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10/01/2023 | CJUE | N°C-469/22

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, Ambisig - Ambiente e Sistemas de Informação Geográfica SA contre Fundação do Desporto e.a., 10/01/2023, C-469/22


 ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

10 janvier 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Passation des marchés publics de services, de fournitures et de travaux – Directive 2014/24/UE – Déroulement de la procédure – Choix des participants et attribution des marchés – Article 63 – Opérateur économique recourant aux capacités d’une autre entité pour satisfaire aux exigences du pouvoir adjudicateur – Obligation pour cet opérateur économique de transmettre les documents d’aptitude

d’un sous-traitant après l’attribution
du marché – Incompatibilité »

Dans l’affaire C‑469/22,

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 ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

10 janvier 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Passation des marchés publics de services, de fournitures et de travaux – Directive 2014/24/UE – Déroulement de la procédure – Choix des participants et attribution des marchés – Article 63 – Opérateur économique recourant aux capacités d’une autre entité pour satisfaire aux exigences du pouvoir adjudicateur – Obligation pour cet opérateur économique de transmettre les documents d’aptitude d’un sous-traitant après l’attribution
du marché – Incompatibilité »

Dans l’affaire C‑469/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal), par décision du 23 juin 2022, parvenue à la Cour le 13 juillet 2022, dans la procédure

Ambisig – Ambiente e Sistemas de Informação Geográfica SA

contre

Fundação do Desporto,

ANO – Sistemas de Informática e Serviços Lda,

Link Consulting – Tecnologias de Informação SA,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. M. Safjan, président de chambre, MM. N. Piçarra et M. Gavalec (rapporteur), juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 63 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE (JO 2014, L 94, p. 65).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Ambisig – Ambiente e Sistemas de Informação Geográfica SA (ci-après « Ambisig ») à la Fundação do Desporto, au sujet de la décision par laquelle cette dernière l’a exclue de la participation à une procédure de passation de marché public de services et a attribué le marché concerné à Link Consulting – Tecnologias de Informação SA (ci-après « Link »).

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 Le considérant 84 de la directive 2014/24 énonce :

« De nombreux opérateurs économiques, et en particulier les [petites et moyennes entreprises (PME)], estiment que les lourdeurs administratives découlant de l’obligation de produire un nombre important de certificats ou d’autres documents en rapport avec les critères d’exclusion et de sélection constituent l’un des principaux obstacles à leur participation aux marchés publics. Limiter ces exigences, par exemple en utilisant un document unique de marché européen (DUME) consistant en une déclaration
sur l’honneur actualisée, pourrait conduire à une simplification considérable dont bénéficieraient tant les pouvoirs adjudicateurs que les opérateurs économiques.

Le soumissionnaire à qui il a été décidé d’attribuer le marché devrait néanmoins être tenu de produire les éléments de preuve pertinents ; à défaut, les pouvoirs adjudicateurs ne devraient pas passer de marché avec lui. Les pouvoirs adjudicateurs devraient également être autorisés à demander, à tout moment, communication de tout ou partie des documents justificatifs lorsqu’ils l’estiment nécessaire pour assurer le bon déroulement de la procédure. Cela pourrait notamment être le cas lors de
procédures en deux étapes (procédure restreinte, procédure concurrentielle avec négociation, dialogue compétitif et partenariat d’innovation) dans le cadre desquelles le pouvoir adjudicateur recourt à la possibilité de limiter le nombre de candidats invités à soumissionner. Demander que les documents justificatifs soient produits au moment de la sélection des candidats à inviter pourrait se justifier afin d’éviter que les pouvoirs adjudicateurs invitent des candidats qui se montreraient
ultérieurement incapables de présenter les documents justificatifs au stade de l’attribution du marché, empêchant ainsi des candidats remplissant par ailleurs les conditions requises de participer.

Il convient d’indiquer expressément que le DUME devrait également fournir les informations pertinentes concernant les entités aux capacités desquelles un opérateur économique a recours, de sorte qu’il puisse être procédé à la vérification des informations concernant ces entités parallèlement aux vérifications concernant l’opérateur économique principal et aux mêmes conditions. »

4 L’article 57 de cette directive énumère les différents motifs d’exclusion d’un opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché public.

