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14/11/2018 | CJUE | N°C-93/17

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Commission européenne contre République hellénique., 14/11/2018, C-93/17


ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

14 novembre 2018 ( *1 )

« Manquement d’État – Aides d’État – Aides déclarées illégales et incompatibles avec le marché intérieur – Obligation de récupération – Arrêt de la Cour constatant le manquement – Entreprise qui exerce à la fois des activités civiles et militaires – Inexécution – Intérêts essentiels de la sécurité d’un État membre – Article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE – Sanctions financières – Astreinte – Somme forfaitaire – Capacité de paiement – Facteu

r “n” – Facteurs qui sont à la base de l’évaluation de la
capacité de paiement – Produit intérieur brut – Pondération des voix de ...

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

14 novembre 2018 ( *1 )

« Manquement d’État – Aides d’État – Aides déclarées illégales et incompatibles avec le marché intérieur – Obligation de récupération – Arrêt de la Cour constatant le manquement – Entreprise qui exerce à la fois des activités civiles et militaires – Inexécution – Intérêts essentiels de la sécurité d’un État membre – Article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE – Sanctions financières – Astreinte – Somme forfaitaire – Capacité de paiement – Facteur “n” – Facteurs qui sont à la base de l’évaluation de la
capacité de paiement – Produit intérieur brut – Pondération des voix de l’État membre au Conseil de l’Union européenne – Nouvelle règle de vote au Conseil »

Dans l’affaire C‑93/17,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, introduit le 22 février 2017,

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouchagiar et B. Stromsky, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par M. K. Boskovits et Mme A. Samoni-Rantou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice-présidente, faisant fonction de président de la première chambre, MM. J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev (rapporteur), C. G. Fernlund et S. Rodin, juges,

avocat général : M. M. Wathelet,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 mars 2018,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 mai 2018,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour :

– de constater que, en n’ayant pas pris les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 28 juin 2012, Commission/Grèce (C‑485/10, non publié, ci-après l’ arrêt constatant le manquement , EU:C:2012:395), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE ;

– d’ordonner à la République hellénique de verser à la Commission une astreinte journalière d’un montant de 34974 euros pour le retard dans l’exécution de l’arrêt constatant le manquement à compter du prononcé de l’arrêt dans la présente affaire jusqu’à l’exécution de l’arrêt constatant le manquement ;

– d’ordonner à la République hellénique de verser à la Commission une somme forfaitaire dont le montant résulte de la multiplication d’un montant journalier de 3828 euros par le nombre de jours durant lesquels l’infraction a persisté depuis le prononcé de l’arrêt constatant le manquement et jusqu’à la date à laquelle cet État membre a mis fin à l’infraction ou, à défaut de cessation de l’infraction, jusqu’au jour où l’arrêt dans la présente affaire sera rendu, et

– de condamner la République hellénique aux dépens.

Le cadre juridique

2 L’article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE dispose :

« Les dispositions des traités ne font pas obstacle aux règles ci-après :

[...]

b) tout État membre peut prendre les mesures qu’il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d’armes, de munitions et de matériel de guerre ; ces mesures ne doivent pas altérer les conditions de la concurrence dans le marché intérieur en ce qui concerne les produits non destinés à des fins spécifiquement militaires. »

Les antécédents du litige

3 Hellenic Shipyards SA (Ellinika Nafpigeia AE, ci-après « ENAE »), propriétaire d’un chantier naval civil et militaire grec sis à Skaramagkas (Grèce), est spécialisée dans la construction de navires militaires. Au cours de l’année 1985, ENAE a cessé ses activités et a été mise en liquidation. Au mois de septembre 1985, Elliniki Trapeza Viomichanikis Anaptixeos AE (ci-après « ETVA »), une banque hellénique appartenant à l’État grec, a acquis ENAE. Le 18 septembre 1995, ETVA a vendu 49 % des actions
d’ENAE aux salariés de cette société.

4 Au cours de l’année 1998, dans le cadre d’un projet de modernisation de sa flotte de sous-marins, la République hellénique a conclu avec ENAE un contrat, dénommé « Archimède », pour la construction de trois sous-marins « HDW classe 214 », ainsi que pour la construction optionnelle d’un quatrième, et un contrat, dénommé « Neptune II », pour la modernisation de trois sous-marins « HDW classe 209 ».

5 Au cours de l’année 2001, la République hellénique a décidé de privatiser ENAE. Le 11 octobre 2001, un accord de vente des actions d’ENAE a été signé entre, d’une part, ETVA et les salariés d’ENAE, et, d’autre part, un consortium constitué par Howaldtswerke-Deutsche Werft GmbH (ci-après « HDW ») et Ferrostaal AG (ci-après, prises ensemble, « HDW-Ferrostaal »). HDW-Ferrostaal a créé Greek Naval Shipyard Holding (Elliniki Nafpigokataskevastiki AE Chartofylakeiou, ci-après « GNSH »), détenue à parts
égales par HDW et Ferrostaal, dans le but de gérer leur participation dans ENAE.

6 Au mois de janvier 2005, ThyssenKrupp AG a racheté HDW. Au mois de novembre 2005, ThyssenKrupp a acquis les actions de GNSH détenues par Ferrostaal. Ainsi, depuis cette date, ThyssenKrupp détenait la totalité des parts sociales et le contrôle d’ENAE. GNSH et ENAE ont été intégrées à ThyssenKrupp Marine Systems AG, une division de ThyssenKrupp spécialisée dans les systèmes de navires militaires et les navires marchands spécialisés.

7 Dans ce contexte, la République hellénique a, au cours des années 1996 à 2003, pris un certain nombre de mesures, consistant en des apports en capital, en des garanties et en des prêts en faveur d’ENAE, qui ont fait l’objet de plusieurs décisions du Conseil de l’Union européenne et de la Commission.

8 Le 2 juillet 2008, la Commission a adopté la décision 2009/610/CE, du 2 juillet 2008, concernant les aides C 16/04 (ex NN 29/04, CP 71/02 et CP 133/05) octroyées par la Grèce à l’entreprise Hellenic Shipyards SA (JO 2009, L 225, p. 104), dont les articles 2, 3, 8, 9 et 11 à 15 disposent que ces mesures sont des aides incompatibles avec le marché intérieur.

9 Conformément aux articles 5 et 6 de cette décision, les aides y spécifiées, bien qu’autorisées auparavant par la Commission, ont été appliquées de manière abusive de telle sorte qu’il convenait de les récupérer.

10 Aux termes de l’article 16 de la décision 2009/610, la garantie d’indemnisation fournie par ETVA à HDW-Ferrostaal prévoyant l’indemnisation de ces dernières pour toute aide d’État qui sera récupérée auprès d’ENAE constitue une aide mise en œuvre en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, qui n’est pas compatible avec le marché intérieur. Dès lors, il convenait d’abolir immédiatement cette garantie.

11 Constatant que les aides à récupérer ont bénéficié exclusivement aux activités civiles d’ENAE, la Commission a décidé, à l’article 17 de ladite décision, que ces aides doivent être récupérées auprès de la partie civile des actifs de cette société.

12 L’article 18 de la décision 2009/610 impose à la République hellénique de procéder à la récupération immédiate des aides définies aux articles 2, 3, 5, 6, 8, 9 et 11 à 15 de cette décision. Selon cet article 18, la République hellénique doit prendre les mesures nécessaires à l’exécution de ladite décision dans un délai de quatre mois à compter du 13 août 2008, date de sa notification.

13 Au vu de la situation économique difficile d’ENAE, la République hellénique a fait valoir que la récupération intégrale des aides en cause pouvait entraîner la faillite de celle-ci, et, par-là, affecter ses activités militaires, y compris la construction et la modernisation des sous-marins « HDW classe 214 » et « HDW classe 209 », de telle sorte qu’elle était susceptible de porter atteinte aux intérêts essentiels de la sécurité de la République hellénique, au sens de l’article 346 TFUE. Afin
d’éviter une telle éventualité, la Commission, la République hellénique et ENAE sont parvenus, après des négociations pendant la période allant du mois de juin au mois d’octobre 2010 et des lettres d’engagement de la part d’ENAE et de la République hellénique, datées respectivement du 27 et du 29 octobre 2010, à un accord, aux termes duquel la décision 2009/610 serait réputée comme ayant été correctement exécutée, sous réserve du respect des engagements suivants :

– interruption des activités civiles d’ENAE pour une période de quinze ans, à compter du 1er octobre 2010 ;

– les actifs liés aux activités civiles d’ENAE seront vendus et le produit de la vente sera versé aux autorités grecques. Si les enchères n’amenaient pas à la vente de la totalité ou d’une partie de ces actifs civils, ENAE les transférera à l’État grec à titre d’exécution alternative de l’obligation de récupération des aides en cause. Dans ce cas, l’État grec devra assurer qu’aucun desdits actifs ne sera à nouveau acquis par ENAE ou ses actionnaires actuels ou à venir pendant la période
susmentionnée de quinze ans ;

