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14/07/2022 | CJUE | N°C-116/21

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Commission européenne et Conseil de l'Union européenne contre VW e.a., 14/07/2022, C-116/21


 ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

14 juillet 2022 ( *1 )

« Pourvoi – Fonction publique – Pension – Statut des fonctionnaires de l’Union européenne – Article 20 de l’annexe VIII – Octroi d’une pension de survie – Conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une pension d’ancienneté – Mariage conclu postérieurement à la cessation de service de ce fonctionnaire – Condition de durée minimale du mariage de cinq ans à la date du décès du fonctionnaire – Article 18 de l’annexe VIII – Mariage conclu antÃ

©rieurement à la cessation de service du
fonctionnaire – Condition de durée minimale du mariage d’un an seulement – Exce...

 ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

14 juillet 2022 ( *1 )

« Pourvoi – Fonction publique – Pension – Statut des fonctionnaires de l’Union européenne – Article 20 de l’annexe VIII – Octroi d’une pension de survie – Conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une pension d’ancienneté – Mariage conclu postérieurement à la cessation de service de ce fonctionnaire – Condition de durée minimale du mariage de cinq ans à la date du décès du fonctionnaire – Article 18 de l’annexe VIII – Mariage conclu antérieurement à la cessation de service du
fonctionnaire – Condition de durée minimale du mariage d’un an seulement – Exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 20 – Principe d’égalité de traitement – Article 21, paragraphe 1 – Principe de non-discrimination fondée sur l’âge – Article 52, paragraphe 1 – Absence d’une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif poursuivi par le législateur de l’Union »

Dans les affaires jointes C‑116/21 P à C‑118/21 P, C‑138/21 P et C‑139/21 P,

ayant pour objet cinq pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits le 25 février 2021 en ce qui concerne les affaires C‑116/21 P à C‑118/21 P et le 26 février 2021 en ce qui concerne les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P,

Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara, B. Mongin et B. Schima, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

VW, représentée par Me N. de Montigny, avocate,

partie demanderesse en première instance,

Parlement européen, représenté par Mme D. Boytha, MM. J. Steele et J. Van Pottelberge, en qualité d’agents,

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Alver, M. Bauer et R. Meyer, en qualité d’agents,

parties intervenantes en première instance (C‑116/21 P),

et

Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara, B. Mongin et B. Schima, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

BT, demeurant à Overijse (Belgique), représentée par Me J.-N. Louis, avocat,

partie demanderesse en première instance,

Parlement européen, représenté par Mme D. Boytha, MM. J. Steele et J. Van Pottelberge, en qualité d’agents,

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Alver et M. Bauer, en qualité d’agents,

Association internationale des anciens de l’Union européenne (AIACE Internationale), établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Me N. Maes, advocaat, et Me J. Van Rossum, avocat,

parties intervenantes en première instance (C‑117/21 P),

et

Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara, B. Mongin et B. Schima, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

RN, demeurant à [confidentiel] (France), représentée par Me F. Moyse, avocat,

partie demanderesse en première instance,

Parlement européen, représenté par Mme D. Boytha, MM. J. Steele et J. Van Pottelberge, en qualité d’agents,

partie intervenante en première instance (C‑118/21 P),

et

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Alver et M. Bauer, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

BT, demeurant à Overijse, représentée par Me J.-N. Louis, avocat,

partie demanderesse en première instance,

Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara, B. Mongin et B. Schima, en qualité d’agents,

Parlement européen, représenté par Mme D. Boytha, MM. J. Steele et J. Van Pottelberge, en qualité d’agents,

Association internationale des anciens de l’Union européenne (AIACE Internationale), établie à Bruxelles, représentée par Me N. Maes, advocaat, et Me J. Van Rossum, avocat,

parties intervenantes en première instance (C‑138/21 P),

et

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Alver et M. Bauer, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

VW, représentée par Me N. de Montigny, avocate,

partie demanderesse en première instance,

Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara, B. Mongin et B. Schima, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Parlement européen, représenté par Mme D. Boytha, MM. J. Steele et J. Van Pottelberge, en qualité d’agents,

partie intervenante en première instance (C‑139/21 P),

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe, présidente de chambre, MM. N. Jääskinen, M. Safjan (rapporteur), N. Piçarra et M. Gavalec, juges,

avocat général : M. A. Rantos,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par leurs pourvois, la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne demandent l’annulation des arrêts du Tribunal de l’Union européenne du 16 décembre 2020, VW/Commission (T‑243/18, non publié, EU:T:2020:619, ci-après le « premier arrêt attaqué »), et du 16 décembre 2020, BT/Commission (T‑315/19, non publié, EU:T:2020:622, ci-après le « deuxième arrêt attaqué »), la Commission demandant en outre l’annulation de l’arrêt du Tribunal du 16 décembre 2020, RN/Commission (T‑442/17 RENV,
EU:T:2020:618, ci-après le « troisième arrêt attaqué ») (ci-après, ensemble, les « arrêts attaqués »). Par ces arrêts, le Tribunal a accueilli les recours introduits par VW, BT et RN et annulé, respectivement, les décisions des 26 juin 2017, 20 juillet 2018 et 24 septembre 2014 (ci-après, ensemble, les « décisions litigieuses ») par lesquelles la Commission avait rejeté la demande d’octroi d’une pension de survie à l’égard de chacune de ces personnes sur le fondement de l’article 20 de
l’annexe VIII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, établi par le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission (JO 1968, L 56, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement européen et du
Conseil, du 22 octobre 2013 (JO 2013, L 287, p. 15) (ci-après le « statut »).

Le cadre juridique

2 L’article 1er quinquies du statut est ainsi libellé :

« 1.   Dans l’application du présent statut est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

Aux fins du présent statut, les partenariats non matrimoniaux sont traités au même titre que le mariage, pourvu que toutes les conditions énumérées à l’article 1er, paragraphe 2, point c), de l’annexe VII soient remplies.

2.   Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, ce qui constitue un élément essentiel à prendre en considération dans la mise en œuvre de tous les aspects du présent statut, le principe de l’égalité de traitement n’empêche pas les institutions de l’Union européenne de maintenir ou d’adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l’exercice d’une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou
compenser des désavantages dans la carrière professionnelle.

[...]

5.   Dès lors qu’une personne relevant du présent statut, qui s’estime lésée par le non-respect à son égard du principe de l’égalité de traitement tel que défini ci-dessus, établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à l’institution de prouver qu’il n’y a pas eu violation du principe de l’égalité de traitement. Cette disposition ne s’applique pas dans les procédures disciplinaires.

6.   Dans le respect du principe de non-discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation de ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. Ces objectifs peuvent notamment justifier la fixation d’un âge obligatoire de la retraite et d’un âge minimum pour bénéficier d’une pension d’ancienneté. »

3 L’article 35 du statut dispose :

« Tout fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes :

a) L’activité,

b) Le détachement,

c) Le congé de convenance personnelle,

d) La disponibilité,

e) Le congé pour services militaires,

f) Le congé parental ou le congé familial,

g) Le congé dans l’intérêt du service. »

4 L’article 47 du statut prévoit :

« La cessation définitive des fonctions résulte :

a) De la démission,

b) De la démission d’office,

c) Du retrait d’emploi dans l’intérêt du service,

d) Du licenciement pour insuffisance professionnelle,

e) De la révocation,

f) De la mise à la retraite,

g) Du décès. »

5 L’article 52 du statut énonce :

« Sans préjudice des dispositions de l’article 50, le fonctionnaire est mis à la retraite :

a) soit d’office, le dernier jour du mois durant lequel il atteint l’âge de 66 ans,

b) soit à sa demande, le dernier jour du mois pour lequel la demande a été présentée lorsqu’il a atteint l’âge de la retraite ou que, ayant atteint un âge compris entre 58 ans et l’âge de la retraite, il réunit les conditions requises pour l’octroi d’une pension à jouissance immédiate, conformément à l’article 9 de l’annexe VIII. L’article 48, deuxième alinéa, deuxième phrase, s’applique par analogie.

Toutefois, à sa demande et lorsque l’autorité investie du pouvoir de nomination considère que l’intérêt du service le justifie, un fonctionnaire peut rester en activité jusqu’à l’âge de 67 ans, voire, à titre exceptionnel, jusqu’à l’âge de 70 ans, auquel cas il est mis à la retraite d’office le dernier jour du mois au cours duquel il atteint cet âge.

[...] »

6 Aux termes de l’article 76 du statut :

« Des dons, prêts ou avances peuvent être accordés à un fonctionnaire, à un ancien fonctionnaire ou à des ayants droit d’un fonctionnaire décédé, qui se trouvent dans une situation particulièrement difficile, notamment par suite d’une maladie grave ou prolongée, d’un handicap ou en raison de leur situation de famille. »

7 L’article 17 de l’annexe VIII du statut est rédigé de la manière suivante :

« Le conjoint survivant d’un fonctionnaire décédé dans l’une des positions visées à l’article 35 du statut bénéficie, pour autant qu’il ait été son conjoint pendant un an au moins et sous réserve des dispositions de l’article 1er, paragraphe 1, ci-dessus et de l’article 22 ci-dessous, d’une pension de survie égale à 60 % de la pension d’ancienneté qui aurait été versée au fonctionnaire s’il avait pu, sans condition de durée de service ni d’âge, y prétendre à la date de son décès.

La condition d’antériorité prévue ci-dessus ne joue pas si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage ou d’un mariage antérieur du fonctionnaire pour autant que le conjoint survivant pourvoie ou ait pourvu aux besoins de ces enfants ou si le décès du fonctionnaire résulte soit d’une infirmité ou d’une maladie contractée à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, soit d’un accident. »

8 L’article 18 de l’annexe VIII du statut dispose :

« Le conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une pension d’ancienneté, pour autant que le mariage ait été contracté avant que l’intéressé ait cessé d’être au service d’une institution et qu’il ait été son conjoint pendant un an au moins, a droit, sous réserve des dispositions prévues à l’article 22, à une pension de survie égale à 60 % de la pension d’ancienneté dont bénéficiait son conjoint au jour de son décès. Le minimum de la pension de survie est de 35 % du dernier traitement
de base ; toutefois, le montant de la pension de survie ne peut en aucun cas dépasser le montant de la pension d’ancienneté dont bénéficiait son conjoint au jour de son décès.

La condition de durée du mariage prévue au premier alinéa ne joue pas si un ou plusieurs enfants sont issus d’un mariage du fonctionnaire contracté antérieurement à sa cessation d’activité, pour autant que le conjoint survivant pourvoie ou ait pourvu aux besoins de ces enfants. »

9 L’article 19 de l’annexe VIII du statut prévoit :

« Le conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une allocation d’invalidité, pour autant qu’il ait été son conjoint à la date de son admission au bénéfice de cette allocation, a droit, sous réserve des dispositions de l’article 22, à une pension de survie égale à 60 % de l’allocation d’invalidité dont bénéficiait son conjoint au jour du décès.

Le minimum de la pension de survie est de 35 % du dernier traitement de base ; toutefois, le montant de la pension de survie ne peut en aucun cas dépasser le montant de l’allocation d’invalidité dont bénéficiait son conjoint au jour de son décès. »

10 L’article 20 de l’annexe VIII du statut énonce :

« La condition d’antériorité prévue aux articles 17 bis, 18, 18 bis et 19 ci-dessus ne joue pas si le mariage, même contracté postérieurement à la cessation d’activité du fonctionnaire, a duré au moins cinq ans. »

11 Aux termes de l’article 27 de l’annexe VIII du statut :

« Le conjoint divorcé d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire a droit à la pension de survie définie au présent chapitre, à condition de justifier avoir droit pour son propre compte, au décès de son ex-conjoint, à une pension alimentaire à charge dudit ex-conjoint et fixée soit par décision de justice, soit par convention intervenue entre les anciens époux, officiellement enregistrée et mise en exécution.

La pension de survie ne peut, toutefois, excéder la pension alimentaire telle qu’elle était versée au moment du décès de son ex-conjoint, celle-ci étant actualisée selon les modalités prévues à l’article 82 du statut.

Le conjoint divorcé perd son droit s’il s’est remarié avant le décès de son ex-conjoint. Il bénéficie des dispositions de l’article 26 s’il se remarie après le décès de celui-ci. »

Les antécédents des litiges et les décisions litigieuses

12 VW, BT et RN se sont, selon le cas, mariées ou remariées avec des fonctionnaires de l’Union qui n’étaient plus au service d’une institution de l’Union à la date de la conclusion de leur mariage ou de leur remariage. Les trois anciens fonctionnaires sont décédés moins de cinq ans après cette date.

13 Chacune des trois femmes en question a, en sa qualité de conjointe survivante d’un ancien fonctionnaire de l’Union, introduit une demande d’octroi d’une pension de survie au titre du chapitre 4 de l’annexe VIII du statut.

14 Par les décisions litigieuses, l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) a respectivement rejeté les demandes de VW, de BT et de RN, au motif que celles-ci ne remplissaient pas les conditions prévues à l’article 20 de l’annexe VIII du statut pour pouvoir bénéficier d’une pension de survie, leur mariage avec le fonctionnaire défunt, contracté postérieurement à la cessation de service de celui-ci, ayant duré moins de cinq années.

