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16/02/2023 | CJUE | N°C-638/22

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, T.C. e.a., 16/02/2023, C-638/22


 ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

16 février 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Coopération judiciaire en matière civile – Compétence, reconnaissance et exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale – Enlèvement international d’enfants – Convention de La Haye de 1980 – Règlement (CE) no 2201/2003 – Article 11 – Demande de retour d’un enfant – Décision définitive ordonnant le retour

d’un enfant – Législation d’un État membre
prévoyant le sursis à l’exécution de cette décision intervenant de plein droi...

 ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

16 février 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Coopération judiciaire en matière civile – Compétence, reconnaissance et exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale – Enlèvement international d’enfants – Convention de La Haye de 1980 – Règlement (CE) no 2201/2003 – Article 11 – Demande de retour d’un enfant – Décision définitive ordonnant le retour d’un enfant – Législation d’un État membre
prévoyant le sursis à l’exécution de cette décision intervenant de plein droit en cas de demande introduite par certaines autorités nationales »

Dans l’affaire C‑638/22 PPU,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie, Pologne), par décision du 12 octobre 2022, parvenue à la Cour le 13 octobre 2022, dans la procédure

T.C.,

Rzecznik Praw Dziecka,

Prokurator Generalny

en présence de :

M.C.,

Prokurator Prokuratury Okręgowej we Wrocławiu,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe (rapporteure), présidente de chambre, MM. M. Safjan, N. Piçarra, N. Jääskinen et M. Gavalec, juges,

avocat général : M. N. Emiliou,

greffier : Mme M. Siekierzyńska, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 décembre 2022,

considérant les observations présentées :

– pour T.C., par Me I. Antkowiak, adwokat, M. Bieszczad, radca prawny, et Me D. Kosobucki, adwokat,

– pour M.C., par Me A. Śliwicka, adwokat,

– pour le Prokurator Generalny, par MM. S. Bańko, R. Hernand et Mme E. Tkacz,

– pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna et Mme S. Żyrek, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement belge, par Mmes M. Jacobs, C. Pochet et M. Van Regemorter, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement français, par Mmes A. Daniel et E. Timmermans, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mme C. S. Schillemans, en qualité d’agent,

– pour la Commission européenne, par Mme J. Hottiaux et M. S. Noë, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 janvier 2023,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 11, paragraphe 3, du règlement (CE) no 2201/2003 du Conseil, du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000 (JO 2003, L 338, p. 1), ainsi que des articles 22 et 24, de l’article 27, paragraphe 6, et de l’article 28, paragraphes 1 et 2, du règlement (UE) 2019/1111 du
Conseil, du 25 juin 2019, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale, ainsi qu’à l’enlèvement international d’enfants (JO 2019, L 178, p. 1, et rectificatif JO 2020, L 347, p. 52), lus à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure, engagée par T.C., qui est le père de deux enfants mineurs, tendant à l’exécution d’une décision de retour en Irlande de ces enfants, déplacés en Pologne par M.C., qui est leur mère.

Le cadre juridique

Le droit international

3 La convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, conclue à La Haye le 25 octobre 1980 (ci-après la « convention de La Haye de 1980 ») a pour objectif, ainsi qu’il ressort de son préambule, notamment, de protéger l’enfant, sur le plan international, contre les effets nuisibles d’un déplacement ou d’un non-retour illicites et d’établir des procédures en vue de garantir le retour immédiat de l’enfant dans l’État de sa résidence habituelle. Cette convention, entrée en
vigueur le 1er décembre 1983, a été ratifiée par tous les États membres de l’Union européenne.

4 Conformément à l’article 1er, sous a), de cette convention, celle-ci a pour objet, notamment, d’assurer le retour immédiat des enfants déplacés ou retenus illicitement dans tout État contractant.

5 L’article 2 de ladite convention énonce :

« Les États contractants prennent toutes mesures appropriées pour assurer, dans les limites de leur territoire, la réalisation des objectifs de la Convention. À cet effet, ils doivent recourir à leurs procédures d’urgence. »

6 L’article 3 de la même convention dispose :

« Le déplacement ou le non-retour d’un enfant est considéré comme illicite :

a) lorsqu’il a lieu en violation d’un droit de garde, attribué à une personne, une institution ou tout autre organisme, seul ou conjointement, par le droit de l’État dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour ; et

b) que ce droit était exercé de façon effective seul ou conjointement, au moment du déplacement ou du non-retour, ou l’eût été si de tels événements n’étaient survenus.

[...] »

7 L’article 11, premier alinéa, de la convention de La Haye de 1980 prévoit :

« Les autorités judiciaires ou administratives de tout État contractant doivent procéder d’urgence en vue du retour de l’enfant. »

8 L’article 12, premier et deuxième alinéas, de cette convention est libellé comme suit :

« Lorsqu’un enfant a été déplacé ou retenu illicitement au sens de l’article 3 et qu’une période de moins d’un an s’est écoulée à partir du déplacement ou du non-retour au moment de l’introduction de la demande devant l’autorité judiciaire ou administrative de l’État contractant où se trouve l’enfant, l’autorité saisie ordonne son retour immédiat.

L’autorité judiciaire ou administrative, même saisie après l’expiration de la période d’un an prévue à l’alinéa précédent, doit aussi ordonner le retour de l’enfant, à moins qu’il ne soit établi que l’enfant s’est intégré dans son nouveau milieu. »

9 Aux termes de l’article 13, premier alinéa, sous b), de ladite convention :

« Nonobstant les dispositions de l’article précédent, l’autorité judiciaire ou administrative de l’État membre requis n’est pas tenue d’ordonner le retour de l’enfant, lorsque la personne, l’institution ou l’organisme qui s’oppose à son retour établit :

[...]

b) qu’il existe un risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable. »

Le droit de l’Union

Le règlement no 2201/2003

10 Les considérants 17 et 33 du règlement no 2201/2003 énonçaient :

« (17) En cas de déplacement ou de non-retour illicite[s] d’un enfant, son retour devrait être obtenu sans délai et à ces fins la convention de La Haye [de] 1980 devrait continuer à s’appliquer telle que complétée par les dispositions de ce règlement et en particulier de l’article 11. Les juridictions de l’État membre dans lequel l’enfant a été déplacé ou retenu illicitement devraient être en mesure de s’opposer à son retour dans des cas précis, dûment justifiés. Toutefois, une telle décision
devrait pouvoir être remplacée par une décision ultérieure de la juridiction de l’État membre de la résidence habituelle de l’enfant avant son déplacement ou non-retour illicites. Si cette décision implique le retour de l’enfant, le retour devrait être effectué sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure pour la reconnaissance et l’exécution de ladite décision dans l’État membre où se trouve l’enfant enlevé.

