ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
7 avril 2022 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Politique agricole commune – Régimes de soutien direct – Règles communes – Régime de paiement unique à la surface – Règlement (CE) no 73/2009 – Article 2, sous c) – Notion d’“activité agricole” – Article 35 – Règlement (CE) no 1122/2009 – Réglementation nationale imposant la production d’un titre juridique établissant le droit d’utiliser la parcelle agricole mise à la disposition de l’agriculteur dans le cadre d’un contrat de concession et subordonnant la
validité d’un tel contrat à la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux du futur concessionnaire – Concessionnaire d’une pâture ayant conclu un contrat de collaboration avec des éleveurs d’animaux – Autorité de la chose jugée »
Dans l’affaire C‑116/20,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Curtea de Apel Timişoara (cour d’appel de Timişoara, Roumanie), par décision du 6 février 2020, parvenue à la Cour le 28 février 2020, dans la procédure
SC Avio Lucos SRL
contre
Agenţia de Plăţi şi Intervenţie pentru Agricultură – Centrul judeţean Dolj,
Agenţia de Plăţi şi Intervenţie pentru Agricultură (APIA) – Aparat Central,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. A. Arabadjiev, président de la première chambre, faisant fonction de président de la deuxième chambre, Mme I. Ziemele (rapporteure), MM. T. von Danwitz, P. G. Xuereb et A. Kumin, juges,
avocat général : M. A. Rantos,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour SC Avio Lucos SRL, par Me M. Gornoviceanu, avocate,
– pour l’Agenţia de Plăţi şi Intervenţie pentru Agricultură – Centrul judeţean Dolj, par M. N.S. Răducan, en qualité d’agent,
– pour le gouvernement roumain, par Mmes E. Gane et A. Rotăreanu, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement allemand, par M. J. Möller et Mme S. Heimerl, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement français, par Mmes A.-L. Desjonquères et C. Mosser ainsi que M. W. Zemamta, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mmes L. Vignato et R. Guizzi, avvocati dello Stato,
– pour la Commission européenne, par MM. A. Sauka et A. Biolan, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 2 septembre 2021,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte, premièrement, sur l’interprétation du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003 (JO 2009, L 30, p. 16),
tel que modifié par le règlement (UE) no 1310/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013 (JO 2013, L 347, p 865) (ci-après le « règlement no 73/2009 »), deuxièmement, sur l’interprétation du règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement no 73/2009 en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des
agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole (JO 2009, L 316, p. 65) ainsi que, troisièmement, sur le principe de l’autorité de la chose jugée.
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant SC Avio Lucos SRL à l’Agenția de Plăți și Intervenție pentru Agricultură – Centrul județean Dolj (agence de paiement et d’intervention pour l’agriculture – centre départemental de Dolj, Roumanie) et à l’Agenția de Plăți și Intervenție pentru Agricultură (APIA) – Aparat Central (agence de paiement et d’intervention pour l’agriculture – Centrale, Roumanie) (ci-après, ensemble, l’« APIA ») au sujet de la demande de remboursement du
soutien financier que l’APIA avait accordé à Avio Lucos au titre du régime de paiement unique à la surface pour l’année 2014.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
Le règlement (CE) no 1254/1999
3 L’article 12 du règlement (CE) no 1254/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine (JO 1999, L 160, p. 21), disposait, à son paragraphe 2 :
« Pour la détermination du facteur de densité sur l’exploitation, il est tenu compte :
[...]
b) de la superficie fourragère, au sens de la superficie de l’exploitation disponible pendant toute l’année civile pour l’élevage de bovins et d’ovins et/ou de caprins. [...]
[...] »
4 Cet article 12 a été supprimé par le règlement (CE) no 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) no 2019/93, (CE) no 1452/2001, (CE) no 1453/2001, (CE) no 1454/2001, (CE) no 1868/94, (CE) no 1251/1999, no 1254/1999, (CE) no 1673/2000, (CEE) no 2358/71 et (CE) no 2529/2001 (JO 2003,
L 270, p. 1), avant que le règlement no 1254/1999 ne soit lui-même abrogé par le règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil, du 22 octobre 2007, portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur (règlement OCM unique) (JO 2007, L 299, p. 1).
Le règlement no 1782/2003
5 L’article 44 du règlement no 1782/2003, intitulé « Utilisation des droits au paiement », prévoyait, à ses paragraphes 2 et 3 :
« 2. Par “hectare admissible au bénéfice de l’aide”, on entend toute superficie agricole de l’exploitation occupée par des terres arables et des pâturages permanents, à l’exclusion des superficies occupées par des cultures permanentes et des forêts ou affectées à une activité non agricole.
3. L’agriculteur déclare les parcelles correspondant à la superficie admissible liée à un droit au paiement. Sauf en cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles, ces parcelles sont à la disposition de l’agriculteur [...] »
6 Le règlement no 1782/2003 a été abrogé par le règlement no 73/2009.
Le règlement no 73/2009
7 Les considérants 4, 7, 23 et 25 du règlement no 73/2009 énonçaient :
« (4) En outre, pour éviter l’abandon des terres agricoles et assurer leur maintien dans de bonnes conditions agricoles et environnementales, le [règlement no 1782/2003] a défini un cadre communautaire dans lequel les États membres adoptent des normes qui prennent en compte les caractéristiques des zones concernées, y compris les conditions pédologiques et climatiques ainsi que les modes d’exploitation existants, l’utilisation des terres, la rotation des cultures, les pratiques agricoles et la
structure des exploitations. Il convient de conserver ce cadre. [...]
[...]
(7) Le [règlement no 1782/2003] reconnaît l’effet positif sur l’environnement des pâturages permanents. Il y a lieu de conserver les mesures dudit règlement destinées à encourager le maintien des pâturages permanents existants, afin de prévenir leur transformation généralisée en terres arables.
[...]
(23) L’expérience acquise lors de l’application du régime de paiement unique montre que, dans certains cas, une aide découplée au revenu est octroyée à des bénéficiaires dont les activités agricoles ne constituent qu’une part négligeable de l’ensemble de leurs activités économiques ou dont l’objectif commercial n’est pas ou guère lié à l’exercice d’une activité agricole. Pour éviter qu’une aide au revenu soit attribuée à ces bénéficiaires, et pour veiller à ce que le soutien de la Communauté soit
entièrement utilisé pour garantir un niveau de vie équitable à la population agricole, il convient, en pareils cas, d’autoriser les États membres à ne pas octroyer à ces personnes physiques ou morales de paiements directs au titre du présent règlement.
[...]
(25) Les régimes de soutien relevant de la [politique agricole commune (PAC)] fournissent une aide directe au revenu, notamment en vue d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole. Cet objectif est étroitement lié à la conservation des zones rurales. Dans le but d’éviter une mauvaise affectation des ressources communautaires, il convient de n’effectuer aucun paiement de soutien en faveur d’agriculteurs qui ont créé artificiellement les conditions requises pour bénéficier de tels
paiements. »
8 L’article 2 de ce règlement, intitulé « définitions », disposait :
« Aux fins du présent règlement, on entend par :
[...]
b) “exploitation”, l’ensemble des unités de production gérées par un agriculteur et situées sur le territoire d’un même État membre ;
c) “activité agricole”, la production, l’élevage ou la culture de produits agricoles, y compris la récolte, la traite, l’élevage et la détention d’animaux à des fins agricoles, ou le maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales au sens de l’article 6 ;
[...]
h) “surface agricole”, l’ensemble de la superficie des terres arables, des pâturages permanents ou des cultures permanentes. »
9 L’article 6 dudit règlement, intitulé « Bonnes conditions agricoles et environnementales », prévoyait, à son paragraphe 1, premier alinéa :
« Les États membres veillent à ce que toutes les terres agricoles, en particulier celles qui ne sont plus exploitées à des fins de production, soient maintenues dans de bonnes conditions agricoles et environnementales. Les États membres définissent, au niveau national ou régional, des exigences minimales pour les bonnes conditions agricoles et environnementales sur la base du cadre fixé à l’annexe III, en tenant compte des caractéristiques des zones concernées, y compris des conditions
pédologiques et climatiques, des modes d’exploitation existants, de l’utilisation des terres, de la rotation des cultures, des pratiques agricoles et de la structure des exploitations. Les États membres ne peuvent pas définir des exigences minimales qui ne sont pas prévues dans ce cadre. »
10 L’article 19 du même règlement, intitulé « Demandes d’aide », énonçait, à son paragraphe 1 :
« Chaque année, l’agriculteur introduit une demande pour les paiements directs, indiquant, le cas échéant :
a) toutes les parcelles agricoles de l’exploitation [...] ;
b) les droits au paiement déclarés en vue de leur activation ;
c) toute autre information prévue par le présent règlement ou par l’État membre concerné. »
11 Aux termes de l’article 34 du règlement no 73/2009, intitulé « Activation des droits au paiement par hectare admissible » :
« 1. L’aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par hectare admissible. Les droits au paiement activés donnent droit au paiement des montants qu’ils fixent.