15 Les réclamations introduites par VW, BT et RN contre chacune de ces décisions ont toutes été rejetées.

Les recours en première instance et les arrêts attaqués

16 Par requêtes déposées respectivement au greffe du Tribunal les 20 avril 2018 et 22 mai 2019 ainsi qu’au greffe du Tribunal de la fonction publique le 17 juillet 2015, VW, BT et RN ont chacune introduit un recours afin d’obtenir l’annulation des décisions litigieuses les concernant.

17 Le Parlement européen a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans les trois affaires. S’agissant du Conseil, il a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans les affaires relatives à VW et à BT, tandis que l’Association internationale des anciens de l’Union européenne (AIACE Internationale) a été admise à intervenir au soutien des conclusions de BT dans l’affaire relative à cette dernière.

18 Par un arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), le Tribunal de la fonction publique a, dans l’affaire relative à RN, accueilli le premier moyen du recours et annulé la décision du 24 septembre 2014. Cet arrêt a fait l’objet d’un pourvoi de la part de la Commission, lequel a été accueilli par le Tribunal par un arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520). Dans cet arrêt, le Tribunal a annulé ledit arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission
(F‑104/15, EU:F:2016:163), et, estimant que le litige n’était pas en état d’être jugé, a renvoyé l’affaire devant une chambre du Tribunal autre que celle qui avait statué sur le pourvoi.

19 Par décisions des 6 mai 2019 et 11 mars 2019, le Tribunal a ordonné la suspension des affaires relatives à VW et à RN jusqu’au prononcé de la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire HK/Commission, C‑460/18 P.

20 Le 19 décembre 2019, la Cour a rendu l’arrêt HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119).

21 Dans les trois affaires ayant donné lieu aux arrêts attaqués, le Tribunal a, par lettres du 23 décembre 2019, invité les parties à présenter leurs observations sur les conséquences à tirer de cet arrêt de la Cour.

22 Par les arrêts attaqués, le Tribunal a, le 16 décembre 2020, annulé chacune des décisions litigieuses en accueillant le moyen de VW, de BT et de RN tiré, en substance, d’une illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut au regard du principe d’égalité de traitement ainsi que, dans les affaires relatives à VW et à RN, du principe de proportionnalité, et, dans les affaires relatives à BT et à RN, du principe de non-discrimination fondée sur l’âge.

23 Les arrêts attaqués sont fondés sur un raisonnement sensiblement identique, à l’exception notable des considérations développées par le Tribunal aux points 41 à 46 du troisième arrêt attaqué. À ce dernier égard, le Tribunal, statuant sur l’étendue du litige à la suite du renvoi de l’affaire devant lui, a considéré que, dans l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), le moyen soulevé par RN, tiré d’une violation des principes d’égalité de traitement, de
non-discrimination fondée sur l’âge et de proportionnalité, n’avait pas été tranché, si bien que, au final, le Tribunal devait, dans le troisième arrêt attaqué, se prononcer sur l’ensemble des moyens d’annulation soulevés en première instance par RN à la lumière des points de droit tranchés par le Tribunal dans l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520).

24 Pour le reste, dans les trois arrêts attaqués, le Tribunal a constaté que, aux fins de l’octroi d’une pension de survie, la situation couverte par l’article 18 de l’annexe VIII du statut, à savoir celle des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire de l’Union qui se sont mariés avant la cessation de service de celui-ci, était comparable à la situation couverte par l’article 20 de cette annexe, à savoir celle des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui ont contracté mariage après
cette cessation. Le Tribunal a ensuite jugé qu’il existait une différence de traitement de situations comparables en fonction de la date de la conclusion du mariage, en ce que la pension de survie est accordée aux conjoints survivants à la condition que le mariage ait duré au moins un an dans le cadre de l’article 18 de l’annexe VIII du statut et au moins cinq ans dans le cadre de l’article 20 de cette annexe. Le Tribunal a ajouté qu’une telle différence de traitement entraînait un désavantage
pour les conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui se sont mariés après la cessation de service de celui-ci par rapport aux conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui ont contracté mariage avant cette cessation. Dans les affaires relatives à BT et à RN, le Tribunal a également constaté une différence de traitement de situations comparables fondée indirectement sur l’âge de l’ancien fonctionnaire à la date de la conclusion du mariage.

25 Après avoir indiqué que la différence de traitement instituée à l’article 20 de l’annexe VIII du statut était prévue par la « loi », au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), le Tribunal a vérifié si la différence de traitement relevée pouvait être justifiée par un objectif d’intérêt général et si elle était proportionnée au regard de l’objectif poursuivi, notamment à la lumière de la jurisprudence rappelée au
point 48 des premier et deuxième arrêts attaqués ainsi qu’au point 70 du troisième arrêt attaqué.

26 À cet égard, s’agissant, d’une part, de l’objectif d’intérêt général visant à prévenir les fraudes, le Tribunal, tout en reconnaissant que la condition selon laquelle le mariage doit avoir satisfait à une condition de durée minimale pour ouvrir le droit à une pension de survie permet de s’assurer que ce mariage ne repose pas exclusivement sur des considérations étrangères à un projet de vie commun, telles que des considérations purement financières ou liées à l’obtention d’un droit de séjour, a
jugé déraisonnable de considérer que la condition de durée minimale du mariage de cinq années prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui est cinq fois plus élevée que celle prévue à l’article 18 de l’annexe VIII du statut et qui ne souffre aucune exception permettant d’établir l’absence de fraude, quels que soient les éléments de preuve objectifs apportés, puisse être nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif de lutte contre la fraude.

27 S’agissant, d’autre part, de l’objectif d’intérêt général visant à préserver les finances de l’Union, le Tribunal a reconnu qu’un tel objectif pouvait être considéré comme étant légitime, mais que, conformément à la jurisprudence de la Cour, il ne pouvait pas justifier à lui seul une dérogation au principe général d’égalité de traitement. Le Tribunal a alors jugé que, la condition de durée minimale du mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut ne pouvant être justifiée par
l’objectif de lutte contre la fraude, la différence de traitement instaurée par cette disposition ne pouvait pas non plus être justifiée par la seule préservation des finances de l’Union.

28 Le Tribunal a conclu que l’article 20 de l’annexe VIII du statut violait le principe d’égalité de traitement ainsi que, dans l’affaire relative à VW, le principe de proportionnalité et, dans les affaires relatives à BT et à RN, le principe de non-discrimination fondée sur l’âge. Dans ces conditions et ainsi qu’il a déjà été indiqué, au point 22 du présent arrêt, il a fait droit aux exceptions d’illégalité soulevées par VW, BT et RN et annulé chacune des décisions litigieuses.

Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

29 Par ses pourvois dans les affaires C‑116/21 P à C‑118/21 P, la Commission demande à la Cour :

– d’annuler chacun des arrêts attaqués ;

– de rejeter chacun des recours en première instance, et

– de condamner VW, BT et RN aux dépens exposés en première instance et dans le cadre du pourvoi, y compris, en ce qui concerne RN, les dépens afférents aux affaires F‑104/15 et T‑442/17 RENV.

30 Par ses pourvois dans les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P, le Conseil demande à la Cour :

– d’accueillir les pourvois et d’annuler les premier et deuxième arrêts attaqués ;

– d’évoquer les affaires et de rejeter les recours en première instance comme étant non fondés, et

– de condamner VW et BT aux dépens exposés en première instance et dans le cadre du présent pourvoi.

31 Dans les affaires C‑116/21 P et C‑139/21 P, VW demande à la Cour :

– de rejeter les pourvois introduits respectivement par la Commission et le Conseil, et

– de condamner respectivement la Commission et le Conseil aux dépens exposés en première instance et dans le cadre du pourvoi.

32 Dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P, BT demande à la Cour :

– de rejeter les pourvois introduits respectivement par la Commission et le Conseil, et

– de condamner respectivement la Commission et le Conseil aux dépens.

33 Dans l’affaire C‑118/21 P, RN demande à la Cour :

– de déclarer, à titre principal, le pourvoi irrecevable ;

– de déclarer, à titre subsidiaire, les moyens du pourvoi irrecevables ou, en tout état de cause, non fondés et de rejeter le pourvoi comme étant non fondé, et

– de condamner la Commission aux dépens exposés dans le cadre du présent pourvoi et, en cas d’annulation du troisième arrêt attaqué, en première instance, y compris les dépens afférents aux affaires F‑104/15 et T‑442/17 RENV.

34 Dans les affaires C‑116/21 P à C‑118/21 P, C‑138/21 P et C‑139/21 P, le Parlement qui, en tant que partie intervenante en première instance, a déposé un mémoire en réponse conformément à l’article 172 du règlement de procédure de la Cour demande à celle-ci de faire droit aux pourvois.

35 Dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P, l’AIACE Internationale qui, en tant que partie intervenante en première instance, a déposé un mémoire en réponse conformément à l’article 172 du règlement de procédure de la Cour demande à celle-ci :

– de rejeter les pourvois introduits respectivement par la Commission et le Conseil, et

– de condamner respectivement la Commission et le Conseil aux dépens.

36 Dans les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P, la Commission qui, en tant que partie défenderesse en première instance, a déposé un mémoire en réponse conformément à l’article 172 du règlement de procédure de la Cour demande à celle-ci :

– d’annuler les premier et deuxième arrêts attaqués ;

– de rejeter les recours en première instance, et

– de condamner VW et BT aux dépens.

37 En application de l’article 54, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, le président de la Cour a décidé, le 13 avril 2021, de joindre les affaires C‑116/21 P à C‑118/21 P, C‑138/21 P et C‑139/21 P aux fins des phases écrite et orale de la procédure ainsi que de l’arrêt.

Sur les pourvois

38 À l’appui de ses pourvois dans les affaires C‑116/21 P et C‑117/21 P, la Commission fait valoir trois moyens identiques, tirés, le premier, d’une erreur de droit concernant les critères d’appréciation de la légalité des choix faits par le législateur de l’Union et d’une violation de l’obligation de motivation, le deuxième, d’une erreur de droit dans l’interprétation du principe de non-discrimination et, le troisième, d’une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 52, paragraphe 1, de la
Charte et de plusieurs violations de l’obligation de motivation. Dans l’affaire C‑118/21 P, la Commission soulève les mêmes moyens tout en les faisant précéder d’un autre moyen tiré d’une erreur de droit dans la définition et dans l’application du pouvoir du juge de renvoi de se prononcer sur les moyens de recours en première instance après annulation de l’arrêt attaqué.

39 À l’appui de ses pourvois, le Conseil soulève trois moyens identiques tirés, le premier, d’erreurs de droit en ce qui concerne l’existence d’une différence de traitement, le deuxième, d’erreurs de droit concernant l’étendue du contrôle juridictionnel par le Tribunal des choix faits par le législateur de l’Union et, le troisième, d’erreurs de droit s’agissant de la justification de la différence de traitement. Dans l’affaire C‑138/21 P, le Conseil soulève, en outre, un quatrième moyen tiré
d’erreurs de droit et d’une violation de l’obligation de motivation en ce qui concerne les conclusions du Tribunal sur la violation du principe de non-discrimination en fonction de l’âge.

40 VW, BT et RN excipent par ailleurs de l’irrecevabilité des pourvois introduits respectivement dans les affaires C‑116/21 P à C‑118/21 P ainsi que, s’agissant de BT, dans l’affaire C‑138/21 P.

Sur la recevabilité du pourvoi dans l’affaire C‑116/21 P

41 VW soutient que le sens et la portée de certains moyens et arguments de la Commission ne sont pas compréhensibles et qu’un exposé succinct des moyens fait défaut en violation de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour.

42 La Commission conteste cette argumentation en renvoyant notamment au contenu de son pourvoi.

43 À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du
pourvoi ou du moyen concerné (arrêt du 25 janvier 2022, Commission/European Food e.a., C‑638/19 P, EU:C:2022:50, point 75 ainsi que jurisprudence citée).

44 Or, en l’occurrence, il suffit de relever que la Commission a développé, dans le cadre des trois moyens qu’elle avance à l’appui de son pourvoi, une argumentation claire et détaillée exposant les motifs pour lesquels les points du premier arrêt attaqué qu’elle critique sont, selon elle, entachés d’erreurs de droit ou d’une violation de l’obligation de motivation.

45 Par ailleurs, contrairement à ce que VW affirme, le pourvoi introduit par la Commission contient un exposé sommaire des moyens soulevés, conformément à l’article 168, paragraphe 1er, sous d), du règlement de procédure de la Cour.

46 Il s’ensuit que le pourvoi dans l’affaire C‑116/21 P est recevable.

Sur la recevabilité des pourvois dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P

47 BT considère que les pourvois dans les affaires C-117/21 P et C‑138/21 P sont irrecevables dans la mesure où ils sont motivés par la nécessité d’éviter les conséquences financières pour le budget de l’Union qu’entraîne la constatation de l’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut par le deuxième arrêt attaqué, l’existence éventuelle de telles conséquences étant une question de pur fait qui ne répondrait pas aux exigences de l’article 58 du statut de la Cour de justice de l’Union
européenne.

