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16/02/2023 | CJUE | N°C-635/20

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Commission européenne contre République italienne et Royaume d'Espagne., 16/02/2023, C-635/20


 ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

16 février 2023 ( *1 )

« Pourvoi – Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’administrateurs chargés de fonctions d’enquêteurs et de chefs d’équipes d’enquêteurs – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la deuxième langue des concours aux langues allemande, anglaise et française – Langue de communication avec l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires – Article 1er quinquies, paragraphe 

1 – Différence de traitement fondée sur la
langue – Justification – Intérêt du service – Exigence de recrutement d...

 ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

16 février 2023 ( *1 )

« Pourvoi – Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’administrateurs chargés de fonctions d’enquêteurs et de chefs d’équipes d’enquêteurs – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la deuxième langue des concours aux langues allemande, anglaise et française – Langue de communication avec l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires – Article 1er quinquies, paragraphe 1 – Différence de traitement fondée sur la
langue – Justification – Intérêt du service – Exigence de recrutement d’administrateurs “immédiatement opérationnels” – Contrôle juridictionnel – Niveau de preuve exigé »

Dans l’affaire C‑635/20 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 20 novembre 2020,

Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara, T. Lilamand, Mme D. Milanowska et M. N. Ruiz García, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Royaume d’Espagne, représenté par M. L. Aguilera Ruiz et Mme A. Gavela Llopis, en qualité d’agents,

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

parties demanderesses en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, M. K. Lenaerts, président de la Cour, M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, faisant fonction de juges de la première chambre, M. A. Kumin et Mme I. Ziemele (rapporteure), juges,

avocat général : M. A. M. Collins,

greffier : M. C. Di Bella, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 mars 2022,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 19 mai 2022,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 9 septembre 2020, Espagne et Italie/Commission (T‑401/16 et T‑443/16, non publié, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:409), par lequel celui-ci a annulé l’avis de concours généraux EPSO/AD/323/16 et EPSO/AD/324/16, pour la constitution de listes de réserve d’administrateurs chargés de fonctions d’enquêteurs (AD 7) et de chefs d’équipes d’enquêteurs (AD 9) dans les domaines des
dépenses de l’Union européenne, de la lutte contre la corruption, de la douane et du commerce, du tabac ou des contrefaçons (JO 2016, C 187 A, p. 1, ci-après l’« avis de concours litigieux »).

Le cadre juridique

Le règlement no 1/58

2 L’article 1er du règlement no 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), tel que modifié par le règlement (UE) no 517/2013 du Conseil, du 13 mai 2013 (JO 2013, L 158, p. 1) (ci-après le « règlement no 1/58 »), dispose :

« Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont l’allemand, l’anglais, le bulgare, le croate, le danois, l’espagnol, l’estonien, le finnois, le français, le grec, le hongrois, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le suédois et le tchèque. »

3 L’article 2 de ce règlement prévoit :

« Les textes adressés aux institutions par un État membre ou par une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés au choix de l’expéditeur dans l’une des langues officielles. La réponse est rédigée dans la même langue. »

4 Aux termes de l’article 6 dudit règlement :

« Les institutions peuvent déterminer les modalités d’application de ce régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. »

Le statut

5 Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») est établi par le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission (JO 1968, L 56, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement
européen et du Conseil, du 22 octobre 2013 (JO 2013, L 287, p. 15).

6 Le titre I du statut, intitulé « Dispositions générales », comprend les articles 1er à 10 quater de celui-ci.

7 L’article 1er quinquies du statut énonce :

« 1.   Dans l’application du présent statut est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée sur [...] la langue [...]

[...]

6.   Dans le respect du principe de non-discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation de ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. [...] »

8 Aux termes de l’article 2 du statut :

« 1.   Chaque institution détermine les autorités qui exercent en son sein les pouvoirs dévolus par le présent statut à l’autorité investie du pouvoir de nomination.

2.   Toutefois, une ou plusieurs institutions peuvent confier à l’une d’entre elles ou à un organisme interinstitutionnel l’exercice de tout ou partie des pouvoirs dévolus à l’autorité investie du pouvoir de nomination, à l’exception des décisions relatives aux nominations, aux promotions ou aux mutations de fonctionnaires. »

9 Le titre III du statut est intitulé « De la carrière du fonctionnaire ».

10 Le chapitre 1er de ce titre, intitulé « Recrutement », comporte les articles 27 à 34 du statut, dont l’article 27, premier alinéa, de ce dernier dispose :

« Le recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique la plus large possible parmi les ressortissants des États membres de l’Union. Aucun emploi ne peut être réservé aux ressortissants d’un État membre déterminé. »

11 L’article 28 du statut prévoit :

« Nul ne peut être nommé fonctionnaire :

[...]

d) s’il n’a satisfait, sous réserve des dispositions de l’article 29, paragraphe 2 [portant sur l’adoption d’une procédure de recrutement autre que celle du concours pour le recrutement du personnel d’encadrement supérieur et, dans des cas exceptionnels, pour des emplois nécessitant des qualifications spéciales], à un concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves dans les conditions prévues à l’annexe III ;

[...]

f) s’il ne justifie posséder une connaissance approfondie d’une des langues de l’Union et une connaissance satisfaisante d’une autre langue de l’Union dans la mesure nécessaire aux fonctions qu’il est appelé à exercer ».

12 L’annexe III du statut est intitulée « Procédure de concours ». L’article 1er de celle-ci prévoit :

« 1.   L’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination, après consultation de la commission paritaire.

Il doit spécifier :

a) La nature du concours (concours interne à l’institution, concours interne aux institutions, concours général, le cas échéant, commun à deux ou plusieurs institutions) ;

b) Les modalités (concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves) ;

c) La nature des fonctions et attributions afférentes aux emplois à pourvoir ainsi que le groupe de fonctions et le grade proposés ;

d) [...] les diplômes et autres titres ou le niveau d’expérience requis pour les emplois à pourvoir ;

e) Dans le cas de concours sur épreuves, la nature des examens et leur cotation respective ;

f) Éventuellement les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir ;

g) Éventuellement, la limite d’âge ainsi que le report de la limite d’âge applicable aux agents en fonction depuis au minimum un an ;

h) La date limite de réception des candidatures ;

[...] »

13 Aux termes de l’article 7 de cette annexe :

« 1.   Les institutions, après consultation du comité du statut, confient à l’Office européen de sélection du personnel [(EPSO)] la responsabilité de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’application de normes uniformes dans les procédures de sélection des fonctionnaires de l’Union [...]»

La décision 2002/620/CE

14 L’EPSO a été créé par la décision 2002/620/CE du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du médiateur, du 25 juillet 2002 (JO 2002, L 197, p. 53).

15 L’article 2, paragraphe 1, première phrase, de cette décision énonce que l’EPSO exerce, notamment, les pouvoirs de sélection dévolus par l’annexe III du statut aux autorités investies du pouvoir de nomination des institutions signataires de ladite décision.

16 L’article 4, dernière phrase, de la décision 2002/620 prévoit que tout recours dans les domaines visés par cette décision est dirigé contre la Commission.

Les autres textes applicables

Les dispositions générales applicables aux concours généraux

17 Le 27 février 2015, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne un document intitulé « Dispositions générales applicables aux concours généraux » (JO 2015, C 70 A, p. 1), dont la première page précise que ces « dispositions générales font partie intégrante de l’avis de concours et constituent, avec l’avis, le cadre contraignant de la procédure de concours ».

18 Le point 1.3 de ces dispositions générales, intitulé « Éligibilité », énonce, s’agissant des connaissances linguistiques :

« [...]

Dans la pratique, les institutions européennes utilisent depuis longtemps l’allemand, l’anglais et le français principalement pour la communication interne, et ce sont également ces langues qui sont le plus souvent nécessaires pour communiquer avec le monde extérieur et gérer les dossiers.

Les options en matière de seconde langue pour les concours ont été définies dans l’intérêt du service et requièrent des nouvelles recrues qu’elles soient immédiatement opérationnelles et capables de communiquer efficacement dans le cadre de leurs tâches quotidiennes, sans quoi le bon fonctionnement des institutions pourrait être gravement compromis.

Pour garantir l’égalité de traitement de tous les candidats, tous – y compris ceux dont la première langue officielle est l’une des trois langues en question – doivent passer certains tests dans leur seconde langue, choisie parmi ces trois langues. Apprécier des compétences spécifiques par ce moyen permet aux institutions d’évaluer dans quelle mesure les candidats sont capables d’être immédiatement opérationnels dans un environnement qui correspond étroitement à ce que serait la réalité de leur
travail. Rien de tout ceci n’affecte la possibilité d’une formation linguistique ultérieure pour que le personnel puisse travailler dans une troisième langue, comme l’exige l’article 45, paragraphe 2, du statut [...] »

L’avis de concours litigieux

19 Le Tribunal, aux points 1 à 15 de l’arrêt attaqué, a exposé le contenu de l’avis de concours litigieux dans les termes suivants :

« 1 Le 26 mai 2016, l’[EPSO] a publié au Journal officiel de l’Union européenne [l’avis de concours litigieux]. [...]

2 Il est [...] indiqué dans l’introduction de l’avis [de concours litigieux] que ce dernier, accompagné des dispositions générales applicables aux concours généraux [...], constitue le cadre juridique contraignant régissant la procédure de sélection concernée. Il y est, cependant, précisé que l’annexe II des dispositions générales [...] ne s’applique pas aux procédures de sélection en question et est remplacée par le texte figurant à l’annexe II de l’avis [de concours litigieux].

[...]

4 Dans la partie de l’avis [de concours litigieux] intitulée “Puis-je poser ma candidature ?”, qui définit les conditions que les personnes intéressées doivent remplir au moment de la validation de leur candidature, il est exigé, au titre des conditions particulières d’admission, un “niveau C1 [du cadre européen commun de référence pour les langues (CECR)] au minimum dans l’une des 24 langues officielles de l’[Union]”, cette langue étant désignée comme la “langue 1” du concours, et un “niveau B2
[du CECR] au minimum en allemand, en anglais ou en français”. Cette deuxième langue, désignée comme la “langue 2” du concours, doit obligatoirement être différente de la langue choisie par le candidat en tant que langue 1.

5 Dans cette même partie, l’avis [de concours litigieux] précise ce qui suit :

“Pour être recruté dans le cadre de ces deux concours, une bonne compréhension de l’anglais (à l’écrit et à l’oral) est exigée. L’anglais est la langue principalement utilisée par les enquêteurs travaillant dans le domaine de la lutte contre la corruption et/ou de la délinquance financière dans un contexte international. Par conséquent, une bonne maîtrise de l’anglais, tant pour des exposés et des débats que pour la rédaction de rapports, est indispensable pour garantir l’efficacité de la
coopération et des échanges d’informations avec les autorités nationales des États membres et des pays tiers.”

6 Il y est également précisé que “[l’]acte de candidature [...] doit être rempli en allemand, en anglais ou en français”.

7 Par ailleurs, il est indiqué dans la même partie de l’avis [de concours litigieux], que “[l]a deuxième langue choisie doit être l’allemand, l’anglais ou le français”, que “[c]es langues sont les principales langues de travail de la Commission et [qu’]il est indispensable, dans l’intérêt du service, que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables de communiquer efficacement dans l’une de ces langues au moins dans leur travail quotidien”. Les candidats sont, à cet égard,
invités à se rapporter à l’annexe II de l’avis [de concours litigieux], intitulée “Justification du régime linguistique applicable aux présentes procédures de sélection”, “pour plus d’informations sur l’emploi des langues requises pour ces concours”.

[...]

9 La partie introductive de l’annexe II de l’avis [de concours litigieux] est libellée ainsi :

“Les présents concours sont des concours de spécialistes destinés à recruter des enquêteurs et des chefs d’équipes d’enquêteurs. Les conditions énoncées dans la [partie] ‘PUIS-JE POSER MA CANDIDATURE ?’ du présent avis de concours sont conformes aux exigences principales fixées par les institutions de l’[Union] concernant les compétences, l’expérience et les connaissances spécialisées et à la nécessité que les nouveaux recrutés soient en mesure de travailler efficacement, notamment avec les
autres membres du personnel.

Les candidats sont pour cette raison tenus de choisir leur deuxième langue de concours parmi un nombre limité de langues officielles de l’[Union]. Cette limitation s’explique également par les contraintes budgétaires et opérationnelles et la nature des méthodes de sélection d’EPSO décrites aux points 1, 2 et 3 ci‑dessous. Les exigences linguistiques des présents concours ont été adoptées par le conseil d’administration d’EPSO en tenant compte de ces facteurs et des autres exigences spécifiques
liées à la nature des fonctions ou aux besoins particuliers de la Commission [...]