[...]

(33) Le présent règlement reconnaît les droits fondamentaux et observe les principes consacrés par la [Charte]. Il veille notamment à assurer le respect des droits fondamentaux de l’enfant tels qu’énoncés à l’article 24 de la [Charte] ».

11 L’article 11, paragraphes 1 et 3, de ce règlement disposait :

« 1.   Lorsqu’une personne, institution ou tout autre organisme ayant le droit de garde demande aux autorités compétentes d’un État membre de rendre une décision sur la base de la [convention de La Haye de 1980] en vue d’obtenir le retour d’un enfant qui a été déplacé ou retenu illicitement dans un État membre autre que l’État membre dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour illicites, les paragraphes 2 à 8 sont d’application.

[...]

3.   Une juridiction saisie d’une demande de retour d’un enfant visée au paragraphe 1 agit rapidement dans le cadre de la procédure relative à la demande, en utilisant les procédures les plus rapides prévues par le droit national.

Sans préjudice du premier alinéa, la juridiction rend sa décision, sauf si cela s’avère impossible en raison de circonstances exceptionnelles, six semaines au plus tard après sa saisine. »

Le règlement 2019/1111

12 L’article 22 du règlement 2019/1111 dispose :

« Lorsqu’une personne, une institution ou tout autre organisme alléguant une violation du droit de garde demande, soit directement, soit avec l’assistance d’une autorité centrale, à la juridiction d’un État membre de rendre une décision sur la base de la convention de La Haye de 1980 ordonnant le retour d’un enfant âgé de moins de 16 ans qui a été déplacé ou retenu illicitement dans un État membre autre que l’État membre dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son
déplacement ou son non-retour illicites, les articles 23 à 29, et le chapitre VI, du présent règlement s’appliquent et complètent la convention de La Haye de 1980 »

13 L’article 24 de ce règlement prévoit :

« 1.   Une juridiction saisie d’une demande de retour d’un enfant visée à l’article 22 agit rapidement dans le cadre de la procédure relative à la demande, en utilisant les procédures les plus rapides prévues par le droit national.

2.   Sans préjudice du paragraphe 1, une juridiction de première instance, sauf si cela se révèle impossible en raison de circonstances exceptionnelles, rend sa décision six semaines au plus tard après sa saisine.

3.   Sauf si cela se révèle impossible en raison de circonstances exceptionnelles, une juridiction de niveau supérieur rend sa décision six semaines au plus tard après que tous les actes de procédure nécessaires ont été accomplis et qu’elle est en mesure d’examiner le recours, en prévoyant une audition ou d’une autre manière. »

14 L’article 27, paragraphe 6, dudit règlement énonce :

« Une décision ordonnant le retour de l’enfant peut être déclarée exécutoire par provision, nonobstant un éventuel recours, lorsque le retour de l’enfant est requis dans l’intérêt supérieur de l’enfant avant que la décision sur le recours ne soit rendue. »

15 L’article 28 du même règlement est libellé comme suit :

« 1.   Une autorité compétente en matière d’exécution à laquelle est présentée une demande d’exécution d’une décision ordonnant le retour d’un enfant dans un autre État membre agit rapidement pour assurer le traitement de la demande.

2.   Lorsqu’une décision visée au paragraphe 1 n’a pas été exécutée dans un délai de six semaines après la date d’ouverture de la procédure d’exécution, la partie qui demande l’exécution ou l’autorité centrale de l’État membre d’exécution est en droit de demander à l’autorité compétente en matière d’exécution les raisons de ce retard. »

16 Aux termes de l’article 100 du règlement 2019/1111 :

« 1.   Le présent règlement n’est applicable qu’aux actions judiciaires intentées, aux actes authentiques dressés ou enregistrés formellement et aux accords enregistrés le ou après le 1er août 2022.

2.   Le [règlement no 2201/2003] continue de s’appliquer aux décisions rendues à la suite d’actions judiciaires intentées, aux actes authentiques dressés ou enregistrés formellement et aux accords devenus exécutoires dans l’État membre dans lequel ils ont été conclus avant le 1er août 2022 et qui relèvent du champ d’application dudit règlement. »

Le droit polonais

17 L’article 388, paragraphe 1, du Kodeks postępowania cywilnego (code de procédure civile) prévoit :

« Lorsque l’exécution de la décision est de nature à causer un préjudice irréparable à une partie, la juridiction de second degré peut, à la demande d’une partie, suspendre l’exécution de sa décision jusqu’à ce que la procédure de pourvoi soit terminée. Lorsqu’un recours en appel est rejeté, la juridiction de second degré peut également suspendre l’exécution de la décision de la juridiction de premier degré. »

18 L’article 5182, paragraphe 1, de ce code dispose :

« Dans les affaires portant sur le retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle, engagées sur le fondement de la convention de La Haye de 1980, la juridiction de second degré est le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie, Pologne). »

19 Aux termes de l’article 5191, paragraphes 21 et 22, dudit code :

« 21.   Un pourvoi en cassation peut également être formé dans les procédures portant sur le retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle, engagées sur le fondement de la convention de La Haye de 1980.

