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20/04/2023 | CJUE | N°C-580/21

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, EEW Energy from Waste Großräschen GmbH contre MNG Mitteldeutsche Netzgesellschaft Strom GmbH., 20/04/2023, C-580/21


 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

20 avril 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2009/28/CE – Promotion de l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables – Article 16, paragraphe 2, sous c) – Accès aux réseaux de transport et de distribution – Accès prioritaire conféré à l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables – Production à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles »

Dans l’affaire C‑580/21,

ayan

t pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale d...

 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

20 avril 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2009/28/CE – Promotion de l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables – Article 16, paragraphe 2, sous c) – Accès aux réseaux de transport et de distribution – Accès prioritaire conféré à l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables – Production à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles »

Dans l’affaire C‑580/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), par décision du 6 juillet 2021, parvenue à la Cour le 22 septembre 2021, dans la procédure

EEW Energy from Waste Großräschen GmbH

contre

MNG Mitteldeutsche Netzgesellschaft Strom GmbH,

en présence de :

50 Hertz Transmission GmbH,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. D. Gratsias, F. Biltgen, I. Jarukaitis et Z. Csehi (rapporteur), juges,

avocat général : M. A. Rantos,

greffier : M. D. Dittert, chef d’unité,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 septembre 2022,

considérant les observations présentées :

– pour EEW Energy from Waste Großräschen GmbH, par Mes B. Rechner et A. Vallone, Rechtsanwälte,

– pour MNG Mitteldeutsche Netzgesellschaft Strom GmbH, par Mes B. Christ et T. Höch, Rechtsanwälte,

– pour 50 Hertz Transmission GmbH, par Mes T. Burmeister et L. Reichstein, Rechtsanwälte,

– pour la Commission européenne, par MM. B. De Meester et G. Wils, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 17 novembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE (JO 2009, L 140, p. 16), lu en combinaison avec l’article 2, sous a) et e), de cette directive, ainsi que de l’article 5, paragraphe 3, deuxième
alinéa, de ladite directive.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant EEW Energy from Waste Großräschen GmbH (ci-après « EEW ») à MNG Mitteldeutsche Netzgesellschaft Strom GmbH (ci-après « MNG Strom ») au sujet du préjudice que EEW aurait subi à la suite de demandes récurrentes émanant de MNG Strom concernant l’accès aux réseaux en ce qui concerne l’électricité produite par EEW.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2001/77/CE

3 Aux termes de l’article 2, sous c), de la directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 septembre 2001, relative à la promotion de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables sur le marché intérieur de l’électricité (JO 2001, L 283, p. 33) :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

c) “électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables” : l’électricité produite par des installations utilisant exclusivement des sources d’énergie renouvelables, ainsi que la part d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables dans des installations hybrides utilisant les sources d’énergie classiques, y compris l’électricité renouvelable utilisée pour remplir les systèmes de stockage, et à l’exclusion de l’électricité produite à partir de ces systèmes ».

La directive 2009/28

4 Les considérants 11, 60 et 61 de la directive 2009/28, avant son abrogation par la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2018, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (JO 2018, L 328, p. 82), étaient libellés comme suit :

« (11) Il est nécessaire de définir des règles claires et transparentes pour le calcul de la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et pour préciser lesdites sources. [...]

[...]

(60) Un accès prioritaire et un accès garanti pour l’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables sont importants pour intégrer les sources d’énergie renouvelables dans le marché intérieur de l’électricité, conformément à l’article 11, paragraphe 2, et approfondir l’article 11, paragraphe 3, de la [directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive
96/92/CE – Déclarations concernant les opérations de déclassement et de gestion des déchets (JO 2003, L 176, p. 37)]. Les exigences relatives au maintien de la fiabilité et de la sécurité du réseau et à l’appel peuvent différer en fonction des caractéristiques du réseau national et de son bon fonctionnement. L’accès prioritaire au réseau donne aux producteurs connectés d’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables l’assurance qu’ils seront en mesure de vendre et de transporter
l’électricité issue de sources d’énergie renouvelables conformément aux règles de raccordement à tout moment lorsque la source devient disponible. Lorsque l’électricité issue de sources d’énergie renouvelables est intégrée dans le marché au comptant, l’accès garanti assure que toute l’électricité vendue et bénéficiant d’une aide a accès au réseau, ce qui permet d’utiliser une quantité maximale d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables provenant d’installations
raccordées au réseau. Toutefois, cela n’oblige pas les États membres à soutenir ou à rendre obligatoire l’achat d’énergie produite à partir de sources renouvelables. Dans d’autres systèmes, un prix fixe est défini pour l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, en général en liaison avec une obligation d’achat pour l’opérateur du réseau. Dans ce cas, l’accès prioritaire a déjà été donné.

