ORDONNANCE DE LA COUR (neuvième chambre)
9 janvier 2024 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Acte éclairé – Décision 2006/928/CE – Mécanisme de coopération et de vérification des progrès réalisés par la Roumanie en vue d’atteindre certains objectifs de référence spécifiques en matière de réforme du système judiciaire et de lutte contre la corruption – Nature et effets juridiques – Caractère obligatoire pour la Roumanie – Effet direct des objectifs de référence – Obligation de lutter contre la corruption en général et,
en particulier, la corruption de haut niveau – Obligation de prévoir des sanctions pénales dissuasives et effectives – Délai de prescription de la responsabilité pénale – Arrêt d’une Cour constitutionnelle ayant invalidé une disposition nationale régissant les causes d’interruption de ce délai – Risque systémique d’impunité – Principe de légalité des délits et des peines – Exigences de prévisibilité et de précision de la loi pénale – Principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus
favorable (lex mitior) – Principe de sécurité juridique – Standard national de protection des droits fondamentaux – Obligation pour les juridictions d’un État membre de laisser inappliqués des arrêts de la Cour constitutionnelle et/ou de la juridiction suprême de cet État membre en cas de non-conformité au droit de l’Union »
Dans l’affaire C‑131/23,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Curtea de Apel Braşov (cour d’appel de Braşov, Roumanie), par décision du 2 mars 2023, parvenue à la Cour le 3 mars 2023, dans la procédure pénale contre
C.A.A.,
C.V.,
en présence de :
Parchetul de pe lângă Înalta Curte de Casaţie şi Justiţie – Direcţia Naţională Anticorupţie – Serviciul Teritorial Braşov,
Unitatea Administrativ Teritorială Judeţul Braşov,
LA COUR (neuvième chambre),
composée de Mme O. Spineanu-Matei, présidente de chambre, M. C. Lycourgos (rapporteur), président de la quatrième chambre, faisant fonction de juge de la neuvième chambre, et Mme L. S. Rossi, juge,
avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, de l’article 325, paragraphe 1, TFUE, de l’article 2, paragraphe 1, de la convention établie sur la base de l’article K.3 du traité sur l’Union européenne, relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, signée à Bruxelles le 26 juillet 1995 (JO 1995, C 316, p. 49, ci-après la « convention PIF »), de la décision 2006/928/CE de la Commission, du
13 décembre 2006, établissant un mécanisme de coopération et de vérification des progrès réalisés par la Roumanie en vue d’atteindre certains objectifs de référence spécifiques en matière de réforme du système judiciaire et de lutte contre la corruption (JO 2006, L 354, p. 56), de l’article 49, paragraphe 1, dernière phrase, et de l’article 53 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ainsi que du principe de primauté du droit de l’Union.
2 Cette demande a été présentée dans le cadre de recours extraordinaires introduits par C.A.A. et C.V., tendant à l’annulation de leur condamnation définitive pour des infractions de trafic d’influence, de corruption passive et d’abus de fonction, en ce qui concerne C.A.A., et d’abus de fonction, en ce qui concerne C.V.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 La décision 2006/928 a été adoptée, dans le contexte de l’adhésion de la Roumanie à l’Union européenne prévue pour le 1er janvier 2007, sur le fondement, notamment, des articles 37 et 38 de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République de Bulgarie et de la Roumanie et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 2005, L 157, p. 203), entré en vigueur le 1er janvier 2007.
4 Les considérants 1 à 6 et 9 de cette décision sont ainsi libellés :
« (1) L’Union européenne est fondée sur l’État de droit, un principe commun à tous les États membres.
(2) L’espace de liberté, de sécurité et de justice et le marché intérieur instaurés par le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne reposent sur la conviction réciproque que les décisions et pratiques administratives et judiciaires de tous les États membres respectent pleinement l’État de droit.
(3) Cette condition implique l’existence, dans tous les États membres, d’un système judiciaire et administratif impartial, indépendant et efficace, doté de moyens suffisants, entre autres, pour lutter contre la corruption.
(4) Le 1er janvier 2007, la Roumanie deviendra membre de l’Union européenne. Tout en saluant les efforts considérables déployés par la Roumanie pour parachever ses préparatifs d’adhésion à l’Union européenne, la Commission [européenne] a recensé, dans son rapport du 26 septembre 2006, des questions en suspens, en particulier en ce qui concerne la responsabilisation et l’efficacité du système judiciaire et des instances chargées de faire appliquer la loi, domaines dans lesquels des progrès sont
encore nécessaires pour garantir la capacité de ces organes à mettre en œuvre et à appliquer les mesures adoptées pour établir le marché intérieur et l’espace de liberté, de sécurité et de justice.
(5) L’article 37 de l’acte d’adhésion habilite la Commission à adopter des mesures appropriées en cas de risque imminent de dysfonctionnement du marché intérieur lié au non-respect, par la Roumanie, d’engagements qu’elle a pris. L’article 38 de l’acte d’adhésion habilite la Commission à prendre des mesures appropriées en cas de risque imminent de manquements graves constaté en Roumanie en ce qui concerne la transposition, l’état d’avancement de la mise en œuvre ou l’application d’actes adoptés sur
la base du titre VI du traité UE ou d’actes adoptés sur la base du titre IV du traité CE.
(6) Les questions en suspens portant sur la responsabilisation et l’efficacité du système judiciaire et des instances chargées de faire appliquer la loi justifient la mise en place d’un mécanisme de coopération et de vérification des progrès réalisés par la Roumanie en vue d’atteindre certains objectifs de référence spécifiques en matière de réforme du système judiciaire et de lutte contre la corruption.
[...]
(9) Il conviendra de modifier la présente décision si l’évaluation de la Commission indique qu’il y a lieu d’ajuster les objectifs de référence. La présente décision sera abrogée lorsque tous les objectifs de référence auront été atteints. »
5 L’article 1er de la décision 2006/928 prévoit :
« Chaque année, le 31 mars au plus tard, et pour la première fois le 31 mars 2007, la Roumanie fait rapport à la Commission sur les progrès qu’elle a réalisés en vue d’atteindre chacun des objectifs de référence exposés dans l’annexe.