Les présents concours ont pour objectif principal de créer une réserve d’administrateurs destinés à être recrutés au sein de la Commission [...] Une fois recrutés, il est essentiel que les administrateurs soient immédiatement opérationnels et puissent communiquer avec leurs collègues et la hiérarchie. À la lumière des critères exposés au point 2 ci-dessous concernant l’utilisation des langues dans les procédures de sélection de l’[Union] [...], la Commission [...] estime que, pour les présents
concours, l’allemand, l’anglais et le français sont les langues les plus indiquées pour être choisies comme deuxième langue.

Compte tenu du fait que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues les plus fréquemment parlées, traduites et utilisées par le personnel de la Commission [...] dans la communication administrative, tout en étant les langues les plus communément utilisées avec les tiers associés aux enquêtes dans les affaires de contrefaçon, de corruption, de douanes et de commerce, les candidats doivent proposer au moins l’une d’entre elles parmi leurs deux langues obligatoires.

En outre, une bonne maîtrise de l’anglais est également jugée nécessaire à la coopération dans les domaines de la criminalité financière, de la corruption et des contrefaçons dans un contexte international. Par conséquent, une bonne maîtrise de l’anglais, tant pour des exposés et des débats que pour la rédaction de rapports, est indispensable pour garantir l’efficacité de la coopération et des échanges d’informations avec les autorités nationales des États membres et des pays tiers. Les
candidats seront donc également soumis à un test de compréhension linguistique supplémentaire en anglais au cours de la phase du centre d’évaluation.

Les candidats sont tenus d’utiliser leur deuxième langue de concours (allemand, anglais ou français) pour remplir les actes de candidature électroniques et EPSO doit utiliser ces langues pour la communication de masse destinée aux candidats ayant présenté une candidature valide et pour certains tests décrits au point 3.”

10 Le point 1 de l’annexe II de l’avis [de concours litigieux], intitulé “Justification du choix des langues pour chaque procédure de sélection”, énonce ce qui suit :

“Les institutions de l’[Union] estiment que la décision sur le régime linguistique applicable à chaque procédure de sélection, et, notamment, l’éventuelle limitation du choix des langues, doit être prise sur la base des considérations suivantes :

i) La nécessité de s’assurer que les nouveaux recrutés sont immédiatement opérationnels

Les nouveaux recrutés doivent être immédiatement opérationnels et capables d’exercer les fonctions pour lesquelles ils ont été recrutés. EPSO doit donc veiller à ce que les candidats retenus possèdent une connaissance suffisante d’une combinaison de langues qui leur permettra d’exercer leurs fonctions efficacement et, en particulier, à ce qu’ils soient capables de communiquer efficacement, dans le cadre de leur travail quotidien, avec leurs nouveaux collègues qui sont déjà en service, tels
que leurs pairs et leur hiérarchie.

Il peut donc être légitime d’organiser certaines épreuves dans un nombre limité de langues véhiculaires de manière à s’assurer que tous les candidats sont capables de travailler dans au moins l’une de ces langues, quelle que soit leur première langue officielle. L’absence d’une telle limitation comporterait un risque élevé qu’une part importante des lauréats ne soit pas en mesure d’effectuer dans un délai raisonnable les tâches pour lesquelles ils ont été recrutés. En outre, cela
reviendrait à nier l’évidence selon laquelle les candidats à des postes au sein de la fonction publique européenne sont disposés à rejoindre une administration internationale qui, pour pouvoir fonctionner correctement et effectuer les tâches qui lui sont confiées par les traités, doit utiliser des langues véhiculaires.

ii) La nature de la procédure de sélection

Dans certains cas, la limitation du choix des langues des candidats peut également être justifiée par la nature de la procédure de sélection.

Conformément à l’article 27 du statut [...], l’évaluation des candidats à laquelle EPSO procède lors des concours généraux sert à évaluer leurs compétences et à pouvoir mieux anticiper leur capacité à exercer leurs fonctions.

Le centre d’évaluation est une méthode de sélection qui consiste à évaluer les candidats de façon uniforme, sur la base de divers scénarios observés par plusieurs membres du comité de sélection. L’évaluation est effectuée conformément à un cadre de compétences prédéfini par les autorités investies du pouvoir de nomination, selon une méthode de notation commune et une procédure de prise de décision conjointe.

L’appréciation des compétences spécifiques permet ainsi aux institutions de l’[Union] d’évaluer l’aptitude des candidats à être immédiatement opérationnels dans un environnement proche de celui dans lequel ils seront appelés à travailler. De nombreuses recherches scientifiques approfondies démontrent que le recours à des centres d’évaluation qui simulent des situations professionnelles réelles est le meilleur moyen de prévoir les performances. Ces centres d’évaluation sont par conséquent
utilisés partout dans le monde. Étant donné la durée des carrières et la mobilité au sein des institutions de l’[Union], une telle évaluation est essentielle, notamment pour sélectionner des fonctionnaires permanents.

Afin de permettre une évaluation des candidats sur un pied d’égalité et la communication directe avec les évaluateurs et les autres candidats également soumis à cet exercice, les candidats sont évalués ensemble, dans un groupe ayant une langue commune. À moins que le centre d’évaluation ne se déroule dans le cadre d’un concours avec une seule langue principale, cela nécessite forcément que le centre d’évaluation soit organisé dans un nombre de langues limité.

iii) Les contraintes budgétaires et opérationnelles

Le conseil d’administration d’EPSO estime qu’il est impossible, pour plusieurs raisons, d’organiser l’étape du centre d’évaluation de chaque concours dans toutes les langues officielles de l’[Union].

Premièrement, une telle approche aurait de très graves conséquences sur le plan des ressources, de sorte qu’il serait impossible pour les institutions de l’[Union] de répondre à leurs besoins de recrutement dans le cadre budgétaire actuel. Cela ne serait pas non plus une manière raisonnable de gérer l’argent du contribuable européen.

Deuxièmement, mener le centre d’évaluation dans toutes les langues officielles nécessiterait, lors des concours EPSO, la mobilisation d’un grand nombre d’interprètes ainsi que des locaux appropriés, y compris des cabines d’interprétation.

Troisièmement, il faudrait dans ce cas faire appel à un nombre beaucoup plus élevé de membres du jury capables de couvrir les différentes langues utilisées par les candidats”.

11 Aux termes du point 2 de l’annexe II de l’avis [de concours litigieux], qui porte le titre “Critères applicables au choix des langues pour chaque procédure de sélection” :

“Si les candidats sont tenus de choisir parmi un nombre limité de langues officielles de l’[Union], le conseil d’administration d’EPSO doit déterminer au cas par cas les langues qui doivent être utilisées pour chaque concours général, en tenant compte des critères suivants :

i) éventuelles règles internes particulières sur l’utilisation des langues au sein de l’institution ou des institutions, ou des organismes concernés ;

ii) exigences spécifiques liées à la nature des fonctions et aux besoins particuliers de l’institution ou des institutions concernées ;

iii) langues les plus fréquemment utilisées au sein de l’institution ou des institutions concernées, déterminées selon les paramètres suivants :

– la connaissance déclarée et démontrée, chez les fonctionnaires permanents de l’[Union] en activité, des langues officielles de l’[Union], au niveau B2 ou supérieur du [CECR],

– les langues cibles dans lesquelles les documents destinés à une utilisation interne au sein des institutions de l’[Union] sont le plus fréquemment traduits,

– les langues sources à partir desquelles les documents produits en interne par les institutions de l’[Union] et destinés à une utilisation externe sont le plus fréquemment traduits ;

iv) langues utilisées pour la communication administrative au sein de l’institution ou des institutions concernées.”

12 Enfin, le point 3 de l’annexe II de l’avis [de concours litigieux], intitulé “Langues de communication”, indique ce qui suit :

“La présente [partie] décrit les dispositions générales relatives à l’utilisation des langues de communication entre EPSO et les candidats potentiels. D’autres exigences spécifiques pourront être précisées dans chaque avis de concours.

EPSO tient dûment compte du droit des candidats, en tant que citoyens de l’[Union], de communiquer dans leur langue maternelle. Il reconnaît également que les candidats qui ont validé leur acte de candidature sont des membres potentiels de la fonction publique européenne qui bénéficient des droits conférés par le statut [...] et soumis aux obligations prévues par ce dernier. Les institutions européennes estiment par conséquent qu’EPSO devrait, dans la mesure du possible, communiquer avec les
candidats et leur fournir des informations sur leurs candidatures dans toutes les langues officielles de l’[Union]. À cette fin, les éléments stables du site web d’EPSO, les avis de concours et les dispositions générales applicables aux concours généraux seront disponibles dans toutes les langues officielles.

Les langues qu’il convient d’utiliser pour remplir les actes de candidature en ligne sont indiquées dans chaque avis de concours. Les instructions sur la manière de remplir l’acte de candidature devront être fournies dans toutes les langues officielles. Ces dispositions s’appliqueront pendant la période de transition nécessaire à la mise en place d’une procédure de candidature initiale en ligne disponible dans toutes les langues officielles.

Dans un souci de communication rapide et efficace, après la validation de la candidature initiale, EPSO assurera sa communication de masse avec des populations importantes de candidats dans un nombre limité de langues officielles de l’[Union]. Il s’agira soit de la première, soit de la deuxième langue du candidat, selon ce qui est indiqué dans l’avis de concours correspondant.

Les candidats peuvent s’adresser à EPSO dans toute langue officielle de l’[Union], mais, pour que l’Office puisse traiter plus efficacement leur demande, les candidats sont encouragés à choisir parmi un nombre limité de langues pour lesquelles le personnel d’EPSO est en mesure de fournir une couverture linguistique immédiate sans qu’il soit nécessaire de recourir à la traduction.

Certains tests peuvent également être organisés dans un nombre limité de langues officielles de l’[Union] afin de garantir que les candidats possèdent le niveau de compétences linguistiques requis pour pouvoir participer à la phase d’évaluation des concours généraux. Les langues des différentes épreuves seront précisées dans chaque avis de concours.

Les institutions de l’[Union] estiment que ce régime garantit qu’un équilibre juste et approprié est ainsi respecté entre l’intérêt du service et le principe du multilinguisme et de la non-discrimination fondée sur la langue. L’obligation faite aux candidats de choisir une deuxième langue, différente de leur première langue (normalement la langue maternelle ou équivalente), permet de les comparer sur une base homogène [...]”

13 Dans la partie de l’avis [de concours litigieux] intitulée “Comment serai-je sélectionné ?”, il est indiqué, au point 1, que les tests de type “questionnaire à choix multiple” (QCM) sur ordinateur, à savoir les tests de raisonnement verbal, de raisonnement numérique et de raisonnement abstrait, qui constituent la première étape des procédures de sélection concernées, sont organisés dans la langue choisie, par chaque candidat, comme première langue de concours.

14 En outre, selon le point 3 de ladite partie, à la suite de la “sélection sur titres”, qui constitue la deuxième étape des concours concernés par l’avis [de concours litigieux], les candidats ayant obtenu les meilleures notes globales seront invités à passer, dans la langue qu’ils auront choisie comme deuxième langue de concours, les épreuves du centre d’évaluation, dernière étape des concours qui comporte plusieurs tests, visant à évaluer différentes compétences des candidats.

15 Lors de cette étape et pour les raisons indiquées dans la partie de l’avis [de concours litigieux] intitulée “Puis-je poser ma candidature ?” (voir point 5 ci-dessus), les candidats seront, par ailleurs, appelés à passer un test de compréhension linguistique en anglais. Selon l’avis [de concours litigieux], ce dernier test “est éliminatoire, mais la note ne sera pas prise en considération dans le calcul des notes globales obtenues dans le cadre du centre d’évaluation” ».

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

20 Par requêtes déposées au greffe du Tribunal, respectivement, les 29 juillet et 9 août 2016, le Royaume d’Espagne, dans l’affaire T‑401/16, et la République italienne, dans l’affaire T‑443/16, ont chacun introduit un recours au titre de l’article 263 TFUE tendant à l’annulation de l’avis de concours litigieux.

21 Par décision de la présidente de la neuvième chambre du Tribunal du 6 novembre 2019, les affaires T‑401/16 (Espagne/Commission), et T‑443/16 (Italie/Commission), ont été jointes aux fins de la phase orale de la procédure.

22 Par leurs recours, le Royaume d’Espagne et la République italienne ont contesté la légalité de deux volets du régime linguistique instauré par l’avis de concours litigieux limitant aux langues allemande, anglaise et française le choix, d’une part, de la deuxième langue des concours et, d’autre part, de la langue de communication entre les candidats et l’EPSO.

23 En premier lieu, le Tribunal a examiné, de manière conjointe, les deuxième et troisième moyens soulevés dans l’affaire T‑401/16 par le Royaume d’Espagne ainsi que les troisième et septième moyens soulevés dans l’affaire T‑443/16 par la République italienne, portant sur le premier volet de ce régime linguistique.

24 À cet égard, le Tribunal a relevé, au point 73 de l’arrêt attaqué, que la limitation aux langues allemande, anglaise et française du choix de la deuxième langue des concours concernés par l’avis de concours litigieux (ci-après la « limitation du choix de la langue 2 des concours » ou la « limitation en cause ») constitue, en substance, une différence de traitement fondée sur la langue, en principe interdite en vertu de l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du statut, tout en ajoutant qu’une
telle différence de traitement pouvait être justifiée.