(61) Dans certaines circonstances, il n’est pas possible de garantir complètement le transport et la distribution d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables sans altérer la fiabilité ou la sécurité du réseau. Il pourrait alors être justifié d’accorder une compensation financière à ces producteurs. Cependant, la présente directive a pour objectif une augmentation durable du transport et de la distribution d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables
sans que soient affectées la fiabilité ou la sécurité du réseau. À cette fin, les États membres devraient prendre des mesures appropriées afin de permettre une pénétration plus forte de l’électricité provenant de sources renouvelables, notamment en tenant compte des particularités des ressources variables et des ressources qui ne peuvent pas encore être stockées. Dans la mesure où les objectifs fixés en vertu de la présente directive le requièrent, le raccordement des nouvelles installations
d’énergie renouvelable devrait être autorisé le plus rapidement possible. Pour accélérer les procédures de raccordement au réseau, les États membres pourraient prévoir des raccordements prioritaires ou des capacités de raccordement réservées aux nouvelles installations produisant de l’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. »

5 L’article 1er de la directive 2009/28, intitulé « Objet et champ d’application », prévoyait :

« La présente directive définit un cadre commun pour la promotion de la production d’énergie à partir de sources renouvelables. Elle fixe des objectifs nationaux contraignants concernant la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie et la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation d’énergie pour les transports. Elle établit des règles concernant les transferts statistiques entre les États membres,
les projets conjoints entre ceux-ci et avec des pays tiers, les garanties d’origine, les procédures administratives, l’information, la formation et l’accès au réseau électrique pour l’énergie produite à partir de sources renouvelables. [...] »

6 L’article 2 de cette directive disposait :

« Aux fins de la présente directive, les définitions de la [directive 2003/54] s’appliquent.

Les définitions suivantes s’appliquent également :

a) “énergie produite à partir de sources renouvelables” : une énergie produite à partir de sources non fossiles renouvelables, à savoir : énergie éolienne, solaire, aérothermique, géothermique, hydrothermique, marine et hydroélectrique, biomasse, gaz de décharge, gaz des stations d’épuration d’eaux usées et biogaz ;

[...]

e) “biomasse” : la fraction biodégradable des produits, des déchets et des résidus d’origine biologique provenant de l’agriculture (y compris les substances végétales et animales), de la sylviculture et des industries connexes, y compris la pêche et l’aquaculture, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux ;

[...]

j) “garantie d’origine” : un document électronique servant uniquement à prouver au client final qu’une part ou une quantité déterminée d’énergie a été produite à partir de sources renouvelables comme l’exige l’article 3, paragraphe 6, de la [directive 2003/54] ;

[...] »

7 L’article 5, paragraphes 1 et 3, de ladite directive était rédigé comme suit :

« 1.   La consommation finale brute d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans chaque État membre est calculée comme étant la somme :

a) de la consommation finale brute d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables ;

[...]

3.   Aux fins du paragraphe 1, point a), la consommation finale brute d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables est la quantité d’électricité produite dans un État membre à partir de sources renouvelables, à l’exclusion de l’électricité produite dans des systèmes d’accumulation par pompage à partir de l’eau pompée auparavant en amont.

Dans les installations multicombustible utilisant aussi bien des sources d’énergie renouvelables que conventionnelles, seule la part de l’électricité produite à partir de sources renouvelables est prise en compte. Pour effectuer ce calcul, la contribution de chaque source d’énergie est calculée sur la base de son contenu énergétique.

L’électricité produite à partir de l’énergie hydraulique et de l’énergie éolienne entre en ligne de compte conformément aux formules de normalisation énoncées à l’annexe II. »

8 L’article 15, paragraphe 1, de la même directive disposait :

« Aux fins de démontrer aux clients finals la part ou la quantité d’énergie produite à partir de sources renouvelables que contient le bouquet énergétique d’un fournisseur d’énergie, conformément à l’article 3, paragraphe 6, de la [directive 2003/54], les États membres font en sorte que l’origine de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables puisse être garantie comme telle au sens de la présente directive, selon des critères objectifs, transparents et non
discriminatoires. »

9 Aux termes de l’article 16, paragraphes 1 et 2, de la directive 2009/28 :

« 1.   Les États membres prennent les mesures appropriées pour développer l’infrastructure du réseau de transport et de distribution, des réseaux intelligents, des installations de stockage et le réseau électrique de manière à permettre la gestion du réseau électrique en toute sécurité et à tenir compte des progrès dans le domaine de la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, notamment l’interconnexion entre États membres, et entre États membres et pays tiers. Les
États membres prennent également des mesures appropriées pour accélérer les procédures d’autorisation pour l’infrastructure de réseau et pour coordonner l’approbation de l’infrastructure de réseau et les procédures administratives et d’aménagement.