La Commission peut, à tout moment, apporter une aide technique par différents moyens ou collecter et échanger des informations sur les objectifs de référence. En outre, elle peut, à tout moment, organiser des missions d’experts en Roumanie à cet effet. Les autorités roumaines lui apportent le soutien nécessaire dans ce contexte. »
6 L’annexe de cette décision est libellée comme suit :
« Objectifs de référence que la Roumanie doit atteindre, visés à l’article 1er :
1) Garantir un processus judiciaire à la fois plus transparent et plus efficace, notamment en renforçant les capacités et la responsabilisation du Conseil supérieur de la magistrature. Rendre compte de l’incidence des nouveaux codes de procédure civile et administrative et l’évaluer.
2) Constituer, comme prévu, une agence pour l’intégrité dotée de responsabilités en matière de vérification de patrimoine, d’incompatibilités et de conflits d’intérêt potentiels, mais aussi de la capacité d’arrêter des décisions impératives pouvant donner lieu à la prise de sanctions dissuasives.
3) Continuer, en se basant sur les progrès déjà accomplis, à mener des enquêtes professionnelles et non partisanes sur les allégations de corruption de haut niveau.
4) Prendre des mesures supplémentaires pour prévenir et combattre la corruption, en particulier au sein de l’administration locale. »
Le droit roumain
La Constitution roumaine
7 Le principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior) est énoncé à l’article 15, paragraphe 2, de la Constituția României (Constitution roumaine), aux termes duquel « [l]a loi ne dispose que pour l’avenir, à l’exception des lois pénales ou contraventionnelles plus favorables ».
8 L’article 147, paragraphes 1 et 4, de la Constitution roumaine énonce :
« 1. Les dispositions des lois et ordonnances en vigueur ainsi que celles des règlements qui sont jugées inconstitutionnelles cessent de produire leurs effets juridiques quarante-cinq jours après la publication de l’arrêt de la Curtea Constituțională [(Cour constitutionnelle, Roumanie)], à moins que, durant cette période, le Parlement ou le Gouvernement, selon le cas, ne mette les dispositions inconstitutionnelles en accord avec les dispositions de la Constitution. Durant cette période, les
dispositions jugées inconstitutionnelles sont suspendues de plein droit.
[...]
4. Les décisions de la Curtea Constituțională [(Cour constitutionnelle)] sont publiées au Monitorul Oficial al României. À compter de la date de publication, les décisions sont contraignantes à titre général et ne produisent des effets que pour l’avenir. »
La législation pénale
9 Le 1er février 2014, la Legea nr. 286/2009, privind Codul penal (loi no 286/2009, sur le code pénal), du 17 juillet 2009 (Monitorul Oficial al României, partie I, no 510 du 24 juillet 2009, ci-après le « code pénal »), est entrée en vigueur.
10 La portée du principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior), lequel est énoncé à l’article 15, paragraphe 2, de la Constitution roumaine, est précisée à l’article 5, paragraphe 1, du code pénal, aux termes duquel :
« Lorsqu’une ou plusieurs lois pénales sont intervenues entre la commission de l’infraction et le jugement définitif, la loi plus favorable est applicable. »
11 L’article 154, paragraphe 1, du code pénal dispose :
« Les délais de prescription de la responsabilité pénale sont de :
a) 15 ans, lorsque la loi prévoit pour l’infraction commise une peine d’emprisonnement à perpétuité ou une peine d’emprisonnement supérieure à 20 ans ;
b) 10 ans, lorsque la loi prévoit pour l’infraction commise une peine d’emprisonnement supérieure à 10 ans mais n’excédant pas 20 ans ;
c) 8 ans, lorsque la loi prévoit pour l’infraction commise une peine d’emprisonnement supérieure à 5 ans mais n’excédant pas 10 ans ;
d) 5 ans, lorsque la loi prévoit pour l’infraction commise une peine d’emprisonnement supérieure à un an, mais n’excédant pas 5 ans ;
e) 3 ans, lorsque la loi prévoit pour l’infraction commise une peine d’emprisonnement qui n’excède pas un an ou l’amende ».
12 Avant l’entrée en vigueur du code pénal, la disposition régissant l’interruption des délais de prescription en matière pénale prévoyait ce qui suit :
« Tout acte réalisé dans une affaire qui, conformément à la loi, doit être communiqué au mis en examen ou au prévenu au cours de la procédure pénale interrompt le délai de la prescription prévue à l’article 122. »
13 Dans sa version issue de la loi no 286/2009, l’article 155, paragraphe 1, du code pénal disposait :
« Tout acte de procédure réalisé dans une affaire interrompt le délai de la prescription de la responsabilité pénale. »
14 Cet article 155, paragraphe 1, a été modifié comme suit par l’Ordonanța de urgență a Guvernului nr. 71/2022, pentru modificarea articolului 155 alineatul (1) din Legea nr. 286/2009 privind Codul penal (ordonnance d’urgence du gouvernement no 71/2022, modifiant l’article 155, paragraphe 1, de la loi no 286/2009 sur le code pénal), du 30 mai 2022 (Monitorul Oficial al României, partie I, no 531 du 30 mai 2022, ci‑après l’« OUG no 71/2022 ») :
« Tout acte de procédure réalisé dans une affaire qui, conformément à la loi, doit être communiqué au suspect ou au prévenu interrompt le délai de la prescription de la responsabilité pénale. »
15 L’article 426 de la Legea nr. 135/2010, privind Codul de procedură penală (loi no 135/2010, portant code de procédure pénale), du 1er juillet 2010 (Monitorul Oficial al României, partie I, no 486 du 15 juillet 2010), dans sa version applicable au litige au principal, intitulé « Les cas d’ouverture à recours extraordinaire en annulation », prévoit, à son point b) :
« Un recours extraordinaire en annulation peut être introduit contre les jugements définitifs en matière pénale dans les cas suivants :
[...]