5 Aux termes de l’article 59 de ladite directive, qui s’intitule « Document unique de marché européen » :

« 1.   Lors de la présentation de demandes de participation ou d’offres, les pouvoirs adjudicateurs acceptent le [DUME] consistant en une déclaration sur l’honneur actualisée à titre de preuve a priori en lieu et place des certificats délivrés par des autorités publiques ou des tiers pour confirmer que l’opérateur économique concerné remplit l’une des conditions suivantes :

a) il ne se trouve pas dans l’une des situations, visées à l’article 57, qui doit ou peut entraîner l’exclusion d’un opérateur ;

b) il répond aux critères de sélection applicables qui ont été établis conformément à l’article 58 ;

c) le cas échéant, il respecte les règles et critères objectifs qui ont été établis conformément à l’article 65.

Lorsque l’opérateur économique a recours aux capacités d’autres entités en vertu de l’article 63, le DUME comporte également les informations visées au premier alinéa, du présent paragraphe en ce qui concerne ces entités.

Le DUME consiste en une déclaration officielle par laquelle l’opérateur économique affirme que le motif d’exclusion concerné ne s’applique pas et/ou que le critère de sélection concerné est rempli et il fournit les informations pertinentes requises par le pouvoir adjudicateur. Le DUME désigne en outre l’autorité publique ou le tiers compétent pour établir les documents justificatifs et contient une déclaration officielle indiquant que l’opérateur économique sera en mesure, sur demande et sans
tarder, de fournir lesdits documents justificatifs.

[...]

4.   Un pouvoir adjudicateur peut demander à des soumissionnaires et des candidats, à tout moment de la procédure, de fournir tout ou partie des documents justificatifs, si cela est nécessaire pour assurer le bon déroulement de la procédure.

Avant l’attribution du marché, le pouvoir adjudicateur exige du soumissionnaire auquel il a décidé d’attribuer le marché, sauf pour les marchés fondés sur des accords-cadres lorsque ces marchés sont conclus conformément à l’article 33, paragraphe 3, ou à l’article 33, paragraphe 4, point a), qu’il présente des documents justificatifs mis à jour conformément à l’article 60 et, le cas échéant, à l’article 62. Le pouvoir adjudicateur peut inviter les opérateurs économiques à compléter ou à expliciter
les certificats reçus en application des articles 60 et 62.

5.   Nonobstant le paragraphe 4, les opérateurs économiques ne sont pas tenus de présenter des documents justificatifs ou d’autres pièces justificatives lorsque et dans la mesure où le pouvoir adjudicateur a la possibilité d’obtenir directement les certificats ou les informations pertinentes en accédant à une base de données nationale dans un État membre qui est accessible gratuitement, comme un registre national des marchés publics, un dossier virtuel d’entreprise, un système de stockage
électronique de documents ou un système de préqualification.

[...] »

6 Intitulé « Moyens de preuve », l’article 60 de la même directive dispose, à son paragraphe 1 :

« Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger la production des certificats, déclarations et autres moyens de preuve visés aux paragraphes 2, 3 et 4, ainsi qu’à l’annexe XII, à titre de preuve de l’absence des motifs d’exclusion visés à l’article 57 et du respect des critères de sélection conformément à l’article 58.

Les pouvoirs adjudicateurs n’exigent pas de moyens de preuve autres que ceux visés au présent article et à l’article 62. En ce qui concerne l’article 63, les opérateurs économiques peuvent avoir recours à tout moyen approprié pour prouver au pouvoir adjudicateur qu’ils disposeront des moyens nécessaires. »

7 L’article 63 de la directive 2014/24, intitulé « Recours aux capacités d’autres entités », est libellé comme suit :

« 1.   Un opérateur économique peut, le cas échéant et pour un marché déterminé, avoir recours aux capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens qui l’unissent à ces entités, en ce qui concerne les critères relatifs à la capacité économique et financière énoncés à l’article 58, paragraphe 3, et les critères relatifs aux capacités techniques et professionnelles, visés à l’article 58, paragraphe 4. En ce qui concerne les critères relatifs aux titres d’études et
professionnels visés à l’annexe XII, partie II, point f), ou à l’expérience professionnelle pertinente, les opérateurs économiques ne peuvent toutefois avoir recours aux capacités d’autres entités que lorsque ces dernières exécuteront les travaux ou fourniront les services pour lesquels ces capacités sont requises. Si un opérateur économique souhaite recourir aux capacités d’autres entités, il apporte au pouvoir adjudicateur la preuve qu’il disposera des moyens nécessaires, par exemple, en
produisant l’engagement de ces entités à cet effet.