2.   Sous réserve des exigences relatives au maintien de la fiabilité et de la sécurité du réseau, reposant sur des critères transparents et non discriminatoires définis par les autorités nationales compétentes :

a) les États membres veillent à ce que les opérateurs de systèmes de transport et de distribution présents sur leur territoire garantissent le transport et la distribution de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables ;

b) les États membres prévoient, en outre, soit un accès prioritaire, soit un accès garanti au réseau pour l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables ;

c) les États membres font en sorte que, lorsqu’ils appellent les installations de production d’électricité, les gestionnaires de réseau de transport donnent la priorité à celles qui utilisent des sources d’énergie renouvelables, dans la mesure où la gestion en toute sécurité du réseau national d’électricité le permet et sur la base de critères transparents et non discriminatoires. Les États membres veillent à ce que les mesures concrètes appropriées concernant le réseau et le marché soient prises
pour minimiser l’effacement de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables. Si des mesures significatives sont prises pour effacer les sources d’énergie renouvelables en vue de garantir la sécurité du réseau national d’électricité ainsi que la sécurité d’approvisionnement énergétique, les États membres veillent à ce que les gestionnaires du réseau responsables rendent compte devant l’autorité nationale de régulation compétente de ces mesures et indiquent quelles mesures
correctives ils entendent prendre afin d’empêcher toute réduction inappropriée. »

Le droit allemand

10 L’article 3, intitulé « Définitions », du Erneuerbare-Energien-Gesetz (loi relative aux énergies renouvelables), du 25 octobre 2008 (BGBl. 2011 I, p. 1634), dans sa version en vigueur du 1er janvier 2012 au 31 juillet 2014 (ci-après l’« EEG de 2012 »), disposait :

« Aux fins de la présente loi, on entend par :

1) “installation”, tout établissement de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables [...]

3) “énergies renouvelables”, [...] l’énergie de la biomasse [...] ainsi que de la fraction biodégradable des déchets municipaux et industriels,

[...] »

11 L’article 11, intitulé « Gestion de l’alimentation du réseau en électricité », de l’EEG de 2012 prévoyait, à son paragraphe 1 :

« [L]es gestionnaires de réseau sont exceptionnellement habilités à réguler les installations [...] directement ou indirectement raccordées à leur réseau [...] :

1) si, à défaut de régulation, il se produisait une congestion dans la zone du réseau concernée, en ce compris dans le réseau en amont,

2) à condition que l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables [...] continue de bénéficier de la priorité, pour autant que d’autres installations de production d’électricité ne doivent pas rester connectées au réseau en vue de garantir la sécurité et la fiabilité du système d’approvisionnement en électricité [...]

[...] »

12 L’article 12, intitulé « Dispositions exceptionnelles », de l’EEG de 2012 prévoyait, à son paragraphe 1 :

« Lorsque l’alimentation du réseau en électricité provenant d’installations de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables [...] est réduite en raison d’une congestion, conformément à l’article 11, paragraphe 1, les exploitants concernés par cette mesure sont indemnisés [...] à hauteur de 95 % de la perte de revenus subie, majorée des dépenses supplémentaires auxquelles ils ont dû faire face et minorée des frais qu’elle leur a permis d’économiser. [...] »

13 Il ressort de la demande de décision préjudicielle que ces dispositions de l’EEG de 2012 correspondent, en substance, à celles des trois versions de l’EEG successivement applicables au litige au principal.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

14 EEW exploite à Großräschen (Allemagne) une installation de traitement thermique des déchets qui lui permet de produire de l’énergie électrique et thermique. Une partie de ces déchets, constituée de déchets biodégradables, est traitée par incinération en même temps que d’autres types de déchets. La part de déchets biodégradables serait variable et pourrait représenter jusqu’à 50 % du volume total des déchets. Une partie de l’électricité produite par cette installation alimente le réseau dont
MNG Strom est gestionnaire, à laquelle EEW est liée par une convention de raccordement et d’achat.

15 Entre l’année 2011 et l’année 2016, MNG Strom a demandé à de nombreuses reprises, dans le cadre de sa gestion de la sécurité du réseau et, le cas échéant, en concertation avec 50 Hertz Transmission GmbH en tant que gestionnaire de réseau de transport, que EEW réduise temporairement l’alimentation des réseaux respectifs en raison de problèmes de congestion. En conséquence, EEW a introduit une action contre MNG Strom par laquelle elle lui a réclamé le paiement d’une somme de 2,24 millions d’euros à
titre d’indemnisation, sur le fondement, notamment, de l’article 12 de l’EEG de 2012.