– ENAE renoncera à la concession d’une cale sèche dont l’utilisation n’est pas nécessaire pour la poursuite de ses activités militaires. L’État grec assurera que cette concession et le terrain concerné par celle-ci ne seront pas acquis à nouveau par ENAE ou ses actionnaires actuels ou à venir pendant la période susmentionnée de quinze ans ;

– ENAE renoncera à la garantie d’indemnisation visée à l’article 16 de la décision 2009/610 et n’entamera aucune procédure basée sur cette garantie ou en connexion avec celle-ci. La République hellénique devra invoquer la nullité de ladite garantie devant toute instance judiciaire ou extra-judiciaire ;

– dans les six mois suivant l’acceptation de la liste des engagements par la Commission, la République hellénique lui fournira les preuves de la restitution de la cale sèche à l’État grec et les informations mises à jour relatives à la vente aux enchères des actifs civils d’ENAE. De plus, la République hellénique informera annuellement la Commission sur l’état d’avancement de la récupération des aides incompatibles, y compris en présentant des preuves du fait qu’ENAE ne poursuit plus d’activités
civiles, des informations sur la propriété et l’utilisation des actifs restitués à l’État grec ainsi que sur l’utilisation du terrain visé par la concession de la cale sèche.

14 Le 8 octobre 2010, estimant que la République hellénique ne s’était pas conformée aux obligations qui lui incombent en vertu de la décision 2009/610, la Commission a introduit, en application de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, un recours en manquement contre la République hellénique ayant pour objet de faire constater que cette dernière n’avait pas pris, dans les délais prescrits, toutes les mesures nécessaires pour se conformer à cette décision.

15 Par lettre du 1er décembre 2010, la Commission a informé la République hellénique que, si les engagements énumérés au point 13 du présent arrêt étaient effectivement mis à exécution, la Commission considérerait que la décision 2009/610 est pleinement exécutée. Cette institution a précisé dans cette lettre que les actifs d’ENAE, affectés à ses activités civiles, devaient être vendus ou transférés à l’État grec dans les six mois suivant ladite lettre.

16 Le 28 juin 2012, la Cour a, par son arrêt constatant le manquement, jugé que, en n’ayant pas pris, dans le délai imparti, toutes les mesures nécessaires en vue de l’exécution de la décision 2009/610 et en n’ayant pas présenté à la Commission, dans le délai imparti, les informations énumérées à l’article 19 de cette décision, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2, 3, 5, 6, 8, 9 et 11 à 19 de ladite décision.

La procédure précontentieuse

17 À la suite du prononcé de l’arrêt constatant le manquement, les services de la Commission ont échangé plusieurs courriers avec les autorités helléniques sur l’état d’avancement de la récupération des aides incompatibles.

18 Le Parlement hellénique a, dans ce contexte, adopté la loi no 4099/2012 qui est entrée en vigueur le 20 décembre 2012. Son article 169, paragraphe 2, énonce que, « [d]ès l’entrée en vigueur de la présente loi, le droit d’usage exclusif, octroyé à [ENAE] à l’article 1er, paragraphe 15, de la loi no 2302/1995 [...] tel que complété à l’article 6, paragraphe 1, de la loi no 2941/2011, est aboli dans la mesure où il concerne la partie du terrain de l’État ABK 266 d’une surface de [...] (216663,985
m2) indiquée [sur le plan topographique publié à l’annexe I de la présente loi] ainsi que la zone littorale située devant le terrain public ABK susmentionné. »

19 Le 11 janvier 2013, ENAE et ses propriétaires à cette date ont saisi la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale (ci-après le « tribunal arbitral CCI ») d’une action en indemnité contre la République hellénique en raison d’une prétendue violation, en premier lieu, d’un accord-cadre (Framework Agreement) conclu au mois de mars 2010 entre la République hellénique, ENAE, HDW, ThyssenKrupp et Abu Dhabi Mar LLC qui a racheté au cours de l’année 2009 75,1 % des actions
d’ENAE détenues par ThyssenKrupp, dont l’article 11 se référait à l’obligation de la République hellénique de récupérer l’aide d’État, en deuxième lieu, d’un accord d’exécution (Implementation Agreement) entre les mêmes parties à cet accord-cadre qui devait régler plusieurs différends concernant l’exécution des contrats « Archimède » et « Neptune II », et, en troisième lieu, des contrats de construction et de modernisation des sous-marins conclus dans le cadre de ces accords. Le 23 avril 2014, la
République hellénique a également introduit devant le tribunal arbitral CCI un recours en indemnité contre ENAE et ses actionnaires pour violation de l’accord d’exécution et des contrats de construction et de modernisation des sous-marins, et notamment de l’obligation de livrer les sous-marins dans les conditions et les délais prévus.

20 Le Parlement hellénique a, en outre, adopté la loi no 4237/2014 qui est entrée en vigueur le 12 février 2014 et dont l’article 12 énonce que, au vu des intérêts de la sécurité nationale de la République hellénique, la poursuite de toute forme d’exécution forcée contre les biens mobiliers et immobiliers d’ENAE est suspendue.

21 La République hellénique a, au moyen de l’article 26 de la loi no 4258/2014, qui est entrée en vigueur le 14 avril 2014, attribué à la marine de guerre le projet relatif à la construction et à la modernisation des sous-marins, en raison de la circonstance qu’ENAE n’a pas respecté ses engagements contractuels pour assurer les capacités opérationnelles nécessaires à la défense et à la sécurité nationales. Cette disposition prévoyait également que la marine de guerre poursuivrait sans contrepartie
les travaux sur les sous-marins dans les installations d’ENAE et verserait les salaires et les cotisations sociales des employés à titre d’indemnité pour leur travail.

22 Le 27 novembre 2014, considérant que la décision 2009/610 n’avait pas encore été exécutée, la Commission a envoyé une lettre de mise en demeure aux autorités helléniques conformément à l’article 260, paragraphe 2, TFUE leur octroyant un délai d’exécution de deux mois.

23 Par la lettre de mise en demeure, la Commission a noté que les autorités helléniques n’avaient pas récupéré le montant des aides incompatibles et ne lui avaient pas donné d’informations sur l’exécution de la décision 2009/610.

24 Les autorités grecques ont répondu à la lettre de mise en demeure par une lettre du 23 janvier 2015. D’une part, elles y ont fait état de l’attitude d’obstruction et de l’absence de toute coopération de la part d’ENAE dans la mise en œuvre des engagements repris dans la lettre du 1er décembre 2010. D’autre part, elles ont invoqué le besoin que cette société reste opérationnelle pour encore 18 à 20 mois afin que la marine de guerre puisse terminer, dans les installations d’ENAE, la construction et
la modernisation des sous-marins prévues par les contrats « Archimède » et « Neptune II ».

25 Le 4 décembre 2015, les autorités helléniques ont adressé à ENAE un ordre de recouvrement s’élevant à 523352889,23 euros, ce qui représentait environ 80 % du montant à récupérer, y compris les intérêts jusqu’à la date du 30 novembre 2015. Le 5 février 2016, ENAE a introduit un recours devant le Dioikitiko Protodikeio Athinon (tribunal administratif de première instance d’Athènes, Grèce) visant à obtenir l’annulation de cet ordre de recouvrement. Au cours du mois de mars 2016, les autorités
fiscales helléniques ont adopté des actes d’exécution dudit ordre de recouvrement. Le 13 avril 2016, ENAE a formé une opposition devant le même tribunal contre ces actes d’exécution. Le 23 mai 2016, ENAE a déposé auprès dudit tribunal des demandes de sursis à exécution des actes susmentionnés. La Commission est intervenue en qualité d’amicus curiae dans ces affaires en vertu de l’article 29, paragraphe 2, du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application
de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9).

26 Le 29 septembre 2016, le Dioikitiko Protodikeio Athinon (tribunal administratif de première instance d’Athènes) a rejeté les demandes de sursis à exécution déposées par ENAE.

27 À la suite de ces rejets, les autorités helléniques ont engagé, le 3 février 2017, une procédure d’exécution forcée sur les actifs civils d’ENAE. Le 6 février 2017, ces autorités ont procédé à des saisies-arrêts entre les mains de trois banques auprès desquelles ENAE détenait des comptes. Toutefois, la République hellénique n’a récupéré aucune somme en raison de saisies-arrêts précédentes effectuées par d’autres créanciers et en raison de la situation financière difficile de cette entreprise.