25 Par conséquent, il a procédé, aux points 74 à 207 de l’arrêt attaqué, à l’examen d’une telle justification.

26 Dans le cadre de cet examen, il a vérifié, aux points 94 à 116 de l’arrêt attaqué, les trois motifs avancés dans l’avis de concours litigieux pour justifier la limitation en cause.

27 Dans ce contexte, le Tribunal a constaté, au point 105 de l’arrêt attaqué, que, si la nécessité que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles peut éventuellement être apte à justifier une limitation aux trois langues en question, ni les contraintes budgétaires et opérationnelles ni la nature de la procédure de sélection ne sont des motifs susceptibles de justifier une telle limitation.

28 S’agissant du premier de ces trois motifs, le Tribunal a, tout d’abord, relevé, aux points 107 à 109 de l’arrêt attaqué, que les considérations exposées dans la partie introductive et le point 1, sous i), de l’annexe II de l’avis de concours litigieux, bien qu’elles indiquent l’existence d’un intérêt du service à ce que les personnes nouvellement recrutées puissent accomplir leurs tâches et communiquer de manière efficace dès leur prise de fonctions, ne suffisent pas, en elles‑mêmes, à établir
que les fonctions en cause, à savoir celles d’enquêteur ou de chef d’équipe d’enquêteurs à la Commission, et plus spécifiquement à l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), nécessitent concrètement une connaissance suffisante de la langue allemande, anglaise ou française, à l’exclusion des autres langues officielles de l’Union. En particulier, la considération selon laquelle ces trois langues constituent « les langues les plus communément utilisées avec les tiers associés aux enquêtes dans
les affaires de contrefaçon, de corruption, de douanes et de commerce » ne serait étayée par aucune indication concrète, la Commission ne produisant, par ailleurs, aucun élément à cet égard.

29 Ensuite, aux points 110 et 111 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté que, certes, cet avis de concours comporte des considérations plus détaillées sur l’exigence de maîtriser la langue anglaise. Toutefois, ces considérations ne serviraient « qu’à justifier l’organisation, au stade du centre d’évaluation, d’une épreuve de compréhension linguistique en anglais à caractère éliminatoire ». En outre, indépendamment de la question de savoir si lesdites considérations seraient susceptibles de
justifier également que cette langue figure parmi les trois langues auxquelles est limité le choix de la deuxième langue des concours en cause, le Tribunal a considéré que « non seulement elles ne sont pas aptes, par leur objet même, relatif exclusivement à l’anglais, à justifier l’inclusion de l’allemand et du français parmi les trois langues retenues, mais elles remettent également en cause l’acception selon laquelle un candidat disposant d’une connaissance satisfaisante de l’allemand ou du
français pourrait être considéré comme étant immédiatement opérationnel ».

30 Enfin, aux points 112 à 114 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que cette analyse n’est pas infirmée par la description des fonctions que les lauréats recrutés seront appelés à exercer, telle qu’elle figure dans l’avis de concours litigieux, dès lors qu’il n’apparaît pas possible d’établir, sur la base de cette seule description, que les trois langues auxquelles est limité le choix de la langue 2 des concours en cause permettraient toutes aux lauréats de ces concours d’être immédiatement
opérationnels. Le Tribunal a considéré, par ailleurs, qu’aucun élément de cet avis de concours ni, d’ailleurs, des dossiers des présentes affaires ne permet de démontrer une utilisation effective de ces trois langues dans l’accomplissement des tâches énumérées dans l’annexe I de celui‑ci. De même, il ne ressortirait aucunement dudit avis ni des éléments figurant dans les dossiers des présentes affaires que les trois langues susmentionnées fassent toutes l’objet d’une utilisation effective dans
les rapports des enquêteurs ou des chefs d’équipes d’enquêteurs avec les autorités des États membres et des pays tiers.

31 Par conséquent, le Tribunal a conclu, au point 116 de l’arrêt attaqué, que le motif tiré de la nécessité que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles ne saurait, compte tenu de la formulation vague et générale qui en a été faite dans l’avis de concours litigieux ainsi que de l’absence d’indications concrètes de nature à l’étayer, justifier la limitation du choix de la deuxième langue des concours.

32 Dans ces conditions, le Tribunal a vérifié, par la suite, si les éléments produits par la Commission au soutien de ce motif sont susceptibles de démontrer que, eu égard aux spécificités fonctionnelles des emplois à pourvoir, la limitation en cause était objectivement et raisonnablement justifiée par la nécessité de disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels.

33 Aux fins de cette vérification, le Tribunal a, premièrement, examiné, aux points 122 à 169 de l’arrêt attaqué, les éléments relatifs à la pratique interne de la Commission en matière linguistique, à savoir :

– la communication SEC(2000) 2071/6 du président de la Commission, du 29 novembre 2000, relative à la simplification du processus décisionnel, et le procès-verbal de la mille cinq cent deuxième réunion de la Commission, du 29 novembre 2000, établi le 6 décembre 2000 [PV(2002) 1502] portant approbation, par le collège des membres, de cette communication ;

– le règlement intérieur de la Commission (JO 2000, L 308, p. 26), tel que modifié par la décision 2010/138/UE, Euratom de la Commission, du 24 février 2010 (JO 2010, L 55, p. 60, ci-après le « règlement intérieur »), et les modalités d’application de ce règlement intérieur [C(2010) 1200 final] ;

– un extrait du Manuel des procédures opérationnelles de la Commission, intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption », et certains documents y relatifs, et

– l’annexe de la communication SEC(2006) 1489 final de la Commission, du 20 décembre 2006, relative à la traduction à la Commission, intitulée « Règles de traduction après 2006 » (ci-après les « règles de traduction après 2006 »).

34 S’agissant notamment de la communication SEC(2000) 2071/6, le Tribunal a examiné celle-ci aux points 132 à 137 de l’arrêt attaqué, en constatant, au point 133 de cet arrêt, que son objet « consiste, en substance, à évaluer les différents types de procédures de prise de décision par le collège des membres de la Commission, tels qu’ils étaient prévus par son règlement intérieur dans sa version en vigueur au moment où cette communication a été émise, et à en proposer la simplification. C’est dans un
tel contexte et en se référant à un type précis de procédure, à savoir à la procédure écrite, que le point 2.2 de ladite communication indique que “les documents doivent être diffusés dans les trois langues de travail de la Commission”, sans, par ailleurs, les nommer. Or, cette seule référence, quand bien même elle comporte l’expression “langues de travail”, ne suffit pas pour établir que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues effectivement utilisées par tous les services de la
Commission dans leur travail au quotidien ». Ayant relevé, aux points 134 à 136 dudit arrêt, que la portée de cette référence est, en outre, nuancée par d’autres passages de la communication SEC(2000) 2071/6, le Tribunal a conclu, au point 137 de ce même arrêt, que cette communication « ne permet pas de tirer des conclusions utiles sur l’utilisation effective de l’allemand, de l’anglais et du français dans le travail quotidien des services de la Commission, ni a fortiori dans l’exercice des
fonctions visées par l’avis [de concours litigieux] ».

35 Au point 138 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté que cette constatation ne saurait être remise en cause par les autres textes au regard desquels la Commission suggère d’analyser la communication SEC(2000) 2071/6, à savoir son règlement intérieur, les modalités d’application de ce dernier ainsi que le document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption », en examinant, tour à tour, ces trois textes aux points 139 à 151 de cet arrêt.

36 Au point 152 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, à cet égard, que, pris dans leur ensemble, les textes visés au point 35 du présent arrêt ne sauraient s’analyser comme des modalités d’application, dans le règlement intérieur, du régime linguistique général établi par le règlement no 1/58, au sens de l’article 6 de ce dernier. Ainsi que l’aurait également précisé la Commission, ces textes ne feraient que « refléter une pratique administrative longuement établie au sein de cette institution,
consistant à utiliser les langues allemande, anglaise et française comme langues dans lesquelles les documents doivent être rendus disponibles pour être soumis à l’approbation du collège des membres ». En outre, après avoir notamment constaté, aux points 153 et 154 de l’arrêt attaqué, que, en particulier, le document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption » extrait du Manuel des procédures opérationnelles ne saurait s’analyser comme une décision de son président
de fixer les langues de présentation des documents soumis au collège, le Tribunal a observé, au point 155 de cet arrêt, que la Commission a reconnu qu’il n’existait pas une décision interne fixant les langues de travail en son sein.

37 Ayant fait ces « précisions liminaires », le Tribunal a par la suite constaté, au point 156 de l’arrêt attaqué, que, dans la mesure où ils ont pour seul objet de définir les langues nécessaires au déroulement des différentes procédures décisionnelles de la Commission, l’ensemble des textes produits par cette dernière ne sont pas de nature à justifier la limitation aux langues allemande, anglaise et française du choix de la langue 2 des concours au regard des spécificités fonctionnelles des
emplois visés par l’avis de concours litigieux.

38 À cet égard, le Tribunal a précisé, au point 157 de l’arrêt attaqué, qu’il ne ressort pas de ces textes qu’il existe un lien nécessaire entre les procédures décisionnelles de la Commission, notamment celles se déroulant au sein du collège de ses membres, et les fonctions que les lauréats des concours litigieux seront susceptibles d’exercer. En effet, à supposer même que les membres d’une institution déterminée utilisent exclusivement une ou certaines langues dans leurs délibérations, il ne
pourrait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise aucune de ces langues, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile dans l’institution en question.

39 En outre, le Tribunal a relevé, au point 158 de l’arrêt attaqué, qu’il ne ressort pas non plus des textes produits par la Commission que l’ensemble des trois langues qualifiées de « langues procédurales » sont effectivement utilisées par ses services, dans leur travail quotidien. De plus, la communication SEC(2000) 2071/6 laisserait entendre que c’est non pas le service matériellement responsable de la rédaction d’un document, mais bien la direction générale de la traduction qui établit les
versions de ce document dans les langues « procédurales » nécessaires en vue de leur transmission au collège des membres de la Commission. Au point 159 de cet arrêt, il a ajouté que, dans la mesure où aucun fonctionnaire n’est tenu d’avoir une connaissance satisfaisante de l’ensemble des trois langues exigées par l’avis de concours litigieux, il est difficilement envisageable que l’établissement d’un projet d’acte dans les versions linguistiques requises pour sa transmission à ce collège soit
simultanément réparti entre un nombre correspondant de fonctionnaires relevant du service responsable pour la rédaction de ce projet. Par ailleurs, après avoir rejeté, aux points 160 à 163 dudit arrêt, les arguments de la Commission tirés de la communication SEC(2006) 1489 final, le Tribunal a relevé, aux points 164 à 168 de celui-ci, que les textes produits par cette institution sont loin d’indiquer une utilisation exclusive des trois langues « procédurales » dans les procédures qu’ils visent.

40 Au vu de cette analyse, le Tribunal a jugé, au point 169 de l’arrêt attaqué, que les textes en question ne sont pas de nature à démontrer que la limitation en cause soit apte à répondre à des besoins réels du service et, partant, à établir l’existence, au regard des spécificités fonctionnelles des emplois visés par cet avis, d’un intérêt du service à ce que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles.

41 Deuxièmement, le Tribunal a examiné, aux points 170 à 195 de l’arrêt attaqué, les éléments relatifs aux langues utilisées par les membres du personnel de l’OLAF.

42 Tout d’abord, le Tribunal a analysé, aux points 175 à 185 de l’arrêt attaqué, l’annexe intitulée « Données extraites de Sysper relatives aux connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF », en constatant, au point 180 de cet arrêt, que ces données ne permettent ni à elles seules ni en combinaison avec les textes examinés aux points 122 à 169 dudit arrêt d’établir quelles sont la ou les langues véhiculaires effectivement utilisées par ce service dans son travail quotidien, voire la ou les
langues qui seraient indispensables à l’exercice des fonctions d’enquêteur et de chef d’équipe d’enquêteurs. Partant, le Tribunal a considéré que ces données ne permettent pas d’établir quelles sont la ou les langues dont une connaissance satisfaisante ferait des lauréats des concours concernés par l’avis de concours litigieux des administrateurs immédiatement opérationnels.

43 Par ailleurs, après avoir rappelé, au point 181 de l’arrêt attaqué, sa jurisprudence selon laquelle une limitation du choix de la deuxième langue des candidats à un concours à un nombre restreint de langues officielles ne saurait être considérée comme objectivement justifiée et proportionnée lorsque figurent, parmi ces langues, outre une langue dont la connaissance est souhaitable, voire nécessaire, d’autres langues qui ne confèrent aucun avantage particulier aux lauréats potentiels d’un concours
par rapport à une autre langue officielle, le Tribunal a jugé, au point 182 de cet arrêt, que, même s’il devait être considéré que les connaissances linguistiques du personnel en activité peuvent indiquer que, pour être immédiatement opérationnelle sur le plan de la communication interne, une nouvelle recrue devrait maîtriser une langue bénéficiant d’un degré de diffusion particulièrement élevé au sein de ce personnel, les données en question ne sauraient justifier la limitation apportée par
l’avis de concours litigieux au choix de la langue 2.