b) lorsque le prévenu a été condamné, alors qu’il existait des preuves quant à l’existence d’une cause de clôture de la procédure pénale. »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
16 Par un jugement pénal du 30 avril 2020 du Tribunalul Brașov (tribunal de grande instance de Brașov, Roumanie), devenu définitif à la suite d’un arrêt pénal de la Curtea de Apel Brașov (cour d’appel de Brașov, Roumanie) du 1er février 2022, C.A.A. et C.V. ont été reconnus coupables, respectivement, C.A.A., de corruption passive, de trafic d’influence et d’abus de fonction, et C.V., d’abus de fonction, en lien avec des procédures de passation de marchés publics en Roumanie. C.A.A. a été condamné à
une peine d’emprisonnement de sept ans et dix mois assortie d’une peine complémentaire d’interdiction d’exercer certains droits pour une durée de 5 ans. C.V. a été condamné à une peine d’emprisonnement de deux ans assortie d’un sursis probatoire pour une période de trois ans.
17 Le 1er février 2022, sur le fondement de la décision de condamnation, le Tribunalul Brașov (tribunal de grande instance de Brașov) a émis un mandat d’exécution de la peine d’emprisonnement prononcée contre C.A.A.
18 Dans sa demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi fait état d’une jurisprudence nationale relative à l’article 155, paragraphe 1, du code pénal, dans sa version issue de la loi no 286/2009, susceptible d’avoir une incidence déterminante sur la situation des demandeurs au principal.
19 Cette juridiction indique, premièrement, que la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), par son arrêt no 297 du 26 avril 2018, publié le 25 juin 2018 [ci-après l’« arrêt no 297/2018 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) »], a fait droit à une exception d’inconstitutionnalité visant cette disposition en ce qu’elle prévoyait l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale par la réalisation de « tout acte de procédure ».
20 La Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) aurait notamment relevé que ladite disposition était dépourvue de prévisibilité et qu’elle méconnaissait le principe de légalité des délits et des peines, eu égard au fait que l’expression « tout acte de procédure » visait également les actes qui n’étaient pas communiqués au suspect ou au prévenu, l’empêchant ainsi de prendre connaissance de la circonstance qu’un nouveau délai de prescription de sa responsabilité pénale avait commencé à courir.
21 Elle aurait également constaté que l’article 155, paragraphe 1, du code pénal, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de la loi no 286/2009, satisfaisait aux conditions de prévisibilité imposées par les dispositions constitutionnelles pertinentes, puisqu’elle prévoyait que seule la réalisation d’un acte qui, conformément à la loi, devait être communiqué au mis en examen ou au prévenu était susceptible d’interrompre le délai de la prescription de la responsabilité pénale.
22 Deuxièmement, il ressort des explications fournies par la juridiction de renvoi que, durant plusieurs années, le législateur national n’est pas intervenu à la suite de l’arrêt no 297/2018 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), pour remplacer la disposition, jugée inconstitutionnelle, de l’article 155, paragraphe 1, du code pénal.
23 Troisièmement, la juridiction de renvoi précise que la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), par son arrêt no 358 du 26 mai 2022, publié le 9 juin 2022 [ci-après l’« arrêt no 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) »], a fait droit à une nouvelle exception d’inconstitutionnalité visant l’article 155, paragraphe 1, du code pénal. Dans cet arrêt, la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) aurait clarifié que son arrêt no 297/2018 revêtait la nature
juridique d’un arrêt d’inconstitutionnalité « simple ». Soulignant l’absence d’intervention du législateur depuis cet arrêt no 297/2018 ainsi que le fait que l’effet combiné de ce dernier arrêt et de cette absence d’intervention avait donné lieu à une nouvelle situation dépourvue de clarté et de prévisibilité concernant les règles applicables à l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale, laquelle situation s’était traduite par une pratique judiciaire non uniforme, la
Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) aurait précisé que, entre la date de publication dudit arrêt no 297/2018 et l’entrée en vigueur d’un acte normatif déterminant la règle applicable, « le droit positif [roumain] ne [contenait] aucun cas permettant l’interruption du délai de la prescription de la responsabilité pénale ».
24 Quatrièmement, il ressort de la demande de décision préjudicielle que, le 30 mai 2022, à savoir après que l’arrêt no 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) a été rendu, mais avant qu’il ait été publié, le gouvernement roumain, agissant en tant que législateur délégué, a adopté l’OUG no 71/2022, entrée en vigueur à la même date, par laquelle l’article 155, paragraphe 1, du code pénal a été modifié en ce sens que le délai de prescription de la responsabilité pénale est
interrompu par tout acte de procédure devant être communiqué au suspect ou au prévenu.
25 Cinquièmement, la juridiction de renvoi indique que, par son arrêt no 67/2022 du 25 octobre 2022, publié le 28 novembre 2022, l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice) a précisé que, en droit roumain, les règles relatives à l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale relèvent du droit pénal matériel et que, par conséquent, elles sont soumises au principe de non‑rétroactivité de la loi pénale, sans préjudice du principe de l’application
rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior), tel que garanti, notamment, à l’article 15, paragraphe 2, de la Constitution roumaine.
26 Par conséquent, l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice) aurait jugé qu’une condamnation définitive peut, en principe, faire l’objet d’un recours extraordinaire en annulation fondé sur les effets des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) en tant que loi pénale plus favorable (lex mitior). Une telle possibilité serait toutefois exclue lorsque la juridiction d’appel a déjà examiné la question de la prescription de
la responsabilité pénale au cours de la procédure ayant donné lieu à cette condamnation définitive.
27 C.A.A. et C.V. ont chacun introduit, devant la Curtea de Apel Brașov (cour d’appel de Brașov), qui est la juridiction de renvoi, sur le fondement de l’article 426, sous b), de la loi no 135/2010, portant code de procédure pénale, dans sa version applicable au litige au principal, un recours extraordinaire aux fins de l’annulation du jugement pénal du 30 avril 2020, mentionné au point 16 de la présente ordonnance, en expliquant qu’ils avaient été condamnés alors qu’il existait des preuves de
l’existence d’une cause de clôture de la procédure pénale, à savoir l’expiration du délai de prescription de leur responsabilité pénale. À la date d’introduction de son recours extraordinaire en annulation, le 21 juin 2022, C.A.A. était incarcéré.