28 En parallèle, le 12 mai 2016, ENAE et ses actionnaires ont demandé au tribunal arbitral CCI des mesures conservatoires contre les actes administratifs nationaux adoptés par les autorités helléniques au mois de décembre 2015 et au mois de mars 2016 visant à la récupération des aides d’État en cause. Le tribunal arbitral CCI a rejeté cette demande en référé. Ils ont également demandé au tribunal arbitral CCI d’interdire aux autorités grecques d’initier une quelconque procédure de faillite contre
ENAE pendant la procédure arbitrale.

29 Par ordonnance provisoire du 5 août 2016, le tribunal arbitral CCI a rejeté cette demande d’ENAE et de ses actionnaires en jugeant qu’il ne pouvait interférer dans l’exécution de la décision 2009/610. Il a, toutefois, jugé que le recouvrement des aides en cause pourrait mettre ENAE en faillite et a donc interdit à la République hellénique de prendre une mesure de nationalisation de cette société, de prendre l’administration de ladite société sous son contrôle ou de soumettre celle-ci et ses
actifs à une procédure d’insolvabilité, sans l’en informer préalablement.

30 Le 13 février 2017, les autorités helléniques ont informé la Commission de leur intention de soumettre ENAE à une procédure de liquidation spéciale en vertu de la loi no 4307/2014, qui est entrée en vigueur le 15 novembre 2014 (ci-après la « gestion spéciale »), et ont demandé à rencontrer la Commission afin de discuter des conditions de mise en œuvre de cette procédure.

31 C’est dans ces conditions que la Commission a introduit, le 22 février 2017, le présent recours.

Les développements après la saisine de la Cour

32 Une réunion relative au placement d’ENAE sous la gestion spéciale a eu lieu le 8 mars 2017. Lors de cette réunion, les autorités helléniques ont présenté à la Commission un plan détaillé en vue de placer ENAE sous la gestion spéciale proposée.

33 Le 21 mars 2017, deux réservoirs flottants appartenant à ENAE ont été saisis.

34 Le 10 avril 2017, ENAE a introduit une demande en référé devant le tribunal arbitral CCI tendant à l’adoption de mesures conservatoires qui interdiraient aux autorités helléniques de lancer une procédure visant à soumettre cette société à une gestion spéciale en vertu de la loi no 4307/2014. Le tribunal arbitral CCI a rappelé, dans sa décision du 27 juin 2017, que sa sentence était imminente. Il a donc jugé que l’ouverture d’une procédure de gestion spéciale à l’encontre d’ENAE aurait pour effet
de priver les actionnaires de celle-ci de leur contrôle sur la société et que l’administrateur spécial, choisi par les créanciers, pourrait prendre des décisions affectant la position d’ENAE dans la procédure arbitrale. Dans ce contexte, le tribunal arbitral CCI a décidé que les autorités helléniques devraient s’abstenir, jusqu’à l’adoption de sa sentence finale, de toute mesure de recouvrement qui conduirait, directement ou indirectement, à une modification du contrôle de la gestion d’ENAE, y
compris les procédures de faillite et le placement de cette société sous gestion spéciale.

35 Le 29 juin 2017, les autorités helléniques ont envoyé une lettre à ENAE l’invitant à régler les 20 % restants du montant des aides à récupérer, y compris les intérêts jusqu’au 30 juin 2017, à savoir 95098200,99 euros. Ce règlement n’ayant pas été effectué, les autorités fiscales ont été chargées de récupérer ce montant par lettre du 31 juillet 2017 de l’Ypourgeio Oikonomias kai Anaptyxis (ministère de l’Économie et du Développement, Grèce).

36 Le 12 octobre 2017, les autorités helléniques ont engagé une procédure devant les juridictions grecques pour soumettre ENAE à la procédure de gestion spéciale instaurée à l’article 68 de la loi no 4307/2014 qui est entrée en vigueur le 15 novembre 2014.

37 Au cours de la procédure, la Cour a fait droit à trois demandes de la République hellénique concernant la production de nouveaux documents en application de l’article 128, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour. À chaque fois, un délai a été imparti à la Commission pour lui permettre de prendre position sur ces documents.

38 Il ressort desdits documents, premièrement, que, par son arrêt no 725/2018, du 8 mars 2018, le Monomeles Protodikeio Athinon (tribunal de grande instance à juge unique d’Athènes, Grèce) a fait droit à la demande des autorités grecques, a mis ENAE en gestion spéciale et a nommé un gestionnaire spécial.

39 Deuxièmement, ces mêmes documents font ressortir le fait que, le 26 mars 2018, l’autorité indépendante des revenus publics a essayé, par une déclaration de créance faite le 22 mars 2018, de produire auprès de l’administrateur spécial les créances de la République hellénique relatives à la restitution des aides concernées dans le cadre de la procédure de gestion spéciale de cette société. Plus particulièrement, cette autorité a annoncé un montant de 713883282,19 euros avec les majorations dues
pour paiement tardif de la créance. Ce montant inclut les montants de 524896095,75 euros et de 95171888,92 euros que l’État grec doit récupérer pour se conformer à la décision 2009/610 et ainsi à l’arrêt constatant le manquement.

40 L’administrateur spécial a reçu notification de toutes ces actions par une lettre recommandée déposée à la poste.

41 Troisièmement, il ressort des documents produits par la République hellénique en application de l’article 128, paragraphe 2, du règlement de procédure que, le 26 juin 2018, au moyen d’un protocole de livraison, ENAE, représentée par son administrateur spécial, a livré la possession du terrain ABK 266 ainsi que de la partie du littoral située devant celui-ci à l’Etaireia Akiniton Dimosiou A.E. (Société des Biens Immobiliers de l’État SA, ci-après « ETAD »).

Sur le manquement

Argumentation des parties

42 La Commission reproche à la République hellénique de ne pas avoir pris les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt constatant le manquement, dès lors que plusieurs années se sont passées tant après l’adoption de la décision 2009/610 qu’après le prononcé de cet arrêt sans que les autorités helléniques aient récupéré les aides d’État en cause auprès d’ENAE.

43 En premier lieu, la Commission fait valoir que la République hellénique n’a pas pris toutes les mesures qui sont en principe nécessaires aux fins de l’exécution d’une décision telle que la décision 2009/610.

44 En effet, les autorités helléniques, en instaurant le moratoire prévu à l’article 12 de la loi no 4237/2014, auraient rendu plus difficile le recouvrement des aides.

45 Ce ne serait qu’aux mois de décembre 2015 et de mars 2016 que les autorités helléniques auraient adopté des actes administratifs nationaux visant à effectuer une récupération partielle des aides d’État en cause auprès d’ENAE. Cependant, ces actes n’auraient pas abouti à la récupération d’un quelconque montant auprès de cette entreprise.

46 En second lieu, la Commission fait valoir que la République hellénique n’a pas non plus respecté les engagements détaillés dans la lettre du 1er décembre 2010, ces derniers étant considérés comme une méthode alternative d’exécution de la décision 2009/610.

47 À cet égard, la Commission soutient, premièrement, que la vente des actifs civils d’ENAE n’a pas eu lieu et que celle-ci contestait la liste des actifs civils.

48 Deuxièmement, la Commission fait valoir que, bien que le Parlement hellénique ait voté une loi concernant la restitution de la cale sèche, la République hellénique n’a pas encore transmis de carte pertinente indiquant avec précision la zone restituée ni une preuve de ce que les terrains ne sont plus utilisés par ENAE.

49 Troisièmement, hormis la résolution prise par le conseil d’administration d’ENAE le 14 avril 2010, selon laquelle cette entreprise cesserait ses activités civiles, les autorités helléniques n’auraient fourni aucune autre preuve démontrant que ladite entreprise s’est abstenue de toute activité civile depuis la date de cette résolution.

50 Quatrièmement, ces autorités n’auraient jamais envoyé de documents démontrant que la garantie d’indemnisation mentionnée à l’article 16 de la décision 2009/610 a été abolie et qu’elle n’a jamais été utilisée.

51 Cinquièmement, lesdites autorités n’auraient jamais présenté de rapport sur l’avancement de la mise en œuvre de cette décision.

52 Sixièmement, la Commission rappelle que le seul moyen de défense susceptible d’être invoqué par la République hellénique est celui tiré d’une impossibilité absolue d’exécuter correctement la décision 2009/610, en établissant l’absence d’actifs récupérables. Or, dans un tel cas, l’État membre devrait provoquer la liquidation et la cessation définitive de l’activité de l’entreprise bénéficiaire.

53 En l’espèce, les autorités helléniques n’auraient jamais invoqué une impossibilité absolue de récupérer les aides en cause. D’une part, elles se seraient bornées à affirmer qu’une récupération complète entraînerait la liquidation des chantiers navals, ce qui aurait un impact négatif sur les intérêts de la défense nationale, et, d’autre part, elles auraient imputé le défaut de récupération à l’obstruction de la part d’ENAE, alors qu’une telle obstruction ne justifierait pas la non-exécution de la
décision 2009/610.

