposition auprès de la juridiction d’origine, qui doit être envoyée dans un délai de trente jours à compter de la signification ou de la notification de l’injonction qui lui aura été faite.
[...]
5. La juridiction veille à ce que l’injonction de payer soit signifiée ou notifiée au défendeur conformément au droit national, selon des modalités conformes aux normes minimales établies aux articles 13, 14 et 15. »
6 Aux termes de l’article 13 du même règlement, intitulé « Signification ou notification assortie de la preuve de sa réception par le défendeur » :
« L’injonction de payer européenne peut être signifiée ou notifiée au défendeur, conformément au droit national de l’État dans lequel la signification ou la notification doit être effectuée, par l’un des modes suivants :
a) signification ou notification à personne, le défendeur ayant signé un accusé de réception portant la date de réception ;
b) signification ou notification à personne au moyen d’un document signé par la personne compétente qui a procédé à la signification ou à la notification, spécifiant que le défendeur a reçu l’acte ou qu’il a refusé de le recevoir sans aucun motif légitime, ainsi que la date à laquelle l’acte a été signifié ou notifié ;
c) signification ou notification par voie postale, le défendeur ayant signé et renvoyé un accusé de réception portant la date de réception ;
d) signification ou notification par des moyens électroniques, comme la télécopie ou le courrier électronique, le défendeur ayant signé et renvoyé un accusé de réception portant la date de réception. »
7 L’article 14 du règlement no 1896/2006, intitulé « Signification ou notification non assortie de la preuve de sa réception par le défendeur », énonce :
« 1. L’injonction de payer européenne peut également être signifiée ou notifiée au défendeur conformément au droit national de l’État dans lequel la signification ou la notification doit être effectuée, par l’un des modes suivants :
a) signification ou notification à personne, à l’adresse personnelle du défendeur, à des personnes vivant à la même adresse que celui-ci ou employées à cette adresse ;
b) si le défendeur est un indépendant ou une personne morale, signification ou notification à personne, dans les locaux commerciaux du défendeur, à des personnes employées par le défendeur ;
c) dépôt de l’injonction dans la boîte aux lettres du défendeur ;
d) dépôt de l’injonction dans un bureau de poste ou auprès d’une autorité publique compétente et communication écrite de ce dépôt dans la boîte aux lettres du défendeur, à condition que la communication écrite mentionne clairement la nature judiciaire de l’acte ou le fait qu’elle vaut notification ou signification et a pour effet de faire courir les délais ;
e) par voie postale non assortie de l’attestation visée au paragraphe 3, lorsque le défendeur a son adresse dans l’État membre d’origine ;
f) par des moyens électroniques avec accusé de réception automatique, à condition que le défendeur ait expressément accepté à l’avance ce mode de signification ou de notification.
2. Aux fins du présent règlement, la signification ou la notification au titre du paragraphe 1 n’est pas admise si l’adresse du défendeur n’est pas connue avec certitude.
3. La signification ou la notification en application du paragraphe 1, points a), b), c) et d), est attestée par :
a) un acte signé par la personne compétente ayant procédé à la signification ou à la notification mentionnant les éléments suivants :
i) le mode de signification ou de notification utilisé,
et
ii) la date de la signification ou de la notification,
et
iii) lorsque l’injonction de payer a été signifiée ou notifiée à une personne autre que le défendeur, le nom de cette personne et son lien avec le défendeur,
ou
b) un accusé de réception émanant de la personne qui a reçu la signification ou la notification, pour l’application du paragraphe 1, points a) et b). »
8 L’article 15 de ce règlement, intitulé « Signification ou notification à un représentant », prévoit :
« La signification ou la notification en application des articles 13 ou 14 peut aussi être faite à un représentant du défendeur. »
9 L’article 16 dudit règlement, intitulé « Opposition à l’injonction de payer européenne », dispose :
« 1. Le défendeur peut former opposition à l’injonction de payer européenne auprès de la juridiction d’origine au moyen du formulaire type F figurant dans l’annexe VI, qui lui est transmis en même temps que l’injonction de payer européenne.