28 À l’appui de leur recours, ces demandeurs invoquent, sur le fondement du principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior), la prescription de leur responsabilité pénale à la suite des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle).
29 Lesdits demandeurs font valoir, en substance, que, entre la date de publication de l’arrêt no 297/2018 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), à savoir le 25 juin 2018, et celle de publication de l’arrêt no 358/2022 de cette dernière, à savoir le 9 juin 2022, le droit roumain ne prévoyait aucune cause d’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale.
30 Or, le fait que, durant la période comprise entre ces dates, le droit positif ne prévoyait aucune cause d’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale constituerait, en soi, une loi pénale plus favorable qui devrait leur être appliquée conformément au principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior), lequel est notamment consacré par la Constitution roumaine.
31 Si une telle interprétation devait être retenue, la juridiction de renvoi constate que, eu égard à la date de commission des infractions ayant conduit à la condamnation des demandeurs au principal, le délai de prescription prévu pour ces infractions aurait expiré avant que la décision de condamnation de ces demandeurs ne soit devenue définitive, ce qui entraînerait la clôture de la procédure pénale et l’impossibilité de condamner ces derniers.
32 C’est dans ce contexte que la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité avec le droit de l’Union de l’interprétation défendue par les demandeurs au principal. Cette juridiction relève, tout d’abord, que cette interprétation aurait pour effet d’exonérer ceux-ci de leur responsabilité pénale pour des infractions de corruption alors que la décision 2006/928 oblige la Roumanie à lutter de manière efficace et dissuasive contre de telles infractions.
33 Elle souligne encore que l’affaire au principal porte à la fois sur des infractions de corruption au sens strict, à savoir des infractions de corruption passive et de trafic d’influence, en relation avec des procédures de passation de marchés publics, et sur des infractions assimilées à des infractions de corruption, à savoir des infractions d’abus de fonction également commis dans le cadre de marchés publics par des fonctionnaires, dont l’un occupait une fonction particulièrement importante au
sein d’une unité administrative territoriale.
34 Ensuite, la juridiction de renvoi expose que l’interprétation défendue par les demandeurs au principal, qui aurait pour effet d’exonérer ceux-ci de leur responsabilité pénale, doit également être examinée au regard de l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, de l’article 325, paragraphe 1, TFUE, et de l’article 2, paragraphe 1, de la convention PIF. Ces dispositions, qui concerneraient la protection des intérêts financiers de l’Union, seraient applicables en l’occurrence au motif que les
infractions en cause au principal auraient été commises en relation avec des procédures de passation de marchés publics, lesquels auraient été financés au moyens de fonds publics et auraient entraîné l’application de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
35 Cette juridiction ajoute, à cet égard, que le budget de l’Union est financé, entre autres, par les montants versés par les États membres, qui correspondent à un pourcentage du revenu national brut. Partant, les actes qui portent préjudice au budget national auraient une incidence sur le montant de la contribution de l’État membre au budget de l’Union, affectant ainsi indirectement les intérêts financiers de cette dernière.
36 Enfin, la juridiction de renvoi fait valoir que sa demande de décision préjudicielle doit également être examinée au regard de l’article 49, paragraphe 1, dernière phrase, et de l’article 53 de la Charte, étant donné que, en fonction de la réponse apportée par la Cour, le juge national pourrait être amené à appliquer le principe de la loi pénale plus favorable ainsi qu’à vérifier si les standards nationaux de protection découlant des effets attribués aux arrêts de la Curtea Constituțională (Cour
constitutionnelle) respectent la primauté du droit de l’Union.
37 La juridiction de renvoi précise que les effets des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) sur la prescription de la responsabilité pénale ont conduit à la clôture de la procédure pénale dans un nombre particulièrement élevé d’affaires, entraînant un préjudice important, ainsi qu’à la réouverture d’affaires qui avaient été définitivement jugées au cours de la période allant du 25 juin 2018, date de la publication de l’arrêt no 297/2018 de la Curtea
Constituțională (Cour constitutionnelle), au 30 mai 2022, date de l’entrée en vigueur de l’OUG no 71/2022, portant atteinte à l’efficacité de l’ensemble du système judiciaire, qui se trouverait dépourvu d’un élément essentiel dans la lutte contre la corruption.
38 En outre, la Commission aurait fait état, dans son rapport du 22 novembre 2022 au Parlement européen et au Conseil sur les progrès réalisés par la Roumanie au titre du mécanisme de coopération et de vérification [COM(2022) 664 final], de ses préoccupations au sujet de l’incidence majeure de cette jurisprudence sur les affaires pénales en cours, en particulier dans les affaires de corruption.
39 Dans ces conditions, la Curtea de Apel Brașov (cour d’appel de Brașov) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) L’article 19, paragraphe 1, second alinéa, [TUE], l’article 325, paragraphe 1, TFUE, l’article 2, paragraphe 1, de la [convention PIF] et la décision [2006/928] doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’un arrêt de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle, Roumanie) ayant constaté rétroactivement l’absence de cas d’interruption du délai de prescription, dans la mesure où il existe une jurisprudence généralisée et consolidée des juridictions
nationales, y compris de l[’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice, Roumanie)], et où l’application de cet arrêt entraînerait un risque systémique d’impunité en raison de la réouverture d’un nombre important d’affaires pénales définitivement jugées et de l’adoption, par la voie de recours extraordinaires, de décisions clôturant la procédure pénale du fait de la constatation de la survenance de la prescription ?