22.   Dans les affaires visées au paragraphe 21, le Prokurator Generalny [(procureur général)], le Rzecznik Praw Dziecka [(médiateur des droits des enfants)] et le Rzecznik Praw Obywatelskich [(médiateur)] peuvent également former un pourvoi dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle la décision est devenue définitive. »

20 L’ustawa o zmianie ustawy Kodeks postępowania cywilnego (loi portant modification du code de procédure civile), du 7 avril 2022 (Dz. U. de 2022, position 1098), entrée en vigueur le 24 juin 2022 (ci-après la « loi de 2022 »), a modifié le code de procédure civile en y insérant plusieurs dispositions relatives à la suspension des décisions rendues sur le fondement de la convention de La Haye de 1980.

21 Ainsi, l’article 3881 de ce code, inséré dans ce dernier par la loi de 2022, est libellé comme suit :

« 1.   Dans les affaires portant sur le retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle engagées sur le fondement de [la convention de La Haye de 1980], l’exécution d’une décision de justice concernant le retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle est suspendue de plein droit lorsqu’une personne visée à l’article 5191, paragraphe 22, en fait la demande auprès de la juridiction visée à l’article 5182, paragraphe 1, dans un délai ne dépassant pas
deux semaines à compter du jour où cette décision de justice est devenue définitive.

2.   La suspension de l’exécution de la décision de justice, visée au paragraphe 1, prend fin si la personne visée à l’article 5191, paragraphe 22, ne forme pas de pourvoi en cassation dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle cette décision de justice est devenue définitive.

3.   Lorsque la personne visée à l’article 5191, paragraphe 22, forme un pourvoi en cassation dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la décision de justice visée au paragraphe 1 est devenue définitive, la suspension de l’exécution de cette décision est prolongée de plein droit jusqu’au terme de la procédure de cassation.

4.   La personne qui a introduit une demande de suspension de l’exécution de la décision de justice visée au paragraphe 1 peut la retirer dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle cette décision est devenue définitive, à moins qu’une personne visée à l’article 5191, paragraphe 22, n’ait formé un pourvoi en cassation.

5.   À la suite du retrait de la demande de suspension de l’exécution de la décision de justice visée au paragraphe 1, cette décision acquiert force exécutoire. »

22 L’article 3883 dudit code, introduit dans ce dernier par la loi de 2022, énonce :

« Le dépôt d’un pourvoi extraordinaire visé à l’article 89 de l’ustawa o Sądzie Najwyższym [(loi sur la Cour suprême)], du 8 décembre 2017 (Dz. U. de 2021, position 1904, et de 2022, position 480), dans une procédure portant sur le retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle, engagée sur le fondement de la convention de La Haye de 1980, suspend de plein droit l’exécution de la décision de retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle jusqu’au
terme de cette procédure de pourvoi. »

Le litige au principal et la question préjudicielle

23 T.C. et M.C., tous les deux de nationalité polonaise, sont les parents des enfants mineurs N.C. et M.C.(1) (ci-après, ensemble, les « enfants mineurs »), nés en Irlande respectivement en 2011 et en 2017. Cette famille réside depuis plusieurs années dans cet État membre, où T.C. et M.C. ont un emploi stable. Cette dernière est à présent en congé de maladie de longue durée.

24 Au cours de l’été de l’année 2021, M.C. est partie, avec le consentement de T.C., en vacances en Pologne avec les enfants mineurs. Au mois de septembre 2021, M.C. a informé T.C. qu’elle resterait de manière permanente dans cet État membre avec ces enfants. T.C. n’a jamais consenti à un tel déplacement permanent de ces derniers.

25 Le 18 novembre 2021, T.C. a saisi le Sąd Okręgowy we Wrocławiu (tribunal régional de Wrocław, Pologne) d’un recours tendant à ce qu’il soit ordonné à M.C. d’assurer le retour en Irlande des enfants mineurs, sur le fondement de la convention de La Haye de 1980. Par une ordonnance du 15 juin 2022, cette juridiction a ordonné à M.C. d’assurer ce retour dans un délai de sept jours à compter de la date à laquelle cette ordonnance deviendrait définitive.

26 M.C. a interjeté appel de ladite ordonnance devant le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie), la juridiction de renvoi, qui, par une ordonnance du 21 septembre 2022, a rejeté cet appel comme étant non fondé, en considérant qu’aucun motif de refus de retour des enfants mineurs en Irlande ne pouvait être invoqué par M.C. Cette dernière ordonnance a acquis force exécutoire le 28 septembre 2022, sans que M.C. ait respecté l’injonction d’assurer le retour de ces enfants en Irlande.

27 Le 29 septembre 2022, T.C. a demandé à la juridiction de renvoi qu’elle lui communique une copie de cette ordonnance du 21 septembre 2022, accompagnée d’une mention relative à sa force exécutoire.

28 Le 30 septembre 2022 et le 5 octobre 2022, le médiateur des droits des enfants et le procureur général ont respectivement introduit, en vertu de l’article 3881, paragraphe 1, du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022, des demandes de suspension de l’exécution des ordonnances définitives des 15 juin et 21 septembre 2022.

29 Le 21 novembre 2022, le médiateur des droits des enfants et le procureur général ont introduit des pourvois en cassation contre l’ordonnance du 21 septembre 2022 devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne).

30 La juridiction de renvoi relève que, en règle générale, les décisions au fond rendues par une juridiction de second degré sont définitives et exécutoires, même si elles font l’objet d’un pourvoi en cassation devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême). Avant l’entrée en vigueur de la loi de 2022, la seule dérogation à cette règle était celle prévue à l’article 388 du code de procédure civile. Cet article permet à la juridiction de second degré de suspendre la force exécutoire d’une décision définitive
jusqu’au terme de la procédure devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême), lorsque l’exécution de cette décision est susceptible de causer un préjudice irréparable à une partie.

31 Or, en vertu de l’article 3881 du code de procédure civile, introduit dans ce dernier par la loi de 2022, le procureur général, le médiateur des droits des enfants et le médiateur (ci-après, ensemble, les « autorités habilitées ») disposent désormais de la faculté d’obtenir la suspension de l’exécution d’une décision ordonnant le retour d’enfants en vertu de la convention de La Haye de 1980, lorsqu’ils en font la demande auprès du Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) dans un
délai ne dépassant pas deux semaines à compter de la date à laquelle cette décision est devenue définitive. Il ressort des informations fournies par la juridiction de renvoi que les autorités habilitées ne sont pas tenues de motiver leur demande. Une telle demande entraîne une suspension de plein droit pour une période d’au moins deux mois.

