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03/09/2020 | CJUE | N°C-174/20

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, STADA Arzneimittel AG contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)., 03/09/2020, C-174/20


 ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

3 septembre 2020 ( *1 )

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Dépôt hors délai de la requête en pourvoi – Pourvoi manifestement irrecevable »

Dans l’affaire C‑174/20 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 avril 2020,

STADA Arzneimittel AG, établie à Bad Vilbel (Allemagne), représentée par Mes J.-C. Plate et R. Kaase, Rechtsanwälte,

partie req

uérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)...

 ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

3 septembre 2020 ( *1 )

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Dépôt hors délai de la requête en pourvoi – Pourvoi manifestement irrecevable »

Dans l’affaire C‑174/20 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 avril 2020,

STADA Arzneimittel AG, établie à Bad Vilbel (Allemagne), représentée par Mes J.-C. Plate et R. Kaase, Rechtsanwälte,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de Mme L. S. Rossi, présidente de chambre, MM. J. Malenovský (rapporteur) et N. Wahl, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 Par son pourvoi, STADA Arzneimittel AG demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 11 février 2020, Stada Arzneimittel/EUIPO (ViruProtect) (T‑487/18, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:44), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 4 juin 2018 (affaire R 1886/2017‑5), relative à une demande d’enregistrement
du signe verbal « ViruProtect » comme marque de l’Union européenne (ci-après la « décision litigieuse »).

Le cadre juridique

Le statut de la Cour de justice de l’Union européenne

2 L’article 45 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne énonce :

« Des délais de distance seront établis par le règlement de procédure [de la Cour].

Aucune déchéance tirée de l’expiration des délais ne peut être opposée lorsque l’intéressé établit l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure. »

3 L’article 56, premier alinéa, de ce même statut dispose :

« Un pourvoi peut être formé devant la [Cour], dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision attaquée, contre les décisions du Tribunal mettant fin à l’instance [...] »

Le règlement de procédure

4 L’article 49 du règlement de procédure, intitulé « Calcul des délais », est libellé comme suit :

« 1.   Les délais de procédure prévus par les traités, le statut [de la Cour de justice de l’Union européenne] et le présent règlement sont calculés de la façon suivante :

a) si un délai exprimé en jours, en semaines, en mois ou en années est à compter à partir du moment où survient un événement ou s’effectue un acte, le jour au cours duquel survient cet événement ou se situe cet acte n’est pas compté dans le délai ;

b) un délai exprimé en semaines, en mois ou en années prend fin à l’expiration du jour qui, dans la dernière semaine, dans le dernier mois ou dans la dernière année, porte la même dénomination ou le même chiffre que le jour au cours duquel est survenu l’événement ou a été effectué l’acte à partir duquel le délai est à compter. [...]

[...]

d) les délais comprennent les samedis, les dimanches et les jours fériés légaux visés à l’article 24, paragraphe 6, du présent règlement ;

e) les délais ne sont pas suspendus pendant les vacances judiciaires.

2.   Si le délai prend fin un samedi, un dimanche ou un jour férié légal, l’expiration en est reportée à la fin du jour ouvrable suivant. »

5 Aux termes de l’article 51 du règlement de procédure, intitulé « Délai de distance » :

« Les délais de procédure sont augmentés d’un délai de distance forfaitaire de dix jours. »

Les antécédents du litige

6 Les antécédents du litige figurent aux points 1 à 7 de l’arrêt attaqué et peuvent être résumés comme suit.

7 Le 31 janvier 2017, STADA Arzneimittel a présenté, auprès de l’EUIPO, une demande d’enregistrement du signe verbal « ViruProtect » en tant que marque de l’Union européenne.

8 Par décision du 7 juillet 2017, l’examinateur a rejeté cette demande sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la [marque de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1).

9 Après que, le 28 août 2017, la requérante eut formé auprès de l’EUIPO un recours contre cette décision, la cinquième chambre de recours de celui-ci l’a rejeté par la décision litigieuse.

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

10 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 août 2018, STADA Arzneimittel a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

11 À l’appui de son recours, la requérante a invoqué trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement et, le troisième, de la violation de l’obligation de motivation.

12 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours comme étant, en partie, non fondé et, en partie, inopérant.