2. Aux fins du présent règlement, on entend par “hectare admissible” :
a) toute surface agricole de l’exploitation et les surfaces plantées de taillis à courte rotation (code NC ex06029041) utilisées aux fins d’une activité agricole [...]
[...]
Sauf en cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles, les hectares admissibles remplissent les conditions d’admissibilité tout au long de l’année civile. »
12 L’article 35 de ce règlement, intitulé « Déclaration des hectares admissibles », prévoyait, à son paragraphe 1 :
« L’agriculteur déclare les parcelles correspondant à la superficie admissible liée à un droit au paiement. Sauf en cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles, ces parcelles sont à la disposition de l’agriculteur à une date fixée par l’État membre, laquelle n’est pas postérieure à celle fixée dans cet État membre pour la modification de la demande d’aide. »
13 L’article 124 dudit règlement, intitulé « Surface agricole aux fins du régime de paiement unique à la surface », disposait, à son paragraphe 2 :
« Aux fins de l’octroi des paiements au titre du régime de paiement unique à la surface, sont admissibles toutes les parcelles agricoles répondant aux critères prévus au paragraphe 1 [...]
Sauf en cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles, les parcelles visées au premier alinéa sont à la disposition de l’agriculteur à la date fixée par l’État membre, laquelle n’est pas postérieure à celle fixée dans cet État membre pour la modification de la demande d’aide.
La surface minimale admissible par exploitation pour laquelle des paiements peuvent être demandés est de 0,3 ha. Toutefois, tout nouvel État membre peut décider, sur la base de critères objectifs et après accord de la Commission, de relever le seuil minimal, mais celui-ci ne doit pas dépasser 1 ha. »
14 L’annexe III du même règlement, intitulée « Bonnes conditions agricoles et environnementales visées à l’article 6 », mentionnait, s’agissant du niveau minimal d’entretien, notamment la norme facultative suivante : « Densité minimale du bétail et/ou régimes appropriés ».
15 Le règlement no 73/2009 a été abrogé par le règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) no 637/2008 du Conseil et le règlement no 73/2009 (JO 2013, L 347, p. 608).
Le règlement no 1122/2009
16 Les considérants 8 et 28 du règlement no 1122/2009 énonçaient :
« (8) Afin d’assurer la bonne mise en œuvre du régime de paiement unique prévu au titre III du [règlement no 73/2009], il importe que les États membres établissent un système d’identification et d’enregistrement garantissant la traçabilité des droits au paiement [...]
[...]
(28) Il est indispensable que les délais d’introduction des demandes d’aide et de modification des demandes d’aide “surfaces” et de tout document justificatif, contrat ou déclaration soient respectés pour permettre aux administrations nationales de programmer et, par la suite, de réaliser des contrôles efficaces concernant l’exactitude des demandes d’aide. [...] »
17 L’article 12 de ce règlement, intitulé « Contenu de la demande unique », disposait, à son paragraphe 1 :
« La demande unique contient toutes les informations nécessaires pour décider de l’admissibilité à l’aide, en particulier :
[...]
d) les éléments permettant l’identification de toutes les parcelles agricoles de l’exploitation, leur superficie exprimée en hectares avec deux décimales, leur localisation et, le cas échéant, leur utilisation [...] »
18 Le règlement no 1122/2009 a été abrogé par le règlement délégué (UE) no 640/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les conditions relatives au refus ou au retrait des paiements et les sanctions administratives applicables aux paiements directs, le soutien au développement rural et la conditionnalité (JO 2014, L 181, p. 48).
Le droit roumain
La loi sur l’élevage no 72/2002
19 L’article 4 de la legea zootehniei nr. 72/2002 (loi sur l’élevage no 72/2002 republiée, Monitorul Oficial al României, partie I, no 235 du 2 avril 2014) disposait :
« Au sens de la présente loi, on entend par éleveur d’animaux les personnes physiques ou morales qui détiennent en propriété les espèces d’animaux prévues à l’article 2, inscrites au registre agricole. »
20 L’article 5, paragraphe 1, de cette loi prévoyait :
« L’élevage et l’exploitation d’animaux est l’activité des éleveurs d’animaux, quel que soit leur statut juridique, en vue d’obtenir des produits et des produits animaliers. »
L’OUG no 125/2006
21 L’article 7, paragraphe 1, sous f), de l’Ordonanța de urgență a Guvernului nr. 125/2006 pentru aprobarea schemelor de plăți directe și plăți naționale directe complementare, care se acordă în agricultură începând cu anul 2007, și pentru modificarea articolului 2 din Legea nr. 36/1991 privind societățile agricole și alte forme de asociere în agricultură (ordonnance d’urgence du gouvernement no 125/2006 portant approbation des régimes de paiements directs et des paiements directs nationaux
complémentaires, accordés dans le domaine de l’agriculture à partir de l’année 2007, et modifiant l’article 2 de la loi no 36/1991 relative aux sociétés agricoles et à d’autres formes d’association dans l’agriculture), du 21 décembre 2006 (Monitorul Oficial al României, partie I, no 1043 du 29 décembre 2006), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après l’« OUG no 125/2006 »), disposait :
« Pour bénéficier des paiements au titre du régime de paiement unique à la surface, les demandeurs doivent être inscrits au registre des agriculteurs administré par l’Agenția de Plăți și Intervenție pentru Agricultură [(agence de paiement et d’intervention pour l’agriculture, Roumanie)], présenter leur demande de paiement dans les délais et respecter les conditions générales suivantes :
[...]
f) présenter les documents prouvant l’utilisation légale de la terre pour laquelle la demande a été déposée ;
[...] »
Le règlement du ministre de l’Agriculture et du Développement rural no 246/2008
22 L’article 5, paragraphe 1, de l’Ordinul ministrului agriculturii si dezvoltării rurale nr. 246/2008 privind stabilirea modului de implementare, a condițiilor specifice și a criteriilor de eligibilitate pentru aplicarea schemelor de plăți directe și plăți naționale directe complementare în sectorul vegetal, pentru acordarea sprijinului aferent măsurilor de agromediu și zone defavorizate (règlement du ministre de l’Agriculture et du Développement rural no 246/2008 concernant l’établissement du mode
de mise en œuvre, des conditions spécifiques et des critères d’éligibilité pour l’application des régimes de paiement nationaux directs complémentaires dans le secteur végétal, pour l’octroi de l’aide afférente aux mesures agro-environnementales et des zones défavorisées), du 23 avril 2008 (Monitorul Oficial al României, partie I, no 332 du 25 avril 2008), dans sa version applicable au litige au principal, se lisait comme suit :
« Les documents faisant preuve de l’utilisation légale des pâtures permanentes communales, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous f), de l’[OUG no 125/2006] sont les actes attestant du droit de propriété, les contrats de concession ou de location conclus entre les conseils locaux et les éleveurs d’animaux, desquels ressort la terre utilisée et l’attestation délivrée par la mairie conformément aux données figurant au registre agricole. Tout contrat conclu avant l’entrée en vigueur du
présent règlement, ayant pour objet l’utilisation des pâtures communales, continuent à produire leurs effets jusqu’à la date de cessation du droit. »
L’ordonnance d’urgence du gouvernement no 34/2013
23 L’article 2 de l’Ordonanța de urgență a Guvernului nr. 34/2013 privind organizarea, administrarea și exploatarea pajiștilor permanente și pentru modificarea și completarea Legii fondului funciar nr. 18/1991, du 23 avril 2013 (ordonnance d’urgence du gouvernement no 34/2013 concernant l’administration et l’exploitation des prés permanents et modifiant et complétant la loi sur le fonds foncier no 18/1991, Monitorul Oficial al României, partie I, no 267 du 13 mai 2013), dans sa version applicable au
litige au principal, disposait :
« Au sens de la présente ordonnance d’urgence, on entend par les termes et expressions ci-dessous :
[...]