32 En effet, lorsque ces autorités ne forment pas un pourvoi en cassation contre une décision de retour devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême) au cours de cette période, la suspension de l’exécution de celle-ci prend fin. En revanche, si un tel pourvoi est introduit au cours de ladite période, cette suspension est, en application de l’article 3881, paragraphe 3, du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022, prolongée de plein droit jusqu’au terme de la procédure devant le Sąd
Najwyższy (Cour suprême).

33 Par ailleurs, selon la juridiction de renvoi, même si le Sąd Najwyższy (Cour suprême) devait rejeter ce pourvoi en cassation, lesdites autorités pourraient à nouveau obtenir ladite suspension sur le fondement de l’article 3883 du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022, en formant un pourvoi extraordinaire au titre de cet article.

34 Eu égard à ces considérations, la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité de l’article 3881 du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022, avec l’exigence de célérité sous-jacente au règlement no 2201/2003, et notamment avec l’article 11, paragraphe 3, de ce règlement.

35 Par ailleurs, cette juridiction relève que la législation polonaise en vigueur prévoit, en substance, que des entités ne pouvant pas être qualifiées de juridiction ont la faculté de provoquer la suspension de l’exécution d’une décision de justice définitive, sans que l’exercice de cette faculté soit soumis à un quelconque contrôle juridictionnel. Une telle circonstance soulève, selon ladite juridiction, des questions quant à la conformité de cette législation à l’article 47 de la Charte, dans la
mesure où elle priverait d’une protection juridictionnelle effective les parties à une procédure de retour.

36 En outre, eu égard au fait que la date de l’entrée en vigueur de la loi de 2022 ne précède que de quelques jours celle de la mise en application du règlement 2019/1111, qui renforce l’obligation de célérité sous-jacente au règlement no 2201/2003, la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité avec le principe de coopération loyale des dispositions introduites dans le code de procédure civile par cette loi.

37 Enfin, dans l’hypothèse où la Cour confirmerait que le règlement no 2201/2003 s’oppose à ladite loi, la juridiction de renvoi se demande si elle serait obligée de laisser cette dernière inappliquée, conformément au principe de primauté du droit de l’Union.

38 Dans ces conditions, le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 11, paragraphe 3, du [règlement no 2201/2003] ainsi que [les articles 22 et 24], l’article 27, paragraphe 6, et l’article 28, paragraphes 1 et 2, du [règlement 2019/1111], lus [en combinaison] avec l’article 47 de la [Charte], s’opposent-ils à une disposition de droit national en vertu de laquelle, dans les affaires ayant pour objet le retrait d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle introduites sur le fondement de la [convention de La Haye de 1980], l’exécution
d’une décision de justice concernant le retour d’une personne soumise à l’autorité parentale ou sous tutelle est suspendue lorsque [les autorités habilitées en font] la demande auprès du Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) dans un délai ne dépassant pas deux semaines à compter du jour où cette décision de justice est devenue définitive ? »

Sur la demande d’application de la procédure préjudicielle d’urgence

39 La juridiction de renvoi a demandé que le présent renvoi préjudiciel soit soumis à la procédure préjudicielle d’urgence prévue à l’article 107, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.

40 À l’appui de sa demande, cette juridiction a invoqué des raisons tenant à l’intérêt supérieur des enfants mineurs. En particulier, la relation parent/enfants ainsi que le bien-être de ces enfants risqueraient de subir un préjudice irréparable, à cause de la situation d’éloignement desdits enfants de leur père, prolongée du fait de l’exercice, par le médiateur des droits des enfants et le procureur général, de leur faculté d’obtenir la suspension de l’exécution de la décision de retour en Irlande.

41 En premier lieu, il convient de constater que le présent renvoi préjudiciel porte sur l’interprétation, notamment, des dispositions du règlement no 2201/2003, qui a été adopté, notamment, sur le fondement de l’article 61, sous c), CE, devenu article 67 TFUE, et de celles du règlement 2019/1111, qui a été adopté sur le fondement de l’article 81, paragraphe 3, TFUE. Ces actes relèvent donc du titre V de la troisième partie du traité FUE, relatif à l’espace de liberté, de sécurité et de justice. Par
conséquent, ce renvoi est susceptible d’être soumis à la procédure préjudicielle d’urgence.

42 S’agissant, en second lieu, de la condition relative à l’urgence, il ressort de la décision de renvoi que les enfants mineurs sont séparés de leur père depuis plus d’un an et que la prolongation de cette situation pourrait nuire sérieusement à la relation future de ces enfants avec leur père.

43 Dans ces conditions, la troisième chambre de la Cour a décidé, le 26 octobre 2022, sur proposition de la juge rapporteure, l’avocat général entendu, de faire droit à la demande de la juridiction de renvoi tendant à soumettre le présent renvoi préjudiciel à la procédure préjudicielle d’urgence.

Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

44 Le procureur général et, en substance, M.C. contestent la recevabilité de la demande de décision préjudicielle.

45 Premièrement, selon le procureur général, la question préjudicielle posée par la juridiction de renvoi est hypothétique et n’est pas nécessaire aux fins de la solution du litige au principal. En effet, ce dernier serait déjà tranché de manière définitive et cette juridiction ne jouirait d’aucune compétence en ce qui concerne la suspension de l’exécution des ordonnances définitives de retour rendues en première et en deuxième instance, dès lors que cette suspension opèrerait de plein droit.

46 Deuxièmement, le procureur général soutient que cette question est irrecevable en ce que ladite juridiction demande l’interprétation du règlement 2019/1111 alors que, en l’occurrence, ce règlement n’est pas applicable ratione temporis.

47 En premier lieu, il convient de rappeler qu’il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige au principal et doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer [arrêt du 24 novembre 2022,
Varhoven administrativen sad (Abrogation de la disposition contestée), C‑289/21, EU:C:2022:920, point 24 et jurisprudence citée].