Le pouvoir adjudicateur vérifie, conformément aux articles 59, 60 et 61, si les entités aux capacités desquelles l’opérateur économique entend avoir recours remplissent les critères de sélection applicables et s’il existe des motifs d’exclusion en vertu de l’article 57. Le pouvoir adjudicateur exige que l’opérateur économique remplace une entité qui ne remplit pas un critère de sélection applicable ou à l’encontre de laquelle il existe des motifs d’exclusion obligatoires. Le pouvoir adjudicateur
peut exiger ou peut être obligé par l’État membre à exiger que l’opérateur économique remplace une entité à l’encontre de laquelle il existe des motifs d’exclusion non obligatoires.

Lorsqu’un opérateur économique a recours aux capacités d’autres entités en ce qui concerne des critères ayant trait à la capacité économique et financière, le pouvoir adjudicateur peut exiger que l’opérateur économique et les autres entités en question soient solidairement responsables de l’exécution du marché.

Dans les mêmes conditions, un groupement d’opérateurs économiques visé à l’article 19, paragraphe 2, peut avoir recours aux capacités de participants du groupement ou d’autres entités.

2.   Pour les marchés de travaux, les marchés de services et les travaux de pose ou d’installation dans le cadre d’un marché de fournitures, les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger que certaines tâches essentielles soient effectuées directement par le soumissionnaire lui-même ou, si l’offre est soumise par un groupement d’opérateurs économiques visé à l’article 19, paragraphe 2, par un participant dudit groupement. »

Le droit portugais

8 Ainsi qu’il résulte de la décision de renvoi, en vertu de l’article 77, paragraphe 2, sous a) et c), du Código dos Contratos Públicos (code des contrats publics), lu en combinaison avec les articles 81, 92 et 93 de ce code, lorsqu’un opérateur économique recourt aux capacités d’un tiers en vue de l’exécution de la prestation de services concernée et à moins que l’avis de marché n’en dispose autrement, tant les documents d’aptitude de ce tiers que la présentation d’une déclaration d’engagement de
celui-ci ne doivent être exigés qu’après l’attribution du marché public en cause. Par conséquent, ce n’est que dans le cadre d’une procédure restreinte avec sélection préalable qu’une telle exigence s’impose au moment de la présentation de la candidature, en vertu de l’article 168, paragraphe 4, dudit code.

Le litige au principal et la question préjudicielle

9 Sur la base des observations formulées par Ambisig au soutien de son pourvoi, telles que celles-ci sont reproduites dans la demande de décision préjudicielle, il apparaît que la Fundação do Desporto a organisé une procédure de passation de marché public de services. Le marché concerné a été attribué à Link.

10 Ambisig a introduit un recours contentieux précontractuel devant le Tribunal Administrativo e Fiscal de Leiria (tribunal administratif et fiscal de Leiria, Portugal) visant à contester tant son exclusion de la participation à cette procédure de passation de marché public que l’attribution de ce marché à Link.

11 Ambisig reprochait, en substance, à la Fundação do Desporto d’avoir considéré que son offre avait été présentée par un groupement de soumissionnaires, alors qu’elle entendait recourir à un sous-traitant et que, à ce titre, elle n’était pas tenue de joindre à son offre une déclaration d’engagement de ce sous-traitant. À cet égard, selon Ambisig, l’application par analogie à la procédure en cause au principal des dispositions de l’article 168, paragraphe 4, du code des contrats publics, qui
transposent dans l’ordre juridique portugais l’article 63 de la directive 2014/24, est illégale, le fait de l’exclure de la participation à cette procédure au titre de l’article 70, paragraphe 2, sous a) et b), de ce code constituant une erreur de droit.

12 Par un jugement du 28 septembre 2021, le Tribunal Administrativo e Fiscal de Leiria (tribunal administratif et fiscal de Leiria) a débouté Ambisig de son recours. Cette juridiction a considéré que, certes, l’exigence d’engagements de tiers n’était pas expressément prévue dans l’avis de marché et qu’il s’agissait d’une condition d’exécution de ce marché pouvant, à ce titre, être satisfaite postérieurement à son attribution. Néanmoins, la référence effectuée par Ambisig à la sous-traitance d’une
partie des services concernés relèverait de la clause no 12 du cahier des charges, en vertu de laquelle la sous-traitance était soumise à l’autorisation préalable de l’entité adjudicatrice. Aussi l’absence de présentation de cette autorisation préalable aurait-elle constitué un motif d’exclusion de l’opérateur concerné de la participation à cette procédure de passation de marché public. Cette exclusion aurait également résulté de l’application par analogie de l’article 168, paragraphe 4, du code
des contrats publics.