44 À cet égard, le Tribunal a relevé, au point 183 de l’arrêt attaqué, que, en effet, il résulte d’une analyse des données relatives aux langues déclarées à titre de « langue 1 » et de « langue 2 » que seule une connaissance satisfaisante de la langue anglaise pourrait être considérée comme conférant un avantage aux lauréats potentiels des concours en cause. En revanche, ces données ne permettraient pas d’expliquer pourquoi un candidat disposant, par exemple, d’une connaissance approfondie de la
langue italienne et d’une connaissance satisfaisante de la langue allemande pourrait être immédiatement opérationnel pour ce qui concerne la communication interne, alors qu’un candidat disposant d’une connaissance approfondie de la langue italienne et d’une connaissance satisfaisante de la langue néerlandaise ne le pourrait pas. S’agissant, en outre, des données relatives à la « langue 3 », le Tribunal a précisé, au point 184 de cet arrêt que, même si le contenu de celles-ci ne modifie en rien
cette appréciation, elles ne sauraient, en tout état de cause, être prises en compte, dès lors qu’il ne ressort pas de l’annexe fournie par la Commission que le personnel y visé a déjà fait preuve de la capacité à travailler dans sa troisième langue.

45 Le Tribunal a ainsi conclu, au point 185 de l’arrêt attaqué, que les données relatives aux connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF ne permettent pas de justifier la limitation en cause au regard de l’objectif de disposer de lauréats immédiatement opérationnels.

46 Ensuite, en ce qui concerne l’annexe intitulée « Informations […] concernant l’utilisation de l’anglais à l’OLAF », le Tribunal a considéré, aux points 186 et 187 de l’arrêt attaqué, que celle-ci n’est pas pertinente, dès lors qu’elle fait apparaître, sur l’ensemble de la période couverte, une utilisation quasi exclusive de la langue anglaise et une utilisation très limitée de la langue française et qu’elle ne comporte aucun élément susceptible de démontrer une utilisation de la langue allemande
en tant que langue de travail dans les activités concernées.

47 Enfin, le Tribunal a examiné, aux points 188 à 194 de l’arrêt attaqué, l’annexe intitulée « Programmes opérationnels en matière de lutte contre la fraude » comportant un tableau avec des données sur la gestion de certains aspects du programme dit « Hercule III », en écartant la pertinence de ces données au motif, notamment, qu’il résulte de cette annexe que « l’utilisation de l’allemand et du français s’avère, dans ce contexte particulier, tout à fait exceptionnelle », le principe étant que
« tout le travail [relatif à ce programme] se fait en anglais », et que, surtout, aucun élément des dossiers ne permet de considérer que les lauréats des concours litigieux seraient chargés des tâches liées à la rédaction d’appels à propositions dans le cadre dudit programme.

48 Dans ces conditions, le Tribunal a conclu, aux points 195 et 196 de l’arrêt attaqué, que, à l’instar des éléments produits par la Commission en ce qui concerne sa pratique interne en matière linguistique, ceux relatifs aux langues utilisées par le personnel de l’OLAF ne permettent pas d’établir que la limitation en cause serait justifiée par l’objectif que les administrateurs recrutés soient immédiatement opérationnels.

49 Troisièmement, le Tribunal a examiné, aux points 197 à 204 de l’arrêt attaqué, les éléments relatifs à la diffusion des langues allemande, anglaise et française en tant que langues étrangères parlées et étudiées en Europe, en jugeant, aux points 203 et 204 de cet arrêt, que ceux-ci ne sont pas susceptibles, ni à eux seuls ni pris conjointement avec d’autres éléments des dossiers, de justifier la limitation en cause, dès lors que, tout au plus, ces éléments pourraient éventuellement démontrer le
caractère proportionné de cette limitation, s’il était avéré que celle-ci répond à la nécessité de disposer de lauréats immédiatement opérationnels, ce que la Commission serait toutefois restée en défaut de démontrer.

50 Eu égard à son examen de l’ensemble des éléments avancés par la Commission, le Tribunal a conclu, aux points 205 à 207 de l’arrêt attaqué, que celle-ci n’a pas démontré que la limitation du choix de la langue 2 est objectivement justifiée et proportionnée à l’objectif primordial escompté, consistant à recruter des administrateurs qui seraient immédiatement opérationnels. En effet, il ne suffirait pas de défendre le principe d’une telle limitation en faisant référence au grand nombre des langues
officielles de l’Union et à la nécessité de choisir un nombre plus restreint de langues, voire une seule, comme langues de communication interne ou « langues véhiculaires ». Encore faudrait-il, au regard de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut, objectivement justifier le choix d’une ou de plusieurs langues spécifiques, à l’exclusion de toutes les autres.

51 Par conséquent, le Tribunal a accueilli les deuxième et troisième moyens soulevés dans l’affaire T‑401/16 par le Royaume d’Espagne ainsi que les troisième et septième moyens soulevés dans l’affaire T‑443/16 par la République italienne et a annulé l’avis de concours litigieux en ce qu’il limite le choix de la langue 2 des concours aux langues allemande, anglaise et française.

52 En second lieu, le Tribunal a examiné conjointement le premier moyen dans l’affaire T‑401/16 et le sixième moyen dans l’affaire T‑443/16, relatifs au second volet du régime linguistique contesté, et tirés de la violation de l’article 18 TFUE, de l’article 24, quatrième alinéa, TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 1er et 2 du règlement no 1/58 ainsi que de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut. Le Tribunal a, au point 234
de l’arrêt attaqué, accueilli ces moyens et a annulé l’avis de concours litigieux en ce qu’il limite le choix des langues de communication entre les candidats et l’EPSO aux langues allemande, anglaise et française.

53 Le Tribunal a, en conséquence, au point 235 de l’arrêt attaqué, accueilli les recours et a annulé l’avis de concours litigieux dans son ensemble. Il a en outre précisé, aux points 237 à 242 de cet arrêt, que, pour les motifs exposés à ces mêmes points, cette annulation ne saurait avoir d’incidence sur les recrutements déjà effectués sur la base des listes de réserve établies à l’issue de la procédure de sélection en cause.

Les conclusions des parties au pourvoi

54 La Commission demande à la Cour :

– d’annuler l’arrêt attaqué ;

– de rejeter, si le litige est en état d’être jugé, le recours en première instance comme étant non fondé, et

– de condamner le Royaume d’Espagne et la République italienne aux dépens de la présente procédure et à ceux de la procédure en première instance.

55 Le Royaume d’Espagne et la République italienne demandent à la Cour :

– de rejeter le pourvoi et

– de condamner la Commission aux dépens.

Sur le pourvoi

56 La Commission soulève trois moyens à l’appui de son pourvoi.

57 Les premier et deuxième moyens portent sur la légalité de la limitation aux langues allemande, anglaise et française du choix de la langue 2 des concours, tandis que le troisième moyen porte sur la légalité de la limitation des langues pouvant être utilisées dans les communications entre les candidats concernés par l’avis de concours litigieux et l’EPSO.

Sur le premier moyen

58 Le premier moyen, qui se divise en trois branches, est tiré d’erreurs de droit dans l’interprétation de l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut et dans la définition de l’obligation de motivation incombant à la Commission ainsi que d’une violation de cette obligation incombant au Tribunal.

Sur la première branche, tirée d’une erreur de droit quant à l’objectif de disposer de candidats immédiatement opérationnels et d’une violation de l’obligation de motivation incombant au Tribunal

– Argumentation des parties

59 La Commission fait valoir que, lors de son examen des éléments relatifs à la pratique interne de la Commission en matière linguistique et aux langues utilisées par le personnel de l’OLAF, le Tribunal a appliqué, sans aucune motivation, des critères illégaux pour apprécier si ces éléments démontraient le caractère justifié de la limitation en cause, à savoir, au point 157 de l’arrêt attaqué, la capacité d’un fonctionnaire nouvellement recruté de fournir immédiatement un « travail utile » dans
l’institution de recrutement ainsi que, aux points 181 à 183 de cet arrêt, l’absence d’un « avantage particulier » que certaines des langues auxquelles est limité le choix confèrent à un tel fonctionnaire. Or, le fait de se fonder sur ces critères reviendrait à nier l’intérêt du service à ce que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels.

60 S’agissant plus particulièrement du critère retenu au point 157 de l’arrêt attaqué, la Commission soutient, premièrement, que, l’intérêt du service exigeant le recrutement de candidats immédiatement opérationnels, la circonstance que ces candidats soient néanmoins capables de fournir un « travail utile » ne serait pas pertinente.

61 En effet, exiger du personnel nouvellement recruté qu’il soit immédiatement opérationnel viserait à assurer la continuité avec le personnel en fonction dans le service d’affectation et irait au-delà de la simple capacité à fournir immédiatement un travail utile.

62 Deuxièmement, la Commission fait valoir que le Tribunal n’a pas défini ce que recouvre cette notion de « travail utile », ni étayé le constat selon lequel il serait possible d’effectuer un tel travail, en violation de l’obligation de motivation.

63 Troisièmement, il serait « impossible » qu’un candidat nouvellement recruté, qui ne maîtrise pas l’une des trois langues éligibles aux termes de l’avis de concours litigieux en tant que langue 2, puisse fournir un travail utile au sein d’une institution dont l’organe de direction politique et d’orientation, à savoir le collège des membres de la Commission, prend ses décisions internes uniquement dans l’une de ces trois langues. À cet égard, la Commission soutient, en substance, que le renvoi
opéré par le Tribunal aux points 121 et 122 de l’arrêt du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495), est erroné, dans la mesure où le Comité des représentants permanents (Coreper), auquel il est fait référence à ces points, est un organe, spécifiquement prévu à l’article 16, paragraphe 7, TUE, qui serait distinct des autres institutions. Or, la présente affaire concernerait des membres d’une même institution, comprenant à la fois le collège et les différents
services de cette institution. Au demeurant, la spécificité des fonctions à exercer dans les services d’affectation serait sans influence sur le fait que ce sont, in fine, les services qui soumettent tout projet d’acte au collège des membres de la Commission.

64 Quatrièmement, le Tribunal aurait outrepassé les limites de son contrôle juridictionnel en considérant que la Commission aurait dû présenter de plus amples explications pour justifier la limitation en cause, sans, de surcroît, motiver une telle appréciation.

65 Le Royaume d’Espagne et la République italienne contestent cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

66 Il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence constante de la Cour, les institutions de l’Union doivent disposer d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services et, en particulier, dans la détermination des critères de capacité exigés par les emplois à pourvoir et, en fonction de ces critères et dans l’intérêt du service, les conditions et les modalités d’organisation du concours. Ainsi, les institutions, tout comme l’EPSO, lorsque ce dernier exerce des pouvoirs qui
lui sont dévolus par lesdites institutions, doivent pouvoir déterminer, en fonction de leurs besoins, les capacités qu’il convient d’exiger des candidats participant aux concours pour organiser leurs services de manière utile et raisonnable (arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 88).

67 Les institutions doivent cependant veiller, dans l’application du statut, au respect de l’article 1er quinquies de celui-ci qui interdit toute discrimination fondée sur la langue. Si le paragraphe 6 dudit article prévoit certes que des limitations à cette interdiction sont possibles, c’est à condition qu’elles soient « objectivement et raisonnablement justifiée[s] » et qu’elles répondent à des « objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel » (arrêt du 26 mars
2019, Commission/Italie, C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 89).

68 Ainsi, le large pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions de l’Union en ce qui concerne l’organisation de leurs services, de même que l’EPSO dans les conditions visées au point 67 du présent arrêt, se trouve impérativement encadré par l’article 1er quinquies du statut, de telle sorte que les différences de traitement fondées sur la langue résultant d’une limitation du régime linguistique d’un concours à un nombre restreint de langues officielles ne peuvent être admises que si une
telle limitation est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service. En outre, toute condition relative à des connaissances linguistiques spécifiques doit reposer sur des critères clairs, objectifs et prévisibles permettant aux candidats de comprendre les motifs de cette condition et aux juridictions de l’Union d’en contrôler la légalité (voir en ce sens, arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C‑621/16 P, EU:C:2019:251, points 90 à 93 et jurisprudence citée).

69 Il appartient à l’institution ayant limité le régime linguistique d’une procédure de sélection à un nombre restreint de langues officielles de l’Union d’établir qu’une telle limitation est bien apte à répondre à des besoins réels relatifs aux fonctions que les personnes recrutées seront appelées à exercer, qu’elle est proportionnée à ces besoins et qu’elle repose sur des critères clairs, objectifs et prévisibles, tandis qu’il incombe au Tribunal d’effectuer un examen in concreto du caractère
objectivement justifié et proportionné de cette limitation au regard desdits besoins (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C 621/16 P, EU:C:2019:251, points 93 et 94).