48 Ainsi, le rejet par la Cour d’une demande de décision préjudicielle introduite par une juridiction nationale n’est possible que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées [arrêt du
24 novembre 2022, Varhoven administrativen sad (Abrogation de la disposition contestée), C‑289/21, EU:C:2022:920, point 25 et jurisprudence citée].

49 De plus, il convient de rappeler que les termes « rendre son jugement », au sens de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE, englobent l’ensemble de la procédure menant au jugement de la juridiction de renvoi. Ces termes doivent faire l’objet d’une interprétation large, afin d’éviter que nombre de questions procédurales soient considérées comme étant irrecevables et ne puissent faire l’objet d’une interprétation par la Cour et que cette dernière ne puisse connaître de l’interprétation de toutes
dispositions du droit de l’Union que la juridiction de renvoi est tenue d’appliquer (arrêt du 21 novembre 2019, Procureur-Generaal bij de Hoge Raad der Nederlanden, C‑678/18, EU:C:2019:998, point 25 et jurisprudence citée).

50 À cet égard, premièrement, il ressort de la décision de renvoi et des observations présentées par les parties lors de l’audience, d’une part, que T.C. a introduit auprès de la juridiction de renvoi une demande en vue d’obtenir l’exécution de l’ordonnance du 21 septembre 2022, par laquelle cette juridiction a ordonné le retour des enfants mineurs en Irlande. D’autre part, en application de l’article 3881 du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022, ladite juridiction serait
tenue de faire droit aux demandes de suspension de cette exécution introduites par le procureur général et le médiateur des droits des enfants.

51 Dans ces conditions, ainsi que M. l’avocat général le relève au point 46 de ses conclusions, il apparaît que la juridiction de renvoi est saisie de demandes contradictoires présentées, d’une part, par T.C. ainsi que, d’autre part, par le procureur général et le médiateur des droits des enfants. Ces demandes reflètent l’existence d’un « litige » entre ces parties, qui porte sur l’exécution de l’ordonnance de retour du 21 septembre 2022 et sur laquelle cette juridiction est appelée, dans le cadre
desdites demandes, à rendre un jugement, au sens de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE.

52 Deuxièmement, quant au rapport entre la question préjudicielle posée par la juridiction de renvoi et la réalité ou l’objet du litige au principal, il ressort clairement de la décision de renvoi que cette question est destinée à permettre à cette juridiction de déterminer si les dispositions des règlements no 2201/2003 et 2019/1111 doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à l’article 3881 du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022, et si elle doit, le cas
échéant, laisser inappliqué cet article. Ce faisant, ladite juridiction démontre à suffisance qu’une réponse de la Cour à ladite question est « nécessaire », au sens de l’article 267, deuxième alinéa, TFUE, pour qu’elle puisse statuer sur l’éventuelle suspension de l’exécution de la décision de retour en cause.

53 En second lieu, la recevabilité de la présente demande de décision préjudicielle n’est pas susceptible d’être remise en cause par l’argument du procureur général tiré du fait que, en l’occurrence, le règlement 2019/1111 ne serait pas applicable ratione temporis. En effet, lorsqu’il n’apparaît pas de manière manifeste que l’interprétation d’un acte de droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, l’objection tirée de l’inapplicabilité de cet acte à l’affaire
au principal n’a pas trait à la recevabilité de la demande de décision préjudicielle, mais relève du fond des questions préjudicielles posées (voir, en ce sens, arrêts du 13 juillet 2006, Manfredi e.a., C‑295/04 à C‑298/04, EU:C:2006:461, point 30, ainsi que du 19 décembre 2019, Dobersberger, C‑16/18, EU:C:2019:1110, point 21).

54 Dans ces conditions, la demande de décision préjudicielle est recevable.

Sur la question préjudicielle

55 À titre liminaire, il convient de relever que, si la question posée porte tant sur l’interprétation des dispositions du règlement no 2201/2003 que sur celles du règlement 2019/1111, seul le premier de ces règlements est applicable, ratione temporis, au litige au principal. En effet, il ressort de l’article 100, paragraphe 2, du règlement 2019/1111 que le règlement no 2201/2003 continue de s’appliquer, après l’entrée en vigueur du règlement 2019/1111, aux actions introduites avant le1er août 2022.
En l’occurrence, ainsi qu’il a été indiqué au point 25 du présent arrêt, T.C. a introduit son recours devant le Sąd Okręgowy we Wrocławiu (tribunal régional de Wrocław) le 18 novembre 2021.

56 À cet égard, si la demande de T.C. visant à obtenir l’exécution de l’ordonnance de retour du 21 septembre 2022 a été introduite après le 1er août 2022, il n’en reste pas moins qu’il ressort des informations dont dispose la Cour que cette demande constitue non pas une procédure indépendante, mais une étape de la procédure de retour, ayant pour origine le recours de T.C. introduit le 18 novembre 2021, tendant à ce que soit ordonné le retour des enfants mineurs en Irlande.

57 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale conférant à des autorités n’ayant pas la qualité de juridiction la faculté d’obtenir la suspension de plein droit, pendant une durée d’au moins deux mois, de l’exécution d’une décision de retour rendue sur
la base de la convention de La Haye de 1980, sans devoir motiver leur demande de suspension.

58 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003 dispose qu’une juridiction saisie d’une demande de retour d’un enfant agit rapidement dans le cadre de la procédure relative à cette demande, en utilisant les procédures les plus rapides prévues par le droit national. Sauf si cela s’avère impossible en raison de circonstances exceptionnelles, cette juridiction doit rendre sa décision six semaines au plus tard après sa saisine.

59 En premier lieu, selon une jurisprudence constante, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie [arrêt du 28 octobre 2022, Generalstaatsanwaltschaft München (Extradition et ne bis in idem), C‑435/22 PPU, EU:C:2022:852, point 67].