13 Ce jugement a été confirmé en appel par un arrêt du Tribunal Central Administrativo Sul (tribunal administratif central du Sud, Portugal), rendu le 3 février 2022. Cette juridiction a relevé que la sous-traitance devait être préalablement autorisée par l’entité adjudicatrice, conformément à la clause no 12 du cahier des charges, et que la présentation par l’opérateur économique en cause des documents d’aptitude de son potentiel sous-traitant constituait un préalable indispensable à la délivrance
d’une telle autorisation.

14 Ambisig, qui estime cet arrêt erroné à un triple titre, a formé un pourvoi à son encontre devant le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal). Premièrement, la présentation de documents d’aptitude du tiers concerné ne saurait être exigée, dès lors qu’elle ne ressortirait ni de l’avis de marché ni du code des contrats publics, l’article 168, paragraphe 4, de ce code n’étant pas applicable au litige au principal. Deuxièmement, la clause no 12 du cahier des charges ne
serait pas applicable dans le cadre de la phase précontractuelle de la procédure de passation de marché public en cause. Troisièmement, l’article 63 de la directive 2014/24 n’imposerait pas à un soumissionnaire de joindre, au moment de la présentation de son offre, une déclaration d’engagement des sous-traitants.

15 Pour le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême), qui renvoie aux faits tels qu’ils ont été établis dans l’arrêt du 3 février 2022 et dont l’exposé est considéré comme étant intégralement reproduit, conformément à l’article 663, paragraphe 6, du Código de Processo Civil (code de procédure civile), les deux premiers arguments d’Ambisig mentionnés au point précédent sont fondés.

16 Resterait donc à trancher la question de savoir si, lorsque, dans le cadre d’une procédure de passation de marché public de services, un soumissionnaire présente un tiers aux capacités techniques duquel il entend recourir pour fournir une partie de ce marché, l’article 63 de la directive 2014/24 l’oblige à présenter, conjointement avec son offre, les documents d’aptitude de ce tiers et la déclaration de ce dernier selon laquelle celui-ci s’engage à exécuter cette partie dudit marché.

17 Dans ces conditions, le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« La solution prévue par le droit national, selon laquelle, dans le cadre des procédures de marchés publics où il est recouru aux capacités d’autres entités en vue de l’exécution de la prestation concernée, tant les documents d’aptitude du sous-traitant que la présentation d’une déclaration d’engagement de celui-ci ne doivent être exigés qu’après l’attribution du marché concerné, est-elle conforme au droit de l’Union, et, en particulier, à l’article 63 de la directive [2014/24] ? »

Sur la demande de procédure accélérée

18 La juridiction de renvoi a demandé à la Cour que le présent renvoi préjudiciel soit soumis à la procédure accélérée en vertu de l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.

19 Cependant, compte tenu de la décision de la Cour de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure, il n’y a pas lieu de statuer sur cette demande (ordonnance du 17 mai 2022, Estaleiros Navais de Peniche, C‑787/21, non publiée, EU:C:2022:414, point 17 et jurisprudence citée).

Sur la question préjudicielle

20 En vertu de l’article 99 du règlement de procédure, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à une telle question ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

21 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

22 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 63 de la directive 2014/24, lu en combinaison avec le considérant 84 de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle un opérateur économique qui entend recourir aux capacités d’une autre entité en vue de l’exécution d’un marché public ne doit transmettre les documents d’aptitude de cette entité et la déclaration d’engagement de celle-ci qu’après
l’attribution du marché en cause.

23 À cet égard, il convient de rappeler que l’article 63, paragraphe 1, de la directive 2014/24 prévoit le droit pour un opérateur économique de recourir, pour un marché déterminé, aux capacités d’autres entités, quelle que soit la nature juridique des liens qui l’unissent à ces entités, en vue de satisfaire tant aux critères relatifs à la capacité économique et financière énoncés à l’article 58, paragraphe 3, de cette directive qu’aux critères relatifs aux capacités techniques et professionnelles,
visés à l’article 58, paragraphe 4, de ladite directive (voir, en ce sens, arrêts du 10 octobre 2013, Swm Costruzioni 2 et Mannocchi Luigino, C‑94/12, EU:C:2013:646, points 29 et 33, ainsi que du 7 septembre 2021, Klaipėdos regiono atliekų tvarkymo centras, C‑927/19, EU:C:2021:700, point 150).