b) pâtures et prés de fauche – terres agricoles inscrites dans les actes de propriété sous cette catégorie d’utilisation destinés à produire du fourrage, de l’herbe et d’autres plantes herbacées pour les animaux, récoltées par fauchage ou valorisées par pâturage ;
c) unité de gros bétail (UGB) – unité de mesure standard fixée sur la base des besoins nutritionnels de chaque type d’animaux qui permet de faire la conversion entre différentes catégories d’animaux ;
d) utilisateur de pâtures et de prés de fauche – éleveur d’animaux, personne physique/morale inscrite au registre national des exploitations qui exerce des activités agricoles spécifiques à la catégorie d’utilisation des pâtures et des prés de fauche, conformément à la classification statistique des activités économiques dans l’Union européenne pour la production végétale et animale, qui détient légalement le droit d’utilisation sur la terre agricole et qui valorise la pâture moyennant le
pâturage effectif par des animaux dont il est propriétaire ou par fauchage au moins une fois par an ;
e) registre national des exploitations (RNE) – banque de données sous format électronique qui comprend les informations d’identification de chaque exploitation de la Roumanie [...] ;
f) détenteurs de prés – titulaires du droit de propriété, d’autres droits réels sur celles-ci ou personnes ayant, en vertu des lois civiles, la qualité de possesseurs ou détenteurs précaires des prés ».
Le règlement du ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Forêts et du ministre de l’Administration publique no 226/235/2003
24 L’Ordinul ministrului agriculturii, alimentaţiei şi pădurilor şi al ministrului administraţiei publice nr. 226/235/2003 pentru aprobarea Strategiei privind organizarea activității de imbunatatire și exploatare a pajiștilor la nivel național, pe termen mediu și lung (règlement du ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Forêts et du ministre de l’Administration publique no 226/235/2003 portant approbation de la stratégie concernant l’organisation des activités d’amélioration et
d’exploitation des prés au niveau national, à moyen et long terme) (Monitorul Oficial al României, partie I, no 423 du 17 juin 2003), dans sa version applicable au litige au principal, comprenait une annexe I, dont le chapitre VI, point 1, était libellé comme suit :
« Les responsabilités des utilisateurs de prés
a) Afin d’utiliser les prés administrés par les conseils communaux, les villes ou les municipalités :
les associations d’éleveurs d’animaux constituées, les éleveurs d’animaux personnes physiques et morales déposent une demande auprès du conseil local, [...]
b) Les utilisateurs de prés qui concluent des contrats de concession remplissent au minimum les conditions suivantes :
– être enregistrés au [RNE] ;
– garantir une charge minimale de 0,3 UGB/ha pour le terrain sollicité ;
– présenter un programme de pâturage conforme aux dispositions du chapitre IV, point 8, pour la période de reprise de l’utilisation du pré demandé. »
Le code de procédure civile
25 L’article 431 du Codul de procedură civilă (code de procédure civile) dispose, à son paragraphe 2 :
« Les parties peuvent opposer la chose jugée antérieurement dans un autre litige dès lors qu’il y a un lien avec la solution de ce dernier. »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
26 Avio Lucos a déposé auprès de l’APIA une demande de soutien financier au titre du régime de paiement unique à la surface pour l’année 2014, portant sur une surface de 341,70 ha de pâturage. Pour prouver son droit d’utilisation du terrain, cette société a produit un contrat de concession, conclu le 28 janvier 2013 avec le Consiliul Local al Comunei Podari (conseil local de la commune de Podari, Roumanie), relatif à une pâture située dans cette commune. Aux termes de ce contrat, en tant que
concessionnaire, Avio Lucos avait le droit d’exploiter directement les biens donnés en concession et ce, à ses risques et périls. Par ailleurs, elle était tenue d’exploiter le terrain donné en concession par pâturage et il lui était interdit de louer ce bien ou de le donner en sous-concession.
27 Avio Lucos a ensuite conclu, le 30 janvier 2013, un contrat de collaboration participative avec quatre personnes physiques. En vertu de ce contrat, Avio Lucos devait mettre la pâture communale prise en concession à la disposition de ces personnes physiques et réaliser annuellement, à ses frais, les travaux d’entretien requis, lesdites personnes physiques s’engageant, en retour, à mettre leurs animaux, à savoir, notamment, des moutons, des chèvres, des vaches et des chevaux, à la disposition
d’Avio Lucos, de telle sorte que le pâturage du bien pris en concession soit effectué de manière continue et permanente.
28 Après le dépôt d’une demande en ce sens, l’APIA a accordé à Avio Lucos une avance de paiement au titre des régimes d’aide à la surface – campagne 2014, pour un montant total de 529340,24 lei roumains (RON) (environ 107000 euros).
29 Toutefois, à la suite d’un réexamen de cette demande, l’APIA a constaté que, à la date de conclusion du contrat de concession, Avio Lucos n’avait pas le droit de prendre en concession des pâtures relevant du domaine public ou privé des communes, au motif qu’elle n’avait pas la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux, en méconnaissance du droit national applicable.
30 Eu égard à cette constatation, l’APIA a, d’une part, adopté une décision infligeant, conformément à l’article 58, troisième alinéa, du règlement no 1122/2009, des sanctions pluriannuelles à Avio Lucos, pour un montant total de 555729,59 RON (environ 112000 euros). Cette décision a fait l’objet de plusieurs recours administratifs et judiciaires, qui ont été rejetés.
31 D’autre part, l’APIA a établi, à charge d’Avio Lucos, une créance budgétaire d’un montant total de 529340,24 RON (environ 107000 euros), correspondant au montant qui lui avait déjà été versé au titre du régime de paiement unique à la surface pour l’année 2014.
32 Avio Lucos a contesté cette décision devant le Tribunalul Dolj (tribunal de grande instance de Dolj, Roumanie), qui a rejeté son recours. Avio Lucos a formé un pourvoi contre ce jugement devant la Curtea de Apel Craiova (cour d’appel de Craiova, Roumanie), laquelle a réformé celui-ci et a renvoyé l’affaire devant le Tribunalul Dolj (tribunal de grande instance de Dolj). Par jugement du 25 février 2018, cette juridiction a rejeté le recours. Avio Lucos a formé un pourvoi contre ce jugement,
l’affaire étant désormais pendante devant la Curtea de Apel Timişoara (cour d’appel de Timişoara, Roumanie), la juridiction de renvoi.
33 La juridiction de renvoi souligne que la question de savoir si le droit de l’Union s’oppose à une réglementation nationale qui impose de prouver le droit d’utilisation ou d’exploitation d’une surface de terrain ou encore d’être un éleveur ou un propriétaire d’animaux afin d’obtenir la concession de pâtures, en vue d’obtenir un soutien financier afférent aux régimes de paiement à la surface, n’est pas dénuée d’incertitude. En outre, se poserait la question de savoir si l’activité exercée
concrètement par Avio Lucos relève de l’article 2 du règlement no 73/2009. Enfin, la juridiction de renvoi, qui fait état de l’existence de deux décisions juridictionnelles définitives ayant constaté l’inéligibilité de demandes de paiement au titre du régime de paiement unique à la surface pour l’année 2014 au regard du non-respect du droit national en ce qui concerne l’exigence relative à la légalité du titre d’exploitation ou d’utilisation de la terre, se demande si le droit de l’Union s’oppose
à une application du principe de l’autorité de la chose jugée qui empêche le juge national compétent d’examiner la conformité au droit de l’Union d’exigences imposées par le droit national dans le cadre d’un nouveau litige portant sur la légalité de la créance sur la base de laquelle les sommes payées indûment à Avio Lucos sont récupérées.
34 Dans ces conditions, la Curtea de Apel Timişoara (cour d’appel de Timişoara) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Le droit [de l’Union] applicable au soutien financier afférent à l’année agricole 2014 – en particulier le règlement no 73/2009 et le règlement no 1122/2009 – s’oppose-t-il à l’institution, par le droit national, d’une obligation de prouver le droit d’utilisation sur une surface agricole, en vue d’obtenir le soutien financier afférent aux régimes de paiement à la surface ?
2) Dans la mesure où le droit [de l’Union] susmentionné ne s’oppose pas à la réglementation nationale visée dans la première question, le droit [de l’Union] (y compris le principe de proportionnalité) s’oppose-t-il – dans le cas particulier dans lequel le droit d’exploiter une surface agricole a été justifié par le bénéficiaire par la présentation d’un contrat de concession d’une pâture (contrat sur la base duquel le demandeur a obtenu le droit d’exploiter la pâture à ses propres risques et à son
profit, en échange d’une redevance) – à une réglementation nationale qui impose, pour conclure valablement un tel contrat de concession, la condition selon laquelle le futur concessionnaire doit obligatoirement être un éleveur ou un propriétaire d’animaux ?