60 Tout d’abord, il ressort du libellé de l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003 et, notamment de l’utilisation des termes « rapidement » et les « plus rapides », que, lorsqu’un enfant a été déplacé ou retenu illicitement dans un État membre autre que celui dans lequel cet enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour illicites, les juridictions compétentes des États membres sont tenues d’adopter une décision de retour de l’enfant concerné
dans un délai particulièrement bref et strict. Une telle décision doit, en principe, intervenir au plus tard dans un délai de six semaines après la saisine de ces juridictions, en utilisant les procédures les plus rapides prévues par le droit national. Une dérogation à cette règle n’est possible que dans des « circonstances exceptionnelles ».

61 Ensuite, une telle interprétation est confortée par le contexte dans lequel l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003 s’insère et, notamment, par les dispositions pertinentes de la convention de La Haye de 1980.

62 En effet, le règlement no 2201/2003 complète et précise, notamment à son article 11, les règles de la convention de La Haye de 1980 régissant la procédure de retour des enfants illicitement déplacés. Ainsi, les articles 8 à 11 de cette convention et l’article 11 de ce règlement constituent un ensemble normatif indivisible qui s’applique aux procédures de retour des enfants illicitement déplacés au sein de l’Union [voir, en ce sens, avis 1/13 (Adhésion d’États tiers à la convention de La Haye), du
14 octobre 2014, EU:C:2014:2303, points 77 et 78].

63 En raison du chevauchement et du lien étroit existant entre les dispositions dudit règlement et celles de ladite convention, ces dernières sont donc susceptibles d’avoir une incidence sur le sens, la portée et l’efficacité des règles du même règlement [voir, en ce sens, avis 1/13 (Adhésion d’États tiers à la convention de La Haye), du 14 octobre 2014, EU:C:2014:2303, point 85].

64 Ainsi, premièrement, conformément au préambule et à l’article 1er, sous a), de la convention de La Haye de 1980, cette dernière poursuit l’objectif d’un retour immédiat de l’enfant concerné à son lieu de résidence habituelle. Deuxièmement, l’article 2, seconde phrase, de cette convention oblige les autorités des États contractants à recourir, pour le traitement d’une demande de retour, à leurs procédures d’urgence. Troisièmement, selon l’article 11, premier alinéa, de ladite convention, les
autorités judiciaires ou administratives de tout État contractant doivent procéder d’urgence en vue du retour de l’enfant. Quatrièmement, l’article 13 de la même convention énonce de manière restrictive les hypothèses dans lesquelles l’autorité judiciaire de l’État contractant requis n’est pas tenue d’ordonner le retour de l’enfant. En particulier, selon l’article 13, premier alinéa, sous b), de la convention de la Haye de 1980, cette autorité n’est pas tenue d’ordonner le retour d’un enfant
lorsque la personne, l’institution ou l’organisme qui s’oppose à son retour établit qu’il existe un risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière le place dans une situation intolérable.

65 Il ressort de l’ensemble de ces dispositions que, conformément à la convention de la Haye de 1980, d’une part, lorsqu’un enfant a été déplacé illicitement de sa résidence habituelle, le retour de cet enfant doit intervenir immédiatement selon les procédures d’urgence prévues par le droit national. D’autre part, ce n’est que dans des circonstances exceptionnelles, notamment en cas de risque grave pour ledit enfant, que ce retour peut ne pas être ordonné.

66 Enfin, les finalités du règlement no 2201/2003 et, notamment, de son article 11, paragraphe 3, viennent également conforter les constatations figurant aux points 60 et 65 du présent arrêt.

67 Ainsi, premièrement, il y a lieu de rappeler que le règlement no 2201/2003 procède de la conception selon laquelle l’intérêt supérieur de l’enfant doit primer. Ledit règlement vise, en particulier, à dissuader les enlèvements d’enfants entre États membres et, en cas d’enlèvement, à obtenir que le retour de l’enfant soit effectué sans délai (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2008, Rinau, C‑195/08 PPU, EU:C:2008:406, points 51 et 52).

68 Deuxièmement, comme l’énonce le considérant 17 du règlement no 2201/2003, en cas de déplacement ou de non-retour illicites d’un enfant, le retour de ce dernier devrait être obtenu sans délai. En outre, les juridictions de l’État membre dans lequel l’enfant a été déplacé ou retenu illicitement devraient être en mesure de s’opposer à son retour uniquement dans des cas précis, dûment justifiés.

69 Troisièmement, il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’un des objectifs de l’article 11 de ce règlement est le rétablissement du statu quo ante, c’est-à-dire de la situation qui existait antérieurement au déplacement ou au non-retour illicites de l’enfant (voir, en ce sens, arrêt du 8 juin 2017, OL, C‑111/17 PPU, EU:C:2017:436, point 61).

70 Quatrièmement, la Cour a déjà jugé qu’une procédure de retour est, par nature, une procédure expéditive, dès lors qu’elle vise à assurer, ainsi que le prévoit le préambule de la convention de La Haye de 1980 et le considérant 17 du règlement no 2201/2003, le prompt retour de l’enfant (arrêt du 8 juin 2017, OL, C‑111/17 PPU, EU:C:2017:436, point 57).

71 Il ressort ainsi d’une interprétation littérale, contextuelle et téléologique de l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003 que cette disposition, d’une part, impose à une juridiction d’un État membre saisie d’une demande de retour d’un enfant illicitement enlevé du lieu de sa résidence habituelle de statuer sur cette demande, en principe, au plus tard dans un délai de six semaines après sa saisine, en utilisant les procédures les plus rapides prévues par le droit national. D’autre
part, ce n’est que dans des cas précis et exceptionnels, dûment justifiés, que le retour d’un enfant illicitement enlevé peut ne pas être ordonné.

72 Certes, les obligations découlant de cet article 11, paragraphe 3, portent sur la procédure d’adoption d’une décision de retour. Toutefois, il y a lieu de considérer, à l’instar de M. l’avocat général au point 59 de ses conclusions, que l’impératif d’efficacité et de célérité qui régit l’adoption d’une décision de retour s’impose aux autorités nationales également dans le cadre de l’exécution d’une telle décision. En effet, ledit article 11, paragraphe 3, serait privé d’effet utile si le droit
national permettait de suspendre l’exécution d’une décision définitive ordonnant le retour d’un enfant.