Les conclusions de la requérante et la procédure devant la Cour

13 Par son pourvoi, STADA Arzneimittel demande à la Cour :

– d’annuler l’arrêt attaqué et

– de condamner l’EUIPO aux dépens.

14 Au soutien de son pourvoi, la requérante invoque deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation, commise dans le cadre de l’appréciation des différences entre le signe verbal « ViruProtect » et les termes en langue anglaise auxquels celui-ci fait référence et, le second, d’une dénaturation des éléments de preuve commise lors de l’appréciation du caractère descriptif de ce signe.

15 Le 27 avril 2020, le greffe de la Cour a invité la requérante à prendre position sur la question du respect du délai qui lui était imparti par le règlement de procédure pour introduire son pourvoi, ce qu’elle a fait par acte déposé au greffe de la Cour le 7 mai 2020.

Sur le pourvoi

16 En vertu de l’article 181 du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, notamment, en tout ou en partie, manifestement irrecevable, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter totalement ou partiellement ce pourvoi, par voie d’ordonnance motivée.

17 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent pourvoi.

Argumentation de la requérante

18 La requérante fait valoir que le délai de deux mois visé à l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et le délai forfaitaire de dix jours prévu à l’article 51 du règlement de procédure constituent deux délais distincts.

19 Elle se fonde, à cet égard, sur l’intitulé de l’article 51 du règlement de procédure et sur le libellé de cet article, ainsi que sur une lecture systématique de cette disposition, en particulier en lien avec l’article 49, paragraphe 2, de celui-ci.

20 La requérante fait en outre valoir que, lorsqu’une disposition procédurale est ambiguë, il convient d’interpréter celle-ci dans un sens favorable au requérant, et ce conformément au droit de ce dernier d’être entendu.

21 Ainsi, en l’occurrence, le délai de deux mois dont elle disposait pour former un pourvoi contre l’arrêt attaqué ayant pris fin le dimanche 12 avril 2020, et le lundi 13 avril 2020 étant un jour férié légal, ce délai aurait dû, conformément à l’article 49, paragraphe 2, du règlement de procédure, être prorogé jusqu’au mardi 14 avril 2020, date à partir de laquelle il conviendrait d’ajouter le délai forfaitaire de dix jours prévu à l’article 51 dudit règlement de procédure.

Appréciation de la Cour

22 Il importe, tout d’abord, de rappeler que, conformément à l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le délai pour introduire un pourvoi est de deux mois à compter de la date de notification de la décision attaquée, ce délai devant, en vertu de l’article 51 du règlement de procédure, être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

23 La Cour a jugé que ce délai de distance forfaitaire est à considérer non pas comme étant distinct du délai de recours visé à l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne mais, au contraire, comme faisant partie intégrante de celui-ci en l’allongeant. Ainsi, il résulte de cet article, lu en combinaison avec l’article 51 du règlement de procédure, que le délai dans lequel le pourvoi doit être introduit sous peine d’irrecevabilité de celui-ci est de deux mois et dix jours à
compter de la notification de la décision attaquée (ordonnance du 30 avril 2015, Castel Frères/OHMI, C‑622/13 P, non publiée, EU:C:2015:297, point 28).

24 Il découle par ailleurs de l’article 49, paragraphe 1, sous b), du règlement de procédure que, s’agissant d’actes devant être notifiés, le délai de recours commence à courir à compter de la fin du jour de la notification, indépendamment de l’heure à laquelle la notification de l’acte attaqué a eu lieu (voir, en ce sens, arrêt du 15 janvier 1987, Misset/Conseil, 152/85, EU:C:1987:10, point 7, ainsi que ordonnance du 17 mai 2002, Allemagne/Parlement et Conseil, C‑406/01, EU:C:2002:304, point 14).

25 Il résulte également de cette disposition que ce délai prend fin à l’expiration du jour qui, dans le dernier mois de décompte du délai, porte le même chiffre que le jour qui a fait courir le délai, à savoir le jour de la notification, délai auquel s’ajoute le délai de distance forfaitaire de dix jours (ordonnance du 11 juin 2020, GMPO/Commission, C‑575/19 P, non publiée, EU:C:2020:448, point 30 et jurisprudence citée).