16 La juridiction d’appel a débouté EEW de son action au motif que l’électricité produite dans l’installation d’EEW ne l’est pas exclusivement à partir de sources d’énergie renouvelables, de sorte que cette installation ne pouvait être qualifiée d’« installation de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables », au sens des dispositions nationales applicables.

17 EEW a introduit un recours en Revision contre cette décision devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), la juridiction de renvoi.

18 Selon cette juridiction, l’issue de ce recours dépend de la réponse à la question de savoir si l’installation d’EEW constitue une « installation de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables », au sens de l’article 12 de l’EEG de 2012, lu à la lumière de l’article 2, sous c), de la directive 2001/77 et des dispositions de la directive 2009/28, notamment son article 16, paragraphe 2, sous c).

19 Dans ces conditions, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’article 16, paragraphe 2, sous c), lu en combinaison avec l’article 2, sous a) et e), de la directive 2009/28, doit-il être interprété en ce sens que la priorité aux fins de l’alimentation du réseau en électricité doit également être donnée aux installations de production d’électricité dans lesquelles celle-ci est produite par traitement thermique de déchets en mélange contenant une fraction variable de déchets biodégradables industriels et municipaux ?

2) Dans le cas où la première question appellerait une réponse affirmative : la priorité aux fins de l’alimentation du réseau en électricité prévue à l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28 dépend-elle de l’importance de la fraction des déchets biodégradables utilisés pour la production d’électricité selon le processus décrit à la première question ?

3) Dans le cas où la deuxième question appellerait une réponse affirmative : s’agissant de l’importance de la fraction des déchets biodégradables, existe-t-il un seuil en deçà duquel l’électricité produite ne bénéficie pas de la législation applicable à l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables ?

4) Dans le cas où la troisième question appellerait une réponse affirmative : à quelle fraction des déchets biodégradables ce seuil correspond-il ou comment doit-il être déterminé ?

5) Dans le cas où les première et deuxième questions appelleraient une réponse affirmative : si l’électricité dont seule une part est produite à partir de déchets biodégradables bénéficie de la législation applicable à l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, la ratio legis de l’article 5, paragraphe 3, deuxième alinéa, de la directive 2009/28 peut-elle être invoquée afin que cette législation ne s’applique qu’à la part de l’électricité produite à partir de sources
d’énergie renouvelables, celle-ci étant alors calculée sur la base du contenu énergétique de chaque source d’énergie ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

20 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28 doit être interprété en ce sens que la priorité d’accès au réseau électrique dont bénéficient les installations de production d’électricité qui utilisent des sources d’énergie renouvelables doit être accordée non pas uniquement aux installations produisant de l’électricité exclusivement à partir de sources d’énergie renouvelables, mais également à celles qui en
produisent à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles.

21 Aux termes de l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28, les États membres font en sorte que, lorsqu’ils font appel aux installations de production d’électricité, les gestionnaires de réseau de transport donnent la priorité à celles qui utilisent des sources d’énergie renouvelables, dans la mesure où la gestion en toute sécurité du réseau national d’électricité le permet et sur la base de critères transparents et non discriminatoires.

22 Si la directive 2009/28 définit, à son article 2, sous a), la notion d’« énergie produite à partir de sources renouvelables » comme incluant, notamment, la « biomasse », et, à son article 2, sous e), la notion de « biomasse » comme incluant, notamment, « la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux », elle ne précise pas, en revanche, la portée de la notion d’« installation de production d’électricité qui utilise des sources d’énergie renouvelables », au sens de son article 16,
paragraphe 2, sous c).

23 Dans ces conditions, selon une jurisprudence constante de la Cour, il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit de l’Union qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée doivent normalement trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme qui doit être recherchée en tenant compte non seulement des termes, mais également du
contexte de la disposition et de l’objectif poursuivi par la réglementation en cause [arrêt du 2 juin 2022, T. N. et N. N. (Déclaration concernant la renonciation à la succession), C‑617/20, EU:C:2022:426, point 35 et jurisprudence citée].

24 S’agissant d’abord du libellé de l’article 16, paragraphe 2, sous c), première phrase, de la directive 2009/28, celui-ci, en se référant aux installations qui « utilisent » des sources d’énergie renouvelables, ne permet pas, à lui seul, de déterminer si cette disposition vise les seules installations produisant de l’électricité exclusivement à partir de sources d’énergie renouvelables ou si elle s’applique également à celles qui n’utilisent, à cette fin, que pour partie de telles sources
d’énergie.