48 Par ailleurs, BT considère que, puisque la Commission s’est engagée à verser une pension de survie à RN quelle que soit l’issue du pourvoi dans l’affaire C‑118/21 P, cette institution doit, pour des raisons d’égalité de traitement, prendre le même engagement envers elle et VW, ce qui prive tant la Commission que le Conseil d’un intérêt à agir et rend ainsi irrecevables l’ensemble des pourvois dans les affaires jointes.

49 La Commission conteste cette argumentation en expliquant notamment que l’engagement pris à l’égard de RN l’a été à titre purement gracieux en vertu de l’article 76 du statut et ne saurait être étendu à d’autres personnes au nom du principe de l’égalité de traitement. En outre, une telle extension n’ayant pas eu lieu dans le cas de BT, l’argument visant à démontrer l’irrecevabilité des pourvois pour défaut d’intérêt à agir serait voué au rejet.

50 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 256 TFUE et de l’article 58 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Algebris (UK) et Anchorage Capital Group/CRU, C‑934/19 P, EU:C:2021:1042, point 43 ainsi que jurisprudence citée).

51 En l’occurrence, il y a lieu de relever que les pourvois dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P sont bel et bien fondés sur des moyens de pur droit qui ne visent pas à remettre en cause les constatations factuelles effectuées par le Tribunal, mais qui se bornent à critiquer le raisonnement juridique adopté par le Tribunal dans le deuxième arrêt attaqué. Quant au fait que la Commission et le Conseil attirent l’attention de la Cour, respectivement à titre introductif ou à titre digressif, sur
les conséquences d’un rejet de leurs pourvois, il convient de constater que de telles explications, qui ne sont pas utilisées en tant que telles au soutien de l’argumentation en droit dirigée contre le deuxième arrêt attaqué, ne sauraient remettre en cause la recevabilité des pourvois.

52 S’agissant de l’exception d’irrecevabilité tirée d’un défaut d’intérêt à agir, il importe de constater que cette argumentation est fondée sur une prétendue obligation que la Commission aurait d’étendre à BT le bénéfice de la pension de survie qui, ainsi qu’il découle des explications de la Commission, a été accordée à titre gracieux à RN en vertu de l’article 76 du statut, alors qu’une telle obligation ne découle ni du statut ni, plus généralement, du droit de l’Union, toute décision de « don »,
au sens de cette disposition du statut, étant prise dans le cadre d’un pouvoir discrétionnaire et devant nécessairement procéder d’une décision individuelle au regard des circonstances de l’espèce.

53 Il s’ensuit que les pourvois dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P sont recevables.

Sur la recevabilité du pourvoi dans l’affaire C‑118/21 P

54 RN excipe de l’irrecevabilité du pourvoi dans l’affaire C‑118/21 P. Elle soutient que la Commission ne peut former un second pourvoi dans la même affaire. Or, ni le traité FUE ni le statut de la Cour de justice de l’Union européenne ne contiendraient une quelconque disposition autorisant des pourvois itératifs dans une même affaire. RN invoque également à cet égard la règle selon laquelle « pourvoi sur pourvoi ne vaut ».

55 La Commission répond que les arguments de RN ne trouvent aucun fondement dans les dispositions procédurales applicables.

56 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 18 du présent arrêt, la Commission a, conformément à l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit un pourvoi contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163). Ce pourvoi a été accueilli par le Tribunal par l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), et l’affaire a été renvoyée, à la
suite de la dissolution du Tribunal de la fonction publique le 1er septembre 2016, devant une chambre du Tribunal autre que celle qui avait statué sur le pourvoi. L’affaire a ainsi été jugée une seconde fois en première instance, donnant lieu au troisième arrêt attaqué. Conformément à l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Commission a introduit un pourvoi contre ce dernier arrêt.

57 Dès lors que tant l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), que le troisième arrêt attaqué sont, chacun pris isolément, des « décisions [...] mettant fin à l’instance », au sens de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 56 de ce statut, c’est à tort que RN affirme que la Commission a formé deux pourvois dans la même affaire.

58 Il s’ensuit que le pourvoi dans l’affaire C‑118/21 P est recevable.

Sur le premier moyen dans l’affaire C‑118/21 P

Argumentation des parties

59 Par son premier moyen, la Commission soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit, aux points 41 à 46 du troisième arrêt attaqué, dans la définition et dans l’application du pouvoir du juge de renvoi de se prononcer sur les moyens de recours soulevés en première instance après annulation de l’arrêt de première instance par le Tribunal statuant sur pourvoi. Ce moyen se divise en trois branches.

60 Par la première branche de son premier moyen, la Commission fait valoir que l’étendue du renvoi n’est pas laissée à l’appréciation du juge auquel l’affaire est renvoyée. À cet égard, il ressortirait, notamment, du point 68 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), que l’objet du renvoi dont le Tribunal a été saisi, dans l’affaire ayant donné lieu au troisième arrêt attaqué, était clairement limité à l’examen du troisième moyen du recours introduit en
première instance, lequel ne contiendrait aucun argument tiré de la prétendue illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut. Dès lors, le Tribunal, dans le troisième arrêt attaqué, ne pouvait pas se prononcer sur des moyens autres que ce troisième moyen.

61 Par ailleurs, outre le fait que le Tribunal aurait pris, à tort, en considération, au point 42 du troisième arrêt attaqué, les moyens soulevés à l’appui du pourvoi pour établir si des éléments de l’arrêt en première instance avaient été ou non invalidés, la Commission soutient que l’annulation de l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), est fondée sur les points 51 à 57 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), relatifs à
l’interprétation de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, les points 58 à 64 de cet arrêt venant étayer le raisonnement du Tribunal au regard des griefs de RN formulés au soutien de l’exception d’illégalité relative à cette disposition du statut.

62 Dès lors, en estimant que l’étendue du litige, après renvoi, portait aussi sur le moyen développé par RN dans son recours initial devant le Tribunal de la fonction publique et tiré d’une violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination en fonction de l’âge, le Tribunal aurait commis une erreur de droit.

63 Par la deuxième branche de son premier moyen, la Commission considère que le Tribunal, dans le troisième arrêt attaqué, s’est implicitement, mais nécessairement, prononcé sur l’absence de discrimination dans le cadre des situations régies par les articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut. À cet égard, la Commission soutient que le Tribunal, dans l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), a jugé que l’interprétation retenue par le Tribunal de la fonction
publique de l’article 20 de l’annexe VIII du statut était erronée en droit au regard de l’argument de RN tiré d’une différence de durée du mariage. Or, en considérant à cet égard que l’absence de prise en compte de la période de mariage antérieure à la date de cessation de service du fonctionnaire ne saurait démontrer l’illégalité de ladite disposition, le Tribunal aurait implicitement, mais nécessairement, considéré que la portée des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut était telle que
le grief tiré de l’illégalité fondée sur cette dernière disposition pour violation du principe d’égalité de traitement ne pouvait pas se poser et que, de ce fait, il n’était pas nécessaire de se prononcer sur la question de la proportionnalité, ainsi qu’il l’aurait conclu, au point 63 de cet arrêt. Dès lors, en effectuant, au point 45 du troisième arrêt attaqué, une analyse erronée de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), le Tribunal aurait eu tort de
considérer, au point 46 du troisième arrêt attaqué, que les moyens fondés sur une violation de l’égalité de traitement ainsi que du principe de non-discrimination et de proportionnalité n’avaient pas été tranchés dans ledit arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520).

64 Par la troisième branche de son premier moyen, la Commission allègue que, en concluant, au point 112 du troisième arrêt attaqué, que l’article 20 de l’annexe VIII du statut viole, notamment, le principe d’égalité de traitement, le Tribunal a statué en contradiction avec l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520). La constatation faite au point 59 de cet arrêt sur la délimitation du champ d’application de l’article 20 de l’annexe VIII du statut ainsi que la
différence des conditions d’octroi de la pension de survie entre cette disposition et l’article 18 de cette annexe ne permettraient pas de conclure à l’existence d’une violation du principe d’égalité de traitement.

65 Pour sa part, RN soutient, à titre principal, que le premier moyen est irrecevable en ce que sa formulation manque de précision, la Commission ne pouvant pas, en toute logique, reprocher au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit à la fois dans la définition et dans l’application du pouvoir du juge de renvoi. Ce manque de précision affecterait par voie de conséquence les arguments juridiques qui sous-tendent le premier moyen.

66 RN conclut, à titre subsidiaire, que le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

67 Dans son mémoire en réplique, la Commission soutient que le premier moyen est recevable en ce qu’elle ne saurait se limiter à contester uniquement l’interprétation des principes faisant l’objet du pourvoi sans en contester aussi leur application concrète et vice versa. Pour le reste, elle conteste l’interprétation faite par RN du troisième arrêt attaqué.

Appréciation de la Cour

– Sur la recevabilité du premier moyen

68 Contrairement à ce que soutient RN, il y a lieu de constater que la formulation du premier moyen de la Commission n’est dénuée ni de précision ni de logique au regard de la jurisprudence rappelée au point 43 du présent arrêt. En effet, par ce premier moyen, la Commission reproche, dans des termes clairs, au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit à la fois dans la définition et dans l’application du pouvoir du juge de renvoi de se prononcer sur les moyens de recours en première instance après
annulation de l’arrêt attaqué et développe, au soutien de ce moyen, trois branches formulées de manière tout aussi précise et claire.

69 Pour autant que RN reproche à la Commission de considérer que le Tribunal a commis une erreur de droit « à la fois » dans la définition et dans l’application du pouvoir du juge de renvoi, ce qui ne serait pas possible, il suffit de constater que, dans son pourvoi, la Commission expose, en substance, que le Tribunal n’a pas, dans le troisième arrêt attaqué, correctement défini l’objet et l’étendue du litige dans l’affaire dont il était saisi, en raison du fait qu’il aurait fait une mauvaise
application de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), ainsi que de la jurisprudence relative à la détermination de l’objet et de l’étendue du litige après renvoi.

70 Dès lors, il y a lieu de conclure que le premier moyen de la Commission dans l’affaire C‑118/21 P est recevable.

– Sur le bien-fondé du premier moyen

71 En premier lieu, il convient de rejeter le grief de la Commission tiré d’une erreur de droit que le Tribunal aurait commise au point 42 du troisième arrêt attaqué. La Commission fait en effet une lecture erronée de ce point en considérant que le Tribunal a déterminé l’objet du litige et son étendue après renvoi sur le fondement des moyens avancés par la Commission dans son pourvoi dans l’affaire T‑695/16 P. En effet, à la première phrase du point 42 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal
rappelle que l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), a procédé à l’annulation de l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), après avoir accueilli partiellement deux moyens soulevés par la Commission. Dans ces conditions et ainsi que RN l’avance, l’annulation intégrale de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique devait amener le juge de renvoi à statuer à nouveau sur l’intégralité du recours en première instance.

72 C’est donc à bon droit que, au point 43 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal en a déduit qu’il devait se prononcer une nouvelle fois sur l’ensemble des moyens d’annulation soulevés par RN devant le Tribunal de la fonction publique, à la lumière des points de droit tranchés par l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), et liant le Tribunal dans le cadre du renvoi. Afin d’opérer cette déduction, le Tribunal s’est nécessairement fondé sur la jurisprudence
rappelée au point 41 du troisième arrêt attaqué et non contestée par la Commission ainsi que sur la constatation effectuée à la première phrase du point 42 de cet arrêt au sujet de l’annulation intégrale de l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163). Quant aux deux dernières phrases figurant au point 42 du troisième arrêt attaqué, il y a lieu de constater qu’il s’agit d’un simple rappel, inopérant aux fins de cette déduction, des moyens soulevés par la Commission dans
l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520).

73 En deuxième lieu, il convient de constater que le Tribunal n’a pas non plus commis d’erreur de droit, aux points 45 et 46 du troisième arrêt attaqué, en considérant que, dans son arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), il n’avait pas tranché les branches du deuxième moyen soulevé par RN dans son recours devant le Tribunal de la fonction publique.

74 Il ressort des points 35, 55 à 60 et 76 de l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), que le Tribunal de la fonction publique a examiné le deuxième moyen du recours de RN non pas sous l’angle de l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, mais seulement aux fins de l’interprétation, dans le cadre de l’examen du premier moyen, de la condition de durée minimale de mariage figurant à cette disposition. Dans ce cadre, le Tribunal de la fonction
publique cherchait à déterminer si ladite disposition pouvait être interprétée, conformément aux principes du droit de l’Union tels que les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, en ce sens que la Commission devait prendre en compte la durée cumulée des deux périodes de mariage de RN avec son conjoint décédé, une interprétation qui n’était pas exclue, selon le Tribunal de la fonction publique, par le libellé de la même disposition.

75 Par ailleurs, il convient de relever que, au point 57 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), le Tribunal, statuant sur pourvoi, a considéré que l’interprétation de la disposition en cause par le Tribunal de la fonction publique aux points 57 et 76 de l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), était entachée d’une erreur de droit au motif, essentiellement, que le libellé clair de cette disposition s’opposait à une telle
interprétation. Le Tribunal a alors annulé cet arrêt dans son intégralité.