2) Le principe de primauté du droit [de l’Union], eu égard à la décision [2006/928] et à l’article 49, paragraphe 1, troisième phrase (principe de rétroactivité de la loi pénale plus favorable) de la [Charte], s’oppose-t-il à un réexamen, au stade de l’exécution de la peine, au moyen d’une voie de recours extraordinaire, du délai de prescription de la responsabilité pénale, dans la mesure où l’introduction d’un tel recours est la conséquence d’un arrêt de la Curtea Constituțională (Cour
constitutionnelle), rendu après que la condamnation est devenue définitive, qui renverse une jurisprudence généralisée et consolidée des juridictions nationales et où le caractère dissuasif et effectif de la peine ainsi que la sécurité et la stabilité des relations juridiques s’en trouveraient affectés ?
3) Le principe de primauté du droit [de l’Union], eu égard à l’article 53 de la [Charte], permet-il l’application de standards nationaux de protection, tels que celui en cause au principal, garantis par le droit de l’État membre, découlant des effets attribués aux arrêts de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), dans la mesure où l’application effective du droit de l’Union sur le territoire de l’État membre s’en trouverait affectée ? »
La procédure devant la Cour
40 Par une décision du président de la Cour du 30 mars 2023, la procédure dans la présente affaire a été suspendue jusqu’au prononcé de l’arrêt à intervenir dans l’affaire Lin (C‑107/23 PPU).
41 La Cour ayant rendu, le 24 juillet 2023, son arrêt dans l’affaire Lin (C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606), le président de la Cour a ordonné, le même jour, la reprise de la procédure.
42 La juridiction de renvoi, à laquelle le greffe avait communiqué cet arrêt, a informé la Cour qu’elle entendait maintenir sa demande de décision préjudicielle.
43 Dans sa demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi a demandé à la Cour que la présente affaire soit soumise à la procédure accélérée prévue à l’article 105 du règlement de procédure de la Cour.
44 Au regard de la décision de statuer par voie d’ordonnance motivée conformément à l’article 99 du règlement de procédure, il n’y a plus lieu de statuer sur cette demande.
Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle
45 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il
pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer [arrêt du 21 mars 2023, Mercedes-Benz Group (Responsabilité des constructeurs de véhicules munis de dispositifs d’invalidation), C‑100/21, EU:C:2023:229, point 52 et jurisprudence citée].
46 Il s’ensuit que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit
nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées [arrêt du 21 mars 2023, Mercedes-Benz Group (Responsabilité des constructeurs de véhicules munis de dispositifs d’invalidation), C‑100/21, EU:C:2023:229, point 53 et jurisprudence citée].
47 En l’occurrence, la première question posée par la juridiction de renvoi porte, notamment, sur l’interprétation de l’article 325, paragraphe 1, TFUE, et de l’article 2, paragraphe 1, de la convention PIF, lesquels ont pour objet la protection des intérêts financiers de l’Union.
48 Il y a lieu de relever que le litige au principal concerne, comme il ressort du point 16 de la présente ordonnance, des infractions de corruption passive, de trafic d’influence et d’abus de fonction commises en relation avec des procédures de passation de marchés publics en Roumanie.
49 Or, à la différence des infractions de corruption en cause dans certains litiges en cause dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a. (C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034), qui avaient été commises en relation avec des procédures de passation de marchés publics partiellement financés par des fonds européens, aucun élément du dossier dont dispose la Cour ne tend à indiquer que les intérêts financiers de l’Union auraient été
affectés par les infractions faisant l’objet du litige au principal.
50 En particulier, la circonstance que la TVA a été appliquée dans le cadre des procédures de marchés publics concernées ne saurait suffire à considérer que les intérêts financiers de l’Union ont été affectés. De même, ne saurait être suffisant le fait, évoqué par la juridiction de renvoi, que les infractions commises ont pu porter préjudice au budget national, ce qui pourrait avoir une incidence sur le montant de la contribution de la Roumanie au budget de l’Union.
51 Il résulte de ce qui précède que la première question, dans la mesure où elle porte sur l’interprétation de l’article 325, paragraphe 1, TFUE, et de l’article 2, paragraphe 1, de la convention PIF, n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal. Elle est donc, dans cette mesure, manifestement irrecevable.
Sur les questions préjudicielles
52 En vertu de l’article 99 de son règlement de procédure, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence.
53 Il convient également de rappeler que la coopération judiciaire instaurée par l’article 267 TFUE est fondée sur une nette séparation des fonctions entre la Cour et les juridictions nationales. D’une part, la Cour est habilitée non pas à appliquer les règles du droit de l’Union à une espèce déterminée, mais seulement à se prononcer sur l’interprétation des traités et des actes pris par les institutions, les organes ou les organismes de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 18 mai 2021, Asociaţia
Forumul Judecătorilor din România e.a., C‑83/19, C‑127/19, C‑195/19, C‑291/19, C‑355/19 et C‑397/19, EU:C:2021:393, point 201 ainsi que jurisprudence citée). D’autre part, conformément au point 11 des recommandations de la Cour de justice de l’Union européenne à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles (JO 2019, C 380, p. 1), il revient aux juridictions nationales de tirer dans les litiges pendants devant elles les conséquences concrètes
des éléments d’interprétation fournis par la Cour (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2018, Roche Lietuva, C‑413/17, EU:C:2018:865, point 43).
54 En l’occurrence, malgré les doutes exprimés par la juridiction de renvoi, la Cour estime que l’interprétation du droit de l’Union sollicitée par la juridiction de renvoi peut être clairement déduite des arrêts du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a. (C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034), et du 24 juillet 2023, Lin (C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606). Il y a donc lieu de faire application de l’article 99 du règlement de procédure dans la présente affaire.
55 Ainsi qu’il ressort du point 53 de la présente ordonnance, il reviendra à la juridiction de renvoi de tirer les conséquences concrètes, dans le litige au principal, des éléments d’interprétation découlant de cette jurisprudence de la Cour.
56 Les questions posées par la juridiction de renvoi, qu’il convient d’examiner conjointement, portent, dans la mesure où elles sont recevables, sur l’interprétation de l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, de l’article 49, paragraphe 1, dernière phrase, et de l’article 53 de la Charte ainsi que de la décision 2006/928.