26 En l’occurrence, l’arrêt attaqué ayant été signifié à la requérante le 12 février 2020, ainsi qu’elle le reconnaît elle-même dans ses écritures, le délai pour l’introduction du pourvoi a commencé à courir le 12 février 2020 à 24 heures et, augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours, a expiré le mercredi 22 avril 2020 à 24 heures.

27 Or, le présent pourvoi a été déposé au greffe de la Cour le 24 avril 2020. Par conséquent, il a été introduit en dehors du délai mentionné au point 23 de la présente ordonnance.

28 Ensuite, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’application stricte des règles de procédure répond à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice (arrêt du 23 avril 2013, Gbagbo e.a./Conseil, C‑478/11 P à C‑482/11 P, EU:C:2013:258, point 71 et jurisprudence citée, ainsi que ordonnance du 29 janvier 2014, Gbagbo/Conseil, C‑397/13 P, non publiée, EU:C:2014:46, point 7).

29 Ainsi, conformément à l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, il ne peut être dérogé aux délais de procédure que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, lorsqu’est établie l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure. Or, ni dans son pourvoi ni dans ses observations du 7 mai 2020, la requérante n’invoque à cet égard l’existence d’un cas fortuit ou d’un cas de force majeure.

30 En effet, la requérante se borne à alléguer une prétendue ambiguïté des dispositions de l’article 49, paragraphe 2, et de l’article 51 du règlement de procédure. À cet égard, cependant, il y a lieu de rappeler que la réglementation relative aux délais applicable en l’espèce ne présente pas de difficulté d’interprétation particulière, de sorte qu’une erreur excusable de la part de la requérante, qui justifierait une dérogation à l’application de ladite réglementation, ne saurait être reconnue en
l’occurrence (ordonnance du 17 mai 2002, Allemagne/Parlement et Conseil, C‑406/01, EU:C:2002:304, point 21).

31 Enfin, pour autant que, en invoquant le droit d’être entendu, la requérante prétend se prévaloir du droit à une protection juridictionnelle effective, il importe de rappeler que les règles concernant les délais de recours sont d’ordre public et qu’une dérogation à ces règles ne saurait être justifiée par la circonstance que des droits fondamentaux sont en jeu (voir, en ce sens, ordonnance du 16 novembre 2010, Internationale Fruchtimport Gesellschaft Weichert/Commission, C‑73/10 P, EU:C:2010:684,
point 50 et jurisprudence citée).

32 Ainsi que la Cour l’a déjà jugé, le droit à une protection juridictionnelle effective n’est nullement affecté par l’application stricte des réglementations de l’Union concernant les délais de procédure (voir, notamment, ordonnances du 17 mai 2002, Allemagne/Parlement et Conseil, C‑406/01, EU:C:2002:304, point 20 et jurisprudence citée, ainsi que du 22 octobre 2010, Seacid/Parlement et Conseil, C‑266/10 P, non publiée, EU:C:2010:629, point 30). En effet, de tels délais constituent, pour les
raisons de sécurité juridique rappelées au point 28 de la présente ordonnance, une limitation inhérente au droit d’accès au juge (voir, en ce sens, ordonnances du 12 septembre 2013, Ellinika Nafpigeia et 2. Hoern/Commission, C‑616/12 P, non publiée, EU:C:2013:884, point 31, ainsi que du 11 juin 2020, GMPO/Commission, C‑575/19 P, non publiée, EU:C:2020:448, point 40).

33 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le pourvoi, en raison de sa tardiveté, doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

Sur les dépens

34 En application de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. En l’espèce, la présente ordonnance étant prononcée avant que le pourvoi ne soit signifié à la partie défenderesse en première instance et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que STADA Arzneimittel supportera ses propres
dépens.

  Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) ordonne :

  1) Le pourvoi est rejeté comme étant manifestement irrecevable.

  2) STADA Arzneimittel AG supporte ses propres dépens.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : C-174/20
Date de la décision : 03/09/2020
Type d'affaire : Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Dépôt hors délai de la requête en pourvoi – Pourvoi manifestement irrecevable.

Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale

Marques


Parties
Demandeurs : STADA Arzneimittel AG
Défendeurs : Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).

Composition du Tribunal
Avocat général : Szpunar
Rapporteur ?: Malenovský

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2020:651

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