25 Par ailleurs, la deuxième phrase de cette même disposition, qui se réfère à des mesures devant être prises pour minimiser le non-recours à de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, semble, en utilisant le verbe « minimiser », partir du principe que l’accès prioritaire devrait également pouvoir être accordé aux installations n’utilisant que partiellement des sources d’énergie renouvelables. En effet, l’exclusion de telles installations aurait pour conséquence d’exclure
de l’accès prioritaire une partie, le cas échéant significative, de l’électricité « verte ».

26 Ensuite, s’agissant du contexte dans lequel s’inscrit ladite disposition, la directive 2001/77 définissait, à son article 2, sous c), l’« électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables » comme « l’électricité produite par des installations utilisant exclusivement des sources d’énergie renouvelables, ainsi que la part d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables dans des installations hybrides utilisant les sources d’énergie classiques ».

27 Or, la directive 2009/28, qui a remplacé la directive 2001/77 et qui était en vigueur à la date des faits au principal, n’a pas repris cette définition. Cette directive définit, à son article 2, sous a), l’« énergie produite à partir de sources renouvelables » comme une « énergie produite à partir de sources non fossiles renouvelables » et elle précise, par la suite, quelles sont les sources renouvelables qui relèvent de cette définition. Par conséquent, ainsi que l’a fait remarquer 50 Hertz
Transmission, la qualification d’« électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables » ne dépend plus du type d’installation dans laquelle l’électricité a été produite, mais uniquement des sources d’énergie utilisées par ces installations pour produire de l’électricité.

28 Enfin, en ce qui concerne les objectifs poursuivis par la directive 2009/28, celle-ci, conformément à son article 1er, a pour objet de définir un cadre commun pour la promotion de la production d’énergie à partir de sources renouvelables en fixant, notamment, des objectifs nationaux contraignants concernant la part de l’énergie produite à partir de telles sources dans la consommation finale brute d’énergie.

29 En outre, il ressort du considérant 60 de cette directive qu’elle vise, au travers de l’intégration de l’électricité issue de sources d’énergie renouvelables dans le marché au comptant, à favoriser au maximum l’utilisation d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables. Le considérant 61 de ladite directive énonce que celle-ci a pour objectif une augmentation durable du transport et de la distribution d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables et que, à
cette fin, les États membres devraient prendre des mesures appropriées afin de permettre une pénétration plus forte de l’électricité provenant de sources renouvelables.

30 Par ailleurs, selon la jurisprudence de la Cour, s’agissant de l’accès garanti au réseau prévu à l’article 16, paragraphe 2, sous b), de la directive 2009/28, celui-ci vise à intégrer les sources d’énergie renouvelables dans le marché intérieur de l’électricité en assurant que toute l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables a accès aux réseaux, ce qui permet d’utiliser une quantité maximale d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables (voir, en ce
sens, arrêt du 27 janvier 2022, Fondul Proprietatea, C‑179/20, EU:C:2022:58, point 62).

31 Or, les objectifs tenant à recourir au maximum à de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables et à une augmentation durable du transport et de la distribution d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables risqueraient d’être compromis si une installation de production d’électricité qui n’utilise pas exclusivement des sources d’énergie renouvelables était, de ce fait, assimilée à une installation n’ayant recours qu’à des sources d’énergie
conventionnelles et, par suite, exclue de l’accès prioritaire prévu à l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28.

32 Partant, il convient de répondre à la première question que l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28 doit être interprété en ce sens que la priorité d’accès au réseau électrique dont bénéficient les installations de production d’électricité qui utilisent des sources d’énergie renouvelables doit être accordée non pas uniquement aux installations produisant de l’électricité exclusivement à partir de sources d’énergie renouvelables, mais également à celles qui en produisent à
partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles.

Sur les deuxième à cinquième questions

33 Par ses deuxième à cinquième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28 doit être interprété en ce sens qu’une installation qui produit de l’électricité à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles, selon une part variable, bénéficie d’une priorité d’accès au réseau uniquement pour la part d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables
et, dans l’affirmative, quelles sont les modalités d’application de cette priorité d’accès.

34 En l’occurrence, la juridiction de renvoi se demande plus particulièrement si une installation telle que celle exploitée par EEW, qui produit de l’électricité au départ d’un mélange de déchets contenant une part variable de déchets biodégradables industriels et municipaux, bénéficie d’une priorité d’accès au réseau uniquement pour l’électricité produite à partir de cette part variable.