57 Toutefois, il ressort des motifs de la décision de renvoi que les doutes de la juridiction de renvoi à l’origine de ces questions portent, en substance, sur l’interprétation, d’une part, des dispositions du droit de l’Union imposant aux États membres de lutter efficacement contre la corruption et, d’autre part, des garanties découlant du principe de légalité des délits et des peines.
58 Dans ces conditions, il n’y a lieu d’examiner lesdites questions qu’au regard de la décision 2006/928 ainsi que de l’article 49, paragraphe 1, et de l’article 53 de la Charte.
59 Il s’ensuit que, par ses questions, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les dispositions du droit de l’Union mentionnées au point précédent doivent être interprétées en ce sens que les juridictions d’un État membre sont tenues de laisser inappliqués, d’une part, des arrêts de la Cour constitutionnelle de cet État membre invalidant la disposition législative nationale qui régit les causes d’interruption du délai de prescription en matière pénale, en raison d’une atteinte au principe
de légalité des délits et des peines, dans ses exigences relatives à la prévisibilité et à la précision de la loi pénale, ainsi que, d’autre part, un arrêt de la juridiction suprême dudit État membre, dont il ressort que les règles régissant ces causes d’interruption, telles qu’elles découlent de cette jurisprudence constitutionnelle, peuvent être appliquées rétroactivement en tant que loi pénale plus favorable (lex mitior) afin de remettre en cause des condamnations définitives, étant entendu
que ces arrêts ont pour conséquence qu’un nombre considérable d’affaires pénales, y compris des affaires relatives à des infractions de corruption, seront clôturées en raison de la prescription de la responsabilité pénale.
Sur la méconnaissance de l’obligation incombant à la Roumanie de lutter de manière effective contre la corruption
60 La Cour a déjà eu l’opportunité de juger que la décision 2006/928 est, aussi longtemps qu’elle n’a pas été abrogée, obligatoire dans tous ses éléments pour la Roumanie et que les objectifs de référence qui figurent à son annexe, lesquels visent à assurer le respect par cet État membre de la valeur de l’État de droit énoncée à l’article 2 TUE, revêtent un caractère contraignant pour ledit État membre, en ce sens que ce dernier est tenu de prendre les mesures appropriées aux fins de la réalisation
de ces objectifs en tenant dûment compte, au titre du principe de coopération loyale énoncé à l’article 4, paragraphe 3, TUE, des rapports établis par la Commission sur la base de ladite décision, en particulier des recommandations formulées dans lesdits rapports (arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a., C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034, point 175).
61 Parmi les objectifs de référence énoncés à l’annexe de la décision 2006/928 figurent celui de « continuer, en se basant sur les progrès déjà accomplis, à mener des enquêtes professionnelles et non partisanes sur les allégations de corruption de haut niveau » (troisième objectif de référence) ainsi que celui de « prendre des mesures supplémentaires pour prévenir et combattre la corruption, en particulier au sein de l’administration locale » (quatrième objectif de référence).
62 Il résulte de ces objectifs de référence, qui revêtent un caractère contraignant pour la Roumanie, que la décision 2006/928 établit l’obligation, pour la Roumanie, de lutter de manière effective contre la corruption en général et, en particulier, la corruption de haut niveau, tout particulièrement au sein de l’administration locale. À cet égard, il ressort de la décision de renvoi que C.A.A. occupait une importante fonction de direction au sein d’une administration publique locale en Roumanie.
63 En vue de se conformer aux prescriptions de cette décision, qui exigent de prévenir et de combattre la corruption telle que visée au point précédent, la Roumanie est tenue de prévoir des sanctions pénales revêtant un caractère effectif et dissuasif (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a., C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034, points 190 et 191).
64 Il appartient en outre à la Roumanie d’assurer que ses règles de droit pénal et de procédure pénale permettent une répression effective des infractions de corruption. Ainsi, si les sanctions prévues et les procédures pénales instituées pour lutter contre ces infractions relèvent de la compétence de cet État membre, cette compétence est limitée non seulement par les principes de proportionnalité et d’équivalence, mais également par le principe d’effectivité, lequel impose que lesdites sanctions
présentent un caractère effectif et dissuasif. Cette exigence d’effectivité s’étend nécessairement tant aux poursuites et aux sanctions des infractions de corruption qu’à l’application des peines infligées, dans la mesure où, en l’absence d’exécution effective des sanctions, celles-ci ne sauraient présenter un caractère effectif et dissuasif (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a., C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034, point 192).
65 En l’occurrence, il ressort des explications fournies par la juridiction de renvoi, telles que résumées aux points 18 à 26 de la présente ordonnance, que, d’une part, en application des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), durant la période allant du 25 juin 2018, date de la publication de cet arrêt no 297/2018, au 30 mai 2022, date de l’entrée en vigueur de l’OUG no 71/2022, le droit roumain ne prévoyait aucun cas permettant l’interruption du
délai de prescription de la responsabilité pénale et que, d’autre part, selon l’arrêt no 67/2022 de l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice), la règle résultant de cette jurisprudence constitutionnelle peut être invoquée en tant que loi pénale plus favorable (lex mitior), et ce y compris pour remettre en cause des condamnations définitives.
66 En ce qui concerne les effets concrets qui seraient susceptibles de s’attacher à ladite jurisprudence, la juridiction de renvoi indique que, dans le cadre du litige au principal, l’application, en tant que loi pénale plus favorable (lex mitior), de la règle résultant des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), selon laquelle, durant la période visée au point précédent, le droit roumain ne prévoyait pas de cause d’interruption du délai de prescription
de la responsabilité pénale, aurait pour conséquence que le délai de prescription prévu pour les infractions en cause au principal aurait expiré avant que la condamnation des demandeurs au principal ne soit devenue définitive, ce qui entraînerait la clôture de la procédure pénale et l’impossibilité de condamner ces derniers.
67 La juridiction de renvoi a également souligné que les arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) sont susceptibles d’affecter un « nombre particulièrement élevé d’affaires », y compris des affaires clôturées par le prononcé de condamnations définitives, qui pourraient être remises en cause au moyen de recours extraordinaires tels que ceux en cause au principal.