76 Il s’ensuit que, si le Tribunal a, par son arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), annulé l’arrêt du 20 juillet 2016, RN/Commission (F‑104/15, EU:F:2016:163), c’est parce qu’il a infirmé l’interprétation faite par le Tribunal de la fonction publique de l’article 20 de l’annexe VIII du statut au regard du premier moyen du recours de RN ainsi que du principe d’égalité de traitement, et ce indépendamment des griefs tirés d’une exception d’illégalité de cette
disposition, soulevés par RN.

77 Ce faisant, le Tribunal n’a pas pu prendre position, ne fût-ce qu’implicitement, sur les griefs tirés d’une telle exception car, contrairement à ce que la Commission affirme, pas plus l’infirmation de l’interprétation faite par le Tribunal de la fonction publique de l’article 20 de l’annexe VIII du statut que la portée retenue par le Tribunal des articles 18 et 20 de cette annexe n’impliquent que ce dernier article ne pourrait pas encore être déclaré comme étant illégal au regard des arguments
soulevés par RN dans le cadre du deuxième moyen de son recours initial. En effet, si ce moyen était accueilli, RN pourrait, malgré le fait qu’elle ne puisse exiger le cumul de la durée de ses deux mariages dans le cadre de l’interprétation de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, faire déclarer illégale cette disposition, de sorte que la Commission serait tenue de prendre une nouvelle décision à son égard en tirant les conséquences de l’arrêt mettant fin au litige.

78 Dans ces conditions, c’est à tort que la Commission affirme, en substance, que le Tribunal s’est implicitement mais nécessairement prononcé par la négative, dans l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), sur l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

79 En outre, contrairement à ce qu’affirme la Commission, le Tribunal, aux points 58 à 64 de son arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), n’a pas examiné ni rejeté les griefs formulés par RN au soutien de l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, si bien que la Commission ne saurait soutenir que, au point 46 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal a eu tort de juger qu’il n’avait pas tranché le deuxième moyen du recours dans ce
premier arrêt.

80 En effet, il convient de constater à cet égard que, aux points 58 à 64 de son arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), le Tribunal s’est contenté de répondre aux arguments avancés par RN en réponse au pourvoi de la Commission. Or, d’une part, les deux arguments de RN, examinés aux points 59 à 61 de cet arrêt, ont exclusivement trait à l’interprétation, donnée par le Tribunal, de l’article 20 de l’annexe VIII du statut et n’ont donc aucun lien avec
l’exception d’illégalité de cette disposition.

81 D’autre part, s’agissant de l’argument de RN, examiné aux points 62 à 64 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), il est vrai que cet argument relatif à la violation du principe de proportionnalité se rapporte au deuxième moyen du recours initial tiré d’une exception d’illégalité. Toutefois, le Tribunal, au point 63 de cet arrêt, explique que le Tribunal de la fonction publique a examiné la question de la violation du principe de proportionnalité en
partant de la prémisse selon laquelle le libellé de l’article 20 de l’annexe VIII du statut pouvait être interprété comme obligeant de prendre en compte la durée cumulée des deux mariages de RN. Ayant cependant considéré que le Tribunal de la fonction publique ne pouvait pas partir d’une telle prémisse, le Tribunal en a conclu, toujours au point 63 dudit arrêt, qu’il n’était pas nécessaire de se prononcer sur l’argument de RN relatif à une prétendue violation du principe de proportionnalité. Dès
lors, loin de rejeter le deuxième moyen du recours initial de RN, le Tribunal s’est contenté de refuser d’examiner ce moyen et, plus précisément, l’argument tiré d’une violation du principe de proportionnalité, en raison du fait qu’un tel examen ne relevait pas du stade du pourvoi.

82 Il s’ensuit que le Tribunal a, au point 45 du troisième arrêt attaqué, effectué une analyse correcte du point 63 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), si bien qu’aucune erreur de droit ne saurait lui être reproché à ce sujet.

83 En troisième lieu, c’est à tort que la Commission affirme que, dans le troisième arrêt attaqué, le Tribunal ne pouvait pas, en raison de la déclaration figurant à la première phrase du point 68 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), se prononcer sur des moyens autres que le troisième moyen du recours introduit devant le Tribunal de la fonction publique.

84 En effet, il y a lieu de relever que le Tribunal, au point 68 de cet arrêt, s’est borné à déclarer qu’il n’était pas en mesure de juger l’affaire étant donné que le Tribunal de la fonction publique n’avait pas examiné le troisième moyen invoqué par RN. Or, il convient de constater que cette déclaration se rapporte seulement à la question de savoir si l’affaire était en état d’être jugée par le Tribunal statuant sur pourvoi et non à celle, distincte, relative à la détermination de l’objet et de
l’étendue du litige après renvoi. À cet égard, c’est au seul juge de renvoi et non au juge du pourvoi qu’il appartient de déterminer cet objet et cette étendue en tant que conséquence de l’arrêt rendu par le juge du pourvoi. Dès lors, une quelconque déclaration quant à la question de savoir si l’affaire est en état d’être jugée ne saurait être déterminante, à elle seule, aux fins de l’analyse de l’objet et de l’étendue de l’affaire après renvoi, que le juge de renvoi doit opérer.

85 En l’occurrence, il ressort du point 73 du présent arrêt que, au point 46 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal a correctement jugé qu’il n’avait pas tranché les branches du deuxième moyen du recours dans l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), tirées de la violation des principes d’égalité de traitement, de non-discrimination en fonction de l’âge et de proportionnalité.

86 En quatrième lieu, le grief de la Commission tiré d’une contradiction entre le point 112 du troisième arrêt attaqué et le point 59 de l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), ne saurait prospérer en ce qu’il est fondé sur la prémisse, rejetée au point 78 du présent arrêt, selon laquelle, dans l’arrêt du 18 juillet 2017, Commission/RN (T‑695/16 P, non publié, EU:T:2017:520), le Tribunal aurait implicitement, mais nécessairement, rejeté le moyen tiré d’une
violation du principe d’égalité de traitement.

87 Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter comme étant non fondé le premier moyen soulevé par la Commission à l’appui de son pourvoi dans l’affaire C‑118/21 P.

Sur la troisième branche du premier moyen et sur le deuxième moyen dans l’affaire C‑116/21 P, sur la troisième branche du premier moyen et sur les deux premières branches du deuxième moyen dans l’affaire C‑117/21 P, sur la troisième branche du deuxième moyen et sur les deux premières branches du troisième moyen dans l’affaire C‑118/21 P ainsi que sur le premier moyen dans les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P

Argumentation des parties

88 Par ces moyens et ces branches, la Commission ainsi que, à titre principal, le Conseil soutiennent que, par les arrêts attaqués, le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’interprétation du principe d’égalité de traitement et du principe de non-discrimination en ce qu’il a conclu, à tort, à la comparabilité des situations couvertes par les dispositions des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut et, partant, à l’existence d’une différence de traitement tenant à l’application de régimes
différents à ces situations comparables.

89 De manière générale, ces institutions, soutenues par le Parlement, considèrent que le Tribunal a, aux points 59 et 60 du premier arrêt attaqué, aux points 58 et 59 du deuxième arrêt attaqué ainsi que, en ce qui concerne la Commission, aux points 80 et 81 du troisième arrêt attaqué, commis une erreur de droit en considérant que la date de la conclusion du mariage était le seul élément déterminant l’application de l’article 18 ou de l’article 20 de l’annexe VIII du statut et que, dès lors, les
situations relevant de ces dispositions étaient bien comparables. Or, si le Tribunal avait pris en compte l’ensemble des éléments caractérisant ces situations, il aurait dû constater qu’il existe une différence essentielle et objective entre les fonctionnaires en service et ceux ayant cessé d’être au service d’une institution de l’Union, tenant à la situation juridique respective de ces fonctionnaires, notamment eu égard aux droits et aux obligations professionnels auxquels les premiers, au
contraire des seconds, sont tenus en vertu des dispositions statutaires pendant toute la durée de leur service.

90 En particulier, tant la Commission que le Conseil mettent, notamment, en exergue le fait que le fonctionnaire en service, au contraire des anciens fonctionnaires qui n’ont plus l’obligation de travailler, doit cotiser au régime de pensions, perçoit un traitement de base supérieur à la pension d’ancienneté qui lui sera octroyée lorsqu’il se retrouvera à la retraite, a l’obligation de résider sur son lieu d’affectation et a droit à des indemnités de dépaysement, d’expatriation et de voyage. La
Commission ajoute que les anciens fonctionnaires ne sont plus couverts par le régime commun d’assurance maladie pour les accidents professionnels. Cette institution relève en outre que, contrairement à l’article 20 de l’annexe VIII du statut, l’article 18 de cette annexe dispose que la condition de durée du mariage ne joue pas si, dans la famille du fonctionnaire, un enfant est né du mariage contracté par ce dernier avant sa cessation de service, ce qui démontre que les situations faisant l’objet
de ces deux dispositions sont radicalement différentes. L’ensemble de ces considérations montreraient que la situation d’un ancien fonctionnaire qui se marie ne nécessite pas, avec la même évidence que dans le cas du fonctionnaire qui se marie alors qu’il est encore en service, qu’un revenu de remplacement soit offert au conjoint survivant par l’octroi de la pension de survie.

91 La Commission estime également que la situation des fonctionnaires en service et des fonctionnaires ayant cessé d’être au service d’une institution de l’Union se distingue sur le plan personnel. D’une part, les fonctionnaires qui se marient avant leur cessation de service seraient plus jeunes que les fonctionnaires relevant de l’article 20 de l’annexe VIII du statut. D’autre part, une personne qui se marie avec un fonctionnaire à la retraite serait déjà censée être dans une situation
d’indépendance économique, si bien que le décès de ce fonctionnaire aurait un effet plus limité que dans le cas d’un fonctionnaire ayant entretenu son foyer depuis son service actif. À cet égard, la Commission souligne que le Tribunal a, au point 51 du premier arrêt attaqué, au point 50 du deuxième arrêt attaqué et au point 72 du troisième arrêt attaqué, interprété de manière incorrecte le point 69 de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119). Contrairement à ce
qu’aurait soutenu le Tribunal, la capacité économique du conjoint survivant serait précisément susceptible de constituer un élément pertinent pour le législateur de l’Union lorsqu’il fixe les critères de l’octroi de la pension de survie au titre de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, compte tenu des circonstances dans lesquelles le mariage a eu lieu.

92 La Commission et le Conseil ajoutent que c’est à tort que le Tribunal a refusé, au point 56 du premier arrêt attaqué, au point 55 du deuxième arrêt attaqué et, pour ce qui concerne la Commission, au point 77 du troisième arrêt attaqué, de tirer les conséquences du point 33 de l’arrêt du 17 juin 1993, Arauxo-Dumay/Commission (T‑65/92, EU:T:1993:47), dans la mesure où le Tribunal, dans ce dernier arrêt, a mis en exergue la différence entre les situations régies aux articles 18 et 20 de
l’annexe VIII du statut, la logique sous-tendant ce même arrêt étant transposable aux cas d’espèce malgré la différence des faits à l’origine des litiges respectivement en cause.

93 La Commission soutient par ailleurs que, au point 58 du premier arrêt attaqué, au point 57 du deuxième arrêt attaqué et au point 79 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal a ignoré à tort, dans son analyse, la finalité de la durée minimale du mariage prévue aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut, à savoir, ainsi que cela résulte du point 89 de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), celle d’éviter des pactes successoraux et, partant, de contracter
mariage dans le seul but de pouvoir obtenir le paiement d’une pension de survie sans que ce mariage corresponde à aucune réalité ni à aucune stabilité des relations entre les personnes concernées. Ainsi, le Tribunal n’aurait pas respecté le critère selon lequel, lors de l’appréciation du caractère comparable des situations, il faut prendre en considération l’ensemble des éléments qui les caractérisent ainsi que l’ensemble des règles de droit régissant les positions de chacune des situations à
comparer. En particulier, en considérant, à ces mêmes points des trois arrêts attaqués, qu’un mariage conclu après cessation du service ne modifie pas de manière essentielle la situation d’un conjoint survivant en ce qui concerne ses droits patrimoniaux en comparaison avec la situation faisant l’objet de l’article 18 de l’annexe VIII du statut, le Tribunal aurait, outre l’absence totale de motivation de cette considération, ignoré le risque qu’un tel mariage soit le prétexte pour la conclusion de
pactes successoraux.

94 VW, BT, soutenue par l’AIACE Internationale, et RN contestent cette argumentation.

Appréciation de la Cour

95 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle l’égalité en droit, énoncée à l’article 20 de la Charte, est un principe général du droit de l’Union qui exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée [arrêt du 2 septembre 2021, État belge (Droit de séjour en cas de violence
domestique), C‑930/19, EU:C:2021:657, point 57 et jurisprudence citée].