54 Quant aux intérêts de la défense nationale invoqués par la République hellénique qui ne concerneraient que la construction des sous-marins dans les installations d’ENAE pour la marine de guerre, la Commission fait observer que la dérogation prévue à l’article 346 TFUE concerne des cas exceptionnels et clairement déterminés et ne se prête donc pas à une interprétation extensive. Dès lors, il appartiendrait à cet État membre de démontrer que cette dérogation est nécessaire pour la protection de ses
intérêts essentiels de sécurité.

55 Dans ce contexte, la Commission conteste le bien-fondé des intérêts de sécurité invoqués par la République hellénique. Les autorités helléniques n’auraient jamais expliqué pourquoi la construction et la modernisation des sous-marins devaient nécessairement avoir lieu dans les installations d’ENAE et non dans celles d’autres chantiers navals grecs, notamment après l’attribution à la marine de guerre, prévue à l’article 26 de la loi no 4258/2014, du projet de construction et de modernisation des
sous-marins.

56 La République hellénique rétorque qu’elle a pris toutes les mesures nécessaires en vue de l’exécution de l’arrêt constatant le manquement.

57 Cet État membre fait observer que l’article 12 de la loi no 4237/2014 ne constitue pas une mesure qui rendrait plus difficile la récupération des aides en cause puisque la suspension de l’exécution forcée contre les actifs d’ENAE prévue à cet article ne s’appliquerait que dans la mesure où une exécution forcée affecte la construction et l’entretien des sous-marins de la marine militaire, ce qui serait conforme à l’article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE. Par ailleurs, la circonstance que les
autorités helléniques ont ultérieurement pris des mesures d’exécution contre ENAE démontrerait que l’article 12 de cette loi n’empêche pas de procéder à cette récupération.

58 La République hellénique invoque, ensuite, ses intérêts essentiels de sécurité, au sens de l’article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE, en faisant valoir qu’une récupération ne doit entraver ni la poursuite des activités militaires du plus grand et plus productif chantier naval en Grèce ni le large pouvoir d’appréciation dont elle dispose pour choisir les mesures qu’elle estime nécessaires.

59 En effet la République hellénique ne pourrait pas provoquer la faillite d’ENAE, dans la mesure où cette procédure affecterait l’ensemble des actifs de cette entreprise et mettrait en péril la bonne continuation des activités militaires du chantier naval et, partant, les capacités de défense de cet État membre. C’est pour ces raisons que les autorités helléniques auraient donné une priorité à la mise en œuvre des engagements dont fait état la lettre du 1er décembre 2010.

60 À cet égard, la République hellénique fait remarquer, en ce qui concerne la vente des actifs civils d’ENAE, qu’elle s’est heurtée à l’obstruction de cette société qui n’était pas d’accord avec la liste des actifs civils destinés à être vendus.

61 En raison de ces obstructions, les autorités helléniques auraient adressé à ladite société des ordres de recouvrement et des saisies-arrêts.

62 Ces mesures n’ayant donné lieu à aucun remboursement en raison de saisies-arrêts antérieures d’autres créanciers et de l’absence manifeste d’actifs suffisants d’ENAE, les autorités helléniques auraient estimé qu’il convenait de soumettre cette société à une gestion spéciale en vertu des dispositions de la loi no 4307/2014. En effet, selon la République hellénique, après l’attribution des activités de construction des sous-marins à la marine militaire, les autorités helléniques pouvaient prendre
des mesures de liquidation contre ENAE sans compromettre l’exécution de programmes militaires.

63 Dans ce contexte, la République hellénique soutient que la soumission d’ENAE à une gestion spéciale est la mesure appropriée pour liquider cette société, cette mesure étant en pleine conformité avec les exigences du droit de l’Union puisque la procédure permet la vente aux enchères publiques de tout ou partie des branches ou d’actifs isolés de ladite société sous la responsabilité d’un administrateur indépendant et sous contrôle judiciaire. Cette procédure de gestion spéciale, qui pourrait être
achevée dans une période de douze mois à compter de la désignation de l’administrateur spécial, assurerait au moins les mêmes garanties que celles de la procédure de faillite ordinaire et présenterait une rapidité et une transparence beaucoup plus grandes. Ladite procédure permettrait d’éviter une dépréciation de la valeur des actifs concernés et garantirait la vente des actifs militaires d’ENAE comme une branche unique, conformément aux intérêts essentiels de sécurité de la République
hellénique.

64 En ce qui concerne la restitution des terrains octroyés à ENAE pour son usage exclusif, la République hellénique soutient que, le 20 décembre 2012, le droit d’utilisation de ces terrains a été abrogé par l’article 169, paragraphe 2, de la loi no 4099/2012. La République hellénique affirme que des copies de la retranscription au bureau du registre des hypothèques compétent géographiquement, communiquées à la Commission, font apparaître que lesdits terrains ont été restitués. Selon cet État membre,
la circonstance que ces mêmes terrains ne sont plus utilisés par ENAE résulte du fait que cette entreprise n’exerce aucune activité civile depuis 2010.

65 Par ailleurs, la République hellénique estime que la restitution des terrains en cause est une mesure d’exécution de la décision 2009/610, car, en l’absence d’actifs suffisants, les autorités helléniques sont tenues de procéder à la liquidation de tous les actifs civils d’ENAE. Cela étant, cet État membre soutient que l’évaluation de ces mêmes terrains, aux prix de 2008, démontre qu’ils représentent 60 % de la valeur totale des actifs civils d’ENAE ou 58 % de l’infrastructure non militaire du
chantier naval. Eu égard à ce calcul, la vente des actifs civils d’ENAE ne concernerait en réalité qu’une petite partie de la valeur de la branche civile de cette entreprise.

66 S’agissant de la cessation des activités civiles d’ENAE, la République hellénique fait valoir que le conseil d’administration de cette société a expressément adopté une décision sur ce point et que la nouvelle administration de ladite société a confirmé à plusieurs reprises qu’ENAE n’exerce plus aucune activité civile depuis l’année 2010. Cet État membre ajoute qu’ENAE n’a pas publié de bilan après le 30 septembre 2011 en raison de sa mauvaise situation économique.

67 Enfin, en ce qui concerne la garantie d’indemnisation visée à l’article 16 de la décision 2009/610, la République hellénique fait valoir que c’est à ENAE qu’il revient de la dénoncer. En outre, cet État membre constate que la question de l’application de cette garantie ne s’est posée dans aucune affaire de telle sorte que les autorités helléniques n’ont pas été en mesure d’invoquer la nullité de celle-ci.

Appréciation de la Cour

68 À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’État membre destinataire d’une décision l’obligeant à récupérer des aides illégales déclarées incompatibles avec le marché intérieur est tenu, en vertu de l’article 288 TFUE, de prendre toutes les mesures propres à assurer l’exécution de cette décision. Il doit parvenir à un recouvrement effectif des sommes dues afin d’éliminer la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel procuré par
ces aides (arrêt du 9 novembre 2017, Commission/Grèce, C‑481/16, non publié, EU:C:2017:845, point 23).

69 En effet, la récupération d’une aide illégale déclarée incompatible avec le marché intérieur doit être effectuée sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l’État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission. À cette fin, les États membres concernés sont tenus de prendre toutes les mesures prévues par leurs systèmes juridiques respectifs, y compris les mesures provisoires, sans
préjudice du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 9 novembre 2017, Commission/Grèce, C‑481/16, non publié, EU:C:2017:845, point 24).

70 S’agissant des hypothèses dans lesquelles les aides d’État illégalement versées doivent être récupérées auprès d’entreprises bénéficiaires en difficulté ou en état de faillite, il y a lieu de rappeler que de telles difficultés n’affectent pas l’obligation de récupération de l’aide. L’État membre est, dès lors, tenu, selon le cas, de provoquer la liquidation de la société, de faire inscrire sa créance au passif de celle-ci ou de prendre toute autre mesure permettant le remboursement de l’aide
(arrêt du 17 janvier 2018, Commission/Grèce, C‑363/16, EU:C:2018:12, point 36).

71 Or, dans le cas d’espèce, il ressort du dossier que, au vu de la situation économique difficile d’ENAE et afin de ne pas mettre cette société en faillite, de ne pas compromettre l’exécution des programmes « Archimède » et « Neptune II » pour la marine de guerre et, ainsi, de ne pas porter atteinte aux intérêts essentiels de sécurité de la République hellénique, au sens de l’article 346 TFUE, la Commission, cet État membre et ENAE s’étaient engagés à mettre en œuvre une méthode alternative de
récupération pour que la Commission puisse considérer la décision 2009/610 comme pleinement exécutée.