68 En outre, les données présentées par la Commission dans son rapport mentionné au point 38 de la présente ordonnance, établi en exécution de l’article 2 de la décision 2006/928, confirment l’existence du risque que de nombreux cas de corruption ne puissent plus être sanctionnés en raison de la prescription de la responsabilité pénale qui s’y rattache. En effet, il ressort de ce rapport, évoqué par la juridiction de renvoi, que les arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour
constitutionnelle) pourraient conduire « à la clôture de la procédure pénale et à la suppression de la responsabilité pénale dans un très grand nombre d’affaires » et que « l’arrêt de la procédure pénale dans un nombre aussi élevé d’affaires de corruption peut avoir une incidence significative sur les efforts de lutte contre la corruption à haut niveau ».
69 Il peut être déduit des éléments qui précèdent que la situation juridique qui résulte de l’application des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) ainsi que de l’arrêt no 67/2022 de l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice) engendre un risque systémique d’impunité pour les infractions de corruption, en particulier dans les affaires dont la complexité appelle une instruction plus longue de la part des autorités
pénales (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 91).
70 Or, l’existence d’un tel risque systémique d’impunité est incompatible avec les exigences de la décision 2006/928, telles que rappelées aux points 59 à 61 de la présente ordonnance.
71 À cet égard, il incombe, au premier chef, au législateur national de prendre les mesures nécessaires pour satisfaire à ces exigences, en adoptant les dispositions nécessaires ou en modifiant les dispositions existantes afin de garantir que le régime applicable à la poursuite et à la sanction des infractions de corruption, y compris les règles gouvernant la prescription de la responsabilité pénale, soit conforme aux exigences de la décision 2006/928. Ce régime doit être conçu de telle manière
qu’il ne présente pas, pour des raisons inhérentes à celui-ci, un risque systémique d’impunité des faits constitutifs de telles infractions, tout en assurant la protection des droits fondamentaux des personnes poursuivies (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 93).
72 Or, une situation juridique dans laquelle la réglementation d’un État membre régissant l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale a été invalidée et, partant, privée d’effet par la Cour constitutionnelle de cet État membre, sans que le législateur national ait remédié à cette situation pendant une période de près de quatre années, est incompatible avec l’obligation, rappelée aux points 59 à 61 de la présente ordonnance, de veiller à ce que les infractions de corruption,
commises sur le territoire national, soient passibles de sanctions pénales revêtant un caractère effectif et dissuasif. En effet, une telle situation, qui affecte une disposition à portée générale qui était applicable à toute procédure pénale et dont le non‑remplacement, à la suite de sa déclaration d’inconstitutionnalité, n’était prévisible ni par les autorités chargées des poursuites ni par les juridictions pénales, comporte le risque intrinsèque que de nombreux cas de corruption ne puissent
pas être sanctionnés en raison de l’expiration de ce délai, en particulier dans les affaires dont la complexité appelle une instruction plus longue de la part des autorités pénales (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 94).
Sur les obligations incombant aux juridictions nationales
73 Il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de primauté du droit de l’Union impose au juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l’Union l’obligation, à défaut de pouvoir procéder à une interprétation de la réglementation nationale conforme aux exigences de droit de l’Union, d’assurer le plein effet des exigences de ce droit dans le litige dont il est saisi en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute
réglementation ou pratique nationale, même postérieure, qui est contraire à une disposition du droit de l’Union qui est d’effet direct, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de cette réglementation ou pratique nationale par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel (arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 95).
74 En l’occurrence, les objectifs de référence énoncés à l’annexe de la décision 2006/928 sont formulés en des termes clairs et précis et ne sont assortis d’aucune condition, si bien qu’ils sont d’effet direct (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a., C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034, point 253).
75 Dès lors, il incombe, en principe, aux juridictions nationales de donner plein effet aux obligations découlant de cette décision ainsi que de laisser inappliquées des dispositions internes qui, dans le cadre d’une procédure concernant des infractions de corruption, font obstacle à l’application de sanctions effectives et dissuasives pour lutter contre de telles infractions (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box Promotion e.a., C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19,
EU:C:2021:1034, point 194).
76 Il apparaît ainsi que, en principe, les juridictions nationales sont tenues, conformément à la décision 2006/928, de laisser inappliqués les arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle), dont il résulte que, durant la période allant du 25 juin 2018, date de la publication de cet arrêt no 297/2018, au 30 mai 2022, date de l’entrée en vigueur de l’OUG no 71/2022, le droit roumain ne prévoyait aucune cause d’interruption du délai de prescription de la
responsabilité pénale, dans la mesure où ces arrêts ont pour effet de conduire à la prescription de la responsabilité pénale dans un grand nombre de cas de corruption et, partant, comme il a été constaté au point 66 de la présente ordonnance, de créer un risque systémique d’impunité pour de telles infractions (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 98).
77 De même, les juridictions nationales sont tenues, en principe, conformément à ces dispositions, de laisser inappliqué l’arrêt no 67/2022 de l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice), dans la mesure où cet arrêt permet d’invoquer la prescription de la responsabilité pénale, sur le fondement des effets des arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) en tant que loi pénale plus favorable (lex mitior), dans des cas de
corruption et, partant, accroît le risque systémique d’impunité pour de telles infractions (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 99).
78 Cependant, il est encore nécessaire de vérifier si l’obligation de laisser inappliqués de tels arrêts se heurte, dans une situation telle que celle en cause au principal, à la protection des droits fondamentaux (arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 100).
79 À cet égard, il convient d’observer, en premier lieu, que les procédures pénales ayant pour objet des infractions de corruption constituent une mise en œuvre des obligations qui incombent à la Roumanie en vertu de la décision 2006/928 et, donc, du droit de l’Union, au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte. Le droits fondamentaux garantis par la Charte aux personnes concernées dans l’affaire au principal doivent donc être respectés (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Euro Box
Promotion e.a., C‑357/19, C‑379/19, C‑547/19, C‑811/19 et C‑840/19, EU:C:2021:1034, point 204).