24 L’opérateur économique qui souhaite se prévaloir de ce droit peut, conformément à l’article 60, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2014/24, avoir recours à tout moyen approprié pour prouver au pouvoir adjudicateur qu’il disposera des moyens nécessaires. À cet égard, l’article 63, paragraphe 1, troisième phrase, de cette directive mentionne, à titre d’exemple, la possibilité pour cet opérateur économique de produire l’engagement de ces entités à cet effet. Ledit opérateur économique
peut également, conformément à l’article 59, paragraphe 1, deuxième et troisième alinéas, de ladite directive, lu à la lumière du considérant 84, troisième alinéa, de celle-ci, transmettre au pouvoir adjudicateur, lors de la présentation de sa demande de participation ou de son offre, un DUME visant, notamment, à confirmer que, d’une part, ni lui-même ni aucune des entités aux capacités desquelles il entend recourir ne se trouvent dans l’une des situations visées à l’article 57 de la même
directive, qui doit ou peut entraîner l’exclusion d’un opérateur économique, et, d’autre part, que le ou les critères de sélection concernés sont remplis. En tout état de cause, tout opérateur économique qui souhaite recourir aux capacités d’autres entités doit apporter au pouvoir adjudicateur la preuve qu’il disposera des moyens nécessaires pour satisfaire aux critères de sélection énoncés à l’article 58 de la directive 2014/24.

25 Il appartient alors, en vertu de l’article 63, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2014/24, au pouvoir adjudicateur de vérifier, conformément aux articles 59 à 61 de celle-ci, premièrement, que les entités aux capacités desquelles l’opérateur économique entend recourir remplissent les critères de sélection applicables et, deuxièmement, s’il existe des motifs d’exclusion, visés à l’article 57 de cette directive, concernant ces entités.

26 Ces vérifications doivent pouvoir être effectuées par le pouvoir adjudicateur avant l’attribution du marché en cause. À cet égard, le considérant 84 de la directive 2014/24, qui éclaire la portée de l’article 63 de cette directive, énonce expressément, à ses deuxième et troisième alinéas, que demander que les documents justificatifs soient produits au moment de la sélection des candidats à inviter pourrait se justifier afin d’éviter que les pouvoirs adjudicateurs invitent des candidats qui se
montreraient ultérieurement incapables de présenter les documents justificatifs au stade de l’attribution du marché, empêchant ainsi des candidats remplissant par ailleurs les conditions requises de participer.

27 Il résulte ainsi des considérations qui précèdent que l’article 63 de la directive 2014/24, lu en combinaison avec l’article 59 et le considérant 84 de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle un opérateur économique qui entend recourir aux capacités d’une autre entité en vue de l’exécution d’un marché public ne doit transmettre les documents d’aptitude de cette entité et la déclaration d’engagement de celle-ci qu’après
l’attribution du marché en cause.

Sur les dépens

28 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

  Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

  L’article 63 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE, lu en combinaison avec l’article 59 et le considérant 84 de cette directive,

  doit être interprété en ce sens que :

  il s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle un opérateur économique qui entend recourir aux capacités d’une autre entité en vue de l’exécution d’un marché public ne doit transmettre les documents d’aptitude de cette entité et la déclaration d’engagement de celle-ci qu’après l’attribution du marché en cause.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le portugais.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : C-469/22
Date de la décision : 10/01/2023
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Supremo Tribunal Administrativo.

Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Passation des marchés publics de services, de fournitures et de travaux – Directive 2014/24/UE – Déroulement de la procédure – Choix des participants et attribution des marchés – Article 63 – Opérateur économique recourant aux capacités d’une autre entité pour satisfaire aux exigences du pouvoir adjudicateur – Obligation pour cet opérateur économique de transmettre les documents d’aptitude d’un sous-traitant après l’attribution du marché – Incompatibilité.

Rapprochement des législations

Libre prestation des services

Droit d'établissement


Parties
Demandeurs : Ambisig - Ambiente e Sistemas de Informação Geográfica SA
Défendeurs : Fundação do Desporto e.a.

Composition du Tribunal
Avocat général : Campos Sánchez-Bordona
Rapporteur ?: Gavalec

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2023:25

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