3) L’activité d’un bénéficiaire d’un régime de paiement à la surface qui – ayant conclu un contrat de concession d’une pâture en vue d’obtenir le droit d’exploiter cette terre et d’obtenir le droit au paiement au titre de l’année 2014 – conclut ultérieurement un contrat de collaboration avec des éleveurs d’animaux, contrat en vertu duquel il leur permet de laisser paître gratuitement les animaux sur la terre donnée en concession, le bénéficiaire conservant le droit d’utilisation de la terre, mais
s’obligeant à ne pas limiter l’activité de pâturage et à réaliser des travaux d’entretien de la pâture, relève-t-elle de l’activité agricole visée à l’article 2 du règlement no 73/2009 ?
4) Le droit de l’Union s’oppose-t-il à une interprétation d’une réglementation nationale telle que l’article 431, paragraphe 2, du code de procédure civile – concernant l’autorité de la chose jugée d’une décision juridictionnelle définitive par laquelle il est constaté qu’une demande de paiement est inéligible car elle ne respecte pas le droit national en ce qui concerne l’exigence relative à la légalité du titre d’exploitation/utilisation de la terre pour laquelle un soutien financier est
sollicité pour l’année agricole 2014 au titre du régime de paiement unique à la surface (dans un litige dans lequel l’annulation de la décision d’application de sanctions pluriannuelles a été demandée) – qui empêche d’analyser la conformité de ces exigences nationales au droit [de l’Union] applicable au cours de cette année 2014 dans le cadre d’un nouveau litige portant sur la légalité de l’acte de récupération des sommes payées indûment au demandeur, au titre de cette même année 2014, ledit
acte étant fondé sur les mêmes faits et la même réglementation nationale qui ont été analysés dans la décision juridictionnelle définitive précédente ? »
Sur les questions préjudicielles
Sur la recevabilité
35 Dans ses observations écrites, le gouvernement roumain soutient que la demande de décision préjudicielle est irrecevable dans son ensemble, dès lors que la juridiction de renvoi disposerait des informations lui permettant de trancher le litige dont elle est saisie. En particulier, selon ce gouvernement, la juridiction de renvoi aurait dû analyser en priorité les règles relatives à la « vérité de la chose jugée », visées à l’article 431, paragraphe 2, du code de procédure civile, et rejeter le
recours d’Avio Lucos. À cet égard, ce gouvernement ajoute que, dans la mesure où cette disposition est applicable au litige au principal, les trois premières questions sont sans objet.
36 Pour sa part, Avio Lucos fait valoir que les première et deuxième questions ne sont pas pertinentes pour résoudre le litige au principal, celles-ci ayant trait non pas à l’éligibilité du demandeur au bénéfice du paiement unique à la surface, mais à la question de la validité du contrat de concession en cause au principal.
37 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de
l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 55 et jurisprudence citée).
38 Il s’ensuit que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit
nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 55 et jurisprudence citée).
39 En l’occurrence, d’une part, la considération selon laquelle l’article 431, paragraphe 2, du code de procédure civile devrait mener la juridiction de renvoi à rejeter le recours pendant devant elle ne permet pas d’établir que l’interprétation des règles de droit de l’Union dont l’interprétation est demandée par cette juridiction serait manifestement dénuée de tout rapport avec le litige au principal. En effet, dans le cadre de la procédure prévue à l’article 267 TFUE, les fonctions de la Cour et
celles de la juridiction de renvoi sont clairement distinctes et c’est à cette dernière exclusivement qu’il appartient d’interpréter la législation nationale (arrêt du 15 janvier 2013, Križan e.a., C‑416/10, EU:C:2013:8, point 58 ainsi que jurisprudence citée).
40 D’autre part, pour ce qui est de l’absence de pertinence alléguée des première et deuxième questions, il y a lieu de rappeler que l’article 267 TFUE permet toujours à une juridiction nationale, si elle le juge opportun, de déférer à la Cour des questions d’interprétation du droit de l’Union (arrêt du 15 janvier 2013, Križan e.a., C‑416/10, EU:C:2013:8, point 56 ainsi que jurisprudence citée). Or, ainsi qu’il ressort du point 33 du présent arrêt, cette juridiction considère que la question de
savoir si le droit de l’Union s’oppose à une réglementation nationale qui impose de prouver le droit d’utilisation ou d’exploitation d’une surface de terrain ou encore d’avoir la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux pour pouvoir prétendre à une concession sur des pâtures et obtenir, le cas échéant, un soutien financier au titre d’un régime de paiement à la surface est nécessaire pour trancher le litige dont elle est saisie.
41 Il s’ensuit que les questions posées par la juridiction de renvoi sont recevables.
Sur la première question
42 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les règlements nos 73/2009 et 1122/2009 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui conditionne l’obtention d’une aide au titre du régime de paiement unique à la surface à l’obligation pour le demandeur de prouver qu’il détient un « droit d’utilisation » de la surface agricole faisant l’objet de cette demande.
43 Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 34, paragraphe 1, du règlement no 73/2009, l’aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par hectare admissible.
44 Conformément à l’article 35, paragraphe 1, de ce règlement, il incombe à l’agriculteur de déclarer les parcelles correspondant à la superficie admissible liée à un droit au paiement et, sauf en cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles, ces parcelles doivent être « à la disposition » de l’agriculteur à une date fixée par l’État membre concerné. De même, en vertu de l’article 124, paragraphe 2, dudit règlement, aux fins de l’octroi de paiements au titre du régime de paiement unique
à la surface, sont admissibles toutes les parcelles agricoles répondant aux critères prévus au paragraphe 1 de cet article, lesquelles, sauf en cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles, doivent être « à la disposition » de l’agriculteur à la date fixée par cet État membre.
45 Dès lors que le règlement no 73/2009 ne précise pas à quel titre les surfaces concernées doivent être « à la disposition » de l’agriculteur, il y a lieu, pour l’interprétation de cette disposition, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, de tenir compte non seulement des termes de celle-ci conformément à leur sens habituel dans le langage courant, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir, en ce sens, arrêts du
24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08, EU:C:2010:365, point 58, et du 29 juillet 2019, Pelham e.a., C‑476/17, EU:C:2019:624, point 28 ainsi que jurisprudence citée).
46 En premier lieu, en ce qui concerne le libellé de l’article 35, paragraphe 1, de ce règlement, il y a lieu de relever que, dans le langage courant, le fait pour une surface d’être à la disposition de l’agriculteur implique, en principe, que celui-ci est en mesure de l’utiliser à sa convenance afin de lui permettre, dans les faits, d’y exercer une activité agricole.
47 S’agissant, en deuxième lieu, du contexte dans lequel s’inscrit cette disposition, il ressort du point 43 du présent arrêt que l’aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par « hectare admissible », une telle notion désignant, selon l’article 34, paragraphe 2, du règlement no 73/2009, toute surface agricole de l’exploitation utilisée aux fins d’une activité agricole.
48 Or, ces termes sont eux-mêmes définis par ce règlement. Ainsi, l’article 2, sous b), c) et h), dudit règlement définit la notion d’« exploitation » comme étant « l’ensemble des unités de production gérées par un agriculteur et situées sur le territoire d’un même État membre », celle d’« activité agricole » comme étant « la production, l’élevage ou la culture de produits agricoles [...] ou le maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales » et, enfin, celle de
« surface agricole » comme « l’ensemble de la superficie des terres arables, des pâturages permanents ou des cultures permanentes ».
49 À cet égard, s’agissant de l’exigence, visée à l’article 2, sous b), du règlement no 73/2009, selon laquelle une unité de production doit être « gérée » par un agriculteur, la Cour a déjà jugé que la notion de « gestion » n’implique pas l’existence au profit de l’agriculteur d’un pouvoir de disposition illimité sur la superficie concernée dans le cadre de l’utilisation de celle-ci à des fins agricoles. En revanche, l’agriculteur doit disposer, à l’égard de cette superficie, d’une autonomie
suffisante aux fins de l’exercice de son activité agricole, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier, compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce (voir, en ce sens, arrêts du 14 octobre 2010, Landkreis Bad Dürkheim, C‑61/09, EU:C:2010:606, points 61 et 62, ainsi que du 2 juillet 2015, Demmer, C‑684/13, EU:C:2015:439, point 58).