2. L’opposition est envoyée dans un délai de trente jours à compter de la signification ou de la notification de l’injonction au défendeur.
[...] »
10 Aux termes de l’article 18 du même règlement, intitulé « Force exécutoire » :
« 1. Si, dans le délai prévu à l’article 16, paragraphe 2, compte tenu d’un délai supplémentaire nécessaire à l’acheminement de l’opposition, aucune opposition n’a été formée auprès de la juridiction d’origine, la juridiction d’origine déclare sans tarder l’injonction de payer européenne exécutoire, au moyen du formulaire type G figurant dans l’annexe VII. La juridiction vérifie la date à laquelle l’injonction de payer a été signifiée ou notifiée.
2. Sans préjudice du paragraphe 1, les conditions formelles d’acquisition de la force exécutoire sont régies par le droit de l’État membre d’origine.
3. La juridiction envoie l’injonction de payer européenne exécutoire au demandeur. »
11 L’article 26 du règlement no 1896/2006, intitulé « Relation avec le droit procédural national », énonce :
« Toute question procédurale non expressément réglée par le présent règlement est régie par le droit national. »
12 L’article 27 de ce règlement dispose :
« Le présent règlement ne porte pas atteinte à l’application du règlement (CE) no 1348/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale [(JO 2000, L 160, p. 37)]. »
Le règlement no 1393/2007
13 L’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1393/2007 prévoit :
« Le présent règlement est applicable en matière civile et commerciale, lorsqu’un acte judiciaire ou extrajudiciaire doit être transmis d’un État membre à un autre pour y être signifié ou notifié. Il ne couvre notamment pas les matières fiscales, douanières ou administratives, ni la responsabilité de l’État pour des actes ou des omissions commis dans l’exercice de la puissance publique (“acta jure imperii”). »
14 L’article 7 de ce règlement, intitulé « Signification ou notification des actes », énonce, à son paragraphe 1 :
« L’entité requise procède ou fait procéder à la signification ou à la notification de l’acte soit conformément à la législation de l’État membre requis, soit selon le mode particulier demandé par l’entité d’origine, sauf si ce mode est incompatible avec la loi de cet État membre. »
15 Aux termes de l’article 8 dudit règlement, intitulé « Refus de réception de l’acte » :
« 1. L’entité requise informe le destinataire, au moyen du formulaire type figurant à l’annexe II, qu’il peut refuser de recevoir l’acte à signifier ou à notifier, au moment de la signification ou de la notification ou en retournant l’acte à l’entité requise dans un délai d’une semaine, si celui-ci n’est pas rédigé ou accompagné d’une traduction dans l’une des langues suivantes :
a) une langue comprise du destinataire ou
b) la langue officielle de l’État membre requis ou, s’il existe plusieurs langues officielles dans cet État membre, la langue officielle ou l’une des langues officielles du lieu où il doit être procédé à la signification ou à la notification.
2. Si l’entité requise est informée que le destinataire refuse de recevoir l’acte conformément au paragraphe 1, elle en informe immédiatement l’entité d’origine au moyen de l’attestation prévue à l’article 10 et lui retourne la demande ainsi que les actes dont la traduction est demandée.
3. Si le destinataire a refusé de recevoir l’acte en vertu du paragraphe 1, il est possible de remédier à la situation qui en résulte en signifiant ou en notifiant au destinataire, conformément aux dispositions du présent règlement, l’acte accompagné d’une traduction dans l’une des langues visées au paragraphe 1. Dans ce cas, la date de signification ou de notification de l’acte est celle à laquelle l’acte accompagné de la traduction a été signifié ou notifié conformément à la législation de
l’État membre requis. Toutefois, lorsque, conformément à la législation d’un État membre, un acte doit être signifié ou notifié dans un délai déterminé, la date à prendre en considération à l’égard du requérant est celle de la signification ou de la notification de l’acte initial, fixée conformément à l’article 9, paragraphe 2.