72 Dès lors, afin de déterminer si la République hellénique a adopté toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt constatant le manquement, il y a lieu de vérifier si cet État membre a respecté les engagements détaillés dans la lettre du 1er décembre 2010 ou si les aides d’État en cause, telles que définies aux articles 2, 3, 5, 6, 8, 9 et 11 à 15 de la décision 2009/610 ont été intégralement récupérées par ledit État membre et si les informations énumérées à l’article 19 de cette
décision ont été présentées à la Commission.

73 Il convient de préciser d’emblée que, en ce qui concerne la procédure en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, il y a lieu de retenir comme date de référence pour apprécier l’existence d’un tel manquement celle de l’expiration du délai fixé dans la lettre de mise en demeure émise en vertu de cette disposition (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 32).

74 En l’occurrence, ainsi qu’il a été rappelé au point 22 du présent arrêt, la Commission ayant envoyé, le 27 novembre 2014, à la République hellénique une lettre de mise en demeure, conformément à la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 2, TFUE, la date de référence mentionnée au point précédent est celle de l’expiration du délai fixé dans cette lettre, à savoir le 27 janvier 2015.

75 Or, en ce qui concerne les engagements visés dans la lettre du 1er décembre 2010, il est constant que, à cette date du 27 janvier 2015, les autorités helléniques ne les ont pas respectés.

76 En effet, il ressort du dossier que la seule mesure prise par la République hellénique à ladite date est l’adoption de la loi no 4099/2012 qui est entrée en vigueur le 20 décembre 2012.

77 Toutefois, il y a lieu de préciser, à cet égard, qu’il ressort du dossier que tant le tribunal arbitral CCI que le Monomeles Protodikeio Athinon (tribunal de grande instance à juge unique d’Athènes) ont constaté que, malgré l’entrée en vigueur de cette loi, ENAE n’avait pas effectivement restitué le terrain public visé par la concession de la cale sèche.

78 Selon le protocole du 26 juin 2018, ENAE a effectué la livraison de la possession du terrain ABK 266, y compris la cale sèche dont l’utilisation lui avait été octroyée par une concession, ainsi que de la partie du littoral située devant celui-ci. La République hellénique n’a cependant pas démontré que cette société avait effectivement livré à l’État grec la possession de ce terrain avant le 27 janvier 2015.

79 Ainsi, il ne peut être constaté qu’ENAE a renoncé à la concession de la cale sèche comme requis par les engagements visés dans la lettre du 1er décembre 2010.

80 En ce qui concerne l’argument de la République hellénique selon lequel la circonstance que ledit terrain n’est plus utilisé par ENAE résulte du fait que cette société n’exerce aucune activité civile depuis l’année 2010, ce qui ressortirait de la décision du conseil d’administration de ladite société en date du 14 avril 2010, il y a lieu de constater qu’il ne ressort ni de cette décision ni du dossier qu’ENAE a interrompu ses activités civiles au sens des engagements visés dans la lettre du
1er décembre 2010.

81 En effet, ladite décision du conseil d’administration ne peut pas viser l’engagement d’interruption des activités civiles d’ENAE pour une période de quinze ans à compter du 1er décembre 2010, puisqu’elle date d’avant la lettre d’engagement d’ENAE, du 27 octobre 2010. Cette décision se borne à mentionner le fait que, en relation avec un accord de prêt d’ENAE, « l’activité non navale est actuellement entièrement interrompue ».

82 En outre, invitée par la Cour, la République hellénique n’a pas été en mesure de fournir des documents susceptibles de démontrer qu’ENAE a respecté l’obligation de cessation de ses activités civiles pour une période de quinze ans.

83 Dès lors, faute d’avoir démontré qu’ENAE a interrompu ses activités civiles à compter du 1er décembre 2010, la République hellénique n’a pas prouvé que cette sociétén’utilisait plus le terrain public visé par la concession de la cale sèche.

84 S’agissant de l’engagement relatif à la vente des actifs civils d’ENAE ou leur restitution à l’État grec, il est manifeste que cette vente ou cette restitution n’a pas eu lieu. Partant, cet engagement n’a pas été respecté.

85 Concernant la garantie d’indemnisation visée à l’article 16 de la décision 2009/610, il convient de noter que, selon la lettre du 1er décembre 2010, ENAE devait y renoncer et n’introduire aucune procédure sur la base de celle-ci ou en connexion avec celle-ci. Il ne ressort pas du dossier que pareille renonciation ait eu lieu ni que la République hellénique ait aboli cette garantie par voie législative. Elle n’a donc pas respecté cet engagement.

86 Selon l’accord entre la Commission, la République hellénique et ENAE résultant de la lettre du 1er décembre 2010, tous les engagements devaient être respectés afin de pouvoir établir que la décision 2009/610 a été correctement exécutée. Partant, il suffit qu’un seul de ces engagements ne soit pas respecté pour constater l’échec de cette méthode de récupération. Or, il y a lieu de constater que les engagements énumérés au point 13 du présent arrêt n’ont pas été respectés.

87 Quant à l’obligation principale de la République hellénique de récupérer intégralement les aides d’État en cause, telles que définies aux articles 2, 3, 5, 6, 8, 9 et 11 à 15 de la décision 2009/610, il suffit de constater qu’il est manifeste que les autorités helléniques n’ont pas respecté cette obligation et qu’elles n’ont pas présenté à la Commission les informations énumérées à l’article 19 de cette décision.

88 En ce qui concerne l’argument de la République hellénique selon lequel ses intérêts essentiels de sécurité, au sens de l’article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE, ne lui permettaient pas de provoquer la faillite d’ENAE, dans la mesure où une telle procédure aurait affecté l’ensemble des actifs de cette société et aurait mis en péril la bonne continuation des activités militaires du chantier naval et, partant, les capacités de défense de cet État membre, alors qu’il existait une mesure plus
appropriée pour liquider ladite société, qui tenait compte des intérêts essentiels de sécurité dudit État membre, à savoir la soumission de celle-ci à une gestion spéciale, il y a lieu de préciser que la possibilité de soumettre ENAE à une gestion spéciale était ouverte aux autorités helléniques avant l’expiration du délai fixé dans la lettre de mise en demeure, à savoir le 27 janvier 2015, la loi no 4307/2014 étant entrée en vigueur le 15 novembre 2014.

89 Or, il ressort du dossier que la demande pour le déclenchement de cette procédure n’a été introduite que le 12 octobre 2017.

90 Partant, à supposer même que la République hellénique puisse valablement invoquer ses intérêts essentiels de sécurité, au sens de l’article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE, au stade de la récupération des aides d’État en cause, il suffit de relever que cet État membre n’avait pas pris, à la date du 27 janvier 2015, la mesure qu’il considère lui-même appropriée au regard de ses intérêts essentiels de sécurité.

91 Ainsi, la République hellénique ne saurait valablement soutenir qu’elle a pris toutes les mesures nécessaires afin de mettre en œuvre la procédure de récupération des aides d’État en cause. Partant, l’arrêt constatant le manquement demeure, au 27 janvier 2015, inexécuté.

92 Par conséquent, il y a lieu de constater que, en n’ayant pas pris, à la date à laquelle a expiré le délai imparti, toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt constatant le manquement, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE.

Sur les sanctions pécuniaires

Sur l’astreinte

Argumentation des parties

93 En premier lieu, la Commission estime que le manquement reproché à la République hellénique perdure au moment de l’examen des faits par la Cour.

94 Plus particulièrement, en ce qui concerne la déclaration de créance du 22 mars 2018 par laquelle la République hellénique a informé l’administrateur spécial d’ENAE de ses créances relatives à la restitution des aides concernées dans le cadre de la procédure de gestion spéciale de cette société, la Commission estime que c’est l’inscription au tableau des créances de celles relatives à la restitution des aides concernées qui peut être considérée comme étant, en principe, une mesure appropriée
susceptible d’assurer l’élimination de la distorsion de concurrence pour autant qu’une telle mesure est suivie soit de la récupération de l’intégralité du montant desdites aides, soit de la liquidation de l’entreprise et de la cessation définitive de ses activités, si une telle récupération reste impossible au cours de la procédure de faillite. La simple déclaration de ces créances ne suffit pas pour faire regarder cet État membre comme s’étant acquitté de son obligation de récupération. La
Commission ajoute que, conformément à l’article 77 de la loi no 4307/2014, l’inscription formelle au tableau des créances est effectuée après le transfert des actifs de l’entreprise concernée résultant de la gestion spéciale à laquelle cette entreprise est soumise, et non pas avant ce transfert.

95 En ce qui concerne le protocole de livraison par lequel ENAE a livré la possession du terrain ABK 266 ainsi que de la partie du littoral située devant celui-ci à ETAD, la Commission observe que ce protocole date du 26 juin 2018. Partant, cette livraison serait tardive puisque, selon la lettre de 1er décembre 2010, elle aurait dû être effectuée dans les six mois suivant cette lettre. Par ailleurs, la Commission fait valoir que la République hellénique n’a pas encore transmis une carte indiquant
clairement les terrains rendus à l’État ni d’éléments de preuves démontrant qu’ENAE n’utilise plus ces terrains.