50 Ainsi, l’agriculteur doit être en mesure d’exercer un certain pouvoir de décision dans le cadre de l’utilisation de la superficie concernée (arrêt du 14 octobre 2010, Landkreis Bad Dürkheim, C‑61/09, EU:C:2010:606, point 63) aux fins de l’exercice par celui-ci, sur cette superficie, de son activité agricole.
51 En troisième lieu, pour ce qui concerne les objectifs poursuivis par la réglementation en cause, le considérant 23 du règlement no 73/2009 énonce que celui-ci a pour objet d’éviter qu’une aide directe soit octroyée à des bénéficiaires dont les activités agricoles ne constituent qu’une part négligeable de l’ensemble de leurs activités économiques ou dont l’objectif commercial n’est pas ou guère lié à l’exercice d’une activité agricole. En outre, il ressort de l’article 39, paragraphe 1, sous b),
TFUE, dont la substance est rappelée au considérant 25 de ce règlement, que les régimes de soutien relevant de la PAC fournissent une aide directe au revenu, qui a pour but d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l’agriculture.
52 Ainsi, il y a lieu de considérer, à l’instar de M. l’avocat général au point 50 de ses conclusions, que l’aide au titre du régime de paiement unique à la surface a pour objectif d’assurer un niveau de vie équitable aux agriculteurs qui exercent réellement une activité agricole et, partant, disposent dans les faits d’une surface agricole sur laquelle cette activité est exercée.
53 Eu égard au libellé de l’article 35, paragraphe 1, du règlement no 73/2009, au contexte dans lequel cette disposition s’inscrit et à l’objectif de la réglementation dont elle fait partie, il y a lieu de considérer que, aux fins de déterminer si une parcelle est « à la disposition » d’un agriculteur, au sens de ladite disposition, ce règlement n’exige pas que cet agriculteur produise un titre juridique formel établissant son « droit d’utilisation » de la surface en cause, la démonstration du
caractère effectif de l’utilisation de cette surface ainsi que d’une autonomie suffisante dudit agriculteur aux fins de l’exercice de son activité agricole sur ladite surface étant suffisante à cet effet.
54 Une telle interprétation est corroborée, d’une part, par la jurisprudence de la Cour relative à la notion de « superficie agricole de l’exploitation », visée à l’article 44, paragraphes 2 et 3, du règlement no 1782/2003. À cet égard, la Cour a en effet jugé que, dès lors que ces dispositions ne précisent pas la nature de la relation juridique sur le fondement de laquelle la superficie concernée est utilisée par l’agriculteur, il ne saurait être déduit desdites dispositions que les parcelles en
question doivent être à la disposition de l’agriculteur en vertu d’un contrat de bail à ferme ou d’une transaction équivalente (arrêt du 14 octobre 2010, Landkreis Bad Dürkheim, C‑61/09, EU:C:2010:606, point 54).
55 D’autre part, elle est confortée par la jurisprudence de la Cour relative à la notion de « superficie de l’exploitation disponible », qui figurait à l’article 12, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1254/1999, la Cour ayant jugé que cette disposition ne conditionne pas l’éligibilité d’une demande d’aide à la présentation d’un titre juridique valable justifiant du droit du demandeur d’utiliser les superficies fourragères objet de cette demande. Au contraire, c’est l’utilisation effective de la
superficie fourragère qui constitue une des conditions d’éligibilité pour l’octroi des primes concernées (voir, en ce sens, arrêt du 24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08, EU:C:2010:365, points 62 et 70).
56 Toutefois, même si l’obligation de prouver le « droit d’utilisation » d’une surface agricole n’est pas imposée par le droit de l’Union, il importe encore d’examiner si celui-ci s’oppose à ce que les États membres prévoient une telle obligation dans leur réglementation nationale.
57 À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de l’article 19, paragraphe 1, du règlement no 73/2009 que, chaque année, l’agriculteur introduit une demande pour les paiements directs, indiquant, le cas échéant, toutes les parcelles agricoles de l’exploitation, les droits au paiement déclarés en vue de leur activation ainsi que toute autre information prévue par ce règlement ou par l’État membre concerné.
58 En outre, l’article 12, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1122/2009, qui fixe les modalités d’application du règlement no 73/2009, notamment en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce dernier règlement, dispose que la demande unique contient toutes les informations nécessaires pour décider de l’admissibilité à l’aide, en particulier les éléments
permettant l’identification de toutes les parcelles agricoles de l’exploitation, leur superficie, leur localisation et, le cas échéant, leur utilisation.
59 Le règlement no 1122/2009 précise encore, à son considérant 8, que, afin d’assurer la bonne mise en œuvre du régime de paiement unique prévu au titre III du règlement no 73/2009, il importe que les États membres établissent un système d’identification et d’enregistrement garantissant la traçabilité des droits au paiement. Ainsi qu’il ressort en substance du considérant 28 du règlement no 1122/2009, la production dans les délais de « tout document justificatif, contrat ou déclaration » doit
permettre aux administrations nationales de programmer et, par la suite, de réaliser des contrôles efficaces concernant l’exactitude des demandes d’aide.
60 Or, s’agissant de tels documents justificatifs, la Cour a déjà eu l’occasion de juger, eu égard à la réglementation de l’Union relative aux régimes d’aide et aux modalités d’application du système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs antérieure à l’adoption du règlement no 1122/2009, que les États membres disposent d’une marge d’appréciation en ce qui concerne les pièces justificatives et les preuves qu’il convient d’exiger d’un
demandeur d’aides quant aux surfaces qui font l’objet de sa demande.
61 La Cour a ainsi considéré que, compte tenu de cette marge d’appréciation, il est loisible aux États membres d’apporter des précisions en ce qui concerne les preuves à fournir à l’appui d’une demande d’aide en se référant, notamment, aux pratiques habituelles sur leur territoire dans le domaine de l’agriculture relatives à la jouissance et à l’utilisation des superficies fourragères ainsi qu’aux titres à produire à l’égard de cette utilisation (arrêt du 24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08,
EU:C:2010:365, point 82).
62 La Cour a également jugé que les États membres jouissent d’une marge d’appréciation lors du choix des mesures nationales qu’ils estiment nécessaires pour prévenir et sanctionner de manière efficace les irrégularités et les fraudes (arrêt du 24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08, EU:C:2010:365, point 76).
63 La Cour a toutefois ajouté que l’exercice par les États membres de leur marge d’appréciation relative aux preuves à fournir à l’appui d’une demande d’aide est soumise à certaines limites, notamment quant à la possibilité d’obliger le demandeur à présenter un titre juridique valable justifiant de son droit d’utiliser les surfaces faisant l’objet de sa demande. Dans ce contexte, la réglementation nationale qui met en œuvre cette marge d’appréciation doit respecter les objectifs poursuivis par le
droit de l’Union en matière de soutien financier direct en faveur des agriculteurs et les principes généraux du droit de l’Union, en particulier le principe de proportionnalité, qui exige que les moyens mis en œuvre par une disposition soient aptes à réaliser l’objectif visé et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre [voir, en ce sens, arrêts du 24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08, EU:C:2010:365, points 86 et 87, ainsi que du 17 décembre 2020, Land Berlin (Droits au
paiement liés à la PAC), C‑216/19, EU:C:2020:1046, point 35].
64 S’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, dans chaque cas d’espèce, si ce principe a été respecté (voir, en ce sens, arrêt du 24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08, EU:C:2010:365, point 89), conformément à une jurisprudence constante de la Cour, celle-ci est compétente pour fournir à la juridiction de renvoi tous les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui peuvent permettre à celle-ci d’apprécier une telle conformité pour le jugement de l’affaire dont elle est saisie
(arrêt du 11 juin 2020, Subdelegación del Gobierno en Guadalajara, C‑448/19, EU:C:2020:467, point 17 et jurisprudence citée).
65 À cet égard, en premier lieu, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 57 de ses conclusions, l’institution d’une obligation, telle que celle visée à l’article 7, paragraphe 1, sous f), de l’OUG no 125/2006, de présenter des documents prouvant l’utilisation légale de la terre faisant l’objet de la demande de paiement, apparaît apte à garantir que les objectifs de la PAC, visés aux points 51 et 52 du présent arrêt, seront réellement poursuivis. En effet, une telle obligation vise
notamment à empêcher qu’un demandeur de soutien au titre du régime de paiement unique puisse profiter abusivement des terrains d’autrui dans le but de contourner la réglementation de l’Union relative à ce régime (voir, par analogie, arrêt du 24 juin 2010, Pontini e.a., C‑375/08, EU:C:2010:365, point 88).