35 À cet égard, il convient de relever d’emblée qu’il ressort des définitions figurant à l’article 2, sous a) et e), de la directive 2009/28 que, si l’énergie obtenue par la valorisation de la biomasse constitue une énergie produite à partir de sources renouvelables, seule la fraction biodégradable, notamment, des déchets industriels et municipaux relève de la notion de « biomasse », telle que définie par cette directive. L’énergie produite par traitement thermique de déchets industriels et
municipaux est ainsi considérée, pour l’électricité produite à partir de cette fraction biodégradable de ces déchets et à l’exclusion de leur fraction composée de déchets conventionnels, comme une énergie produite à partir de sources renouvelables.

36 Ensuite, la Cour a jugé, au sujet de l’article 16, paragraphe 2, sous b), de cette directive, que, si cette disposition évoque la possibilité d’instaurer un « accès garanti » au réseau pour l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, c’est uniquement en ce qui concerne l’électricité « verte » et que ladite disposition ne saurait donc servir de fondement juridique à des dispositions nationales visant l’accès garanti pour des installations de production d’énergie provenant
d’une source conventionnelle (voir, en ce sens, arrêt du 27 janvier 2022, Fondul Proprietatea, C‑179/20, EU:C:2022:58, point 65). Il convient, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 46 de ses conclusions, d’interpréter de manière analogue le principe de la priorité d’accès au réseau visée à l’article 16, paragraphe 2, sous c), de ladite directive.

37 Partant, une installation de production d’électricité utilisant un mélange de déchets dont seule une part variable est constituée de déchets biodégradables industriels et municipaux ou, de manière plus générale, utilisant dans une part variable, à la fois des sources d’énergie renouvelables et conventionnelles, doit pouvoir bénéficier de la priorité d’accès prévue à l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28, à concurrence de la seule part variable d’électricité produite à
partir de sources d’énergie renouvelables.

38 La directive 2009/28 ne détermine toutefois pas de quelle manière la part d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables par une installation de production d’électricité utilisant aussi bien des sources d’énergie renouvelables que conventionnelles doit être calculée et, plus particulièrement, si cette part doit atteindre un seuil minimal pour que l’électricité produite bénéficie de la priorité d’accès.

39 Cette directive se limite, à son article 16, paragraphe 2, sous c), à imposer deux exigences.

40 En premier lieu, cette disposition subordonne la priorité d’accès aux besoins tenant à la sécurité du réseau national d’électricité. À cet égard, le considérant 60 de la directive 2009/28 précise que les exigences relatives au maintien de la fiabilité et de la sécurité du réseau ainsi qu’à l’appel peuvent différer en fonction des caractéristiques du réseau national et de son bon fonctionnement.

41 En second lieu, l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28 exige que la gestion de la priorité d’accès se fasse sur la base de critères transparents et non discriminatoires. À cet égard, le considérant 11 de cette directive souligne l’importance de définir des règles claires et transparentes pour le calcul de la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et pour préciser lesdites sources. Par ailleurs, le considérant 60 de ladite directive rappelle, de manière
générale, l’importance d’un accès prioritaire réservé à l’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables pour l’intégration des sources d’énergie renouvelables dans le marché intérieur de l’électricité et, en particulier, que cet accès prioritaire devrait être traduit dans les règles de raccordement nationales en donnant aux producteurs connectés d’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables l’assurance qu’ils seront en mesure de vendre et de transporter l’électricité issue
de sources d’énergie renouvelables à tout moment lorsque la source devient disponible.

42 Il en résulte que les États membres disposent d’une large marge d’appréciation lorsqu’ils établissent les modalités de mise en œuvre de l’accès prioritaire dont doivent bénéficier les installations de production d’électricité qui utilisent des sources d’énergie renouvelables, pourvu qu’ils respectent les objectifs poursuivis par cette directive.

43 La Cour a d’ailleurs déjà constaté que, par l’adoption de la directive 2009/28, loin d’entendre opérer une harmonisation exhaustive des régimes nationaux de soutien à la production d’énergie verte, le législateur de l’Union est parti, d’une part, du constat selon lequel les États membres appliquent différents régimes de soutien et, d’autre part, du principe qu’il importe de garantir le bon fonctionnement de ceux-ci afin de conserver la confiance des investisseurs et de permettre à ces États de
définir des mesures nationales efficaces pour atteindre les objectifs contraignants nationaux globaux que leur impartit cette directive (arrêt du 4 octobre 2018, L.E.G.O., C‑242/17, EU:C:2018:804, point 53 et jurisprudence citée).