80 Or, il y a lieu de relever que, ainsi que la Cour l’a jugé au point 109 de l’arrêt du 24 juillet 2023, Lin (C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606), l’obligation, pour les juridictions nationales, de laisser inappliqués les arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) ainsi que l’arrêt no 67/2022 de l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice) n’est de nature à porter atteinte ni au principe de prévisibilité, de précision et de
non‑rétroactivité des délits et des peines ni au principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior), tels qu’ils sont garantis à l’article 49, paragraphe 1, de la Charte.
81 En second lieu, il importe de rappeler que, lorsque, comme en l’occurrence, une juridiction d’un État membre est appelée à contrôler la conformité aux droits fondamentaux d’une disposition ou d’une mesure nationale qui, dans une situation dans laquelle l’action des États membres n’est pas entièrement déterminée par le droit de l’Union, met en œuvre ce droit au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, il reste loisible aux autorités et aux juridictions nationales d’appliquer des standards
nationaux de protection des droits fondamentaux, pourvu que cette application ne compromette pas le niveau de protection prévu par la Charte, telle qu’interprétée par la Cour, ni la primauté, l’unité et l’effectivité du droit de l’Union (arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 110).
82 Au point 111 de l’arrêt du 24 juillet 2023, Lin (C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606), la Cour a constaté que les solutions adoptées dans les arrêts nos 297/2018 et 358/2022 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) ainsi que dans l’arrêt no 67/2022 de l’Înalta Curte de Casație și Justiție (Haute Cour de cassation et de justice) reposent sur le principe de légalité des délits et des peines ainsi que sur le principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior) tels
qu’ils sont garantis par la constitution roumaine, ces principes devant être considérés comme étant des standards nationaux de protection des droits fondamentaux.
83 Il résulte, en substance, du point 118 de l’arrêt du 24 juillet 2023, Lin (C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606), que les juridictions roumaines ne sont pas tenues de laisser inappliquée la jurisprudence nationale visée au point précédent, conformément à la décision 2006/928, nonobstant l’existence d’un risque systémique d’impunité des infractions de corruption, dans la mesure où cette jurisprudence nationale est fondée sur le principe de légalité des délits et des peines tel que protégé en droit
national, dans ses exigences relatives à la prévisibilité et à la précision de la loi pénale, y compris du régime de prescription relatif aux infractions pénales.
84 En revanche, compte tenu de la nécessaire mise en balance du standard national de protection relatif au principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior) avec les dispositions de la décision 2006/928, l’application, par un juge national, dudit standard, pour remettre en cause l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale par des actes de procédure intervenus avant le 25 juin 2018, date de la publication de l’arrêt no 297/2018 de la Curtea
Constituțională (Cour constitutionnelle), doit être considérée comme étant de nature à compromettre la primauté, l’unité et l’effectivité du droit de l’Union, au sens de la jurisprudence rappelée au point 76 de la présente ordonnance (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 123).
85 Par conséquent, il y a lieu de considérer que les juridictions nationales ne peuvent, dans le cadre de procédures juridictionnelles visant à sanctionner sur le plan pénal des infractions de corruption, appliquer le standard national de protection relatif au principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior), tel que visé au point 62 de la présente ordonnance, en vue de remettre en cause l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale par des
actes de procédure intervenus avant le 25 juin 2018, date de la publication de l’arrêt no 297/2018 de la Curtea Constituțională (Cour constitutionnelle) (voir, en ce sens, arrêt du 24 juillet 2023, Lin, C‑107/23 PPU, EU:C:2023:606, point 124).
86 Dans ces conditions, il convient de répondre aux questions posées que la décision 2006/928 doit être interprétée en ce sens que les juridictions d’un État membre ne sont pas tenues de laisser inappliqués les arrêts de la Cour constitutionnelle de cet État membre invalidant la disposition législative nationale qui régit les causes d’interruption du délai de prescription en matière pénale en raison d’une atteinte au principe de légalité des délits et des peines tel que protégé en droit national,
dans ses exigences relatives à la prévisibilité et à la précision de la loi pénale, même si ces arrêts ont pour conséquence qu’un nombre considérable d’affaires pénales, y compris des affaires relatives à des infractions de corruption, seront clôturées en raison de la prescription de la responsabilité pénale. En revanche, cette décision doit être interprétée en ce sens que les juridictions de cet État membre sont tenues de laisser inappliqué un standard national de protection relatif au principe
de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior) qui permet de remettre en cause, y compris dans le cadre de recours dirigés contre des jugements définitifs, l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale dans de telles affaires par des actes de procédure intervenus avant un tel constat d’invalidité.
Sur les dépens
87 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :
La décision 2006/928/CE de la Commission, du 13 décembre 2006, établissant un mécanisme de coopération et de vérification des progrès réalisés par la Roumanie en vue d’atteindre certains objectifs de référence spécifiques en matière de réforme du système judiciaire et de lutte contre la corruption,
doit être interprétée en ce sens que :
les juridictions d’un État membre ne sont pas tenues de laisser inappliqués les arrêts de la Cour constitutionnelle de cet État membre invalidant la disposition législative nationale qui régit les causes d’interruption du délai de prescription en matière pénale en raison d’une atteinte au principe de légalité des délits et des peines tel que protégé en droit national, dans ses exigences relatives à la prévisibilité et à la précision de la loi pénale, même si ces arrêts ont pour conséquence qu’un
nombre considérable d’affaires pénales, y compris des affaires relatives à des infractions de corruption, seront clôturées en raison de la prescription de la responsabilité pénale.
En revanche, cette décision doit être interprétée en ce sens que :
les juridictions de cet État membre sont tenues de laisser inappliqué un standard national de protection relatif au principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable (lex mitior) qui permet de remettre en cause, y compris dans le cadre de recours dirigés contre des jugements définitifs, l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale dans de telles affaires par des actes de procédure intervenus avant un tel constat d’invalidité.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le roumain.