66 En second lieu, s’agissant de la question de savoir si cette réglementation nationale ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ledit objectif, il convient de rappeler que l’examen de la proportionnalité doit se faire en tenant compte, particulièrement, des objectifs de la PAC, ce qui impose une mise en balance entre ces objectifs et celui poursuivi par ladite réglementation (voir, en ce sens, arrêt du 23 décembre 2015, Scotch Whisky Association e.a., C‑333/14, EU:C:2015:845,
points 28 et 40).
67 En l’occurrence, il convient de relever que l’article 5, paragraphe 1, du règlement du ministre de l’Agriculture et du Développement rural no 246/2008, dans sa version applicable au litige au principal, précise que « [l]es documents faisant preuve de l’utilisation légale des pâtures permanentes communales, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous f), de l’[OUG no 125/2006] sont les actes attestant du droit de propriété, les contrats de concession ou de location conclus entre les conseils
locaux et les éleveurs d’animaux, desquels ressort la terre utilisée et l’attestation délivrée par la mairie conformément aux données figurant au registre agricole » et, partant, ne semble concerner que l’établissement de la preuve de l’utilisation légale des pâtures permanentes communales, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer. Or, s’agissant de pâtures relevant tant du domaine public que du domaine privé des entités administratives territoriales, en l’occurrence les
municipalités, il est permis de considérer qu’un acte formel attestant du droit d’utilisation sera en principe établi entre les parties, de sorte que l’obligation de produire un tel acte n’apparaît pas, dans un tel cas particulier, disproportionnée.
68 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que les règlements nos 73/2009 et 1122/2009 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui conditionne l’obtention d’une aide au titre du régime de paiement unique à la surface à l’obligation pour le demandeur de prouver qu’il détient un « droit d’utilisation » de la surface agricole faisant l’objet de cette demande, pour autant que soient
respectés les objectifs poursuivis par la réglementation concernée de l’Union et les principes généraux du droit de l’Union, en particulier le principe de proportionnalité.
Sur la deuxième question
69 Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les règlements nos 73/2009 et 1122/2009 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent, dans le cas particulier dans lequel le droit d’exploiter une surface agricole a été justifié par le bénéficiaire d’une aide au titre du régime de paiement unique à la surface par la présentation d’un contrat de concession d’une pâture relevant du domaine public d’une entité administrative territoriale, à une réglementation
nationale qui subordonne la validité d’un tel contrat à la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux du futur concessionnaire.
70 D’emblée, il y a lieu de relever qu’il ressort des indications contenues dans la demande de décision préjudicielle que l’obligation, pour le concessionnaire d’une pâture, d’avoir la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux ne constitue pas, en tant que telle, une condition d’éligibilité à un soutien financier au titre du régime de paiement unique à la surface en cause au principal. En effet, il apparaît que les demandeurs doivent, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de l’OUG
no 125/2006, être inscrits au registre des agriculteurs administré par l’APIA, présenter leur demande de paiement dans les délais et respecter les conditions générales prévues par cette disposition, lesquelles ne comportent pas une telle obligation.
71 Il ressort toutefois du dossier dont dispose la Cour que cette obligation résulte des dispositions de l’annexe I du règlement du ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Forêts et du ministre de l’Administration publique no 226/235/2003, dans sa version applicable au litige au principal.
72 Cette même obligation ne résultant pas du droit de l’Union et relevant de la marge d’appréciation des États membres, il incombe à la juridiction de renvoi, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 61, 63 et 64 du présent arrêt, de déterminer si une telle exigence respecte les objectifs poursuivis par la réglementation concernée de l’Union et les principes généraux du droit de l’Union, en particulier le principe de proportionnalité.
73 À cet égard, le gouvernement roumain a indiqué, dans ses observations écrites, en substance, que le législateur roumain, au regard de la situation spécifique de l’agriculture en Roumanie, confrontée à des phénomènes tels que l’abandon des terres, le vieillissement de la population agricole, le faible nombre de jeunes agriculteurs et le grand nombre d’exploitations de petite taille, dont un pourcentage élevé est constitué d’exploitations de semi-subsistance, a fait le choix de subordonner la
conclusion de contrats de concession portant sur les pâtures relevant du domaine public des entités administratives territoriales à la qualité de possesseur ou de propriétaire d’animaux des concessionnaires. Or, un tel choix, qui constituerait une condition non pas d’éligibilité au régime de paiement à la surface, mais de validité de tels contrats de concession, relèverait de la marge d’appréciation de ce législateur.
74 En imposant cette condition, le législateur roumain aurait ainsi cherché à assurer un niveau de vie équitable à la population agricole en facilitant l’accès direct du plus grand nombre de propriétaires ou de possesseurs d’animaux aux pâtures appartenant aux entités administratives territoriales, tout en évitant d’en faire profiter des opérateurs qui exercent des activités agricoles par intermédiation. L’APIA a ajouté, dans sa réponse aux questions pour réponse écrite de la Cour, que, pour la
majorité des éleveurs d’animaux, l’unique source de nourriture des animaux en été est constituée par la végétation obtenue sur les prés, de sorte qu’il est important que les éleveurs d’animaux puissent prendre en concession les prés des localités où ils vivent et élèvent leurs animaux.
75 Or, ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 68 de ses conclusions, un tel objectif respecte les objectifs poursuivis par le droit de l’Union en la matière. En effet, ainsi qu’il ressort du point 52 du présent arrêt, l’aide au titre du régime de paiement unique à la surface a pour objectif d’assurer un niveau de vie équitable aux agriculteurs qui exercent réellement une activité agricole, et, partant, disposent dans les faits d’une surface agricole sur laquelle cette
activité est exercée.
76 Par ailleurs, sous réserve des vérifications qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’effectuer, l’obligation d’être un propriétaire ou un éleveur d’animaux semble, ainsi qu’il ressort du point 74 du présent arrêt, être apte à réaliser l’objectif visé par le législateur roumain consistant à faciliter l’accès direct aux pâtures appartenant aux entités administratives territoriales au plus grand nombre de ces propriétaires ou éleveurs, dans un contexte où, ainsi qu’il l’a été relevé à ce même
point, l’unique source de nourriture des animaux d’élevage en été est constituée par la végétation obtenue sur les prés.
77 En outre, dès lors que cette obligation porte uniquement sur la possibilité, pour une personne, de prendre en concession une pâture relevant du domaine public des entités administratives territoriales, la réglementation nationale en cause ne semble pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif, ce qu’il incombera à la juridiction de renvoi de vérifier, et ce en tenant compte des exigences fixées par la jurisprudence citée au point 66 du présent arrêt.
78 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question que les règlements nos 73/2009 et 1122/2009 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas, dans le cas particulier dans lequel le droit d’exploiter une surface agricole a été justifié par le bénéficiaire d’une aide au titre du régime de paiement unique à la surface par la présentation d’un contrat de concession d’une pâture relevant du domaine public d’une entité administrative territoriale, à
une réglementation nationale qui subordonne la validité d’un tel contrat à la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux du futur concessionnaire.
Sur la troisième question
79 Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, sous c), du règlement no 73/2009 doit être interprété en ce sens que la notion d’« activité agricole » couvre une activité par laquelle une personne prend en concession une pâture et conclut ultérieurement un contrat de collaboration avec des éleveurs d’animaux, en vertu duquel ces éleveurs font paître les animaux sur la terre donnée en concession, le concessionnaire conservant le droit d’utilisation de la
terre, mais s’obligeant à ne pas limiter l’activité de pâturage et prenant à sa charge les travaux d’entretien de la pâture.
80 La notion d’« activité agricole » est définie à l’article 2, sous c), du règlement no 73/2009 comme, d’une part, la production, l’élevage ou la culture de produits agricoles, y compris la récolte, la traite, l’élevage et la détention d’animaux à des fins agricoles, et, d’autre part, le maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales, au sens de l’article 6 de ce règlement.
81 Il apparaît constant, dans le litige au principal, que l’activité d’Avio Lucos ne relève pas du premier cas de figure, relatif à la production, à l’élevage ou à la culture de produits agricoles. En effet, ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 73 de ses conclusions, les animaux mis à la disposition d’Avio Lucos par les éleveurs en vertu de l’article 8 du contrat de collaboration participative en cause au principal ont toujours été détenus, élevés et utilisés pour le pâturage par
lesdits éleveurs.