96 L’exigence tenant au caractère comparable des situations, afin de déterminer l’existence d’une violation du principe d’égalité de traitement, doit être appréciée au regard de l’ensemble des éléments qui les caractérisent et, notamment, à la lumière de l’objet et du but poursuivi par l’acte qui institue la distinction en cause, étant entendu qu’il doit être tenu compte, à cet effet, des principes et des objectifs du domaine dont relève cet acte. Pour autant que les situations ne sont pas
comparables, une différence de traitement des situations concernées ne viole pas l’égalité en droit consacrée à l’article 20 de la Charte [arrêt du 2 septembre 2021, État belge (Droit de séjour en cas de violence domestique), C‑930/19, EU:C:2021:657, point 58 et jurisprudence citée].

97 C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner les allégations de la Commission et du Conseil, soutenues par le Parlement, selon lesquelles le Tribunal aurait conclu erronément, dans les arrêts attaqués, à la comparabilité des situations couvertes par les dispositions des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut et à l’existence d’une différence de traitement de ces situations comparables en fonction de la date de la conclusion du mariage.

98 À cet égard, il convient de relever que, aux points 51, 52 et 55 du premier arrêt attaqué, aux points 50, 51 et 54 du deuxième arrêt attaqué ainsi qu’aux points 72, 73 et 76 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut ont pour objet, sous réserve du respect de la condition de durée minimale du mariage, l’octroi de pensions de survie au conjoint survivant en fonction de la seule nature juridique des liens unissant ce conjoint au conjoint
décédé. Le Tribunal a également indiqué que ces dispositions poursuivent l’objectif d’octroyer au conjoint survivant un revenu de remplacement destiné à compenser partiellement la perte des revenus du conjoint décédé, celui-ci étant un ancien fonctionnaire qui n’est plus en service et qui ne cotise donc plus au régime de pension de l’Union.

99 Dès lors, le Tribunal a considéré, en substance, que ces deux dispositions de l’annexe VIII du statut avaient un objet et un but sensiblement identiques au regard de la jurisprudence mentionnée au point 96 du présent arrêt et rappelée par le Tribunal lui-même au point 44 des premier et deuxième arrêts attaqués ainsi qu’au point 66 du troisième arrêt attaqué. Selon le Tribunal, le principal élément caractérisant les pensions de survie concernées réside dans la nature juridique des liens unissant
le conjoint survivant, en tant que personne à laquelle lesdites dispositions confèrent un droit, à l’ancien fonctionnaire décédé. Toujours selon le Tribunal, la seule différence dans l’application des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut tient dans la condition de durée minimale du mariage, laquelle est elle-même conditionnée par la date de la conclusion du mariage au regard de la position statutaire du fonctionnaire à cette date, ainsi que cela ressort sans ambiguïté du point 53 du
premier arrêt attaqué, du point 52 du deuxième arrêt attaqué et du point 74 du troisième arrêt attaqué.

100 Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a pu considérer, d’une part, au point 59 du premier arrêt attaqué, au point 58 du deuxième arrêt attaqué et au point 80 du troisième arrêt attaqué, que les situations couvertes par les dispositions des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut étaient comparables et, d’autre part, aux points 53 et 60 du premier arrêt attaqué, aux points 52 et 59 du deuxième arrêt attaqué ainsi qu’aux points 74 et 81 du troisième arrêt
attaqué, que les situations couvertes par ces dispositions se distinguaient seulement au regard de la date de la conclusion du mariage par rapport à la position statutaire du fonctionnaire.

101 La Commission et le Conseil, soutenus par le Parlement, affirment, cependant, en premier lieu, que les situations visées aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut se distinguent de manière essentielle et objective par le fait que, précisément, à la date de la conclusion du mariage, le fonctionnaire était, dans le cadre de la première disposition, encore au service d’une institution de l’Union, tandis qu’il ne l’était plus dans le cadre de la seconde disposition. Le Tribunal aurait ainsi
omis de tenir suffisamment compte de cet élément caractéristique dans son appréciation de la comparabilité des situations.

102 Toutefois, ainsi que le Tribunal l’a indiqué à bon droit, au point 54 du premier arrêt attaqué, au point 53 du deuxième arrêt attaqué et au point 75 du troisième arrêt attaqué, la nature juridique des liens qui unissaient le conjoint survivant au fonctionnaire décédé ne diffère pas selon que, à la date de la conclusion du mariage, les fonctionnaires exerçaient une activité professionnelle ou non et selon le montant des cotisations au régime de pensions de l’Union qui ont été payées ou qui
seraient encore dues. De même, comme le Tribunal l’a constaté au point 58 du premier arrêt attaqué, au point 57 du deuxième arrêt attaqué et au point 79 du troisième arrêt attaqué, la circonstance que le fonctionnaire défunt se soit marié avant ou après sa cessation de service n’est pas de nature à modifier, de manière essentielle, la situation du conjoint survivant en ce qui concerne ses droits patrimoniaux, dont fait partie le droit à une pension de survie en tant que revenu de remplacement.

103 En effet, il convient de souligner que la date de la conclusion du mariage est déterminée par la seule volonté des futurs époux. Cette décision procède d’un libre choix de la part du fonctionnaire sur la base de considérations multiples qui n’impliquent pas nécessairement ni uniquement la prise en compte des circonstances liées à l’exercice ou non d’une activité professionnelle. Contrairement à ce qu’affirment la Commission et le Conseil, le fait que ce fonctionnaire ait été en service ou non à
cette date ne saurait dès lors avoir une incidence déterminante sur l’appréciation de la comparabilité des situations en cause au regard des critères rappelés au point 96 du présent arrêt et, notamment, de l’objet et du but des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut, tels que rappelés au point 98 du présent arrêt. À cet égard, le raisonnement du Tribunal, rappelé au point précédent du présent arrêt, est fondé, en substance, sur cet objet, ce but et cet élément principal.

104 Il est vrai que, ainsi qu’il ressort du point 99 du présent arrêt, la position statutaire du fonctionnaire à la date de la conclusion du mariage a une incidence sur la condition de durée minimale de ce mariage. Alors que la durée exigée n’est que d’un an dans le cas où le mariage est contracté lorsque le fonctionnaire est encore en service, elle est portée à cinq ans dans le cas où le fonctionnaire se marie après avoir cessé d’être au service d’une institution de l’Union.

105 Toutefois, ainsi que VW l’indique à juste titre et comme cela ressort des points 102 et 103 du présent arrêt, ni la position statutaire du fonctionnaire ni la date de la conclusion du mariage ne sont des éléments pertinents au stade de la comparabilité des situations en ce qu’ils sont dénués de lien direct avec l’objet, le but et le principal élément caractéristique du droit à une pension de survie visé aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut.

106 C’est pour cette raison qu’il convient de considérer, par analogie, comme la Cour l’a, s’agissant de la pension de survie prévue à l’article 17 de l’annexe VIII du statut, indiqué au point 70 de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), que l’octroi de la pension de survie dépend « seulement », dans son principe même, de la nature juridique des liens qui unissaient la personne concernée au fonctionnaire décédé, et ce alors même que la Cour a reconnu, au point 89 de
cet arrêt, que la durée minimale du mariage constitue elle aussi une condition pour que le conjoint survivant bénéficie de la pension de survie.

107 En effet, c’est la nature juridique des liens entre les conjoints qui sous-tend le régime des pensions de survie de la fonction publique de l’Union, en ce que cette condition d’octroi est commune à l’ensemble des pensions de survie visées aux articles 17 à 20 et à l’article 27 de l’annexe VIII du statut. La condition de durée minimale du mariage, quant à elle, revêt un caractère accessoire à la condition relative à la nature juridique des liens entre les conjoints, dans la mesure où elle vise
seulement à préciser la durée pendant laquelle le lien juridique doit avoir perduré aux fins de l’octroi de la pension de survie. Cette condition accessoire n’est en outre pas reprise dans certaines des pensions de survie, telles que celles visées aux articles 19 et 27 de l’annexe VIII du statut.

108 C’est donc à juste titre que le Tribunal a, aux points 52 et 54 du premier arrêt attaqué, aux points 51 et 53 du deuxième arrêt attaqué ainsi qu’aux points 73 et 75 du troisième arrêt attaqué, insisté, dans sa motivation, sur l’importance du lien juridique entre les conjoints en tant qu’élément principal caractérisant le régime des pensions de survie de l’Union et conclu à l’absence d’incidence de la position statutaire du fonctionnaire sur ce lien.

109 La Commission et le Conseil soutiennent, en deuxième lieu, que la situation d’un ancien fonctionnaire qui se marie après sa cessation de service ne nécessite pas qu’un revenu de remplacement soit offert au conjoint survivant avec la même évidence que dans le cas du fonctionnaire qui se marie alors qu’il est encore en service. À cet égard, il suffit de rappeler, ainsi que le Tribunal l’a indiqué à juste titre au point 58 du premier arrêt attaqué, au point 57 du deuxième arrêt attaqué et au
point 79 du troisième arrêt attaqué, en faisant référence au point 69 de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), que le droit aux pensions de survie visées aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut n’est pas soumis à des conditions de ressources ou de patrimoine devant caractériser une incapacité du conjoint survivant à faire face à ses besoins et démontrant ainsi sa dépendance financière passée par rapport au défunt.

110 La Commission avance, en troisième lieu, que le Tribunal n’aurait pas tenu compte de la finalité de la durée minimale du mariage prévue aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut et qui consisterait, ainsi que cela résulterait du point 89 de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), à éviter la conclusion de pactes successoraux frauduleux ou abusifs. À cet égard, il suffit de relever que cet aspect n’est pas pertinent au stade de la comparabilité des
situations. Cet argument se rapporte en effet à la justification de la durée plus ou moins importante exigée du mariage, si bien qu’il ne peut intervenir qu’au stade de l’appréciation du caractère proportionné de l’éventuelle différence de traitement constatée.

111 S’agissant, au surplus, de l’argument de la Commission selon lequel le défaut de comparabilité des situations serait également attesté par le fait que, contrairement à ce qui est prévu à l’article 20 de l’annexe VIII du statut, la condition de durée minimale du mariage cesse, en vertu de l’article 18 de cette annexe, de jouer lorsque le conjoint survivant pourvoit ou a pourvu aux besoins des enfants de l’ancien fonctionnaire, cet élément est sans incidence sur l’appréciation de la comparabilité
des situations couvertes par ces deux articles. En effet, la condition relative à l’entretien des enfants, prévue seulement à l’article 18 de l’annexe VIII du statut, revêt, par analogie avec ce qui a été indiqué aux points 104 et 106 du présent arrêt, le même caractère accessoire que la condition relative à la durée minimale du mariage, à laquelle elle se substitue. Elle est ainsi dénuée de lien direct avec l’objet, le but et le principal élément caractéristique du droit à une pension de survie
visé aux articles 18 et 20 de cette annexe.

112 Il ressort des considérations qui précèdent que, contrairement à ce que la Commission et le Conseil, soutenus par le Parlement, affirment, les conclusions auxquelles le Tribunal est parvenu, aux points 59 et 60 du premier arrêt attaqué, aux points 58 et 59 du deuxième arrêt attaqué ainsi qu’aux points 80 et 81 du troisième arrêt attaqué, ne sont pas entachées d’erreur de droit.

113 Dans ces conditions, il convient de qualifier d’inopérant l’argument de la Commission et du Conseil selon lequel le Tribunal aurait, à tort, refusé, au point 56 du premier arrêt attaqué, au point 55 du deuxième arrêt attaqué et, pour ce qui concerne la Commission, au point 77 du troisième arrêt attaqué, de tirer les conséquences du point 33 de l’arrêt du 17 juin 1993, Arauxo-Dumay/Commission (T‑65/92, EU:T:1993:47). En effet, à supposer même que cet argument soit fondé, les conclusions du
Tribunal relatives à la comparabilité des situations se fondent à suffisance sur la motivation figurant respectivement aux points 51 à 55 et 58 du premier arrêt attaqué, aux points 50 à 54 et 57 du deuxième arrêt attaqué ainsi qu’aux points 72 à 76 et 79 du troisième arrêt attaqué, indépendamment des considérations exposées, respectivement, aux points 56, 57 et 77 de ces arrêts.

114 Il s’ensuit qu’il convient de rejeter comme étant non fondés la troisième branche du premier moyen et le deuxième moyen dans l’affaire C‑116/21 P, la troisième branche du premier moyen et les deux premières branches du deuxième moyen dans l’affaire C‑117/21 P, la troisième branche du deuxième moyen et les deux premières branches du troisième moyen dans l’affaire C‑118/21 P ainsi que le premier moyen dans les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P.

Sur les deux premières branches du premier moyen dans les affaires C‑116/21 P et C‑117/21 P, sur les deux premières branches du deuxième moyen dans l’affaire C‑118/21 P ainsi que sur le deuxième moyen dans les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P

Argumentation des parties

115 Par ces moyens, la Commission ainsi que, à titre subsidiaire, le Conseil reprochent, en substance, au Tribunal d’avoir commis, dans les arrêts attaqués, une erreur de droit en ce qui concerne l’étendue du contrôle juridictionnel.