70 Dans le cadre de cet examen, le juge de l’Union doit non seulement vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 104).

71 Par la première branche du présent moyen, la Commission reproche, en substance, au Tribunal d’avoir examiné la justification de la limitation du choix de la langue 2 des concours au regard d’un objectif qui ne correspond pas à celui retenu par l’avis de concours litigieux.

72 Or, force est de constater que ce reproche repose sur une lecture erronée des points 157 et 181 à 183 de l’arrêt attaqué, dont la teneur a été rappelée aux points 38, 43 et 44 du présent arrêt.

73 En effet, il résulte de ces points de l’arrêt attaqué, lus dans leur contexte, que c’est bien au regard de la « nécessité de recruter des administrateurs immédiatement opérationnels », avancée notamment à l’annexe II, point 1, sous i), de l’avis de concours litigieux en tant que justification d’une telle limitation, que le Tribunal a examiné si les éléments produits par la Commission relatifs à sa pratique interne en matière linguistique et aux langues utilisées par le personnel de l’OLAF sont
susceptibles de démontrer le caractère objectivement justifié et proportionné de cette limitation.

74 Ainsi, s’agissant, en premier lieu, du point 157 de l’arrêt attaqué, le Tribunal, en considérant qu’« il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise aucune [des langues éligibles en tant que deuxième langue], ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile dans l’institution », n’a nullement remis en cause l’intérêt du service à disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels, mais a, au contraire,
cherché à déterminer si les éléments avancés par la Commission relatifs à sa pratique interne en matière linguistique démontrent que, afin de satisfaire à cet intérêt, il est nécessaire, compte tenu des spécificités fonctionnelles des emplois visés par l’avis de concours litigieux et des langues effectivement utilisées par les services concernés dans leur travail quotidien, que le choix de la langue 2 de ces concours soit limité aux langues allemande, anglaise et française (voir également,
s’agissant de la jurisprudence du Tribunal citée à ce point 157, arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 106).

75 Par ailleurs, en procédant ainsi, le Tribunal n’a ni manqué à son obligation de motivation, ni outrepassé les limites de son contrôle juridictionnel.

76 En effet, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 69 et 70 du présent arrêt, c’est à bon droit et sans excéder les limites de son contrôle que le Tribunal a vérifié si la limitation du choix de la langue 2 des concours était objectivement justifiée par la nécessité de recruter des administrateurs immédiatement opérationnels et si le niveau de connaissance linguistique exigé était proportionné aux besoins réels du service.

77 S’agissant de l’argumentation de la Commission relative à ses procédures décisionnelles propres, et à son reproche fait au Tribunal de s’être erronément référé à l’arrêt du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495), ainsi que d’avoir retenu le caractère spécifique des fonctions concernées par l’avis de concours litigieux pour rejeter la justification tirée de l’objectif de disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels, il convient, tout d’abord, d’observer
que le Tribunal a examiné l’ensemble des textes produits par la Commission, et que, au terme de cet examen, il est parvenu à la conclusion qu’il n’en ressortait pas l’existence d’un lien nécessaire entre les procédures décisionnelles de la Commission et les fonctions d’enquêteur et de chef d’équipe d’enquêteurs que les lauréats des concours litigieux seront susceptibles d’exercer. Or, la Commission ne conteste pas cette conclusion, mais se borne à soutenir qu’il serait « impossible » d’utiliser
une langue autre que les trois langues en question.

78 Ensuite, bien que le point 121 de l’arrêt du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495), auquel fait référence le point 157 de l’arrêt attaqué, porte sur l’argumentation de la Commission relative aux langues utilisées au sein du Coreper, il convient de relever que le Tribunal a également considéré, au point 122 de ce même arrêt, que, de manière générale, s’agissant des arguments tirés de l’utilisation d’une ou de plusieurs langues comme « langues de délibération »
d’une institution de l’Union, il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise aucune de ces langues, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile dans l’institution en question. Il s’ensuit que la Commission n’est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le Tribunal a méconnu sa propre jurisprudence.

79 S’agissant enfin du caractère spécifique des fonctions concernées par l’avis de concours litigieux, il y a lieu de relever que le Tribunal a constaté, au point 157 de l’arrêt attaqué, que la justification tirée de l’objectif de disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels n’avait pas été étayée à suffisance de droit.

80 À cet égard, le Tribunal s’est contenté de procéder, conformément à ce qui a été rappelé aux points 69 et 70 du présent arrêt, à l’examen nécessaire afin de déterminer les connaissances linguistiques qui peuvent objectivement être exigées par la Commission dans l’intérêt du service, au vu des fonctions particulières visées par l’avis de concours litigieux.

81 En second lieu, s’agissant des griefs de la Commission dirigés contre les points 181 à 183 de l’arrêt attaqué, il convient de relever que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 69 du présent arrêt, il appartenait à la Commission d’établir que la limitation du choix de la langue 2 des concours était bien apte à répondre à des besoins réels relatifs aux fonctions que les personnes recrutées seront appelées à exercer.

82 C’est précisément ce que le Tribunal a vérifié, aux points 181 à 183 de l’arrêt attaqué, en constatant que les données présentées par la Commission en ce qui concerne les connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF conduisent, au mieux, à conclure que, si la maîtrise de la langue anglaise pourrait être de nature à conférer un avantage dans la communication interne au profit des lauréats des concours litigieux et ainsi à permettre à ceux-ci d’être immédiatement opérationnels sur le plan de
cette communication, une telle conclusion ne vaut pas en ce qui concerne la maîtrise des langues allemande et française.

83 Par conséquent, le Tribunal a pu conclure, à bon droit, que la Commission était restée en défaut d’établir que la connaissance satisfaisante de l’une de ces deux autres langues confère un avantage en vue de la réalisation de l’objectif de disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels.

84 Aucun des griefs n’étant fondé, la première branche du premier moyen doit être rejetée.

Sur la deuxième branche, tirée d’une erreur de droit dans la définition de la charge de la preuve et de l’obligation de motivation incombant à la Commission dans un avis de concours

– Argumentation des parties

85 La Commission soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en définissant de manière excessivement stricte tant l’obligation de motiver, dans l’avis de concours litigieux, la justification pour la limitation en cause que la charge de prouver le bien-fondé de cette justification.

86 Ainsi, premièrement, la charge de la preuve imposée par le Tribunal à la Commission afin de prouver l’existence des justifications invoquées irait bien au-delà du degré de précision qu’exige la jurisprudence, en ce qu’il a jugé, à la dernière phrase du point 133, à la première phrase du point 158 et au point 180 de l’arrêt attaqué, que la Commission était restée en défaut de prouver que les trois langues éligibles en tant que langue 2 dans l’avis de concours litigieux étaient effectivement les
trois langues utilisées quotidiennement par « tous les services » de cette institution.

87 Deuxièmement, le Tribunal aurait exigé, au point 164 de l’arrêt attaqué, la démonstration de l’« utilisation exclusive » de ces trois langues dans les procédures décisionnelles de la Commission, alors que cet avis précisait que les institutions de l’Union utilisent non pas exclusivement, mais principalement lesdites langues. Ainsi, le Tribunal aurait dû vérifier si ces trois langues étaient effectivement les plus utilisées par l’institution, et non les seules et uniques langues utilisées. En
outre, le Tribunal aurait commis cette même erreur, aux points 181 à 183 de cet arrêt, en ajoutant un critère d’examen selon lequel il est nécessaire d’apprécier si les trois langues en question confèrent un « avantage particulier » aux candidats des concours litigieux.

88 Troisièmement, contrairement à ce qu’affirme le Tribunal à la dernière phrase du point 167 de l’arrêt attaqué, il n’appartiendrait pas à la Commission d’identifier celle des trois langues qui peut être utilisée et l’importance relative de chacune de ces langues serait sans pertinence.

89 Quatrièmement, la Commission reproche au Tribunal d’avoir rejeté, au point 201 de l’arrêt attaqué, l’ensemble des données statistiques qu’elle a présentées, aux motifs qu’il ne saurait être présumé qu’elles reflètent correctement les connaissances linguistiques des candidats potentiels aux concours en cause.

90 Selon cette institution, le niveau de preuve exigé en vertu de la jurisprudence de la Cour se rapporterait à l’identification des langues officielles dont la connaissance est la plus répandue dans l’Union. Partant, la limitation du choix de la langue 2 des concours serait justifiée par des éléments objectifs relatifs à la diffusion des langues permettant de déduire raisonnablement que ces données correspondent aux connaissances linguistiques que possèdent les personnes souhaitant participer à des
concours de l’Union. Dans ces conditions, il n’appartiendrait pas à la Commission de prouver qu’une telle correspondance est correctement établie.

91 En outre, la conclusion figurant à la première phrase du point 205 de l’arrêt attaqué, en ce qu’elle repose sur la même prémisse erronée, serait également entachée d’une erreur de droit.

92 Enfin, cinquièmement, la Commission fait valoir que, au point 159 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est livré à des appréciations purement hypothétiques, en réduisant de manière significative la portée de la communication SEC(2000) 2071/6.

93 Le Royaume d’Espagne et la République italienne contestent cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

94 En premier lieu, il importe de rappeler, ainsi qu’il résulte du point 68 du présent arrêt, que toute condition relative à des connaissances linguistiques spécifiques doit reposer sur des critères clairs, objectifs et prévisibles permettant aux candidats de comprendre les motifs de cette condition et aux juridictions de l’Union d’en contrôler la légalité.

95 La motivation d’une décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union revêt une importance toute particulière, en tant qu’elle permet à l’intéressé de décider en pleine connaissance de cause s’il entend introduire un recours contre cette décision ainsi qu’à la juridiction compétente d’exercer son contrôle, et qu’elle constitue donc l’une des conditions de l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux (arrêt du 15 juillet
2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 103 ainsi que jurisprudence citée).

96 En ce qui concerne la limitation du choix de la langue 2 dans un avis de concours, la Cour a jugé qu’il appartient au Tribunal de vérifier si cet avis, les dispositions générales applicables aux concours généraux ou encore les éléments de preuve fournis par la Commission comportent des « indications concrètes » permettant d’établir, objectivement, l’existence d’un intérêt du service susceptible de justifier cette limitation (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie, C‑621/16 P,
EU:C:2019:251, point 95).

97 Partant, c’est à bon droit que le Tribunal, dans l’arrêt attaqué, a procédé à cette vérification et a constaté, au point 116 de cet arrêt et après l’examen effectué notamment aux points 107 à 115 de celui-ci, dont la teneur a été exposée aux points 28 à 30 du présent arrêt, que, même compris au regard de la description des fonctions figurant dans l’avis de concours litigieux, le motif tiré de la nécessité que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles, avancé dans
cet avis, ne saurait, compte tenu de sa formulation vague et générale et en l’absence, dans ledit avis, d’indications concrètes de nature à l’étayer, justifier la limitation du choix de la langue 2 des concours aux langues allemande, anglaise et française.

98 Par ailleurs, la Commission a souligné, dans sa requête en pourvoi, qu’elle ne conteste pas les points 100 à 116 de l’arrêt attaqué.

99 En second lieu, pour autant que la Commission fait grief au Tribunal de lui avoir imposé une charge de la preuve disproportionnée, il résulte des points 69 et 70 du présent arrêt que, d’une part, la Commission devait établir, dans le cadre de la présente affaire, que la limitation du choix de la langue 2 des concours est bien apte à répondre à des besoins réels relatifs aux fonctions que les personnes recrutées seront appelées à exercer, qu’elle est proportionnée à ces besoins et qu’elle repose
sur des critères clairs, objectifs et prévisibles, et, d’autre part, le Tribunal devait effectuer un examen in concreto du caractère objectivement justifié et proportionné de cette limitation au regard desdits besoins, en vérifiant non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués par la Commission, leur fiabilité et leur cohérence, mais également si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier la justification
de ladite limitation et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées.

100 Or, c’est précisément ce que le Tribunal a fait lorsqu’il a examiné, aux points 122 à 207 de l’arrêt attaqué, les éléments produits par la Commission au soutien du motif tiré de la nécessité que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles.

101 Premièrement, s’agissant des griefs dirigés contre la dernière phrase du point 133, la première phrase du point 158 et le point 180 de l’arrêt attaqué, dont la teneur a été exposée aux points 34, 39 et 42 du présent arrêt, il convient de constater que, contrairement à ce que soutient la Commission, le Tribunal n’y a nullement exigé que celle-ci, afin d’établir le caractère justifié de la limitation en cause, démontre que les langues allemande, anglaise et française sont utilisées par tous les
services de la Commission dans leur travail quotidien.

102 Ainsi, au point 133 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a fait que vérifier l’argument de la Commission, selon lequel la communication SEC(2000) 2071/6, et en particulier son point 2.2, limite le nombre des « langues de travail » de cette institution à trois, en considérant que, compte tenu notamment du contexte de ce point, qui se rapporte à la prise de décision par le collège des membres de la Commission par procédure écrite, la seule référence à celui-ci aux « trois langues de travail de la
Commission » ne suffit pas pour établir le bien-fondé de cet argument.