82 S’agissant du second cas de figure, relatif au maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales, l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 73/2009 prévoit que les États membres, d’une part, veillent à ce que toutes les terres agricoles soient maintenues dans de bonnes conditions agricoles et environnementales et, d’autre part, définissent, au niveau national ou régional, des exigences minimales pour les bonnes conditions agricoles et environnementales sur la base du
cadre fixé à l’annexe III de ce règlement, en tenant compte des « caractéristiques des zones concernées », cet article ajoutant que ces États ne peuvent pas définir des exigences minimales qui ne sont pas prévues dans ce cadre.
83 À cet égard, le gouvernement roumain a indiqué, dans ses observations écrites, que le législateur roumain avait imposé la norme facultative « densité minimale du bétail et/ou régimes appropriés », expressément visée et autorisée par les dispositions de cette annexe III. Ce législateur aurait ainsi prévu, dans le cadre du système de conditionnalité, à compter de l’année 2012, « l’entretien des pâtures permanentes par le maintien d’un niveau minimal de pâturage de 0,3 UGB/ha et/ou par le fauchage
desdites pâtures au moins une fois par an ».
84 Dans ses observations écrites, la Commission a également souligné que, selon la notification de la Roumanie relative à la mise en œuvre des exigences minimales pour les bonnes conditions agricoles et environnementales pour l’année de demande 2014, « les agriculteurs sont tenus de faire les efforts suivants pour mettre en œuvre la norme relative à la densité minimale du bétail et/ou aux régimes appropriés : couper l’herbe au moins une fois par an et/ou assurer un niveau minimal de pâturage (0,3
animal par hectare au minimum) afin de maintenir les terres (pâturages permanents) en bon état ».
85 En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, aux termes de l’article 7 du contrat de collaboration participative conclu entre Avio Lucos et les éleveurs d’animaux, cette entreprise « réalise annuellement, à ses frais, les travaux de nettoyage de la pâture, d’élimination des mauvaises herbes toxiques ainsi que l’élimination de l’excès d’eau du terrain, en veillant à ce que les conditions soient optimales pour que la pâture se refasse ». Or, sous réserve des vérifications qu’il incombe
à la juridiction de renvoi d’effectuer, il apparaît qu’une telle activité relève de l’une des activités alternatives mentionnées dans la notification visée au point précédent et, partant, relève de la notion d’« activité agricole », au sens de l’article 2, sous c), du règlement no 73/2009.
86 Une telle interprétation est, au demeurant, conforme aux objectifs de ce règlement, tels qu’ils ressortent notamment des considérants 4 et 7 de celui-ci, tenant au maintien des pâtures dans de bonnes conditions agricoles et environnementales, l’effet positif sur l’environnement des pâturages permanents étant reconnu.
87 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la troisième question que l’article 2, sous c), du règlement no 73/2009 doit être interprété en ce sens que la notion d’« activité agricole » couvre une activité par laquelle une personne prend en concession une pâture et conclut ultérieurement un contrat de collaboration avec des éleveurs d’animaux, en vertu duquel ces éleveurs font paître les animaux sur la terre donnée en concession, le concessionnaire conservant le droit
d’utilisation de la terre, mais s’obligeant à ne pas limiter l’activité de pâturage et prenant à sa charge les travaux d’entretien de la pâture, pour autant que ces travaux satisfassent aux conditions prévues par la norme facultative visée à l’annexe III de ce règlement.
Sur la quatrième question
88 Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application, dans l’ordre juridique d’un État membre, du principe de l’autorité de la chose jugée qui, dans le cadre d’un litige entre les mêmes parties portant sur la légalité d’un acte de récupération de sommes payées au demandeur d’une aide au titre d’un régime de paiement unique à la surface, fait obstacle à un examen, par le juge saisi, de la
conformité au droit de l’Union d’exigences nationales relatives à la légalité du titre d’exploitation de la surface agricole ayant fait l’objet de la demande d’aide, au motif que cet acte de récupération est fondé sur les mêmes faits et sur la même réglementation nationale que ceux qui ont été analysés dans une précédente décision juridictionnelle devenue définitive.
89 Ainsi que le relève la juridiction de renvoi, cette question est suscitée par la circonstance que l’APIA a invoqué l’autorité de la chose jugée s’attachant à deux jugements définitifs par lesquels ont été rejetés des recours d’Avio Lucos ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation de la décision infligeant des sanctions pluriannuelles à cette société au titre de l’année 2014, laquelle est visée au point 30 du présent arrêt et, d’autre part, une demande d’annulation d’un procès-verbal
de constatation d’irrégularités, au titre de cette même année. Or, ces deux actes seraient fondés sur la décision de l’APIA selon laquelle Avio Lucos devait être exclue du paiement au titre du régime d’aide à la surface au motif que, n’ayant pas la qualité d’éleveur d’animaux, elle restait en défaut d’apporter la preuve qu’elle utilisait légalement la pâture communale en cause au principal.
90 La juridiction de renvoi relève, à cet égard, que, au regard de la doctrine nationale relative à l’article 431, paragraphe 2, du code de procédure civile, l’exception tirée de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à une décision définitive ne saurait être valablement soulevée dans le cadre d’une procédure juridictionnelle que si le rapport juridique invoqué à cette occasion est non seulement identique à celui qui a été précédemment examiné dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à
cette décision définitive, mais aussi qu’il est explicitement ou implicitement compris dans cette précédente procédure. Ainsi, l’autorité de la chose jugée opèrerait également dans les cas dans lesquels le nouveau recours met le juge dans la situation de devoir répéter ou contredire totalement ou partiellement le rapport juridique auquel il a été fait droit ou ayant été rejeté dans le jugement antérieur. Or, en l’occurrence, les jugements visés au point précédent auraient tranché des litiges
entre les mêmes parties, à savoir l’APIA et Avio Lucos, et auraient porté sur les mêmes faits, à savoir la demande de paiement unique à la surface pour l’année 2014.
91 À titre liminaire, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort de la réponse apportée aux première et deuxième questions, pour autant que soient respectés les objectifs poursuivis par la réglementation concernée de l’Union et les principes généraux du droit de l’Union, en particulier le principe de proportionnalité, le droit de l’Union ne s’oppose ni à l’institution, par le droit national, en vue de l’obtention d’un soutien direct au titre du régime de paiement unique à la surface, d’une
obligation de prouver le « droit d’utilisation » d’une surface agricole, ni, dans le cas particulier dans lequel le droit d’exploiter une surface agricole a été justifié par le bénéficiaire par la présentation d’un contrat de concession d’une pâture appartenant à une entité administrative territoriale, à une réglementation nationale qui impose, pour conclure valablement un tel contrat de concession, la condition selon laquelle le futur concessionnaire ne peut être qu’un éleveur ou un propriétaire
d’animaux.
92 Il convient de rappeler l’importance que revêt, tant dans l’ordre juridique de l’Union que dans les ordres juridiques nationaux, le principe de l’autorité de la chose jugée. En effet, en vue de garantir aussi bien la stabilité du droit et des relations juridiques qu’une bonne administration de la justice, il importe que les décisions juridictionnelles devenues définitives après épuisement des voies de recours disponibles ou après expiration des délais prévus pour ces recours ne puissent plus être
remises en cause (arrêts du 3 septembre 2009, Fallimento Olimpiclub, C‑2/08, EU:C:2009:506, point 22 ; du 17 octobre 2018, Klohn, C‑167/17, EU:C:2018:833, point 63, et du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17 et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 88 ainsi que jurisprudence citée).
93 Partant, le droit de l’Union n’impose pas au juge national d’écarter l’application des règles de procédure internes conférant l’autorité de la chose jugée à une décision, même si cela permettrait de remédier à une situation nationale incompatible avec ce droit (voir, en ce sens, arrêts du 3 septembre 2009, Fallimento Olimpiclub, C‑2/08, EU:C:2009:506, point 23 ; du 26 janvier 2017, Banco Primus, C‑421/14, EU:C:2017:60, point 47, et du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17
et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 89 ainsi que jurisprudence citée).
94 Le droit de l’Union n’exige donc pas non plus que, pour tenir compte de l’interprétation d’une disposition pertinente de ce droit adoptée par la Cour, un organe juridictionnel national doive, par principe, revenir sur sa décision revêtue de l’autorité de la chose jugée (arrêt du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17 et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 90 ainsi que jurisprudence citée).