116 Ces deux institutions, soutenues par le Parlement, considèrent que, à la deuxième phrase du point 48 des deux premiers arrêts attaqués et, pour ce qui concerne la Commission, à la deuxième phrase du point 70 du troisième arrêt attaqué, le Tribunal a fait application d’une jurisprudence de l’Union développée dans le contexte radicalement différent des choix de politique de personnel dans des situations où plusieurs options sont ouvertes au législateur. C’est ainsi que le Tribunal aurait,
notamment au point 80 du premier arrêt attaqué, au point 84 du deuxième arrêt attaqué et, s’agissant de la Commission, au point 105 du troisième arrêt attaqué, conclu à tort au caractère simplement « déraisonnable » du choix du législateur de l’Union concernant la durée minimale de mariage retenue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut. Ce faisant, il aurait procédé à un contrôle allant au-delà du caractère « manifestement inapproprié ou inadéquat » de la mesure en cause par rapport à
l’objectif poursuivi par les institutions compétentes, à savoir, en l’espèce, prévenir l’abus de droit et les fraudes ainsi que préserver les finances de l’Union. Le Tribunal aurait, de la sorte, substitué sa propre appréciation à celle du législateur de l’Union et aurait donc dépassé les limites du contrôle de légalité.

117 En ce qui concerne l’objectif visant à préserver les finances de l’Union, le Conseil reproche au Tribunal d’avoir omis d’examiner l’article 20 de l’annexe VIII du statut à l’aune de cet objectif entendu au sens large, en lien avec l’objectif de lutte contre la fraude. Outre le fait que le Tribunal aurait dû examiner si cette disposition était manifestement inadéquate au regard de ces objectifs, le Conseil soutient que le Tribunal a considéré à tort, au point 83 du premier arrêt attaqué et au
point 87 du deuxième arrêt attaqué, que, même en l’absence de ladite disposition, l’équilibre financier du régime de pension de l’Union ne serait pas menacé. En effet, l’Union se devait de concevoir un régime susceptible d’éviter des situations de fraude résultant de mariages de complaisance conclus par des fonctionnaires retraités de l’Union.

118 La Commission avance, en outre, que le Tribunal, alors qu’il aurait affirmé asseoir son appréciation de la légalité de l’article 20 de l’annexe VIII sur les articles 20 et 21 de la Charte, se serait écarté de la jurisprudence de la Cour selon laquelle l’appréciation de la légalité d’un acte de l’Union au regard des droits fondamentaux ne saurait, en tout état de cause, reposer sur des allégations tirées des conséquences de cet acte dans un cas particulier. En effet, le Tribunal aurait mis en
exergue le désavantage particulier dont certaines personnes peuvent être victimes et aurait, en outre, tiré argument de la particularité des circonstances factuelles de l’espèce, aux points 77 et 78 du premier arrêt attaqué, au point 81 du deuxième arrêt attaqué et aux points 101 à 103 du troisième arrêt attaqué, pour juger l’article 20 de l’annexe VIII du statut illégal.

119 VW considère que, en reprochant au Tribunal d’avoir vérifié le caractère « déraisonnable » du choix fait par le législateur de l’Union, la Commission et le Conseil font une lecture erronée du premier arrêt attaqué. Le Tribunal aurait en effet procédé, aux points 69 à 74 de cet arrêt, à l’examen du caractère « manifestement déraisonnable » de ce choix, entendu dans le sens d’« inadéquat ». Estimant que le Tribunal a suivi la logique correcte de l’examen de proportionnalité tel qu’il résulte de la
jurisprudence des juridictions de l’Union, VW soutient que c’est à juste titre que le Tribunal a jugé que, même à reconnaître comme étant légitime l’objectif de lutte contre les fraudes, la mesure visant à imposer, sur la base d’une présomption irréfragable, une durée minimale du mariage cinq fois supérieure à celle exigée à l’article 18 de cette annexe était manifestement inadéquate et allait au-delà de ce qui était nécessaire pour garantir l’absence de fraude.

120 Par ailleurs, VW considère que, contrairement à ce que soutient la Commission, le Tribunal a, au-delà des considérations relatives à sa situation factuelle et familiale, indiqué, au point 61 du premier arrêt attaqué, que la différence de traitement entraînait un désavantage non seulement pour elle-même, mais, de manière plus générale, pour l’ensemble des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui se sont mariés après la cessation de service de celui-ci et, partant, pour l’ensemble des
conjoints survivants entrant dans le champ d’application de l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

121 BT, soutenue par l’AIACE Internationale, considère également que le Tribunal s’est exprimé, au point 61 du deuxième arrêt attaqué, en des termes génériques sans viser spécifiquement son propre cas et sans tirer d’argument des circonstances factuelles de l’espèce.

122 En outre, BT allègue que, tout comme la Cour a, dans l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), considéré que la condition de durée minimale du mariage d’un an visée aux articles 17 et 18 de l’annexe VIII du statut n’apparaissait pas comme étant discriminatoire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif poursuivi par l’octroi de la pension de survie, le Tribunal était tenu d’examiner si la condition de durée minimale du mariage de cinq ans visée à
l’article 20 de cette annexe n’était pas discriminatoire, manifestement inadéquate et nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par le législateur de l’Union. Or, le Tribunal aurait minutieusement procédé à cet examen dans le deuxième arrêt attaqué.

123 RN soutient que l’argument de la Commission tiré d’une méconnaissance, par le Tribunal, de l’étendue de son pouvoir juridictionnel manque de clarté et, partant, est irrecevable, en ce que la Commission ne précise pas au regard de quel objectif poursuivi par la pension de survie la légalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut aurait dû être envisagée. En tout état de cause, RN considère que le Tribunal a apprécié la situation des conjoints survivants au regard de l’objectif visant à
compenser, au bénéfice de ces conjoints, la perte de revenus découlant du décès de l’ancien fonctionnaire.

124 RN allègue en outre que, contrairement à ce qu’affirme la Commission, le Tribunal, lors de l’appréciation de la validité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, n’a pas simplement envisagé l’application de cette disposition au cas d’espèce, mais a, aux points 83 et 103 du troisième arrêt attaqué, relevé que cette disposition entraînait un désavantage particulier pour toute une catégorie de personnes, à savoir les conjoints survivants ayant épousé un ancien fonctionnaire.

Appréciation de la Cour

125 À titre liminaire, il convient de constater que, contrairement à ce que RN affirme, l’argument de la Commission selon lequel le Tribunal a méconnu l’étendue de son contrôle juridictionnel ne manque pas de clarté et n’est, dès lors, pas irrecevable au regard de la jurisprudence rappelée au point 43 du présent arrêt. En effet, par cet argument, cette institution reproche au Tribunal de ne pas avoir fait une application correcte du critère à l’aune duquel la légalité de l’article 20 de
l’annexe VIII du statut devait être appréciée.

126 Sur le fond, il y a lieu de relever que le Tribunal a rappelé, aux points 46 à 48 des premier et deuxième arrêts attaqués ainsi qu’aux points 68 à 70 du troisième arrêt attaqué, les exigences mentionnées à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte ainsi que la jurisprudence applicable aux fins du contrôle de proportionnalité d’une différence de traitement. Il a ensuite jugé, au point 49 des premier et deuxième arrêts attaqués ainsi qu’au point 71 du troisième arrêt attaqué, que, si les situations
visées respectivement aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut étaient comparables, il devrait alors vérifier qu’il n’apparaissait pas déraisonnable pour le législateur de l’Union d’estimer que la différence de traitement instituée puisse être appropriée et nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif d’intérêt général poursuivi par la condition relative à la durée minimale de mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut. Ayant conclu à la comparabilité des situations,
il a effectué cette analyse à partir du point 65 du premier arrêt attaqué, du point 66 du deuxième arrêt attaqué et du point 90 du troisième arrêt attaqué.

127 Or, ainsi que l’avancent la Commission et le Conseil, soutenus par le Parlement, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, en présence de règles statutaires telles que celles en cause en l’espèce et compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont dispose le législateur de l’Union à cet égard, le principe d’égalité de traitement, tel que consacré à l’article 20 de la Charte, n’est méconnu que lorsque le législateur de l’Union procède à une différenciation arbitraire ou manifestement
inadéquate par rapport à l’objectif poursuivi par la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2021, Alvarez y Bejarano e.a./Commission, C‑517/19 P et C‑518/19 P, EU:C:2021:240, point 53 ainsi que jurisprudence citée).

128 Il convient de considérer que cette jurisprudence est applicable dans le cadre de la vérification de l’exigence de proportionnalité imposée à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte.

129 En l’occurrence, le Tribunal a considéré, au point 49 des premier et deuxième arrêts attaqués ainsi qu’au point 71 du troisième arrêt attaqué, qu’il devait vérifier s’il n’apparaissait pas déraisonnable pour le législateur de l’Union d’estimer que la différence de traitement instituée puisse être appropriée et nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif d’intérêt général poursuivi par la condition relative à la durée minimale de mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut.
Or, il aurait dû se limiter à vérifier si la différenciation opérée à cette disposition, lue en combinaison avec l’article 18 de cette annexe, n’apparaissait pas arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif d’intérêt général poursuivi. Ce faisant, il a méconnu l’étendue de son contrôle juridictionnel en procédant de manière incorrecte à l’examen de l’exigence de proportionnalité et a ainsi commis une erreur de droit. En effet, sans cette erreur, le Tribunal aurait été amené à
adopter un raisonnement différent et à parvenir éventuellement à des conclusions autres que celles auxquelles il a abouti aux points 80, 85 et 87 du premier arrêt attaqué, aux points 84, 90 et 92 du deuxième arrêt attaqué ainsi qu’aux points 105, 110 et 112 du troisième arrêt attaqué.

130 Cette méconnaissance du contrôle juridictionnel s’est également répercutée au point 69 du premier arrêt attaqué, au point 71 du deuxième arrêt attaqué et au point 94 du troisième arrêt attaqué. Le Tribunal s’est en effet attaché à examiner, à partir de ces points, si la condition de durée minimale de mariage de cinq ans prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut, prise isolément et indépendamment de celle d’un an prévue à l’article 18 de cette annexe, était, dans le cadre de l’article 52,
paragraphe 1, de la Charte, proportionnée en ce sens qu’elle n’allait pas manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser l’objectif poursuivi par le législateur de l’Union. Or, ainsi qu’il ressort du point 128 du présent arrêt, même dans le cadre de cette disposition de la Charte, le Tribunal aurait dû se contenter d’examiner si la différenciation constatée en l’espèce, à savoir le fait que la condition de durée minimale du mariage est, dans les situations relevant de l’article 20
de l’annexe VIII du statut, cinq fois supérieure à celle prévue pour les situations relevant de l’article 18 de cette annexe, alors même que l’ensemble de ces situations sont comparables, devait être considérée comme arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif, commun à ces deux dispositions, poursuivi par le législateur de l’Union.

131 Dans ces conditions et sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres arguments soulevés par la Commission et le Conseil, il y a lieu de faire droit aux deux premières branches du premier moyen du pourvoi dans les affaires C‑116/21 P et C‑117/21 P, aux deux premières branches du deuxième moyen du pourvoi dans l’affaire C‑118/21 P ainsi qu’au deuxième moyen du pourvoi dans les affaires C‑138/21 P et C‑139/21 P.

132 Partant, il convient, sans qu’il soit besoin d’examiner le troisième moyen dans l’affaire C‑116/21 P, la troisième branche du deuxième moyen et le troisième moyen dans l’affaire C‑117/21 P, la troisième branche du troisième moyen et le quatrième moyen dans l’affaire C‑118/21 P, les troisième et quatrième moyens dans l’affaire C‑138/21 P ainsi que le troisième moyen dans l’affaire C‑139/21 P, d’accueillir les pourvois et d’annuler les trois arrêts attaqués.

Sur les recours devant le Tribunal

133 Conformément à l’article 61, premier alinéa, deuxième phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, celle-ci peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

134 En l’espèce, eu égard notamment à la circonstance que les recours en annulation dans les affaires T‑243/18, T‑315/19 et T‑442/17 RENV sont fondés sur des moyens ayant fait l’objet d’un débat contradictoire devant le Tribunal et dont l’examen ne nécessite d’adopter aucune mesure supplémentaire d’organisation de la procédure ou d’instruction du dossier, il convient de considérer que ces recours sont en état d’être jugés et qu’il y a lieu de statuer définitivement sur ceux-ci.

135 Afin que la Cour dispose du dossier complet des affaires à cette fin, le greffe de la Cour, sollicité en ce sens par le juge rapporteur, a, le 21 janvier 2022, demandé au greffe du Tribunal la transmission de l’enregistrement sonore des audiences tenues dans les affaires T‑243/18 et T‑315/19. Le greffe du Tribunal a répondu favorablement à cette demande le 25 janvier 2022.

Sur le recours dans l’affaire T‑243/18

136 À l’appui de son recours devant le Tribunal, dans l’affaire T‑243/18, VW a soulevé, en substance, deux moyens tirés, à titre principal, d’une exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut et, à titre subsidiaire, d’une interprétation erronée de l’article 27 de l’annexe VIII du statut. Elle a également excipé, à titre subsidiaire, de l’illégalité de cette disposition tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement consacré à l’article 20 de la Charte.