[...] »
Le droit allemand
16 L’article 1092a de la Zivilprozessordnung (code de procédure civile, ci‑après la « ZPO »), intitulé « Recours en cas d’absence de signification ou de notification ou en cas de signification ou de notification irrégulière de l’injonction de payer européenne », est libellé comme suit :
« (1) Le défendeur peut demander l’annulation de l’injonction de payer européenne lorsque l’injonction de payer
1. n’a pas été signifiée ou notifiée
2. a été signifiée ou notifiée d’une manière qui ne satisfait pas à suffisance aux exigences des articles 13 à 15 du règlement [no 1896/2006].
La demande doit être présentée dans un délai d’un mois à compter du moment où le défendeur a pris ou aurait pu prendre connaissance du prononcé d’une injonction de payer européenne ou de l’absence de signification ou de notification. Si le tribunal accueille la demande pour l’une des raisons citées à la première phrase, l’injonction de payer européenne est annulée.
(2) Si au moment de la demande au titre du paragraphe 1, première phrase, le tribunal a déjà déclaré l’injonction de payer européenne exécutoire en vertu de l’article 18 du règlement [no 1896/2006] et accueille désormais la demande, il déclare irrecevable l’exécution forcée au titre de l’injonction de payer. Le paragraphe 1, troisième phrase, s’applique mutatis mutandis.
(3) La décision est rendue par ordonnance. L’ordonnance ne peut pas être attaquée. L’article 1092, paragraphes 2 à 4, s’applique mutatis mutandis. »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
17 Sur demande de Bulgarfrukt, l’Amtsgericht Wedding (tribunal de district de Berlin-Wedding, Allemagne), qui est la juridiction de renvoi, a délivré, le 4 janvier 2019, une injonction de payer européenne à l’égard d’Oranzherii.
18 L’entité requise bulgare a attesté que la signification de cette injonction avait été effectuée le 26 juillet 2019, en vertu du règlement no 1393/2007. Cette attestation ne précise toutefois pas le mode de signification employé, si ce n’est qu’il y est indiqué, en langue bulgare, que « [l]a personne a quitté cette adresse et son adresse [actuelle] n’est pas inscrite au registre. Les décisions [...] sont à considérer comme ayant été correctement signifiées ou notifiées ».
19 Le 24 avril 2020, présumant qu’il y avait eu signification valable, la juridiction de renvoi a déclaré ladite injonction de payer européenne exécutoire en vertu de l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 1896/2006.
20 Par une télécopie du 1er mars 2021, Oranzherii a formé opposition à la même injonction de payer européenne en faisant valoir qu’elle avait pris connaissance de celle-ci pour la première fois le 24 février 2021, dans le cadre de mesures d’exécution forcée.
21 Après que la juridiction de renvoi a informé cette société des voies de recours disponibles, celle-ci a présenté, par un mémoire du 25 mars 2021, un recours au titre de l’article 1092a de la ZPO.
22 S’agissant de cette voie de recours, prévue à l’article 1092a de la ZPO, contre une injonction de payer européenne, la juridiction de renvoi émet, tout d’abord, des doutes quant à la compatibilité de cet article 1092a avec le droit de l’Union.
23 En effet, en imposant au tribunal saisi de prononcer l’annulation de l’injonction de payer européenne qui n’a pas été signifiée ou notifiée ou ne l’a pas été de manière valable, la réglementation allemande serait plus exigeante que les principes découlant de l’arrêt du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen (C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144), selon lequel une telle situation devrait conduire à la nullité de la déclaration constatant la force exécutoire d’une telle
injonction de payer européenne.
24 À cet égard, la juridiction de renvoi estime, en premier lieu, que l’article 1092a, paragraphe 1, de la ZPO méconnaît les dispositions des articles 16 et 17 du règlement no 1896/2006, en ce qu’il ouvre, de manière anticipée, une voie de recours, alors même que le délai pour former opposition à une telle injonction de payer européenne n’a pas encore commencé à courir.