95 En l’occurrence, il n’est pas demandé à la juridiction de renvoi de revenir sur une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée. En revanche, cette juridiction fait observer que le litige au principal est fondé sur le même rapport juridique que celui qui a donné lieu aux deux jugements définitifs mentionnés au point 89 du présent arrêt, de sorte que, en application du principe de l’autorité de la chose jugée, tel qu’interprété par le droit national, ces jugements ne sauraient être contredits
par le jugement devant intervenir dans l’affaire au principal.
96 À cet égard, il convient de rappeler qu’il incombe aux juridictions nationales d’interpréter les dispositions du droit national dans toute la mesure du possible d’une manière telle qu’elles puissent recevoir une application qui contribue à la mise en œuvre du droit de l’Union (arrêt du 11 novembre 2015, Klausner Holz Niedersachsen, C‑505/14, EU:C:2015:742, point 31 et jurisprudence citée).
97 En outre, l’exigence d’interprétation conforme inclut l’obligation, pour les juridictions nationales, y compris celles statuant en dernier ressort, de modifier, le cas échéant, une jurisprudence établie si celle-ci repose sur une interprétation du droit national incompatible avec le droit de l’Union. Partant, une juridiction nationale ne saurait valablement considérer qu’elle se trouve dans l’impossibilité d’interpréter une disposition nationale en conformité avec le droit de l’Union en raison du
seul fait que cette disposition a été interprétée par d’autres juridictions dans un sens qui n’est pas compatible avec ce droit ou est appliquée d’une telle manière par les autorités nationales compétentes (voir, en ce sens, arrêt du 4 mars 2020, Telecom Italia, C‑34/19, EU:C:2020:148, points 60 et 61 ainsi que jurisprudence citée).
98 En l’occurrence, il y a lieu de relever, à l’instar de M. l’avocat général au point 89 de ses conclusions, que l’objet des jugements mentionnés au point 89 du présent arrêt, d’une part, et du jugement devant intervenir dans la présente affaire, d’autre part, n’apparaît pas identique, dès lors que, même s’ils concernent les mêmes faits, ils portent sur la légalité de décisions administratives différentes.
99 En tout état de cause, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si, selon le droit interne, l’autorité de la chose jugée qui s’attache à ces décisions englobe les éléments de la présente affaire et, le cas échéant, d’examiner les conséquences prévues par ledit droit (voir, par analogie, arrêt du 4 mars 2020, Telecom Italia, C‑34/19, EU:C:2020:148, point 57).
100 En effet, en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, les modalités de mise en œuvre du principe de l’autorité de la chose jugée relèvent de l’ordre juridique interne des États membres en vertu du principe de l’autonomie procédurale de ces derniers. Elles ne doivent cependant pas être moins favorables que celles régissant des situations similaires de nature interne (principe d’équivalence) ni être aménagées de manière à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile
l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (principe d’effectivité) (arrêts du 4 mars 2020, Telecom Italia, C‑34/19, EU:C:2020:148, point 58, et du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17 et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 91 ainsi que jurisprudence citée).
101 À cet égard, la Cour a déjà jugé que chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale rend impossible ou excessivement difficile l’application du droit de l’Union doit être analysé en tenant compte de la place de cette disposition dans l’ensemble de la procédure, de son déroulement et de ses particularités, devant les diverses instances nationales. Dans cette perspective, il y a lieu de prendre en considération, s’il échet, les principes qui sont à la base du
système juridictionnel national, tels que la protection des droits de la défense, le principe de sécurité juridique et le bon déroulement de la procédure (arrêt du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17 et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 93 et jurisprudence citée).
102 En ce qui concerne l’affaire au principal, une interprétation du principe de l’autorité de la chose jugée, telle qu’elle ressort du point 90 du présent arrêt, paraît empêcher de remettre en cause non seulement une décision juridictionnelle revêtue de l’autorité de la chose jugée, même dans l’hypothèse où cette décision comporterait une violation du droit de l’Union, mais également, à l’occasion d’une procédure juridictionnelle à caractère civil relative aux mêmes faits, toute constatation
portant sur le même rapport juridique que celui qui a donné lieu aux deux jugements définitifs.
103 Ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 92 de ses conclusions, une telle interprétation du principe de l’autorité de la chose jugée aurait donc pour conséquence que, lorsqu’une décision antérieure d’une juridiction devenue définitive est fondée sur une interprétation qui est contraire au droit de l’Union, l’application incorrecte de ce droit se reproduirait dans chaque décision prise par des juridictions civiles portant sur le même rapport juridique, sans qu’il soit
possible de corriger cette interprétation faite en méconnaissance dudit droit (voir, par analogie, arrêt du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17 et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 95 et jurisprudence citée).
104 Or, de tels obstacles à l’application effective des règles du droit de l’Union ne peuvent pas raisonnablement être justifiés par le principe de sécurité juridique et doivent donc être considérés comme étant contraires au principe d’effectivité (voir, par analogie, arrêt du 2 avril 2020, CRPNPAC et Vueling Airlines, C‑370/17 et C‑37/18, EU:C:2020:260, point 96 et jurisprudence citée).
105 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la quatrième question que le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application, dans l’ordre juridique d’un État membre, du principe de l’autorité de la chose jugée qui, dans le cadre d’un litige entre les mêmes parties portant sur la légalité d’un acte de récupération de sommes payées au demandeur d’une aide au titre d’un régime de paiement unique à la surface, fait obstacle à un examen, par le
juge saisi, de la conformité au droit de l’Union d’exigences nationales relatives à la légalité du titre d’exploitation de la surface agricole ayant fait l’objet de la demande d’aide, au motif que cet acte de récupération est fondé sur les mêmes faits opposant les mêmes parties et sur la même réglementation nationale que ceux qui ont été analysés dans une précédente décision juridictionnelle devenue définitive.
Sur les dépens
106 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :
1) Le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003, tel que modifié par le règlement (UE) no 1310/2013 du Parlement européen et du Conseil, du
17 décembre 2013, et le règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement no 73/2009 en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide
prévu pour le secteur vitivinicole, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui conditionne l’obtention d’une aide au titre du régime de paiement unique à la surface à l’obligation pour le demandeur de prouver qu’il détient un « droit d’utilisation » de la surface agricole faisant l’objet de cette demande, pour autant que soient respectés les objectifs poursuivis par la réglementation concernée de l’Union et les principes généraux du droit de
l’Union, en particulier le principe de proportionnalité.
2) Le règlement no 73/2009, tel que modifié par le règlement no 1310/2013, et le règlement no 1122/2009 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas, dans le cas particulier dans lequel le droit d’exploiter une surface agricole a été justifié par le bénéficiaire d’une aide au titre du régime de paiement unique à la surface par la présentation d’un contrat de concession d’une pâture relevant du domaine public d’une entité administrative territoriale, à une réglementation nationale
qui subordonne la validité d’un tel contrat à la qualité d’éleveur ou de propriétaire d’animaux du futur concessionnaire.
3) L’article 2, sous c), du règlement no 73/2009, tel que modifié par le règlement no 1310/2013, doit être interprété en ce sens que la notion d’« activité agricole » couvre une activité par laquelle une personne prend en concession une pâture et conclut ultérieurement un contrat de collaboration avec des éleveurs d’animaux, en vertu duquel ces éleveurs font paître les animaux sur la terre donnée en concession, le concessionnaire conservant le droit d’utilisation de la terre, mais s’obligeant à ne
pas limiter l’activité de pâturage et prenant à sa charge les travaux d’entretien de la pâture, pour autant que ces travaux satisfassent aux conditions prévues par la norme facultative visée à l’annexe III de ce règlement.
4) Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application, dans l’ordre juridique d’un État membre, du principe de l’autorité de la chose jugée qui, dans le cadre d’un litige entre les mêmes parties portant sur la légalité d’un acte de récupération de sommes payées au demandeur d’une aide au titre d’un régime de paiement unique à la surface, fait obstacle à un examen, par le juge saisi, de la conformité au droit de l’Union d’exigences nationales relatives à la légalité
du titre d’exploitation de la surface agricole ayant fait l’objet de la demande d’aide, au motif que cet acte de récupération est fondé sur les mêmes faits opposant les mêmes parties et sur la même réglementation nationale que ceux qui ont été analysés dans une précédente décision juridictionnelle devenue définitive.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le roumain.