96 En second lieu, s’agissant du montant de l’astreinte, la Commission se fonde sur sa communication SEC(2005) 1658, du 12 décembre 2005, intitulée « Mise en œuvre de l’article [260 TFUE] » (JO 2007, C 126, p. 15), pour proposer que le montant de l’astreinte journalière soit calculé en multipliant un forfait de base uniforme de 670 euros par un coefficient de gravité de 5 sur une échelle de 1 à 20 et un coefficient de durée de 3, soit le coefficient maximal. Le résultat obtenu serait ensuite
multiplié par un facteur « n », calculé à 3,48 pour la République hellénique, qui est destiné à refléter la capacité de paiement de l’État membre incriminé et qui prend à cette fin comme éléments le produit intérieur brut (PIB) de cet État membre et le nombre de voix dont il dispose au Conseil.

97 En ce qui concerne le coefficient de gravité, la Commission souligne le caractère fondamental des dispositions du traité FUE en matière d’aides d’État, l’effet préjudiciable que les aides incompatibles et non récupérées ont eu sur le secteur naval, le montant considérable de l’aide non récupérée et la répétition du comportement infractionnel de cet État membre dans le domaine des aides d’État.

98 S’agissant du coefficient de durée, la Commission observe que le manquement persiste depuis plusieurs années à compter du prononcé de l’arrêt constatant le manquement, et plus de 8 ans depuis la notification de la décision 2009/610.

99 Quant au facteur « n », la Commission fait valoir que le calcul doit être effectué sur la base de l’évolution du PIB de la République hellénique durant l’année la plus récente pour laquelle des données économiques fiables sont disponibles et de la pondération des voix de cet État membre au Conseil.

100 Pour ce qui est de la pondération des voix au Conseil, la Commission estime que la modification du système de vote au Conseil à partir du 1er avril 2017 ne signifie pas qu’elle est tenue d’adapter sa proposition de facteur « n ». Elle ajoute que, au moment de l’introduction du recours, l’ancien système de pondération des voix n’avait pas expiré. Par conséquent, le facteur qui résulte de l’ancien système de pondération des voix continuerait d’être une base de référence utile pour le calcul des
sanctions.

101 Dans ces conditions, la Commission considère qu’une astreinte de 34974 euros par jour est adaptée aux circonstances et proportionnée au manquement allégué ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné.

102 La République hellénique fait valoir, en premier lieu, qu’elle a, par la déclaration de créance du 22 mars 2018, produit ses créances dans le cadre de la procédure de gestion spéciale à l’administrateur spécial d’ENAE.Cet État membre ajoute que cette société a aussi, au moyen du protocole du 26 juin 2018, effectué la livraison de la possession du terrain ABK 266, y compris la cale sèche dont l’utilisation lui a été octroyée par une concession, ainsi que de la partie du littoral située devant
celui-ci. Selon ledit État membre, cette livraison de possession est une partie importante de l’exécution de l’obligation de récupération des aides d’État en cause.

103 En second lieu, la République hellénique conteste les coefficients de gravité et de durée de l’infraction retenus par la Commission.

104 À cet égard, elle fait valoir que la Commission n’a pas pris en compte une série d’éléments qui atténuent la gravité de l’infraction, comme le fait qu’ENAE n’a plus aucune activité civile depuis l’année 2010 et ainsi n’exerce plus aucune pression concurrentielle sur d’autres entreprises du secteur naval. Elle fait également état de plusieurs difficultés qu’elle a rencontrées lors de l’exécution de la décision 2009/610, dont notamment la décision du tribunal arbitral CCI du 27 juin 2017. Elle
conteste aussi la prétendue répétition du comportement infractionnel de sa part dans le domaine des aides d’État. Pour ces raisons, elle considère que les coefficients de gravité et de durée ne peuvent être supérieurs à 1.

105 Pour ce qui est de la capacité de paiement, la République hellénique considère, d’une part, que le facteur « n » doit être mis à jour, à l’aide des données financières les plus récentes. À cet égard, cet État membre soutient que la Commission n’a pas tenu compte de la situation réelle de l’économie hellénique et, en particulier, du fait que ledit État membre est toujours soumis à un programme d’ajustement macroéconomique étant donné qu’il ne peut se financer efficacement sur les marchés
financiers.

106 D’autre part, la République hellénique estime que le facteur « n » n’est pas correctement calculé puisque, à partir du 1er avril 2017, le traité a définitivement abandonné le système des voix pondérées au sein du Conseil et l’a remplacé par un système de double majorité d’États membres et de populations selon lequel chaque État membre n’a qu’une seule voix au sein du Conseil. La République hellénique considère ainsi que les États membres dont la population et le PIB sont comparables aux siens
ont subi une baisse sérieuse de leur influence au sein du Conseil.

Appréciation de la Cour

107 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’il appartient à la Cour, dans chaque affaire et en fonction des circonstances de l’espèce dont elle se trouve saisie ainsi que du niveau de persuasion et de dissuasion qui lui paraît requis, d’arrêter les sanctions pécuniaires appropriées, notamment pour prévenir la répétition d’infractions analogues au droit de l’Union (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 63).

108 Selon une jurisprudence constante de la Cour, l’infliction d’une astreinte ne se justifie, en principe, que pour autant que perdure le manquement tiré de l’inexécution d’un précédent arrêt jusqu’à l’examen des faits par la Cour (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 64).

109 En l’occurrence, la République hellénique soutient que, à la date de l’examen des faits par la Cour, elle a exécuté les engagements détaillés dans la lettre du 1er décembre 2010 et la décision 2009/610.

110 À cet égard, la République hellénique fait valoir qu’elle a produit ses créances dans le cadre de la procédure de gestion spéciale à l’administrateur spécial d’ENAE et qu’elle a effectué la livraison de la possession du terrain ABK 266, y compris la cale sèche dont l’utilisation lui a été octroyée par une concession, ainsi que de la partie du littoral située devant celui-ci.

111 S’agissant, en premier lieu, de l’argumentation concernant la production des créances, en l’espèce, il est manifeste que, à la date de l’examen des faits par la Cour, la République hellénique n’a pas inscrit au tableau des créances celles relatives à la restitution des aides concernées. En effet, il ne ressort pas du dossier que l’administrateur spécial a inscrit ces créances au tableau de créances. Par ailleurs, conformément à l’article 77 de la loi no 4307/2014, l’inscription formelle au
tableau des créances est effectuée après le transfert des actifs de l’entreprise concernée résultant de la gestion spéciale à laquelle cette entreprise est soumise, et non pas avant ce transfert. Or, il est constant qu’un tel transfert d’actifs n’a pas eu lieu. Ainsi, la République hellénique ne peut pas utilement faire valoir qu’elle a, par la déclaration de créance du 22 mars 2018, produit ses créances dans le cadre de la procédure de gestion spéciale à l’administrateur spécial d’ENAE.

112 En tout état de cause, l’inscription au tableau des créances de celles relatives à la restitution des aides concernées ne suffit pas, à elle seule, pour satisfaire à l’obligation d’exécuter l’arrêt constatant le manquement (arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 103). En effet, une telle inscription est considérée comme étant, en principe, une mesure appropriée susceptible d’assurer l’élimination de la distorsion de concurrence pour autant qu’une telle
mesure est suivie soit de la récupération de l’intégralité du montant desdites aides, soit de la liquidation de l’entreprise et de la cessation définitive de ses activités, si une telle récupération reste impossible au cours de la procédure de faillite (arrêt du 17 janvier 2018, Commission/Grèce, C‑363/16, EU:C:2018:12, point 42).

113 S’agissant, en second lieu, de l’argumentation concernant la livraison de la possession du terrain ABK 266, il suffit de préciser que, en tout état de cause, il ne s’agit que d’une exécution partielle de l’obligation de récupération. Ce transfert n’assure pas, à lui seul, le recouvrement intégral des aides d’État en cause ni le respect de tous les engagements détaillés dans la lettre du 1er décembre 2010.

114 Partant, la République hellénique ne saurait prétendre qu’elle a pris, à la date de l’examen des faits par la Cour, toutes les mesures nécessaires aux fins de l’exécution de l’arrêt constatant le manquement.

115 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que le manquement reproché à la République hellénique a perduré jusqu’à l’examen des faits de l’espèce par la Cour.

116 Dans ces conditions, la condamnation de la République hellénique au paiement d’une astreinte constitue un moyen financier approprié afin d’inciter cette dernière à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin au manquement constaté et pour assurer l’exécution complète de l’arrêt constatant le manquement.