25 En deuxième lieu, si le défendeur apprenait fortuitement l’existence d’une injonction de payer européenne à son égard et qu’il introduisait un recours au titre de l’article 1092a de la ZPO, le juge saisi devrait mettre un terme à la procédure européenne d’injonction de payer concernée, au lieu d’ordonner une nouvelle signification déclenchant les conséquences juridiques visées aux articles 16 et 17 du règlement no 1896/2006.
26 En troisième lieu, la voie de recours prévue à l’article 1092a de la ZPO pourrait faire obstacle à l’effet utile de ce règlement, qui vise à assurer le bon fonctionnement du marché intérieur en éliminant les obstacles au bon déroulement des procédures civiles, dans la mesure où le requérant préférerait ne pas recourir à la procédure européenne d’injonction de payer au vu du risque qu’un recours fondé sur l’article 1092a de la ZPO fasse obstacle à l’injonction de payer européenne qu’il aura
obtenue.
27 En quatrième lieu, le principe qui résulterait de l’arrêt du 2 mars 2017, Henderson (C‑354/15, EU:C:2017:157), selon lequel l’absence de transmission d’un formulaire prévu par le règlement no 1393/2007 n’entraînerait pas la nullité de l’ensemble de la signification concernée, mais requerrait que le tribunal saisi régularise a posteriori une telle omission, devrait également valoir dans le cadre de la procédure européenne d’injonction de payer instituée par le règlement no 1896/2006 (arrêt du
6 septembre 2018, Catlin Europe, C‑21/17, EU:C:2018:675).
28 En cinquième et dernier lieu, plaiderait également en ce sens le fait que le règlement (UE) 2020/1784 du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2020, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (signification ou notification des actes) (JO 2020, L 405, p. 40), prévoit désormais, à son article 12, paragraphes 5 et 6, des dispositions concernant la possibilité de régulariser une
signification en raison d’irrégularités dont celle-ci serait entachée, sans que ces irrégularités entraînent la nullité de cette signification dans son ensemble.
29 La juridiction de renvoi s’interroge, ensuite, sur le fait que, lorsque le tribunal saisi fait droit à un recours au titre de l’article 1092a de la ZPO alors qu’il a déjà déclaré une injonction de payer européenne exécutoire, il est également tenu, en vertu de cet article 1092a, de déclarer irrecevable l’exécution forcée au titre de cette injonction de payer, ce qui aurait pour conséquence de faire durablement obstacle à cette exécution, alors que, en cas de simple invalidité d’une déclaration
constatant la force exécutoire d’une injonction de payer européenne, il serait envisageable que, à la suite d’une nouvelle signification valable, cette dernière injonction de payer européenne devienne exécutoire.
30 Enfin, cette juridiction se demande si un défendeur peut valablement former opposition à une injonction de payer existante avant que celle-ci ne lui ait été valablement signifiée, étant donné que la Cour aurait jugé, au point 49 de l’arrêt du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen (C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144), qu’une application de la procédure d’opposition prévue aux articles 16 et 17 du règlement no 1896/2006 ne peut pas être envisagée dans de telles
circonstances.
31 En outre, ladite juridiction précise que, dans le cas où elle serait tenue de procéder à une nouvelle signification conforme aux normes minimales prévues par ce règlement, elle préviendrait le défendeur qu’il y a lieu de former, par précaution, une nouvelle opposition. Or, le point de savoir si un défendeur est en mesure de se défendre efficacement contre une injonction de payer européenne ne saurait dépendre d’un facteur aléatoire tenant à la bonne volonté de la juridiction saisie.
32 Dans ces conditions, l’Amtsgericht Wedding (tribunal de district de Berlin‑Wedding) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Convient-il d’interpréter le règlement [no 1393/2007] ainsi que le règlement [no 1896/2006] en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui prévoit que le juge doit déclarer la nullité d’une injonction de payer européenne dans le cadre d’un recours lorsque cette injonction n’a pas été signifiée ou notifiée au défendeur ou ne l’a pas été de manière valable ?