73 Or, selon la jurisprudence de la Cour, l’application des règles nationales de droit matériel et de procédure ne sauraient porter atteinte à l’effet utile du règlement no 2201/2003 (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2008, Rinau, C‑195/08 PPU, EU:C:2008:406, point 82).

74 Il convient encore de relever que, en imposant des obligations visant à l’adoption et, partant, à l’exécution dans les plus brefs délais d’une décision permettant un prompt retour de l’enfant au lieu de sa résidence habituelle à la suite d’un enlèvement illicite, le règlement no 2201/2003 veille, ainsi qu’il ressort du considérant 33 de celui-ci, à assurer le respect des droits fondamentaux garantis par la Charte, et, notamment, celui des droits fondamentaux de l’enfant, tels qu’énoncés à
l’article 24 de la Charte.

75 À cet égard, l’article 7 de la Charte consacre le droit au respect de la vie privée ou familiale et doit être lu en combinaison avec l’obligation de prise en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant, reconnu à l’article 24, paragraphe 2, de celle-ci. Il convient, ainsi, de tenir compte de la nécessité pour un enfant, exprimée à l’article 24, paragraphe 3, de la Charte, d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents [voir, en ce sens,
arrêt du 17 novembre 2022, Belgische Staat (Réfugiée mineure mariée), C‑230/21, EU:C:2022:887, point 48].

76 Or, selon l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, dans la mesure où celle–ci contient des droits correspondant à des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que leur confère ladite convention. L’article 53 de la Charte ajoute à cet effet qu’aucune disposition de celle–ci ne doit être interprétée comme limitant ou
portant atteinte, dans le champ d’application du droit de l’Union, aux droits reconnus, notamment, par la CEDH [voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2022, CJ (Décision de remise différée en raison de poursuites pénales), C‑492/22 PPU, EU:C:2022:964, point 79 et jurisprudence citée].

77 Ainsi, en ce qui concerne l’article 8 de la CEDH, qui correspond à l’article 7 de la Charte (voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2022, Orde van Vlaamse Balies e.a., C‑694/20, EU:C:2022:963, point 25), la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que, dans les affaires portant sur des décisions rendues sur la base de la convention de La Haye de 1980, le caractère adéquat d’une mesure doit notamment être apprécié en fonction de la rapidité de sa mise en œuvre. Ces affaires nécessitent un
traitement urgent, dès lors que l’écoulement du temps peut avoir des conséquences irréparables sur les relations entre les enfants et le parent qui ne réside pas avec eux. Les retards dans la procédure peuvent, à eux seuls, permettre de constater que les autorités ne se sont pas conformées aux obligations positives leur incombant en vertu de la CEDH (voir, en ce sens, Cour EDH, 28 avril 2015, Ferrari c. Roumanie, CE:ECHR:2015:0428JUD000171410, § 49).

78 En deuxième lieu, c’est au regard de l’interprétation de l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003 retenue aux points précédents du présent arrêt qu’il convient de déterminer si cette disposition s’oppose à une législation nationale telle que celle décrite au point 57 du présent arrêt.

79 Selon les informations fournies à la Cour, en vertu de cette législation, l’exécution d’une décision de retour est suspendue de plein droit pendant une période d’au moins deux mois lorsque l’une des autorités habilitées introduit une demande en ce sens auprès du Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) dans un délai de deux semaines à compter de la date à laquelle cette décision est devenue définitive.

80 En outre, si, après la présentation de cette demande, cette autorité introduit un pourvoi en cassation devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême) contre ladite décision, la suspension de l’exécution de cette dernière est prolongée de plein droit jusqu’au terme de la procédure de pourvoi devant cette juridiction.

81 Ainsi, premièrement, l’introduction de ladite demande a pour effet de suspendre, pendant une période d’au moins deux mois, l’exécution d’une décision de retour d’un enfant au lieu de sa résidence habituelle, alors même que cette décision est devenue définitive. Ce retour est susceptible d’être suspendu pendant une période de temps beaucoup plus longue dans l’hypothèse où les autorités habilitées décideraient d’introduire un pourvoi en cassation contre ladite décision. L’introduction d’une telle
demande, eu égard aux exigences de célérité sous-jacentes à l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003, en ce qu’elle a pour effet de suspendre de plein droit l’exécution d’une telle décision de retour, est ainsi susceptible de priver d’effet utile cette disposition. Par ailleurs, ces autorités pourraient à nouveau obtenir la suspension de l’exécution d’une décision de retour sur le fondement de l’article 3883 du code de procédure civile, introduit dans ce dernier par la loi de 2022,
en formant un pourvoi extraordinaire au titre de cet article.

82 À cet égard, force est de constater qu’une suspension d’une durée de deux mois de l’exécution d’une décision de retour définitive excède, à elle seule, le délai dans lequel, conformément à ladite disposition du règlement no 2201/2003, cette décision doit être adoptée.

83 Deuxièmement, il ressort des informations dont dispose la Cour que l’exécution d’une décision de retour est suspendue, de plein droit, à la simple demande des autorités habilitées. Ces autorités, qui au demeurant n’ont pas la qualité de juridiction, ne sont pas tenues de motiver leur demande et le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) est tenu d’y faire droit sans pouvoir exercer de contrôle juridictionnel à cet égard. Dès lors, la législation en cause au principal ne paraît pas
être de nature à garantir que, comme cela a été rappelé au point 71 du présent arrêt, le retour de l’enfant au lieu de sa résidence habituelle ne puisse être suspendu que dans des cas précis et exceptionnels et, en tout état de cause, n’assure pas qu’une telle suspension soit dûment motivée.

84 Par ailleurs, selon la jurisprudence constante de la Cour, l’article 47 de la Charte s’oppose à ce qu’une autorité publique puisse empêcher l’exécution d’une décision judiciaire, dès lors que le droit à un recours effectif consacré par cet article serait illusoire si l’ordre juridique d’un État membre permettait qu’une décision judiciaire définitive et obligatoire reste inopérante au détriment d’une partie (voir, en ce sens, arrêts du 30 juin 2016, Toma et Biroul Executorului Judecătoresc
Horaţiu-Vasile Cruduleci, C‑205/15, EU:C:2016:499, point 43 ainsi que jurisprudence citée ; du 29 juillet 2019, Torubarov, C‑556/17, EU:C:2019:626, points 72 et 73, ainsi que du 19 décembre 2019, Deutsche Umwelthilfe, C‑752/18, EU:C:2019:1114, point 36).