Sur le premier moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut

137 Par son premier moyen, dans l’affaire T‑243/18, VW soutient que l’article 20 de l’annexe VIII du statut méconnaît les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, consacrés respectivement à l’article 20 et à l’article 52 de la Charte, en ce que, en imposant une condition de durée minimale du mariage de cinq ans alors que l’article 18 de l’annexe VIII du statut ne prévoit qu’une durée d’un an, il la prive indûment du bénéfice d’une pension de survie.

138 La Commission, soutenue par le Parlement et par le Conseil, conteste cette argumentation.

139 Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, toute limitation de l’exercice des droits et des libertés reconnus par celle-ci doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et
des libertés d’autrui.

140 Par ailleurs, le principe d’égalité de traitement constitue un principe général du droit de l’Union, consacré à l’article 20 de la Charte, dont le principe de non-discrimination énoncé à l’article 21, paragraphe 1, de la Charte est une expression particulière (arrêt du 29 octobre 2020, Veselības ministrija, C‑243/19, EU:C:2020:872, point 35 et jurisprudence citée). Ces deux principes sont également rappelés à l’article 1er quinquies du statut.

141 La Cour a déjà jugé que l’interdiction de toute discrimination fondée sur l’âge, consacrée à l’article 21, paragraphe 1, de la Charte, revêt un caractère impératif en tant que principe général de droit de l’Union, cette interdiction se suffisant à elle-même pour conférer aux particuliers un droit invocable en tant que tel dans un litige qui les oppose dans un domaine couvert par le droit de l’Union (arrêt du 17 avril 2018, Egenberger, C‑414/16, EU:C:2018:257, point 76 et jurisprudence citée). Il
doit en aller de même du principe général d’égalité de traitement ou d’égalité en droit visé à l’article 20 de la Charte.

142 Ainsi qu’il a déjà été indiqué au point 95 du présent arrêt, le principe général d’égalité de traitement exige du législateur de l’Union, conformément aux exigences de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié. Une différence de traitement est justifiée dès lors qu’elle est fondée sur un
critère objectif et raisonnable, à savoir lorsqu’elle est en rapport avec un but légalement admissible poursuivi par la législation en cause, et que cette différence est proportionnée au but poursuivi par le traitement concerné (arrêt du 22 mai 2014, Glatzel, C‑356/12, EU:C:2014:350, point 43 et jurisprudence citée).

143 Comme cela a été exposé au point 96 du présent arrêt, l’exigence tenant au caractère comparable des situations, afin de déterminer l’existence d’une violation du principe d’égalité de traitement, doit être appréciée au regard de l’ensemble des éléments qui les caractérisent et, notamment, à la lumière de l’objet et du but poursuivi par l’acte qui institue la distinction en cause, étant entendu qu’il doit être tenu compte, à cet effet, des principes et des objectifs du domaine dont relève cet
acte. Pour autant que les situations ne sont pas comparables, une différence de traitement des situations concernées ne viole pas l’égalité en droit consacrée à l’article 20 de la Charte.

144 En outre, il y a lieu de rappeler la jurisprudence de la Cour, mentionnée au point 127 du présent arrêt, selon laquelle, en présence de règles statutaires telles que celles en cause en l’espèce et compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont dispose le législateur de l’Union à cet égard, le principe d’égalité de traitement n’est méconnu que lorsque le législateur de l’Union procède à une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate par rapport à l’objectif poursuivi par la
réglementation en cause.

145 C’est à l’aune de cette jurisprudence et des exigences de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte qu’il convient d’examiner l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, soulevée par VW, dans l’affaire T‑243/18, au regard des articles 20 et 52 de la Charte.

146 S’agissant, en premier lieu, de la comparabilité des situations visées aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut, il y a lieu de considérer, pour les motifs indiqués aux points 98 à 113 du présent arrêt, que ces situations sont comparables.

147 En deuxième lieu, il convient de constater que, en prévoyant, à ces dispositions de l’annexe VIII du statut, des durées minimales du mariage différentes, le législateur de l’Union a traité de manière différente des situations comparables.

148 En troisième lieu, il convient d’examiner si cette différence de traitement est conforme à l’article 20 de la Charte en ce qu’elle répond aux critères énoncés à l’article 52, paragraphe 1, de celle-ci et rappelés au point 139 du présent arrêt.

149 Premièrement, il est constant que ladite différence de traitement est prévue par la loi, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, dès lors qu’elle résulte de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, lu en combinaison avec l’article 18 de cette annexe. Ces dispositions du droit de l’Union prévoient des conditions de durée minimale du mariage chiffrées de manière précise qui définissent la portée de la limitation de l’exercice du droit à l’égalité de traitement (voir, s’agissant de la
portée de l’exigence selon laquelle toute limitation de l’exercice des droits fondamentaux doit être prévue par la loi, arrêt du 26 avril 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑401/19, EU:C:2022:297, point 64 et jurisprudence citée).

150 Deuxièmement, la limitation apportée au régime des pensions de survie par la différence de traitement en cause respecte le contenu essentiel du principe d’égalité de traitement, conformément à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte. En effet, cette limitation ne remet pas en cause ce principe en tant que tel dans la mesure où elle ne porte que sur la question, limitée, de la condition minimale de durée du mariage à laquelle les conjoints survivants de fonctionnaires ou d’anciens fonctionnaires
décédés doivent satisfaire pour pouvoir bénéficier d’une pension de survie, sans que ces conjoints soient privés de la possibilité de bénéficier d’une telle pension dans chacun des cas de figure envisagés aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut.

151 Troisièmement, ladite limitation répond à un objectif d’intérêt général, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, à savoir celui visant à prévenir les abus de droit et les fraudes, l’interdiction de celles-ci constituant un principe général du droit de l’Union dont le respect s’impose aux justiciables (arrêt du 6 février 2018, Altun e.a., C‑359/16, EU:C:2018:63, point 49). La Cour a, en effet, déjà jugé que la condition selon laquelle le mariage doit avoir duré un certain temps pour
que le conjoint survivant bénéficie de la pension de survie vise à s’assurer de la réalité et de la stabilité des relations entre les personnes concernées (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 89). Il s’agit d’un critère uniforme et indistinctement applicable à l’ensemble des conjoints survivants couverts par les dispositions des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut qui vise non pas à présumer l’existence d’abus ou de fraudes dans
le chef des conjoints survivants, mais à prévenir la commission de tels abus ou fraudes.

152 S’agissant, quatrièmement, de l’examen de proportionnalité, il convient, dans le cadre du contrôle de légalité d’une disposition du droit de l’Union au regard du principe d’égalité de traitement et en raison du large pouvoir d’appréciation dont dispose le législateur de l’Union en matière de règles statutaires, de vérifier, ainsi qu’il a été rappelé aux points 127 et 144 du présent arrêt, si, en imposant une durée minimale du mariage de cinq ans aux conjoints survivants ayant épousé un
fonctionnaire après la cessation de service de ce dernier alors que cette durée minimale n’est, en vertu de l’article 18 de l’annexe VIII du statut, que d’un an dans le cas d’un mariage contracté avec un fonctionnaire encore en service, l’article 20 de cette annexe prévoit une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate par rapport à l’objectif d’intérêt général rappelé au point précédent du présent arrêt.

153 La Cour a déjà jugé que la condition de durée minimale d’un an prévue à l’article 17 de l’annexe VIII du statut n’est ni arbitraire ni manifestement inadéquate au regard de cet objectif, cette analyse valant mutatis mutandis pour la condition de durée minimale d’un an prévue à l’article 18 de l’annexe VIII du statut (voir, par analogie, arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 90).

154 Ainsi que la Commission, soutenue par le Conseil et le Parlement, l’a indiqué en substance dans ses écrits et au cours de l’audience devant le Tribunal, il n’apparaît ni arbitraire ni manifestement inadéquat d’exiger, à l’article 20 de l’annexe VIII du statut, une durée minimale du mariage plus longue que celle prévue à l’article 18 de cette annexe. En effet, dans l’hypothèse visée à cet article 20, caractérisée par le fait que le mariage est contracté après la cessation de service du
fonctionnaire, l’incitation aux abus ou à la fraude est susceptible d’être favorisée par la plus grande prévisibilité et la plus grande proximité du décès du fonctionnaire dès lors que, comme en l’occurrence, cette cessation intervient par l’effet de la mise à la retraite, au sens de l’article 52 du statut.

155 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, en fixant à l’article 20 de l’annexe VIII du statut une durée minimale du mariage de cinq ans afin de prévenir les abus et les fraudes alors que cette durée n’est que d’un an dans les situations couvertes par l’article 18 de cette annexe, le législateur de l’Union, dans le cadre du large pouvoir d’appréciation qui lui appartient, n’a pas opéré de différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate.

156 Il découle de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner l’objectif visant à préserver les intérêts financiers de l’Union, soulevé par la Commission au cours de l’audience devant le Tribunal, la différence de traitement instituée à l’article 20 de l’annexe VIII du statut est conforme à l’article 20 de la Charte.

157 Dès lors, il convient de rejeter le premier moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

Sur le second moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 27 de l’annexe VIII du statut et d’une exception d’illégalité de cette disposition

158 Par son second moyen, dans l’affaire T‑243/18, VW soutient que la Commission a commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 27 de l’annexe VIII du statut, en ce que, selon VW, cette disposition ne peut être interprétée que comme visant la situation d’un mariage intervenu après le divorce entre des personnes différentes. À titre subsidiaire, VW excipe de l’illégalité de ladite disposition en ce que celle-ci méconnaît les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité
consacrés respectivement à l’article 20 et à l’article 52 de la Charte.

159 La Commission, soutenue par le Parlement et par le Conseil, conteste cette argumentation en se référant, notamment, au libellé clair de l’article 27 de l’annexe VIII du statut. Ayant excipé, dans son mémoire en défense, de l’irrecevabilité du second moyen, la Commission a déclaré, dans son mémoire en duplique, renoncer à cette exception d’irrecevabilité en ce qui concerne la branche principale de ce moyen, tout en la maintenant s’agissant de la branche subsidiaire dudit moyen. À ce dernier
égard, elle indique, notamment, que l’exception d’illégalité de l’article 27 de l’annexe VIII du statut est irrecevable du fait du manque de clarté de la requête quant à cette branche du second moyen.

160 Concernant, en premier lieu, l’erreur de droit prétendument commise par la Commission dans l’interprétation de l’article 27 de l’annexe VIII du statut, il convient de relever, ainsi que la Commission le souligne dans son mémoire en défense, que, en vertu de son libellé clair, cet article régit exclusivement le droit à une pension de survie des conjoints divorcés d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire. Or, sans qu’il soit nécessaire d’interpréter le terme « remarié », figurant au
troisième alinéa de cet article, il est constant que, à la date du décès de son époux, VW était mariée et non divorcée à un ancien fonctionnaire, si bien qu’elle relevait, s’agissant de son droit à une pension de survie, non pas de l’article 27 de l’annexe VIII du statut, mais du seul article 20 de cette annexe. Cet article n’est pas, ainsi que cela résulte du rejet du premier moyen, entaché d’illégalité et ne prive ainsi pas, en lui-même, des conjoints survivants se trouvant dans la situation
de VW de pouvoir bénéficier d’une pension de survie sous réserve de remplir les conditions visées à cet article 20.

161 S’agissant, en second lieu, de l’exception d’illégalité de l’article 27 de l’annexe VIII du statut, il importe de rappeler qu’il résulte de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 76 du règlement de procédure du Tribunal que la requête présentée en première instance doit, notamment, indiquer l’objet du litige avec suffisamment de clarté et de précision afin de permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au juge de l’Union d’exercer son
contrôle. En particulier, les conclusions de la requête doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que le juge de l’Union ne statue ultra petita ou n’omette de statuer sur un grief (voir, en ce sens, ordonnance du 3 décembre 2019, WB/Commission, C‑271/19 P, non publiée, EU:C:2019:1037, point 15 et jurisprudence citée).

162 Or, si, d’un point de vue formel, la requête de VW identifie deux branches dans le cadre du second moyen, force est de constater que les éléments censés venir au soutien de la seconde branche de ce moyen, invoquée à titre subsidiaire par rapport à la première branche, sont trop sommaires pour permettre au juge de l’Union d’en apprécier l’éventuel bien-fondé. Tant son intitulé que son contenu sont tissés de considérations générales ne permettant pas de procéder à son examen précis. En
particulier, cette requête n’explique nullement en quoi l’article 27 de l’annexe VIII du statut méconnaîtrait les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité consacrés, respectivement, à l’article 20 et à l’article 52 de la Charte.

163 Il s’ensuit que, s’agissant de la seconde branche du second moyen, la requête introduite par VW méconnaît les exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal et est, pour ce motif, irrecevable.

164 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de rejeter le second moyen et, partant, le recours de VW dans l’affaire T‑243/18.

Sur le recours dans l’affaire T‑315/19

165 À l’appui de son recours devant le Tribunal, dans l’affaire T‑315/19, BT, soutenue par l’AIACE Internationale, a soulevé deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une illégalité de la condition de durée minimale du mariage de cinq ans fixée à l’article 20 de l’annexe VIII du statut et le second moyen est tiré d’une violation de l’article 1er quinquies du statut.