2) En cas de réponse affirmative à la première question préjudicielle : les règlements susmentionnés doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui prévoit que l’exécution forcée de l’injonction de payer européenne doit être déclarée irrecevable si elle n’a pas été signifiée ou notifiée au défendeur ou ne l’a pas été de manière valable ?
3) En cas de réponse affirmative à la première question préjudicielle : convient-il d’interpréter le règlement no 1896/2006 en ce sens qu’un défendeur qui a connaissance de l’adoption d’une injonction de payer européenne qui ne lui a cependant pas encore été signifiée ou notifiée ou ne l’a pas été de manière valable ne peut pas encore y faire valablement opposition ? »
Sur les questions préjudicielles
Sur la première question
33 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les dispositions du règlement no 1896/2006, lues en combinaison avec celles du règlement no 1393/2007, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, lorsqu’une injonction de payer européenne n’a pas été signifiée ou notifiée au défendeur ou l’a été en méconnaissance des normes minimales prévues aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006, le juge saisi
d’un recours contre cette injonction est obligé de déclarer la nullité de celle-ci.
34 Il convient de relever, en premier lieu, qu’il ressort du considérant 9 et de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1896/2006 que celui-ci a pour objet de simplifier, d’accélérer et de réduire les coûts de règlement dans les litiges transfrontaliers concernant des créances pécuniaires incontestées en instituant une procédure européenne d’injonction de payer (arrêt du 15 septembre 2022, Uniqa Versicherungen, C‑18/21, EU:C:2022:682, point 20).
35 Cette procédure simplifiée et uniforme n’est pas contradictoire. En effet, le défendeur n’a connaissance de la délivrance de l’injonction de payer européenne qu’au moment où celle-ci lui est signifiée ou notifiée et ce n’est qu’à ce moment qu’il est informé, ainsi qu’il ressort de l’article 12, paragraphe 3, du règlement no 1896/2006, du fait qu’il a la possibilité soit de payer au demandeur le montant figurant dans cette injonction, soit de s’y opposer auprès de la juridiction d’origine (voir,
en ce sens, arrêt du 15 septembre 2022, Uniqa Versicherungen, C‑18/21, EU:C:2022:682, point 21 et jurisprudence citée).
36 Cette possibilité de former opposition vise à compenser le fait que le système instauré par le règlement no 1896/2006 ne prévoit pas la participation du défendeur à la procédure européenne d’injonction de payer, en lui permettant de contester la créance après la délivrance de l’injonction de payer européenne (arrêts du 22 octobre 2015, Thomas Cook Belgium, C‑245/14, EU:C:2015:715, point 28, et du 15 septembre 2022, Uniqa Versicherungen, C‑18/21, EU:C:2022:682, point 24 ainsi que jurisprudence
citée).
37 Cette opposition a pour effet de mettre fin à la procédure européenne d’injonction de payer et d’entraîner le passage automatique du litige à la procédure ordinaire, que ce soit la procédure européenne de règlement des petits litiges prévue par le règlement (CE) no 861/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 11 juillet 2007, instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges (JO 2007, L 199, p. 1), ou toute autre procédure civile nationale appropriée, sauf si le demandeur a
expressément demandé qu’il soit mis un terme à la procédure dans le cas d’une opposition (voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2013, Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, point 31, et du 15 septembre 2022, Uniqa Versicherungen, C‑18/21, EU:C:2022:682, point 23).
38 En deuxième lieu, il convient de rappeler que toute injonction de payer européenne visée par le règlement no 1896/2006 doit faire l’objet d’une signification ou d’une notification conforme aux normes minimales prévues aux articles 13 à 15 de ce règlement. En cas de méconnaissance de ces normes minimales, l’équilibre entre les objectifs, poursuivis par ledit règlement, de rapidité et d’efficacité, d’une part, et de respect des droits de la défense, d’autre part, serait compromis (voir, en ce sens,
arrêt du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, point 37).