44 Par conséquent, il appartient, conformément à une jurisprudence constante, au juge national, qui est seul compétent pour apprécier les faits et pour interpréter la législation nationale, de déterminer s’il est, en l’occurrence, satisfait aux exigences découlant du droit de l’Union relatives à la détermination des modalités de la mise en œuvre de l’accès prioritaire pour les installations qui utilisent des sources d’énergie renouvelables. Néanmoins, la Cour, appelée à fournir à celui-ci des
réponses utiles dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, est compétente pour donner des indications quant aux éléments à prendre en compte par les États membres en vue d’appliquer la priorité d’accès au réseau, sur la base du dossier de l’affaire au principal ainsi que des observations écrites et orales qui lui ont été soumises, de nature à permettre au juge national de statuer (voir, par analogie, arrêt du 22 septembre 2020, Cali Apartments, C‑724/18 et C‑727/18, EU:C:2020:743, point 78 et
jurisprudence citée).

45 À cet égard, l’exigence figurant à l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28, selon laquelle la priorité d’accès au réseau doit être déterminée sur la base de critères transparents et non discriminatoires, implique, ainsi que l’a indiqué M. l’avocat général au point 54 de ses conclusions, qu’ils soient clairs, communiqués à l’avance par les États membres, et que leur application soit prévisible pour toutes les parties concernées.

46 En outre, il ressort des débats qui se sont tenus lors de l’audience devant la Cour que les installations produisant de l’électricité peuvent, aux fins de l’application de l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28, être réparties en trois groupes, soit, respectivement, les installations utilisant uniquement des sources d’énergie renouvelables, celles utilisant uniquement des sources d’énergie conventionnelles et celles ayant recours à un mélange de sources d’énergie
renouvelables et conventionnelles.

47 Il apparaît clairement, d’une part, que les installations relevant du premier groupe doivent toujours bénéficier, sous réserve des limitations tenant à la sécurité et à la capacité du réseau, de la priorité d’accès pour l’ensemble de l’électricité qu’elles produisent et que les installations relevant du deuxième groupe ne sauraient obtenir, sur la base de cette disposition, aucun accès prioritaire et, d’autre part, que les installations relevant de ces deux premiers groupes doivent, en principe,
être traitées sur un pied d’égalité au sein du groupe dont elles relèvent.

48 En ce qui concerne les installations relevant du troisième groupe, il convient, en revanche, de rappeler, en premier lieu, que, ainsi qu’il ressort du point 37 du présent arrêt, l’accès prioritaire ne leur revient que pour la seule partie de l’électricité produite au moyen de sources d’énergie renouvelables. En second lieu, au sein de ce troisième groupe, les installations ne sauraient être traitées de manière égale, dans la mesure où la part des sources d’énergie renouvelables à laquelle elles
ont recours n’est pas nécessairement identique.

49 Or, l’objectif poursuivi par la directive 2009/28 de favoriser le recours à de l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables risquerait d’être compromis si les installations qui ont recours à une part importante de sources d’énergie renouvelables bénéficiaient systématiquement d’un accès prioritaire, au détriment d’autres installations qui utilisent elles aussi des sources d’énergie renouvelables, mais dans une moindre mesure. Il n’en demeure pas moins que, eu égard à ce même
objectif, les premières doivent pouvoir être privilégiées par rapport aux secondes, sans pour autant bénéficier d’une priorité systématique.

50 Il importe donc que les critères retenus afin de déterminer l’ordre dans lequel le gestionnaire de réseau fera appel aux installations ayant recours à un mélange de sources d’énergie renouvelables et conventionnelles reflètent l’importance de la part de sources d’énergie renouvelables qu’elles utilisent.

51 De même, il importe que ces critères prennent en compte les particularités et contraintes techniques qui caractérisent la gestion de l’accès des installations aux réseaux d’électricité. À cet égard, MNG Strom a indiqué que le gestionnaire du réseau de transport d’électricité ne connaît pas, en temps réel, la part de déchets biodégradables utilisés par une installation de production d’électricité lorsqu’il doit choisir l’ordre dans lequel les installations doivent être mises à l’arrêt, les
exploitants de ces installations ne connaissant d’ailleurs pas eux-mêmes à tout moment quelle est la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables. 50 Hertz Transmission, quant à elle, a souligné que la décision de priorité est une mesure d’urgence qui se prend quasiment sur l’instant et qu’elle entraîne des répercussions sur les opérateurs en aval, ce qui implique que les critères de priorité doivent permettre de donner des orientations concrètes au gestionnaire du réseau.

52 Il convient d’ajouter que la nature de l’électricité est telle que, une fois admise dans le réseau de transport ou de distribution, il est difficile d’en déterminer l’origine et notamment la source d’énergie à partir de laquelle elle a été produite (arrêt du 1er juillet 2014, Ålands Vindkraft, C‑573/12, EU:C:2014:2037, point 87). De la même manière, au moment où le gestionnaire de réseau de transport fait appel à une installation de production d’électricité qui a recours à des sources d’énergie
tant renouvelables que conventionnelles, il est tout aussi difficile d’identifier concrètement la partie de l’électricité produite par cette installation à partir de sources d’énergie renouvelables. Ces circonstances techniques impliquent une certaine part d’incertitude, de telle sorte qu’il ne saurait être exclu qu’une partie de l’électricité déclarée comme ayant été produite à partir de sources d’énergie renouvelables ne l’a pas été entièrement à ce moment précis.