166 La Commission, soutenue par le Parlement et le Conseil, conteste cette argumentation.

167 À titre liminaire, il convient de relever que l’intégralité du raisonnement adopté par BT dans sa requête devant le Tribunal est fondée, en substance, sur une méconnaissance, au titre de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, lu en combinaison avec l’article 18 de cette annexe, des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination fondée sur l’âge. Ainsi, BT ne fait valoir, malgré la présentation formelle, dans sa requête, de deux moyens, qu’un moyen unique tiré de l’illégalité de
l’article 20 de l’annexe VIII du statut au regard de ces principes.

168 Par ailleurs, il convient de relever que, dans son mémoire en réplique, puis, au cours de l’audience devant le Tribunal, BT a précisé qu’elle faisait également valoir une violation du devoir de sollicitude consacré à l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut. Certes, la requête fait seulement mention d’une violation de l’article 1er quinquies de sorte qu’il pourrait être considéré que BT aurait implicitement fait référence au paragraphe 6 de cet article du statut. Toutefois, il ne ressort
pas de l’argumentation développée par BT dans sa requête devant le Tribunal qu’elle entendait reprocher une quelconque violation du devoir de sollicitude, son argumentation étant en effet seulement centrée sur la méconnaissance des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination fondée sur l’âge. Il convient en outre de souligner à cet égard que, dans son mémoire en défense, la Commission n’a pas compris le second moyen comme visant une violation du devoir de sollicitude.

169 Dès lors, en application de la jurisprudence rappelée au point 161 du présent arrêt et compte tenu du fait que la Commission a excipé, lors de l’audience devant le Tribunal, de l’irrecevabilité du moyen fondé sur le devoir de sollicitude, il convient de considérer que le second moyen visé au point 165 du présent arrêt, pas plus que le premier moyen, ne peut être compris comme englobant une violation du devoir de sollicitude visé à l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut.

170 Sous le bénéfice de ces considérations liminaires, il convient d’examiner l’unique moyen tiré de l’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut au regard des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination fondée sur l’âge.

171 À cet égard, s’agissant, en premier lieu, de l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, en ce qu’elle est fondée sur une violation du principe d’égalité de traitement tel que consacré à l’article 20 de la Charte et rappelé à l’article 1er quinquies du statut, il y a lieu de renvoyer aux points 139 à 156 du présent arrêt et de rejeter, par identité de motifs, cette première branche de l’unique moyen.

172 S’agissant, en second lieu, de l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, en ce qu’elle est tirée d’une violation du principe de non-discrimination fondée sur l’âge tel que consacré à l’article 21, paragraphe 1, de la Charte et rappelé à l’article 1er quinquies du statut, il convient, premièrement, de rappeler, ainsi qu’il a été indiqué au point 146 du présent arrêt, que les situations visées aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut sont comparables.

173 Deuxièmement, il y a lieu de relever que, en prévoyant, à ces articles 18 et 20, des durées minimales de mariage différentes, le législateur de l’Union a procédé à une différence de traitement indirectement fondée sur l’âge.

174 En effet, d’une part, ainsi qu’il a été constaté aux points 99 et 154 du présent arrêt, les situations couvertes par les dispositions des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut se distinguent au regard de la date de la conclusion du mariage par rapport à la cessation de service ou non du fonctionnaire telle qu’elle résulte de l’article 47 du statut et, d’autre part, une telle cessation de service intervient, pour l’essentiel et comme il ressort en substance de l’argumentation concordante
des parties, par l’effet de la mise à la retraite, au sens de l’article 52 du statut. Or, compte tenu du fait que, pris dans son application la plus large, cet article 52 prévoit, ainsi que BT le souligne dans son mémoire en réplique devant le Tribunal, que la mise à la retraite des fonctionnaires titulaires d’une pension d’ancienneté, au sens de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, peut s’effectuer entre 58 et 70 ans, il y a lieu de constater que les anciens fonctionnaires visés à cet
article 20 se sont généralement mariés à un âge plus avancé que les anciens fonctionnaires visés à l’article 18 de l’annexe VIII du statut.

175 Il s’ensuit que l’article 20 de l’annexe VIII du statut, lu en combinaison avec l’article 18 de cette annexe, établit une différence de traitement indirectement fondée sur l’âge du fonctionnaire, étant précisé que le fait que des fonctionnaires peuvent, en vertu de l’article 52 du statut, être mis à la retraite et jouir d’une pension d’ancienneté avec une différence d’âge de 12 ans dans les cas les plus extrêmes ne saurait suffire à nier que cette différence de traitement est bien fondée sur
l’âge (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 2020, Comune di Gesturi, C‑670/18, EU:C:2020:272, points 26 à 28).

176 Troisièmement, il convient de renvoyer aux points 148 à 154 du présent arrêt et, par identité de motifs, de conclure, sans qu’il soit besoin d’examiner l’objectif visant à préserver les intérêts financiers de l’Union, soulevé par la Commission dans son mémoire en duplique devant le Tribunal, que la différence de traitement indirectement fondée sur l’âge, instituée à l’article 20 de l’annexe VIII du statut, est conforme au principe de non-discrimination fondée sur l’âge tel que consacré à
l’article 21, paragraphe 1, de la Charte et rappelé à l’article 1er quinquies du statut.

177 Dès lors, il y a lieu de rejeter la seconde branche de l’unique moyen, tirée d’une illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut au regard du principe de non-discrimination fondée sur l’âge.

178 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de rejeter l’unique moyen tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut et, partant, le recours de BT dans l’affaire T‑315/19.

Sur le recours dans l’affaire T‑442/17 RENV

179 À titre liminaire, il importe de rappeler que la Cour ne doit statuer définitivement sur le recours que dans la limite du litige dont elle reste saisie (arrêt du 23 novembre 2021, Conseil/Hamas, C‑833/19 P, EU:C:2021:950, point 78 et jurisprudence citée).

180 À l’appui de son recours devant le Tribunal dans l’affaire T‑442/17 RENV, RN a invoqué trois moyens. Les premier et troisième moyens ayant été rejetés par le Tribunal dans le troisième arrêt attaqué et RN n’ayant pas contesté, dans le cadre d’un pourvoi incident, le bien-fondé des parties de cet arrêt consacrées à ces deux moyens, l’annulation dudit arrêt, prononcée par la Cour, ne remet pas en cause ce dernier en tant que le Tribunal a rejeté lesdits moyens. En effet, RN aurait pu introduire un
pourvoi incident remettant en cause le rejet, par le Tribunal, des premier et troisième moyens avancés en première instance, puisque l’article 178, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour dispose que les conclusions du pourvoi incident tendent à l’annulation, totale ou partielle, de la décision du Tribunal, sans limiter la portée de ces conclusions à la décision du Tribunal telle qu’elle figure au dispositif de cette décision, à la différence de l’article 169, paragraphe 1, de ce
règlement, relatif aux conclusions du pourvoi. En l’absence d’un tel pourvoi incident, le troisième arrêt attaqué est, dès lors, revêtu de l’autorité de la chose jugée en ce qui concerne le rejet des premier et troisième moyens (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 2021, Conseil/Hamas, C‑833/19 P, EU:C:2021:950, points 81 et 82 ainsi que jurisprudence citée).

181 Il s’ensuit que la Cour doit seulement statuer, dans le cadre du recours dans l’affaire T‑442/17 RENV, sur le deuxième moyen invoqué par RN devant le Tribunal. À cet égard, il convient de relever que la Commission a contesté, devant le Tribunal, la recevabilité de ce moyen. Il y a cependant lieu de rejeter cette exception d’irrecevabilité, pour les mêmes motifs que ceux avancés par le Tribunal aux points 62 et 63 du troisième arrêt attaqué, lesquels n’ont en outre pas été contestés par la
Commission dans son pourvoi.

182 Sous le bénéfice de ces considérations liminaires, il convient de relever que, par son second moyen, RN fait valoir que l’article 20 de l’annexe VIII du statut, lu en combinaison avec l’article 18 de cette annexe, est illégal en ce qu’il viole les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination fondée sur l’âge consacrés respectivement aux articles 20 et 21, paragraphe 1, de la Charte et rappelés à l’article 1er quinquies du statut ainsi que le principe de proportionnalité.

183 La Commission, soutenue par le Parlement, conteste cette argumentation.

184 À cet égard, il convient de renvoyer aux points 171 à 176 du présent arrêt et de rejeter, par identité de motifs, le second moyen et, partant, le recours de RN dans l’affaire T‑442/17 RENV.

Sur les dépens

185 Conformément à l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

186 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute personne qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

187 VW ayant succombé en ses moyens après accueil des pourvois et la Commission ainsi que le Conseil ayant respectivement conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par ces deux institutions tant en première instance dans l’affaire T‑243/18 que dans les présents pourvois dans les affaires C‑116/21 P et C‑139/21 P.

188 BT ayant succombé en ses moyens après accueil des pourvois et la Commission ainsi que le Conseil ayant respectivement conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par ces deux institutions tant en première instance dans l’affaire T‑315/19 que dans les présents pourvois dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P.

189 RN ayant succombé en ses moyens après accueil du pourvoi et la Commission ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission tant en première instance dans les affaires F‑104/15 et T‑442/17 RENV que dans les présents pourvois dans l’affaire C‑118/21 P. En revanche, la Commission n’ayant pas conclu à la condamnation de RN aux dépens dans l’affaire T‑695/16 P, il y a lieu de condamner chacune de ces parties à
supporter leurs propres dépens dans cette affaire.

190 L’article 184, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour prévoit que, lorsqu’elle n’a pas, elle-même, formé le pourvoi, une partie intervenante en première instance ne peut être condamnée aux dépens dans la procédure de pourvoi que si elle a participé à la phase écrite ou orale de la procédure devant la Cour. Lorsqu’une telle partie participe à la procédure, la Cour peut décider qu’elle supportera ses propres dépens.

191 Conformément à ces dispositions, le Parlement et l’AIACE Internationale, parties intervenantes en première instance, qui ont participé à la procédure devant la Cour, supporteront leurs propres dépens dans l’ensemble des affaires dans lesquelles ils sont respectivement intervenus en première instance et dans les pourvois, y compris, en ce qui concerne le Parlement, dans les affaires F‑104/15 et T‑695/16 P.

  Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête :

1) Les arrêts du Tribunal de l’Union européenne du 16 décembre 2020, VW/Commission (T‑243/18, non publié, EU:T:2020:619), du 16 décembre 2020, BT/Commission (T‑315/19, non publié, EU:T:2020:622), et du 16 décembre 2020, RN/Commission (T‑442/17 RENV, EU:T:2020:618), sont annulés.

2) Les recours de VW dans l’affaire T‑243/18, de BT dans l’affaire T‑315/19 et de RN dans l’affaire T‑442/17 RENV sont rejetés.

3) VW est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne tant dans l’affaire T‑243/18 que dans les affaires C‑116/21 P et C‑139/21 P.

  4) BT est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne tant dans l’affaire T‑315/19 que dans les affaires C‑117/21 P et C‑138/21 P.

5) RN est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne tant dans les affaires F‑104/15 et T‑442/17 RENV que dans l’affaire C‑118/21 P.

6) La Commission européenne et RN sont condamnées à supporter leurs propres dépens dans l’affaire T‑695/16 P.

7) Le Parlement européen et l’Association internationale des anciens de l’Union européenne (AIACE Internationale) sont condamnés à supporter leurs propres dépens dans l’ensemble des affaires dans lesquelles ils sont respectivement intervenus en première instance et dans les pourvois, y compris, en ce qui concerne le Parlement européen, dans les affaires F‑104/15 et T‑695/16 P.

Jürimäe

Jääskinen

Safjan

Piçarra

Gavalec
 
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2022.

Le greffier

A. Calot Escobar

La présidente de la IIIème chambre

K. Jürimäe

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( *1 ) Langue de procédure : le français.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : C-116/21
Date de la décision : 14/07/2022
Type d'affaire : Pourvoi - fondé
Type de recours : Recours de fonctionnaires

Analyses

Pourvoi – Fonction publique – Pension – Statut des fonctionnaires de l’Union européenne – Article 20 de l’annexe VIII – Octroi d’une pension de survie – Conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une pension d’ancienneté – Mariage conclu postérieurement à la cessation de service de ce fonctionnaire – Condition de durée minimale du mariage de cinq ans à la date du décès du fonctionnaire – Article 18 de l’annexe VIII – Mariage conclu antérieurement à la cessation de service du fonctionnaire – Condition de durée minimale du mariage d’un an seulement – Exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 20 – Principe d’égalité de traitement – Article 21, paragraphe 1 – Principe de non-discrimination fondée sur l’âge – Article 52, paragraphe 1 – Absence d’une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif poursuivi par le législateur de l’Union.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Commission européenne et Conseil de l'Union européenne
Défendeurs : VW e.a.

Composition du Tribunal
Avocat général : Rantos
Rapporteur ?: Safjan

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2022:557

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