39 À cet égard, la Cour a jugé que, en cas d’absence d’une signification ou d’une notification conforme auxdites normes minimales, le délai d’opposition ne commence pas à courir, de sorte que la validité des procédures qui dépendent de l’expiration de ce délai, notamment celle de la déclaration de force exécutoire visée à l’article 18 du règlement no 1896/2006, même si elles ont déjà été déclenchées, est remise en cause (voir, en ce sens, arrêt du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank
St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, point 43).
40 En troisième lieu, il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1896/2006, lu à la lumière de son considérant 9, que ce règlement correspond à des « normes minimales » établies pour assurer la libre circulation des injonctions de payer européennes. Ledit règlement met en place un instrument uniforme de recouvrement, garantissant des conditions identiques aux créanciers et aux débiteurs dans l’ensemble de l’Union européenne, tout en prévoyant l’application du droit
procédural des États membres à toute question de procédure non expressément réglée par le même règlement (voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2013, Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, point 28, et du 15 septembre 2022, Uniqa Versicherungen, C‑18/21, EU:C:2022:682, point 28 ainsi que jurisprudence citée).
41 Dès lors que le règlement no 1896/2006 reste muet quant aux éventuelles voies de recours qui s’offrent au défendeur lorsque ce n’est qu’après la déclaration de force exécutoire d’une injonction de payer européenne qu’il s’avère que cette injonction n’a pas été signifiée ou notifiée ou ne l’a pas été de manière conforme aux normes minimales énoncées aux articles 13 à 15 de ce règlement, ces questions procédurales demeurent régies par le droit national, conformément à l’article 26 dudit règlement
(voir, en ce sens, arrêt du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, points 46 et 47).
42 En quatrième lieu, s’agissant des questions en matière de signification ou de notification d’une injonction de payer européenne non réglées par le règlement no 1896/2006, il résulte de la jurisprudence de la Cour que celles-ci doivent, le cas échéant, être tranchées conformément au règlement no 1393/2007, dès lors que l’article 27 du règlement no 1896/2006 dispose que celui-ci ne porte pas atteinte à l’application du règlement no 1348/2000 et que ce dernier a été abrogé et remplacé par le
règlement no 1393/2007, dont l’article 25, paragraphe 2, précise que les références faites au règlement no 1348/2000 doivent s’entendre comme étant faites au règlement no 1393/2007 (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2018, Catlin Europe, C‑21/17, EU:C:2018:675, points 39 et 40).
43 À cet égard, il convient de rappeler que le règlement no 1393/2007 prévoit, à son article 8, paragraphe 1, la faculté pour le destinataire de l’acte à signifier ou à notifier de refuser de recevoir celui-ci, au motif que l’acte en cause n’est pas rédigé ou accompagné d’une traduction dans une langue qu’il est censé comprendre (arrêt du 2 mars 2017, Henderson, C‑354/15, EU:C:2017:157, point 49).
44 En effet, il importe de veiller non seulement à ce que le destinataire d’un acte reçoive réellement l’acte en cause, mais également à ce qu’il soit en mesure de connaître ainsi que de comprendre de façon effective et complète le sens et la portée de l’action engagée contre lui à l’étranger, de sorte qu’il puisse utilement préparer sa défense et faire valoir ses droits dans l’État membre d’origine (arrêt du 6 septembre 2018, Catlin Europe, C‑21/17, EU:C:2018:675, point 34 et jurisprudence citée).
45 Or, pour que le droit de refus figurant à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1393/2007 puisse utilement produire ses effets, il est nécessaire que le destinataire de l’acte ait été dûment informé de l’existence de ce droit au moyen du formulaire type figurant à l’annexe II de ce règlement (voir, en ce sens, arrêt du 2 mars 2017, Henderson, C‑354/15, EU:C:2017:157, points 53 et 54).