103 Selon cette même logique, aux points 156 à 158 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté, à l’égard de l’ensemble des éléments avancés par la Commission concernant sa pratique interne en matière linguistique, que, dans la mesure où ils ont pour seul objet de définir les langues nécessaires au déroulement des différentes procédures décisionnelles de la Commission et où il n’en ressort ni qu’il existe un lien nécessaire entre ces procédures et les fonctions que les lauréats des concours litigieux
seront susceptibles d’exercer, ni que l’ensemble des trois langues qualifiées de « langues procédurales » sont effectivement utilisées par ses services, dans leur travail quotidien, ces éléments ne sont pas de nature à justifier la limitation en cause au regard des spécificités fonctionnelles des emplois visés par l’avis de concours litigieux.

104 En outre, au point 180 de l’arrêt attaqué, il a relevé que les données fournies par la Commission relatives aux connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF ne permettent ni à elles seules ni en combinaison avec les éléments relatifs à la pratique interne en matière linguistique de la Commission d’établir quelles sont la ou les langues véhiculaires effectivement utilisées par ce service dans son travail quotidien, voire la ou les langues qui seraient indispensables à l’exercice des
fonctions d’enquêteur et de chef d’équipe d’enquêteurs, et que, partant, ces données ne permettent pas d’établir quelles sont la ou les langues dont une connaissance satisfaisante ferait des lauréats des concours litigieux des administrateurs immédiatement opérationnels.

105 Il résulte ainsi des points 133, 158 et 180 de l’arrêt attaqué, lus dans leur contexte, que le Tribunal n’a que vérifié, et ce à bon droit, si les éléments produits par la Commission au soutien de la justification tirée de la nécessité que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles sont de nature à démontrer que les langues allemande, anglaise et française sont celles effectivement utilisées, dans l’exercice de leurs tâches régulières, par le personnel du service
auquel les candidats des concours en question sont, en principe, censés être affectés, de sorte qu’une maîtrise satisfaisante par ces derniers d’au moins l’une de ces trois langues est à la fois nécessaire et suffisante pour permettre à ces candidats d’être immédiatement opérationnels.

106 Deuxièmement, ces mêmes considérations valent en ce qui concerne le grief dirigé contre l’appréciation du Tribunal, figurant au point 164 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, en tout état de cause et indépendamment même de l’existence d’un lien entre les procédures décisionnelles de la Commission et les fonctions spécifiques visées par l’avis de concours litigieux, les éléments avancés par celle-ci relatifs à sa pratique interne en matière linguistique sont loin d’indiquer une utilisation
exclusive des trois langues « procédurales ». En effet, à ce point 164, le Tribunal n’a que relevé, à titre surabondant, que les éléments en question ne sont pas de nature à étayer la conclusion selon laquelle ces procédures sont limitées à ces trois langues. Par ailleurs, la possibilité, pour le personnel du service auquel les candidats d’un concours sont censés être affectés, d’effectuer leurs tâches régulières dans d’autres langues que celles auxquelles le choix de la langue 2 des concours
est limité peut, le cas échéant, être de nature à mettre en doute la nécessité pour ces candidats de maîtriser l’une de ces langues afin d’être immédiatement opérationnels.

107 En outre, le grief de la Commission selon lequel le Tribunal, aux points 181 à 183 de l’arrêt attaqué, aurait exigé que la connaissance satisfaisante de l’une des langues éligibles en tant que langue 2 des concours litigieux confère un avantage particulier aux lauréats repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

108 En effet, le Tribunal a constaté, au point 183 de l’arrêt attaqué, que les données présentées par la Commission en ce qui concerne les connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF conduisent, au mieux, à conclure que, si la maîtrise de la langue anglaise pourrait être de nature à conférer un avantage dans la communication interne au profit des lauréats des concours litigieux et ainsi à permettre à ceux-ci d’être immédiatement opérationnels sur le plan de cette communication, une telle
conclusion ne vaut pas en ce qui concerne la maîtrise des langues allemande et française.

109 Partant, c’est à juste titre que le Tribunal a pu conclure que la Commission n’était pas parvenue à prouver que la connaissance satisfaisante de la langue allemande ou française, contrairement à une combinaison comprenant une autre langue officielle de l’Union, serait indispensable en vue de garantir la réalisation de l’objectif de disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels.

110 Troisièmement, il résulte des considérations qui précèdent qu’il ne peut être reproché au Tribunal d’avoir considéré, à la dernière phrase du point 167 de l’arrêt attaqué, que les notes émanant du secrétaire général de la Commission que cette dernière a fournies et qui accordent, conformément au document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption », des dérogations permanentes dans certains domaines en autorisant la présentation de projets d’acte dans une seule
langue « procédurale » ne permettent pas de tirer des conclusions utiles, dès lors qu’elles n’identifient pas celle de ces langues qui peut concrètement être utilisée.

111 Quatrièmement, s’agissant du grief de la Commission dirigé contre les points 201 et 205 de l’arrêt attaqué, il convient de constater que celui-ci repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. Tout d’abord, contrairement à ce que fait valoir la Commission, le Tribunal, à ce point 201, n’a nullement rejeté dans son intégralité la prise en compte des données statistiques relatives aux langues les plus étudiées en 2012 au niveau de l’enseignement secondaire inférieur au motif que la Commission
n’aurait pas prouvé que celles-ci reflètent correctement les connaissances linguistiques des candidats potentiels au concours litigieux, mais a simplement fait observer que la force probante de ces données est moindre en raison du fait qu’elles se réfèrent à l’ensemble des citoyens de l’Union, y compris aux personnes n’ayant pas atteint l’âge de la majorité.

112 Ensuite, la Commission ne conteste pas l’appréciation du Tribunal, au point 202 de cet arrêt, selon laquelle la seule chose que lesdites données pourraient démontrer est que le nombre de candidats potentiels dont la situation est affectée par la limitation en cause est moins important qu’il ne le serait si ce choix était limité à d’autres langues.

113 Enfin et surtout, ainsi que l’a en substance relevé le Tribunal au point 203 de l’arrêt attaqué, ces mêmes données ne sont pas susceptibles de démontrer que la limitation du choix de la langue 2 des concours est apte et nécessaire à la réalisation de l’objectif de disposer de lauréats immédiatement opérationnels. Partant, dans la mesure où le Tribunal a conclu, notamment aux points 169 et 196 de cet arrêt, que la Commission est restée en défaut d’apporter cette preuve, les données statistiques
relatives aux langues les plus étudiées n’étaient pas de nature à pouvoir démontrer que cette limitation était objectivement justifiée au regard de cet objectif.

114 Cinquièmement, en contestant l’appréciation, au point 159 de l’arrêt attaqué, exposée au point 39 du présent arrêt, qu’elle estime hypothétique, et en faisant valoir que le Tribunal a réduit de manière significative la portée de la communication SEC(2000) 2071/6, la Commission n’invoque pas une erreur de droit, mais demande à la Cour de substituer sa propre appréciation de cet élément de preuve à celle du Tribunal.

115 Or, il ressort de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit et que le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que les éléments de preuve. L’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour
dans le cadre d’un pourvoi (ordonnance du 27 janvier 2022, FT e.a./Commission, C‑518/21 P, non publiée, EU:C:2022:70, point 12 ainsi que jurisprudence citée).

116 Il résulte de l’ensemble de ces considérations que la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée.

Sur la troisième branche, tirée de ce que le Tribunal a exigé la production d’un acte juridiquement contraignant pour justifier la limitation du choix de la deuxième langue aux termes de l’avis de concours litigieux

– Argumentation des parties

117 La Commission soutient que, aux points 152 à 155 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a réduit la portée des éléments de preuve qu’elle a fournis concernant sa pratique interne en matière linguistique sur la base d’un critère d’appréciation erroné, à savoir l’existence d’un acte juridique contraignant définissant les langues de travail de l’institution concernée. Or, il ne résulterait ni de l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut ni de la jurisprudence de la Cour que seuls de tels actes
peuvent justifier une limitation du choix de la deuxième langue d’un concours.

118 En outre, tant la note du secrétaire général de la Commission portant sur la mise en œuvre de la communication SEC(2000) 2071/6 que les « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption » contenues dans le Manuel des procédures opérationnelles constitueraient des « règles internes » au sens du point 2 de l’annexe II de l’avis de concours litigieux, dans la mesure où elles sont contraignantes pour l’institution.

119 Le Royaume d’Espagne et la République italienne réfutent cette argumentation.

– Appréciation de la Cour

120 Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 72 à 74 de ses conclusions, cette troisième branche du premier moyen, selon laquelle le Tribunal aurait réduit la portée des éléments de preuve relatifs à la pratique interne de la Commission en matière linguistique en considérant que seul un acte juridique contraignant serait susceptible de justifier une limitation linguistique telle que celle imposée par l’avis de concours litigieux, repose sur une lecture erronée des points 152 à 155 de
l’arrêt attaqué, dont la teneur a été rappelée au point 36 du présent arrêt.

121 En effet, il résulte de ces points, lus en combinaison avec les points 156 à 169 de l’arrêt attaqué, exposés aux points 37 à 40 du présent arrêt, que ce n’est qu’en guise de précisions liminaires que le Tribunal a constaté, à juste titre, que ces éléments ne sauraient s’analyser comme des modalités d’application du régime linguistique général, au sens de l’article 6 du règlement no 1/58, tout en examinant, par la suite, de manière approfondie, si lesdits éléments sont de nature à justifier la
limitation en cause au regard des spécificités fonctionnelles des emplois visés par l’avis de concours litigieux. Ainsi, la conclusion du Tribunal selon laquelle tel n’est pas le cas tient non pas à l’absence d’une décision interne fixant les langues de travail au sein de la Commission, relevée par le Tribunal au point 155 de l’arrêt attaqué et d’ailleurs non contestée par celle-ci, mais au fait que ces mêmes éléments ont pour seul objet de définir les langues nécessaires au déroulement des
différentes procédures décisionnelles de la Commission.

122 Dès lors, la troisième branche du premier moyen ne saurait prospérer.

123 Il résulte de ces considérations que le premier moyen du pourvoi doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen

124 Le deuxième moyen comprend six branches par lesquelles la Commission invoque la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal et une erreur de droit.

125 À titre liminaire, il convient de rappeler que sont recevables, au stade du pourvoi, des griefs relatifs à la constatation des faits et à leur appréciation dans la décision attaquée lorsqu’il est allégué que le Tribunal a effectué des constatations dont l’inexactitude matérielle résulte des pièces du dossier ou qu’il a dénaturé les éléments de preuve qui lui ont été soumis(arrêt du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, EU:C:2007:32, point 35).

126 À cet égard, lorsqu’il allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit, en application de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par cette juridiction et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à
cette dénaturation. En outre, une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 28 janvier 2021, Qualcomm et Qualcomm Europe/Commission, C‑466/19 P, EU:C:2021:76, point 43).

127 Par ailleurs, si une dénaturation des éléments de preuve peut consister dans une interprétation d’un document contraire au contenu de celui-ci, elle doit ressortir de façon manifeste du dossier soumis à la Cour et elle suppose que le Tribunal ait manifestement outrepassé les limites d’une appréciation raisonnable de ces éléments de preuve. À cet égard, il ne suffit pas de montrer qu’un document pourrait faire l’objet d’une interprétation différente de celle retenue par le Tribunal(arrêt du
28 janvier 2021, Qualcomm et Qualcomm Europe/Commission, C‑466/19 P, EU:C:2021:76, point 44).

128 C’est au regard de ces principes qu’il convient d’analyser les six branches du deuxième moyen.

Sur la première branche, tirée d’une dénaturation de la communication SEC(2000) 2071/6 et de son approbation par le collège des membres de la Commission

– Argumentation des parties

129 La Commission fait valoir que, aux points 132 à 137 et 158 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a dénaturé le sens et la portée de la communication SEC(2000) 2071/6. Premièrement, la Commission souligne, s’agissant du point 133 de l’arrêt attaqué, que cette communication, loin de constituer une simple évaluation des procédures décisionnelles de l’institution, limite clairement le nombre des langues de travail de celle-ci à trois, ainsi qu’il ressort du point 2.2 de cette communication.

130 Deuxièmement, la référence, faite à ce point 2.2, à la circonstance qu’un document puisse être approuvé dans la langue faisant foi ne ferait pas disparaître, contrairement à ce que le Tribunal aurait considéré au point 135 de l’arrêt attaqué, l’obligation de l’approuver également dans l’une des trois langues de travail.

131 Troisièmement, l’implication du service de traduction ne mériterait pas l’importance que lui a attribuée le Tribunal aux points 136 et 158 de l’arrêt attaqué. En effet, cette implication ne viserait qu’à assurer une gestion plus efficace des ressources dans les différents services et ne changerait rien au fait que notamment le service auteur du projet d’acte à soumettre au collège des membres de la Commission doit, au vu de sa participation active dans la procédure décisionnelle et de
l’obligation de respecter le régime linguistique mentionné au point 4 de ladite communication, disposer de fonctionnaires maîtrisant les trois langues de travail.