117 Il est de jurisprudence constante que l’astreinte doit être arrêtée en fonction du degré de persuasion nécessaire pour que l’État membre défaillant à exécuter un arrêt en manquement modifie son comportement et mette fin à l’infraction incriminée (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 68).

118 Dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation en la matière, il incombe à la Cour de fixer l’astreinte de telle sorte que celle-ci soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 69).

119 Les propositions de la Commission concernant l’astreinte ne sauraient lier la Cour et ne constituent qu’une base de référence utile. De même, des lignes directrices telles que celles contenues dans les communications de la Commission ne lient pas la Cour, mais contribuent à garantir la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de l’action menée par la Commission elle-même lorsque cette institution fait des propositions à la Cour. En effet, dans le cadre d’une procédure fondée sur
l’article 260, paragraphe 2, TFUE, relative à un manquement qui persiste de la part d’un État membre nonobstant le fait que ce même manquement a déjà été constaté à l’occasion d’un premier arrêt rendu au titre de l’article 258 TFUE ou de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, la Cour doit demeurer libre de fixer l’astreinte infligée au montant et sous la forme qu’elle considère adéquats pour inciter cet État membre à mettre fin à l’inexécution des obligations découlant de ce premier arrêt de la Cour
(voir, en ce sens, arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 70).

120 Aux fins de la fixation du montant de l’astreinte, les critères de base qui doivent être pris en considération pour assurer la nature coercitive de cette dernière, en vue d’une application uniforme et effective du droit de l’Union, sont, en principe, la gravité de l’infraction, sa durée et la capacité de paiement de l’État membre en cause. Pour l’application de ces critères, il y a lieu de tenir compte, en particulier, des conséquences du défaut d’exécution sur les intérêts privés et publics
ainsi que de l’urgence qu’il y a à ce que l’État membre concerné se conforme à ses obligations (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 71).

121 En premier lieu, s’agissant de la gravité de l’infraction, il convient de souligner, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 124 de ses conclusions, le caractère fondamental des dispositions du traité en matière d’aides d’État.

122 En effet, les règles faisant l’objet de la décision 2009/610 et de l’arrêt constatant le manquement constituent l’expression de l’une des missions essentielles conférée à l’Union européenne en vertu de l’article 3, paragraphe 3, TUE, à savoir l’établissement d’un marché intérieur, ainsi que du protocole (no 27) sur le marché intérieur et la concurrence, lequel, en application de l’article 51 TUE, fait partie intégrante des traités, et aux termes duquel le marché intérieur comprend un système
garantissant que la concurrence n’est pas faussée.

123 L’importance des dispositions de l’Union enfreintes dans un cas tel que celui de la présente espèce se reflète notamment dans le fait que, par le remboursement des aides déclarées illégales et incompatibles avec le marché intérieur, se trouve éliminée la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel procuré par celles-ci et que, par cette restitution, le bénéficiaire perd l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents (arrêt du 11 décembre 2012,
Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 127).

124 Quant au manquement constaté dans la présente affaire, il convient de rappeler, premièrement, que la République hellénique n’a ni récupéré intégralement les aides d’État en cause ni respecté les engagements, détaillés dans la lettre du 1er décembre 2010. Toutefois, au vu du principe rappelé au point 118 du présent arrêt selon lequel l’astreinte doit être adaptée aux circonstances et proportionnée au manquement constaté, il convient de tenir compte du fait qu’ENAE, représentée par son
administrateur spécial, a livré la possession du terrain ABK 266, y compris la cale sèche dont l’utilisation lui a été octroyée par une concession, ainsi que la partie du littoral située devant celui-ci à ETAD et que ce terrain représente une partie importante des actifs civils d’ENAE.

125 Deuxièmement, il y a lieu de souligner le caractère considérable du montant de l’aide non récupérée. En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 125 de ses conclusions, le montant à récupérer augmente continuellement des intérêts applicables et excédait, au moment de l’audience, 670 millions d’euros, soit plus de 2,6 fois le montant initial.

126 Troisièmement, il convient de tenir compte du fait que le marché de la construction navale est transfrontalier. Ce secteur économique est dispersé dans la quasi-totalité des États membres. Par conséquent, l’effet préjudiciable des aides incompatibles non récupérées aurait un impact sur des entreprises non seulement en Grèce, mais aussi dans le reste de l’Union.

127 Quatrièmement, en ce qui concerne l’argument de la République hellénique selon lequel il existe des circonstances affaiblissant la gravité de l’infraction, en particulier des difficultés telles que l’obstruction et l’absence de toute coopération de la part d’ENAE dans la mise en œuvre des engagements détaillés dans la lettre du 1er décembre 2010 et les effets de la décision du tribunal arbitral CCI du 27 juin 2017, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, des difficultés
juridiques, politiques ou pratiques auxquelles l’État membre concerné s’est trouvé confronté pour mettre en œuvre une décision ordonnant la récupération des aides illégales, sans entreprendre une véritable démarche auprès des entreprises en cause aux fins de récupérer l’aide et sans proposer à la Commission des modalités alternatives de mise en œuvre d’une telle décision qui auraient permis de surmonter ces difficultés, ne sauraient justifier le non-respect par cet État membre des obligations
qui lui incombent au titre du droit de l’Union. Il en va de même pour les prétendus problèmes internes rencontrés lors de l’exécution de la décision de la Commission (arrêt du 9 novembre 2017, Commission/Grèce, C‑481/16, non publié, EU:C:2017:845, point 29). Ainsi, dans ces conditions, les difficultés invoquées par la République hellénique ne peuvent être considérées comme étant, en l’espèce, des circonstances atténuantes.

128 Enfin, il y a lieu de constater une répétition du comportement infractionnel de cet État membre dans le domaine des aides d’État. En effet, la République hellénique a été condamnée, d’une part, dans le cadre de recours en vertu de l’article 108, paragraphe 2, TFUE pour défaut de mise en œuvre de décisions de récupération d’aides, dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 1er mars 2012, Commission/Grèce (C‑354/10, non publié, EU:C:2012:109), du 17 octobre 2013, Commission/Grèce (C‑263/12,
non publié, EU:C:2013:673), du 9 novembre 2017, Commission/Grèce (C‑481/16, non publié, EU:C:2017:845), et du 17 janvier 2018, Commission/Grèce (C‑363/16, EU:C:2018:12), ainsi que, d’autre part, dans le cadre de recours en vertu de l’article 228, paragraphe 2, troisième alinéa, CE dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 7 juillet 2009, Commission/Grèce (C‑369/07, EU:C:2009:428).

129 Force est de constater que, en l’espèce, l’atteinte aux règles du traité en matière d’aides d’État revêt un caractère important.

130 En deuxième lieu, s’agissant de la durée de l’infraction, celle-ci doit être évaluée en prenant en considération le moment auquel la Cour apprécie les faits et non pas celui où cette dernière est saisie par la Commission (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 78).

131 Dans ces conditions, la République hellénique n’ayant pu démontrer qu’il a été mis fin au manquement à son obligation d’exécuter pleinement l’arrêt constatant le manquement, il y a lieu de considérer que ledit manquement perdure depuis plus de six ans depuis la date de prononcé dudit arrêt, ce qui constitue une durée considérable.

132 En troisième lieu, en ce qui concerne la capacité de paiement, et plus particulièrement la proposition de la Commission de multiplier le montant de base par un coefficient spécifique applicable à la République hellénique, la Cour a itérativement jugé que cette méthode de calcul constitue un instrument approprié pour refléter la capacité de paiement de l’État concerné tout en maintenant un écart raisonnable entre les divers États membres (arrêt du 7 juillet 2009, Commission/Grèce, C‑369/07,
EU:C:2009:428, point 123).

133 En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 132 de ses conclusions, la Cour a constamment accepté, afin de calculer les sanctions financières, de tenir compte du PIB de l’État membre concerné et du nombre de voix dont il dispose au Conseil (voir, en ce sens, arrêts du 4 juillet 2000, Commission/Grèce, C‑387/97, EU:C:2000:356, point 88 ; du 25 novembre 2003, Commission/Espagne, C‑278/01, EU:C:2003:635, point 59 ; du 10 janvier 2008, Commission/Portugal, C‑70/06, EU:C:2008:3,
point 48, et du 4 juin 2009, Commission/Grèce, C‑109/08, EU:C:2009:346, point 42).

134 Pour ce qui est du critère PIB, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il convient de prendre en compte l’évolution récente du PIB d’un État membre telle qu’elle se présente à la date de l’examen des faits par la Cour (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 81 et jurisprudence citée).

135 Il y a donc lieu de tenir compte du fait, d’une part, que le PIB de la République hellénique a diminué de plus de 25 % entre l’année 2010 et l’année 2016 et, d’autre part, que, en 2017, le PIB a, pour la première fois depuis l’année 2007, été en progression. L’importance de cette crise économique est donc dûment prise en considération par la Cour pour la détermination du montant de l’astreinte.