46 La Cour en a déduit que l’entité chargée de la signification ou de la notification est tenue, en toutes circonstances et sans disposer d’une marge d’appréciation, d’informer le destinataire d’un acte de son droit de refuser la réception de celui-ci, en utilisant systématiquement à cet effet ce formulaire type (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2018, Catlin Europe, C‑21/17, EU:C:2018:675, point 38 et jurisprudence citée).
47 Lorsqu’un acte est signifié ou notifié à son destinataire sans que ledit formulaire soit joint à cet acte, une telle omission doit être régularisée par l’entité requise en informant sans délai ce destinataire de son droit de refuser la réception dudit acte, en lui transmettant le même formulaire type (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2018, Catlin Europe, C‑21/17, EU:C:2018:675, point 50 et jurisprudence citée).
48 La Cour a jugé que l’omission de joindre le formulaire type figurant à l’annexe II du règlement no 1393/2007 ne saurait entraîner la nullité ni de l’acte à signifier ou à notifier ni de la procédure de signification ou de notification, étant donné qu’une telle conséquence serait incompatible avec l’objectif poursuivi par ce règlement, consistant à prévoir un mode de transmission direct, rapide et efficace entre les États membres des actes en matière civile et commerciale (arrêt du 6 septembre
2018, Catlin Europe, C‑21/17, EU:C:2018:675, point 49 et jurisprudence citée).
49 Dès lors, une réglementation nationale ne saurait disposer, sans méconnaître le règlement no 1393/2007, que l’omission de ce formulaire type doit être sanctionnée de nullité (voir, en ce sens, arrêt du 2 mars 2017, Henderson, C‑354/15, EU:C:2017:157, point 62).
50 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de répondre à la juridiction de renvoi.
51 En l’occurrence, il ressort des constatations faites par la juridiction de renvoi que la signification effectuée par l’entité requise ne respecte manifestement pas les normes minimales prévues aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006, étant donné que ce n’est qu’au moment de l’exécution de l’injonction de payer européenne en cause que la défenderesse au principal a pris connaissance de l’existence de cette injonction.
52 À cet égard, il ressort de la jurisprudence citée aux points 39 et 41 du présent arrêt, d’une part, que la déclaration de force exécutoire d’une telle injonction de payer européenne doit être considérée comme étant invalide et, d’autre part, que le droit national régit les éventuelles voies de recours dont dispose le défendeur lorsqu’il s’avère uniquement après cette déclaration que cette injonction n’a pas été signifiée ou notifiée ou ne l’a pas été de manière conforme aux normes minimales
établies aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006.
53 En l’occurrence, le droit allemand prévoit, à l’article 1092a de la ZPO, une telle voie de recours, dans le cadre de laquelle le juge saisi est obligé de déclarer la nullité d’une telle injonction de payer européenne.
54 Or, lorsqu’une injonction de payer européenne n’a pas été signifiée ou notifiée au défendeur ou ne l’a pas été de manière conforme aux normes minimales établies aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006, le défendeur ne reçoit pas les formulaires nécessaires, notamment celui contenant l’injonction de payer européenne concernée et celui l’informant de son droit de former opposition à cette injonction, de sorte qu’il n’est pas informé de manière régulière de l’existence ou du fondement de
l’injonction de payer européenne délivrée à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, point 41).
55 Il en découle que l’absence de signification ou de notification d’une injonction de payer européenne ou le non-respect des normes minimales établies aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006 doivent être distingués du défaut de communication, au destinataire d’un acte à signifier ou à notifier, du formulaire type figurant à l’annexe II du règlement no 1393/2007 informant ce destinataire de son droit de refuser la réception de cet acte dans le cas où celui-ci n’est pas rédigé ou accompagné
d’une traduction dans une langue qu’il est censé comprendre.