132 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de cette branche, au motif que la Commission se bornerait à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, sans établir que celui-ci les a dénaturés.

– Appréciation de la Cour

133 Il convient de constater que, contrairement à ce que fait valoir la Commission, le Tribunal, lors de son examen de la communication SEC(2000) 2071/6 effectué aux points 132 à 137 et 158 de l’arrêt attaqué, dont la teneur a été exposée aux points 34 et 39 du présent arrêt, n’a nullement dénaturé celle-ci.

134 À cet égard, il importe de relever qu’il résulte du point 1.2 de la communication SEC(2000) 2071/6 que celle-ci vise à identifier les voies et les moyens permettant de rendre les procédures décisionnelles plus efficaces et transparentes. Pour ce faire, cette communication recense, à ses points 2 et 3, les procédures en vigueur et propose, à son point 4, les moyens de les simplifier ainsi que, à son point 5, d’autres mesures à prendre. S’agissant notamment du point 2.2 de cette communication,
celui-ci relève, entre autres, que, dans le cadre de la procédure écrite, « les documents doivent être diffusés dans les trois langues de travail de la Commission », tandis que, dans le cadre de la procédure par habilitation, le texte de la décision à adopter est « présenté dans une seule langue de travail et/ou dans ses versions qui font foi ».

135 Dès lors, le Tribunal n’a manifestement pas dénaturé la communication SEC(2000) 2071/6, lorsqu’il a constaté, au point 133 de l’arrêt attaqué, que l’objet de celle-ci « consiste, en substance, à évaluer les différents types de procédures de prise de décision par le collège des membres de la Commission [...] et à en proposer la simplification » et que « [c]’est dans un tel contexte et en se référant à un type précis de procédure, à savoir la procédure écrite », que le point 2.2 de la
communication, dont le passage en question est d’ailleurs reproduit de manière fidèle, fait référence aux « langues de travail ». En outre, le Tribunal n’a nullement outrepassé les limites d’une appréciation raisonnable de ce point 2.2 en considérant que cette seule référence ne suffit pas pour établir que les langues allemande, anglaise et française sont effectivement utilisées par tous les services de la Commission dans leur travail quotidien.

136 Il en est de même s’agissant du point 135 de l’arrêt attaqué, lequel ne fait que fidèlement reproduire le point 2.2 de la communication SEC(2000) 2071/6 en ce qui concerne le régime linguistique applicable dans le cadre de la procédure par habilitation, et de l’appréciation, apportée au point 134 de cet arrêt, que ce dernier régime nuance la portée de ladite référence. Par ailleurs, cette constatation n’est pas remise en cause par le point 4 de cette communication, auquel la Commission fait
référence, qui expose, entre autres, que les mesures proposées auront également pour effet de simplifier les exigences linguistiques en matière de décisions, en relevant que, lorsqu’un acte est adopté par procédure écrite, « la proposition doit être disponible au moins dans les langues de travail de la Commission », tandis que, dans le cas des décisions prises par procédures d’habilitation ou de délégation, « le texte n’est exigé que dans la ou les langues de la ou des parties auxquelles la
décision est adressée ».

137 En outre, le Tribunal n’a pas non plus dénaturé le point 5.2 de la communication SEC(2000) 2071/6, intitulé « Simplifier le régime linguistique », en relevant, au point 136 de l’arrêt attaqué, que celui‑ci « met en évidence le rôle de la direction générale (DG) de la traduction de la Commission », dans la mesure où il précise que l’« “une des causes majeures de retard dans le lancement ou l’achèvement des procédures écrites et des procédures par habilitation est l’obtention des traductions, y
compris des textes révisés par les juristes linguistes”, ce qui rendrait indispensable une transmission à temps des documents concernés à [cette direction] », et en considérant, au point 134 de cet arrêt, que ce point 5.2 est ainsi également de nature à nuancer la portée de la référence aux « langues de travail » de la Commission.

138 Partant, c’est sans dénaturer la communication SEC(2000) 2071/6 que le Tribunal a pu considérer, au point 137 de l’arrêt attaqué, que le point 2.2 de cette communication ne permet pas de tirer des conclusions utiles sur l’utilisation effective des langues allemande, anglaise et française dans le travail quotidien des services de la Commission, ni a fortiori dans l’exercice des fonctions visées par l’avis de concours litigieux.

139 De même, le Tribunal n’a aucunement dénaturé le point 5.2 de ladite communication en considérant, au point 158 de l’arrêt attaqué, que celui-ci laisse entendre que ce n’est pas le service matériellement responsable de la rédaction d’un document, mais la direction générale de la traduction qui établit les versions de ce document dans les langues procédurales nécessaires en vue de leur transmission au collège des membres de la Commission, le service responsable se limitant à une tâche de
vérification du texte traduit.

140 Or, en l’absence de toute dénaturation, l’importance attribuée par le Tribunal à l’une ou l’autre des éventualités expressément envisagées par ladite communication relève de l’appréciation des éléments de preuve qui échappe, par nature, à la compétence de la Cour au stade du pourvoi.

141 Par conséquent, la première branche du deuxième moyen du pourvoi ne saurait prospérer.

Sur la deuxième branche, tirée d’une dénaturation du règlement intérieur ainsi que de ses modalités d’application

– Argumentation des parties

142 La Commission fait valoir que, aux points 139 à 146 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a dénaturé le lien entre le règlement intérieur, les modalités d’application de ce règlement intérieur, la communication SEC(2000) 2071/6 ainsi que le document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption ».

143 En effet, le Tribunal aurait procédé à une lecture sélective des modalités d’application du règlement intérieur, en omettant de considérer que le président de cette institution peut fixer les langues dans lesquelles les documents doivent être disponibles, compte tenu des besoins minimaux des membres du collège ou des besoins liés à l’adoption d’un acte.

144 Or, le président de la Commission aurait fait usage de cette faculté en adoptant la communication SEC(2000) 2071/6.

145 Dès lors, et quand bien même cette communication ne cite pas précisément les trois langues de travail devant être utilisées par les membres du collège, elle confirmerait la pratique interne relative à l’usage des langues allemande, anglaise ou française dans les procédures décisionnelles de la Commission.

146 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de cette branche du deuxième moyen, au motif que la Commission se bornerait à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, sans établir que celui-ci les a dénaturés.

– Appréciation de la Cour

147 Il convient de constater que la Commission ne conteste pas que c’est de manière tout à fait fidèle que le Tribunal a rappelé, aux points 139 à 146 de l’arrêt attaqué, les dispositions pertinentes du règlement intérieur et de ses modalités d’application, avant de procéder à une analyse du contenu du document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption ».

148 Ainsi, ce qu’elle reproche au Tribunal est de s’être limité à un tel rappel, alors qu’il aurait dû considérer que ces documents confirment l’utilisation des langues allemande, anglaise et française comme langues de travail.

149 Or, force est de constater que non seulement la Commission remet en cause l’appréciation desdits documents sans démontrer en quoi le Tribunal aurait dénaturé ceux-ci, mais son argumentation repose, en outre, sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

150 En effet, contrairement à ce que fait valoir la Commission, le Tribunal ne s’est nullement borné à exposer le contenu des dispositions pertinentes de ces mêmes documents. Au contraire, il a pleinement apprécié celles-ci ensemble avec les autres éléments relatifs à la pratique interne de la Commission en matière linguistique, y inclus avec la communication SEC(2000) 2071/6, en constatant, d’une part, au point 152 de l’arrêt attaqué, que, pris dans leur ensemble, ces textes « ne font que refléter
une pratique administrative longuement établie au sein de cette institution, consistant à utiliser l’allemand, l’anglais et le français comme langues dans lesquelles les documents doivent être rendus disponibles pour être soumis à l’approbation du collège des membres », et, d’autre part, aux points 157 et 158 de cet arrêt, qu’il ne ressort pas desdits textes ni d’autres éléments du dossier qu’« il existe un lien nécessaire entre les procédures décisionnelles de la Commission, notamment celles se
déroulant au sein du collège de ses membres, et les fonctions que les lauréats des concours litigieux seront susceptibles d’exercer » ou que « l’ensemble des trois langues [en question] sont effectivement utilisées par ses services, dans leur travail au quotidien ». C’est pour ce motif que le Tribunal a conclu, au point 169 dudit arrêt, que ces mêmes textes ne sont pas de nature à démontrer que la limitation en cause soit apte à répondre à des besoins réels du service et, partant, à établir
l’existence, au regard des spécificités fonctionnelles des emplois visés par cet avis, d’un intérêt du service à ce que les personnes nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles.

151 Ainsi, la Commission se limite, en réalité, à faire valoir que les documents qu’elle invoque peuvent faire l’objet d’une interprétation différente de celle retenue par le Tribunal, ce qui ne constitue pas, ainsi qu’il a été rappelé au point 127 du présent arrêt, la démonstration d’une dénaturation de ces documents.

152 Il en résulte que la deuxième branche du deuxième moyen du pourvoi ne saurait prospérer.

Sur la troisième branche, tirée de la dénaturation de la section portant sur les « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption », contenue dans le Manuel des procédures opérationnelles

– Argumentation des parties

153 La Commission fait valoir que le Tribunal a dénaturé, aux points 165 à 169 de l’arrêt attaqué, le sens et la portée du document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption ».

154 La Commission soutient, en particulier, que, dans son appréciation de ce document, le Tribunal a manifestement négligé deux aspects. Ainsi, le Tribunal aurait méconnu que, d’une part, l’existence du régime des dérogations conforte plutôt qu’elle n’infirme la règle des trois langues procédurales et, d’autre part, ledit document confirme sans équivoque que c’étaient les services de l’institution qui devaient respecter les exigences linguistiques fixées dans celui-ci.

155 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de cette branche du deuxième moyen, au motif que la Commission se bornerait à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, sans établir que ce dernier les a dénaturés.

– Appréciation de la Cour

156 Force est de constater que, par ce grief, la Commission demande, en réalité, à la Cour de substituer sa propre appréciation du document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption » à celle du Tribunal, sans établir que celui-ci a manifestement outrepassé les limites d’une appréciation raisonnable de ce document.

157 Partant, cette argumentation ne constitue pas, ainsi qu’il a été rappelé au point 127 du présent arrêt, la démonstration d’une dénaturation du document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption ».

158 Dans ces conditions, la troisième branche du deuxième moyen est irrecevable.

Sur la quatrième branche, tirée de l’absence d’appréciation globale de la communication SEC (2000) 2071/6, du règlement intérieur et de ses modalités d’application ainsi que de la section portant sur les « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption »

– Argumentation des parties

159 La Commission soutient que, en qualifiant, au point 152 de l’arrêt attaqué, de reflet d’une pratique administrative la communication SEC(2000) 2071/6, le règlement intérieur et ses modalités d’application ainsi que le document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption », le Tribunal a fait abstraction de ce que ces documents établissent une règle contraignante pour l’adoption d’actes par la Commission, y inclus l’OLAF.

160 Dans ces conditions, le Tribunal aurait dénaturé, aux points 152 à 157 et 159 de l’arrêt attaqué, ces documents en leur déniant la qualité de règles internes, visées au point 2 de l’annexe II de l’avis de concours litigieux, qu’il lui appartenait de prendre en compte pour apprécier la légalité de la motivation avancée quant au caractère objectif et proportionné de la limitation en cause.

161 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de cette branche du deuxième moyen, au motif que la Commission se bornerait à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, sans établir que celui-ci les a dénaturés.

– Appréciation de la Cour

162 D’emblée, il convient de rappeler que, aux points 156 et 157 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les documents mentionnés aux points 123 à 125 et 127 de cet arrêt avaient pour seul objet de définir les langues nécessaires au déroulement des différentes procédures décisionnelles de cette institution, mais ne permettaient pas d’établir le lien nécessaire entre ces procédures et les fonctions que les lauréats des concours litigieux seront susceptibles d’exercer.

163 La Commission considère que, compte tenu de la force contraignante du régime linguistique au sein de cette institution, le Tribunal ne pouvait pas, sans dénaturer ces documents, conclure à l’absence d’un tel lien.

164 Or, d’une part, il résulte du point 121 du présent arrêt que, contrairement à ce que semble considérer la Commission, le Tribunal n’est pas arrivé à cette conclusion au motif que le régime linguistique applicable aux différentes procédures décisionnelles n’aurait pas de force contraignante au sein de cette institution.

165 D’autre part, la Commission ne démontre pas que le Tribunal, en arrivant à ladite conclusion, aurait manifestement outrepassé les limites d’une appréciation raisonnable desdits documents qu’il a, contrairement à ce que semble faire valoir la Commission, apprécié tant individuellement que dans leur globalité.