136 S’agissant du critère du nombre de voix dont un État membre dispose au Conseil, il convient de préciser que, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du protocole (no 36) sur les dispositions transitoires, depuis le 1er novembre 2014, une nouvelle procédure de majorité qualifiée, la double majorité, a pris effet.

137 Conformément à l’article 3, paragraphe 2, de ce protocole, les États membres peuvent, jusqu’au 31 mars 2017, encore solliciter un vote sur la base de la règle de majorité qualifiée précédente.

138 Ainsi, depuis le 1er avril 2017, le système des voix pondérées est remplacé par le système de double majorité selon lequel la majorité qualifiée est atteinte si elle regroupe 55 % des membres du Conseil, ou 72 % si la proposition ne provient pas de la Commission ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et représentant au moins 65 % de la population totale de l’Union.

139 Compte tenu des modalités du nouveau système de double majorité et des différences qu’il présente par rapport à l’ancien système des voix pondérées, le nouveau système de double majorité n’est pas directement transposable au mécanisme de calcul des sanctions et ne peut donc remplacer effectivement à ces fins l’ancien système des voix pondérées.

140 En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 140 de ses conclusions, le nouveau système de double majorité ne fournit pas des critères satisfaisants permettant de déterminer adéquatement la capacité de paiement des États membres.

141 En outre, il convient de relever que, dans sa jurisprudence postérieure au 1er avril 2017, date à compter de laquelle l’ancien système des voix pondérées n’est plus applicable, la Cour ne prend en compte aux fins de l’appréciation de la capacité de paiement des États membres que le PIB de l’État membre concerné (arrêts du 22 février 2018, Commission/Grèce, C‑328/16, EU:C:2018:98, et du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358).

142 Dans ce contexte, aux fins de l’appréciation de la capacité de paiement de la République hellénique, il n’y a pas lieu de tenir compte du critère du nombre de voix dont cet État membre disposait au sein du Conseil ou du nouveau système de double majorité, mais il convient de s’appuyer sur le PIB dudit État membre en tant que facteur prédominant.

143 En ce qui concerne la périodicité de l’astreinte, il y a lieu de tenir compte de la spécificité, invoquée par la République hellénique, des opérations de récupération des aides en cause.

144 Il apparaît qu’il sera particulièrement difficile pour la République hellénique de parvenir dans un bref délai à une exécution complète de la décision 2009/610 et, partant, de l’arrêt constatant le manquement, compte tenu de ce que les opérations qui en relèvent ne peuvent être instantanées et leur impact ne peut être perçu immédiatement.

145 Au vu de cette particularité, il est envisageable que ledit État membre parvienne à augmenter substantiellement le degré d’exécution de la décision 2009/610, sans arriver à une exécution complète de celle-ci dans un tel délai.

146 Il s’ensuit que la constatation éventuelle de la fin de l’infraction en cause ne pourrait intervenir qu’au terme d’une période permettant une évaluation d’ensemble des résultats obtenus.

147 Dès lors, il convient de déterminer une astreinte semestrielle afin de permettre à la Commission d’apprécier l’état d’avancement des mesures d’exécution de cet arrêt, eu égard à la situation prévalant à l’issue de la période en question.

148 Il convient donc de condamner la République hellénique à payer à la Commission une astreinte de 7294000 euros par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt constatant le manquement, à compter de la date du prononcé du présent arrêt et jusqu’à l’exécution complète de cet arrêt.

Sur la somme forfaitaire

Argumentation des parties

149 Pour ce qui est du montant d’une somme forfaitaire, la Commission propose à la Cour de le déterminer en multipliant un montant journalier par le nombre de jours de persistance de l’infraction.

150 La Commission propose d’appliquer, pour le calcul de la somme forfaitaire, le même coefficient de gravité et le même facteur « n » que dans le cadre de l’astreinte. En revanche, le forfait de base pour calculer la somme forfaitaire serait fixé à 220 euros par jour. À la différence du calcul de l’astreinte, un coefficient de durée ne serait pas appliqué, puisque la durée de l’infraction est déjà prise en compte en multipliant un montant journalier par le nombre de jours de persistance du
manquement.

151 Sur cette base, la Commission propose l’adoption d’une somme forfaitaire calculée en multipliant le montant de 3828 euros par le nombre de jours écoulés entre le prononcé de l’arrêt constatant le manquement et la date de l’exécution par l’État membre de ses obligations ou, à défaut, celle du prononcé du présent arrêt.

152 La République hellénique n’a pas présenté d’arguments spécifiques relatifs à la somme forfaitaire. Dans la mesure où, pour son calcul, la Commission utilise des critères identiques à ceux utilisés pour le calcul de l’astreinte, comme la gravité et la durée de l’infraction, il s’impose de tenir compte des arguments présentés par la République hellénique au sujet de l’astreinte.

Appréciation de la Cour

153 Il convient de rappeler, à titre liminaire, que la Cour est habilitée, dans l’exercice du pouvoir d’appréciation qui lui est conféré dans le domaine considéré, à imposer, de façon cumulative, une astreinte et une somme forfaitaire (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 96).

154 La condamnation au paiement d’une somme forfaitaire et la fixation du montant éventuel de cette somme doivent, dans chaque cas d’espèce, demeurer fonction de l’ensemble des éléments pertinents ayant trait tant aux caractéristiques du manquement constaté qu’à l’attitude propre à l’État membre concerné par la procédure initiée sur le fondement de l’article 260 TFUE. À cet égard, celui-ci investit la Cour d’un large pouvoir d’appréciation afin de décider de l’infliction ou non d’une telle sanction
et de déterminer, le cas échéant, son montant (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 97).

155 Dans la présente affaire, l’ensemble des éléments juridiques et factuels ayant abouti à la constatation du manquement constitue un indicateur de ce que la prévention effective de la répétition future d’infractions analogues au droit de l’Union est de nature à requérir l’adoption d’une mesure dissuasive, telle que l’imposition d’une somme forfaitaire.

156 Dans ces circonstances, il appartient à la Cour, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer le montant de cette somme forfaitaire de telle sorte qu’elle soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée à l’infraction commise (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 99).

157 Figurent notamment au rang des facteurs pertinents à cet égard des éléments tels que la gravité de l’infraction constatée et la période durant laquelle celle-ci a persisté depuis le prononcé de l’arrêt l’ayant constatée (arrêt du 31 mai 2018, Commission/Italie, C‑251/17, non publié, EU:C:2018:358, point 100).

158 Les circonstances de l’espèce devant être prises en compte ressortent notamment des considérations figurant aux points 120 à 142 du présent arrêt, relatives à la gravité et à la durée de l’infraction ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre en cause.

159 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il est fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en fixant à 10000000 euros le montant de la somme forfaitaire que la République hellénique devra acquitter.

160 Il convient, par conséquent, de condamner la République hellénique à payer à la Commission une somme forfaitaire de 10000000 euros.

Sur les dépens

161 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et le manquement ayant été constaté, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

  Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête :

  1) En n’ayant pas pris, à la date à laquelle a expiré le délai imparti dans la lettre de mise en demeure émise le 27 novembre 2014 par la Commission européenne, toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 28 juin 2012, Commission/Grèce (C‑485/10, non publié, EU:C:2012:395), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE.

  2) La République hellénique est condamnée à payer à la Commission européenne une astreinte d’un montant de 7294000 euros pour chaque période de six mois à compter du prononcé du présent arrêt jusqu’à la date de l’exécution de l’arrêt du 28 juin 2012, Commission/Grèce (C‑485/10, non publié, EU:C:2012:395).

  3) La République hellénique est condamnée à verser à la Commission européenne une somme forfaitaire de 10000000 euros.

  4) La République hellénique est condamnée aux dépens.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le grec.


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : C-93/17
Date de la décision : 14/11/2018
Type de recours : Recours en constatation de manquement - fondé

Analyses

Manquement d’État – Aides d’État – Aides déclarées illégales et incompatibles avec le marché intérieur – Obligation de récupération – Arrêt de la Cour constatant le manquement – Entreprise qui exerce à la fois des activités civiles et militaires – Inexécution – Intérêts essentiels de la sécurité d’un État membre – Article 346, paragraphe 1, sous b), TFUE – Sanctions financières – Astreinte – Somme forfaitaire – Capacité de paiement – Facteur “n” – Facteurs qui sont à la base de l’évaluation de la capacité de paiement – Produit intérieur brut – Pondération des voix de l’État membre au Conseil de l’Union européenne – Nouvelle règle de vote au Conseil.

Aides accordées par les États

Concurrence


Parties
Demandeurs : Commission européenne
Défendeurs : République hellénique.

Composition du Tribunal
Avocat général : Wathelet
Rapporteur ?: Arabadjiev

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2018:903

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