53 Or, l’objectif que cherche à atteindre la directive 2009/28 de favoriser au maximum l’accès aux réseaux de l’électricité produite à partir des sources d’énergie renouvelables ne requiert pas que, au moment précis où le gestionnaire de réseau fait appel à une installation de production d’électricité ayant recours à un mélange énergétique, ce gestionnaire ait connaissance de l’exacte proportion de ce type d’électricité dans la quantité totale d’énergie fournie par cette installation.

54 Il est suffisant à cet égard que la mise en œuvre des critères retenus par les autorités nationales compétentes permette que, sur une période suffisamment longue et représentative et dans la mesure de la faisabilité technique, la priorité d’accès au réseau soit accordée à chaque installation produisant de l’électricité à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles proportionnellement à l’importance de la part de sources d’énergie renouvelables utilisée par cette dernière.

55 Il ne saurait être exclu que les autorités nationales compétentes tiennent compte, à cette fin, d’une garantie d’origine, au sens de l’article 2, sous j), de la directive 2009/28, délivrée, le cas échéant, à un producteur d’électricité au titre de l’article 15 de cette directive, indépendamment du fait qu’une telle garantie est, ainsi qu’il ressort, notamment, du paragraphe 1 de cette disposition, émise afin de permettre aux clients finals de s’assurer de l’exacte composition du bouquet
énergétique d’un fournisseur d’énergie.

56 Par ailleurs, rien ne s’oppose à ce que les autorités nationales compétentes, dans le cadre de l’exercice de leur marge d’appréciation quant à la fixation de ces critères, s’appuient sur certaines dispositions figurant à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2009/28, notamment la disposition selon laquelle, dans les installations multicombustibles utilisant aussi bien des sources d’énergie renouvelables que conventionnelles, pour effectuer le calcul de la part de l’électricité produite à
partir de sources renouvelables, la contribution de chaque source d’énergie est calculée sur la base de son contenu énergétique.

57 Il résulte de l’ensemble de ces considérations qu’il convient de répondre aux deuxième à cinquième questions que l’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28 doit être interprété en ce sens qu’une installation qui produit de l’électricité à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles bénéficie d’une priorité d’accès au réseau uniquement pour la part d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables. Il appartient aux États membres d’établir
les modalités d’application de cette priorité d’accès, en fixant des critères transparents et non discriminatoires qui, tout en tenant compte des exigences relatives au maintien de la fiabilité et de la sécurité du réseau, permettent d’établir un ordre de priorité en fonction de l’importance de la part de sources d’énergie renouvelables utilisées par chaque installation de production d’électricité.

Sur les dépens

58 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

  1) L’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE,

doit être interprété en ce sens que :

la priorité d’accès au réseau électrique dont bénéficient les installations de production d’électricité qui utilisent des sources d’énergie renouvelables doit être accordée non pas uniquement aux installations produisant de l’électricité exclusivement à partir de sources d’énergie renouvelables, mais également à celles qui en produisent à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles.

  2) L’article 16, paragraphe 2, sous c), de la directive 2009/28

doit être interprété en ce sens que :

une installation qui produit de l’électricité à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles bénéficie d’une priorité d’accès au réseau uniquement pour la part d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables. Il appartient aux États membres d’établir les modalités d’application de cette priorité d’accès, en fixant des critères transparents et non discriminatoires qui, tout en tenant compte des exigences relatives au maintien de la fiabilité et de la
sécurité du réseau, permettent d’établir un ordre de priorité en fonction de l’importance de la part de sources d’énergie renouvelables utilisées par chaque installation de production d’électricité.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-580/21
Date de la décision : 20/04/2023
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesgerichtshof.

Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2009/28/CE – Promotion de l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables – Article 16, paragraphe 2, sous c) – Accès aux réseaux de transport et de distribution – Accès prioritaire conféré à l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables – Production à partir de sources d’énergie tant renouvelables que conventionnelles.

Environnement

Rapprochement des législations


Parties
Demandeurs : EEW Energy from Waste Großräschen GmbH
Défendeurs : MNG Mitteldeutsche Netzgesellschaft Strom GmbH.

Composition du Tribunal
Avocat général : Rantos
Rapporteur ?: Csehi

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2023:304

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