166 Il résulte de ces considérations que la quatrième branche du deuxième moyen ne saurait prospérer.

Sur la cinquième branche, tirée de la dénaturation de la communication SEC(2006) 1489 final

– Argumentation des parties

167 La Commission considère que le Tribunal a dénaturé, aux points 160 à 163 de l’arrêt attaqué, la communication SEC(2006) 1489 final et, notamment, son annexe, intitulée « Règles de traduction après 2006 ».

168 En particulier, la Commission reproche au Tribunal d’avoir méconnu, en relevant au point 161 de cet arrêt que ces règles de traduction se référaient aux documents rédigés en langues allemande, anglaise et française non pas comme langues originales, mais en tant que langues cibles, le fait que ces trois langues étaient les langues de traduction des documents à usage interne et que c’est uniquement dans ces langues que la partie la plus significative des documents destinés à un tel usage devait
être traduite. Ainsi, ce serait sur le fondement de la traduction d’un document dans l’une desdites langues que les services de l’institution devaient travailler.

169 La circonstance que certains documents sont traduits dans toutes les langues officielles serait, à cet égard, sans pertinence, dès lors qu’une telle traduction concernerait uniquement les documents destinés à un usage externe.

170 En outre, l’examen de l’argument relatif aux traductions « grises », effectué au point 162 de l’arrêt attaqué, constituerait une dénaturation supplémentaire, dès lors que le Tribunal se serait concentré sur le contenu d’un point extrêmement limité du document en question, en ignorant la portée plus large résultant du reste de celui-ci.

171 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de cette branche du deuxième moyen, au motif que la Commission se bornerait à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, sans établir que celui-ci les a dénaturés.

– Appréciation de la Cour

172 Aux points 160 à 163 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que l’appréciation qu’il a effectuée de la communication SEC(2000) 2071/6, du règlement intérieur et de ses modalités d’application ainsi que du document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption » ne saurait être remise en cause par les arguments que la Commission tire de la communication SEC(2006) 1489 final et, notamment, de son annexe, intitulée « Règles de traduction après 2006 », à savoir qu’il en
résulterait que, s’agissant des documents à usage interne, seule une traduction en langues anglaise, française et allemande serait exigée, en sus d’une éventuelle langue faisant foi, et que, par ailleurs, les services de la Commission seraient amenés à produire des traductions en faisant appel aux connaissances linguistiques de leur personnel, connues comme traductions « grises ».

173 À cet égard, le Tribunal a relevé, d’une part, au point 161 de l’arrêt attaqué, que le contenu de la communication SEC(2006) 1489 final a pour effet non pas d’infirmer, mais, bien au contraire, de confirmer l’appréciation exposée aux points 157 et 158 de cet arrêt. En effet, les « règles de traduction après 2006 », présentées à l’annexe de cette communication, ne mentionneraient les langues allemande, anglaise et française que comme langues cibles dans lesquelles doivent être traduites certaines
catégories de documents, sans aucunement en définir la langue source. Par ailleurs, pour la grande majorité des catégories de documents visées par cette annexe, une traduction dans toutes les langues officielles serait prévue, la traduction vers les seules langues allemande, anglaise et française étant, en réalité, l’exception.

174 Au point 162 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que, d’autre part, s’agissant de l’argument tiré de la réalisation de traductions « grises », celui-ci ne serait étayé par aucun élément relatif à la proportion exacte que représenterait ce type de traduction au regard du volume global des traductions produites à la Commission. Si la communication SEC(2006) 1489 final reconnaîtrait, à son point 2.2, qu’il est « extrêmement difficile de quantifier ces traductions par manque d’indicateurs
fiables », elle n’en comporterait pas moins, à son point 3.1, une estimation pour l’année 2007, selon laquelle les traductions produites par la direction générale de la traduction représenteraient 1700000 pages, alors que les traductions « grises » atteindraient 100000 pages. Toutefois, ce dernier chiffre correspondant à l’ensemble des services de la Commission autres que cette direction, il serait plus qu’évident que les traductions « grises » ne représenteraient qu’une quantité très réduite au
regard du volume produit par ladite direction. Enfin et surtout, aucun élément du dossier ne permettrait de démontrer que les trois langues susmentionnées soient les langues vers lesquelles seraient effectuées ces traductions « grises ».

175 Or, force est de constater que la Commission ne démontre pas que l’appréciation de la communication SEC(2006) 1489 final et de son annexe, intitulée « Règles de traduction après 2006 », à laquelle le Tribunal s’est livré à ces points de l’arrêt attaqué, serait manifestement erronée, mais se limite, en réalité, à faire valoir que ces textes peuvent faire l’objet d’une interprétation différente de celle retenue par le Tribunal.

176 Dans ces conditions, la cinquième branche du deuxième moyen ne saurait prospérer.

Sur la sixième branche, tirée d’une dénaturation des données relatives aux langues utilisées dans les services d’affectation des lauréats des concours litigieux ainsi que d’une violation de l’obligation de motivation

– Argumentation des parties

177 La Commission considère que, compte tenu du caractère erroné, invoqué dans le cadre de son premier moyen, de la définition des critères pour apprécier les éléments de preuve, retenue par le Tribunal aux points 180 à 183 de l’arrêt attaqué, celui-ci aurait dénaturé, au points 180 à 185 et 188 à 196 de cet arrêt, les données relatives aux langues utilisées par les membres du personnel de l’OLAF, en considérant que celles-ci n’étaient pas de nature à établir que la connaissance de l’une des trois
langues en question permettait aux candidats des concours litigieux d’être immédiatement opérationnels. Elle rappelle à cet égard que c’est pour décrire l’environnement linguistique de travail dans lequel les lauréats des concours litigieux seront amenés à exercer leur fonction qu’elle a produit les données statistiques relatives aux deuxième et troisième langues maîtrisées par les administrateurs exerçant des fonctions au sein de l’OLAF.

178 Partant, le Tribunal ne pouvait dénier la pertinence de ces données sans en méconnaître la nature, puisqu’elles démontreraient que la combinaison des trois langues retenues en tant que langue 2 dans l’avis de concours litigieux permettrait une interaction efficace au sein du personnel, assurant que les lauréats soient immédiatement opérationnels.

179 En outre, le Tribunal ne pouvait se limiter à retenir un critère uniquement quantitatif dans l’analyse de ces données, pour en conclure que seule la maîtrise de la langue anglaise procurerait un avantage dans l’environnement linguistique du service de la Commission concerné par l’avis de concours litigieux.

180 En effet, contrairement à ce qu’a considéré le Tribunal au point 184 de l’arrêt attaqué, les données relatives à la troisième langue maîtrisée par les membres du personnel des services concernés seraient pertinentes pour donner l’image la plus précise de cet environnement linguistique.

181 Finalement, la Commission fait valoir que le Tribunal, au point 191 de l’arrêt attaqué, a dénaturé les données sur la gestion de certains aspects du programme Hercule III qu’elle avait fournies en se fondant sur la constatation que le règlement établissant ce programme, à savoir le règlement no 250/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, établissant un programme pour la promotion d’actions dans le domaine de la protection des intérêts financiers de l’Union européenne
(programme « Hercule III ») et abrogeant la décision no 804/2004/CE (JO 2014, L 84, p. 6), n’impose pas l’utilisation d’une des trois langues éligibles en tant que deuxième langue en vertu de l’avis de concours litigieux. En effet, le Tribunal aurait éludé la circonstance que la gestion même de ce programme est prise en charge par les services de l’OLAF.

182 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de cette branche du deuxième moyen, au motif que la Commission se bornerait à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, sans établir que celui-ci les a dénaturés.

– Appréciation de la Cour

183 Il importe de rappeler que, au point 180 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les données produites par la Commission ne permettaient pas d’identifier quelles sont la ou les langues véhiculaires effectivement utilisées par les services dont émanent ces données, dans leur travail quotidien.

184 En outre, aux points 181 à 183 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a souligné qu’il résultait des données produites par la Commission que, contrairement à la connaissance de la langue anglaise, celle des langues allemande et française ne présentait pas un avantage particulier par rapport à la connaissance d’autres langues officielles de l’Union au regard de la nécessité de disposer d’administrateurs immédiatement opérationnels.

185 Or, ainsi qu’il résulte des points 81 à 83, 104 et 107 à 109 du présent arrêt, c’est à bon droit que le Tribunal a pu fonder l’examen de la justification de la limitation en cause sur une telle exigence.

186 En particulier, conformément aux points 107 et 108 du présent arrêt, il convient de souligner que la Commission procède à une lecture erronée de l’arrêt attaqué lorsqu’elle reproche au Tribunal de s’être fondé, aux points 181 et 183 de l’arrêt attaqué, sur la notion d’« avantage ». En effet, loin de se limiter à une appréciation quantitative des données produites par la Commission, le Tribunal y a relevé, à juste titre, que la connaissance des langues allemande et française n’était pas plus
justifiée que celle d’une autre langue de l’Union.

187 En outre, s’agissant des données visées au point 184 de l’arrêt attaqué, relatives aux connaissances déclarées par des administrateurs chargés des fonctions envisagées par l’avis de concours litigieux s’agissant de leur troisième langue, il convient de relever que ces données ont été mentionnées « même si [leur] contenu [...] ne modifie en rien l’appréciation exposée au point 183 [de l’arrêt attaqué] ».

188 Le motif énoncé au point 184 de l’arrêt attaqué étant surabondant, les grief tirés d’une dénaturation de ces données ainsi que d’une motivation contradictoire dirigés contre ce point sont inopérants.

189 Enfin, s’agissant de l’appréciation des données relatives à la gestion de certains aspects du programme Hercule, il convient de relever que, au point 191 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a tout d’abord souligné qu’aucune disposition du règlement no 250/2014 n’imposait l’utilisation des langues allemande, anglaise ou française dans la mise en œuvre et la gestion de ce programme.

190 Au point 192 du même arrêt, celui-ci a indiqué qu’un document intitulé « Programmes opérationnels en matière de lutte contre la fraude » recensant seulement neuf appels à propositions publiés en langue allemande, anglaise ou française ne permettait pas d’identifier si ces appels à propositions avaient été établis directement par le personnel de l’OLAF ou par la direction générale de la traduction de la Commission.

191 Au point 193 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a souligné qu’« aucun élément des dossiers [...] ne permet de considérer que les lauréats des concours concernés par l’avis [de concours litigieux] seraient chargés des tâches liées à la rédaction d’appels à propositions dans le cadre du programme Hercule III, et non pas d’autres missions ».

192 Or, la Commission ne remet pas en cause le constat effectué par le Tribunal au point 193 de l’arrêt attaqué et ne démontre pas en quoi celui-ci aurait dénaturé les données qu’elle a fournies à cet égard, mais entend uniquement faire valoir une interprétation différente de ces données de celle retenue par le Tribunal, ce qui ne constitue pas en soi, ainsi qu’il a été rappelé au point 127 du présent arrêt, la démonstration d’une dénaturation desdites données.

193 Dès lors que la sixième branche ne saurait prospérer, il y a lieu, par conséquent, de rejeter le deuxième moyen du pourvoi dans son ensemble.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

194 La Commission fait valoir que, le Tribunal ayant accueilli le recours en première instance, d’une part, sur le fondement d’une appréciation erronée en droit de la justification de la limitation en cause et, d’autre part, en dénaturant les moyens de preuve que cette institution a produits, les motifs de l’arrêt attaqué relatifs au second volet de l’avis de concours litigieux seraient entachés d’une erreur de droit.

195 Le Royaume d’Espagne et la République italienne excipent de l’irrecevabilité de ce moyen, au motif qu’il n’est pas motivé de façon autonome, mais se limite à réitérer l’argumentation prise d’une prétendue erreur de droit relative à la limitation en cause.

Appréciation de la Cour

196 Il découle des appréciations relatives aux premier et deuxième moyens du pourvoi que la Commission est restée en défaut de démontrer l’existence des erreurs de droit et des dénaturations d’éléments de preuve alléguées.

197 Le troisième moyen reposant sur ces mêmes allégations, il convient de le rejeter comme étant non fondé.

198 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, aucun moyen n’étant accueilli, le pourvoi doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

199 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

200 Le Royaume d’Espagne et la République italienne ayant conclu à la condamnation de la Commission aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

  Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête :

  1) Le pourvoi est rejeté.

  2) La Commission européenne est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Royaume d’Espagne et la République italienne.

  Signatures

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( *1 ) Langues de procédure : l’espagnol et l’italien.


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : C-635/20
Date de la décision : 16/02/2023
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’administrateurs chargés de fonctions d’enquêteurs et de chefs d’équipes d’enquêteurs – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la deuxième langue des concours aux langues allemande, anglaise et française – Langue de communication avec l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires – Article 1er quinquies, paragraphe 1 – Différence de traitement fondée sur la langue – Justification – Intérêt du service – Exigence de recrutement d’administrateurs “immédiatement opérationnels” – Contrôle juridictionnel – Niveau de preuve exigé.

Dispositions institutionnelles

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Commission européenne
Défendeurs : République italienne et Royaume d'Espagne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Collins
Rapporteur ?: Ziemele

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2023:98

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