85 Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater qu’une législation nationale telle que celle décrite au point 57 du présent arrêt est susceptible de porter atteinte à l’effet utile de l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003.

86 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument du gouvernement polonais selon lequel, en substance, une telle législation serait indispensable afin de permettre aux autorités habilitées d’introduire un pourvoi en cassation devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême) et d’éviter ainsi que les enfants concernés ne subissent un préjudice irréparable découlant du caractère exécutoire d’une décision de retour définitive, dans l’hypothèse où celle-ci devrait être annulée par cette
juridiction.

87 En effet, ainsi que la juridiction de renvoi l’expose, d’une part, avant l’introduction, par la loi de 2022, de l’article 3881 dans le code de procédure civile, l’article 388 de ce code prévoyait déjà un mécanisme permettant au Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) de suspendre l’exécution d’une décision de retour définitive, le cas échéant à la demande de l’une des autorités habilitées, lorsque cette juridiction considérait que l’enfant concerné aurait pu être exposé à un risque
grave de danger physique ou psychique en cas de retour.

88 D’autre part, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la protection juridictionnelle de cet enfant contre un tel risque est, en principe, déjà assurée par l’existence d’un recours devant une instance juridictionnelle [voir, en ce sens, arrêt du 26 septembre 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Effet suspensif de l’appel), C‑175/17, EU:C:2018:776, point 34], et cela même lorsque l’existence d’un risque grave, au sens de l’article 13, premier alinéa, sous b), de la convention de la Haye de 1980,
est alléguée.

89 Par conséquent, ainsi qu’il ressort des points 82 à 84 des conclusions de M. l’avocat général, il ne découle pas de l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003, lu à la lumière des articles 24 et 47 de la Charte, que le droit de l’Union impose aux États membres de prévoir un degré supplémentaire de juridiction contre une décision de retour, lorsque cette décision a été adoptée dans le cadre d’une procédure prévoyant déjà deux degrés de juridiction et que cette procédure permet de tenir
compte de l’existence de risques en cas de retour de l’enfant concerné. A fortiori, ce droit ne permet pas aux États membres d’assortir les recours introduits contre une telle décision d’un effet suspensif de plein droit, contrairement à ce que semble prévoir l’article 3881, paragraphe 3, du code de procédure civile, tel que modifié par la loi de 2022.

90 S’agissant, en troisième et dernier lieu, des conséquences de la conclusion figurant au point 85 du présent arrêt, il y a lieu de rappeler que le principe de primauté du droit de l’Union impose au juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l’Union l’obligation d’assurer le plein effet des exigences de ce droit dans le litige dont il est saisi en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute réglementation ou pratique nationale,
même postérieure, qui est contraire à une disposition du droit de l’Union d’effet direct, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de cette réglementation ou pratique nationale par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel [voir, en ce sens, arrêt du 22 février 2022, RS (Effet des arrêts d’une cour constitutionnelle), C‑430/21, EU:C:2022:99, point 53].

91 À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 288, deuxième alinéa, TFUE, le règlement a une portée générale et est directement applicable dans tout État membre. Dès lors, en raison de sa nature même et de sa fonction dans le système des sources du droit de l’Union, il est apte à conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l’obligation de protéger (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2002, Muñoz et Superior Fruiticola, C‑253/00, EU:C:2002:497,
point 27).

92 En l’occurrence, il convient de relever que l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003 impose aux États membres une obligation de résultat claire et précise, qui n’est assortie d’aucune condition en ce qui concerne l’exigence de célérité à laquelle les procédures ayant pour objet l’adoption d’une décision de retour, au sens de la convention de La Haye de 1980, sont soumises. Ainsi, la juridiction de renvoi sera tenue de garantir, dans le cadre de ses compétences, le plein effet de
cette disposition du droit de l’Union en laissant, au besoin, inappliquée la législation nationale portant atteinte à la réalisation de l’effet utile de ladite disposition.

93 Eu égard à l’ensemble des motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 2201/2003, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale conférant à des autorités n’ayant pas la qualité de juridiction la faculté d’obtenir la suspension de plein droit, pendant une durée d’au moins deux mois, de l’exécution d’une décision de retour rendue sur la base de la
convention de La Haye de 1980, sans devoir motiver leur demande de suspension.

Sur les dépens

94 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

  L’article 11, paragraphe 3, du règlement (CE) no 2201/2003 du Conseil, du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) no 1347/2000, lu à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,

  doit être interprété en ce sens que :

  il s’oppose à une législation nationale conférant à des autorités n’ayant pas la qualité de juridiction la faculté d’obtenir la suspension de plein droit, pendant une durée d’au moins deux mois, de l’exécution d’une décision de retour rendue sur la base de la convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, conclue à La Haye le 25 octobre 1980, sans devoir motiver leur demande de suspension.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le polonais.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : C-638/22
Date de la décision : 16/02/2023
Type d'affaire : Renvoi préjudiciel - Procédure d'urgence

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sąd Apelacyjny w Warszawie.

Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Coopération judiciaire en matière civile – Compétence, reconnaissance et exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale – Enlèvement international d’enfants – Convention de La Haye de 1980 – Règlement (CE) no 2201/2003 – Article 11 – Demande de retour d’un enfant – Décision définitive ordonnant le retour d’un enfant – Législation d’un État membre prévoyant le sursis à l’exécution de cette décision intervenant de plein droit en cas de demande introduite par certaines autorités nationales.

Charte des droits fondamentaux

Droits fondamentaux

Espace de liberté, de sécurité et de justice

Coopération judiciaire en matière civile


Parties
Demandeurs : T.C. e.a.

Composition du Tribunal
Avocat général : Emiliou
Rapporteur ?: Jürimäe

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2023:103

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