56 Si, conformément à la jurisprudence citée aux points 47 et 48 du présent arrêt, l’omission de ce formulaire type doit être régularisée sans délai par l’entité requise et ne peut pas être sanctionnée de nullité, sous peine de compromettre l’objectif poursuivi par le règlement no 1393/2007, il y a lieu de constater que cette jurisprudence n’est pas applicable dans le cas où le juge national déclare la nullité d’une injonction de payer européenne qui n’a pas été signifiée ou notifiée ou qui l’a été
en méconnaissance des normes minimales prévues aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006, une telle annulation étant conforme aux objectifs de ce dernier règlement.
57 En effet, dès que la créance à l’origine d’une injonction de payer européenne est contestée, ce qui est manifestement le cas lorsque le défendeur introduit un recours contre l’exécution d’une injonction de payer européenne dont la signification ou la notification est entachée d’irrégularités, la procédure spéciale régie par le règlement no 1896/2006 ne s’applique plus, étant donné que, ainsi qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), de ce règlement, les objectifs de simplification,
de rapidité et de réduction des coûts poursuivis par celui‑ci ne sont pertinents qu’en ce qui concerne des créances incontestées (voir, en ce sens, arrêts du 4 septembre 2014, eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, point 39, ainsi que du 13 juin 2013, Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, point 42).
58 Dans ce contexte, le fait que le défendeur prenne connaissance de l’existence d’une procédure européenne d’injonction de payer dont la signification ou la notification présente des irrégularités de manière fortuite ou lors de l’exécution de l’injonction de payer concernée, de même que le moment auquel le défendeur conteste la créance faisant l’objet de cette injonction sont dépourvus de pertinence, étant donné que ce recours intervient nécessairement, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée
au point 39 du présent arrêt, avant même que le délai prévu pour former opposition visé à l’article 16, paragraphe 2, du règlement no 1896/2006 ne commence à courir.
59 Par ailleurs, la conciliation des objectifs poursuivis par le règlement no 1896/2006, à savoir la rapidité et l’efficacité, d’une part, et le respect des droits de la défense, d’autre part, permet de constater qu’il incombe au demandeur de supporter les éventuels risques liés à une absence de signification ou de notification ou à une signification ou à une notification qui ne respecterait pas les normes minimales prévues aux articles 13 à 15 de ce règlement.
60 En effet, ainsi qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 1896/2006, en vertu duquel la procédure européenne d’injonction de payer « n’empêche pas le demandeur de faire valoir une créance [...] en recourant à une autre procédure prévue par le droit d’un État membre ou par le droit communautaire », l’injonction de payer européenne est une procédure facultative qui ne se substitue pas aux autres procédures existantes.
61 En outre, aucune disposition du règlement no 1896/2006 ne s’oppose, en principe, à ce que, en cas de rejet d’une demande d’injonction de payer européenne, le créancier concerné fasse, le cas échéant, valoir sa créance dans le cadre d’une nouvelle procédure européenne d’injonction de payer.
62 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que les dispositions du règlement no 1896/2006, lues en combinaison avec celles du règlement no 1393/2007, doivent être interprétées en ce sens qu’elles ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle, lorsqu’une injonction de payer européenne n’a pas été signifiée ou notifiée au défendeur ou l’a été en méconnaissance des normes minimales prévues aux articles 13 à 15 du règlement
no 1896/2006, le juge saisi d’un recours contre cette injonction est obligé de déclarer la nullité de celle-ci.
Sur les deuxième et troisième questions
63 Eu égard à la réponse donnée à la première question, il n’est pas nécessaire de répondre aux deuxième et troisième questions.
Sur les dépens
64 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :
Les dispositions du règlement (CE) no 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction de payer, lues en combinaison avec celles du règlement (CE) no 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale,
doivent être interprétées en ce sens que :
elles ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle, lorsqu’une injonction de payer européenne n’a pas été signifiée ou notifiée au défendeur ou l’a été en méconnaissance des normes minimales prévues aux articles 13 à 15 du règlement no 1896/2006, le juge saisi d’un recours contre cette injonction est obligé de déclarer la nullité de celle-ci.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.