ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)
8 décembre 2016 ( *1 )
«Renvoi préjudiciel — Règlement (CEE) no 2658/87 — Union douanière et tarif douanier commun — Classement tarifaire — Nomenclature combinée — Positions 8539, 8541, 8543, 8548 et 9405 — Lampes à diodes émettrices de lumière (LED)»
Dans l’affaire C‑600/15,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas), par décision du 6 novembre 2015, parvenue à la Cour le 16 novembre 2015, dans la procédure
Staatssecretaris van Financiën
contre
Lemnis Lighting BV,
LA COUR (dixième chambre),
composée de M. A. Borg Barthet (rapporteur), faisant fonction de président de la dixième chambre, MM. E. Levits et F. Biltgen, juges,
avocat général : M. Y. Bot,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
— pour Lemnis Lighting BV, par MM. E. Mennes et B. Kalshoven, belastingadviseurs,
— pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. K. Bulterman et B. Koopman, en qualité d’agents,
— pour le gouvernement hongrois, par MM. M. Fehér et G. Koós ainsi que par Mme A. Pálfy, en qualité d’agents,
— pour la Commission européenne, par MM. A. Caeiros et P. Vanden Heede, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des positions tarifaires 8539, 8541, 8543, 8548 et 9405 de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), dans sa version résultant du règlement (CE) no 1214/2007 de la Commission, du 20 septembre 2007 (JO 2007, L 286, p. 1) (ci-après la « NC »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Staatssecretaris van Financiën (secrétaire d’État aux Finances, Pays-Bas, ci-après l’ « administration des douanes ») à Lemnis Lighting BV au sujet du classement tarifaire de lampes à diodes émettrices de lumière (ci-après les « lampes à LED »).
Le cadre juridique
La convention sur le système harmonisé
3 Le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes (OMD), a été institué par la convention internationale portant création dudit conseil, conclue à Bruxelles le 15 décembre 1950. Le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le « SH ») a été élaboré par l’OMD et institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après la « convention sur le SH »), conclue à
Bruxelles le 14 juin 1983 et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1).
4 En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la convention sur le SH, chaque partie contractante s’engage à ce que ses nomenclatures tarifaires et statistiques soient conformes au SH, à utiliser toutes les positions et les sous-positions de celui-ci, sans adjonction ni modification, ainsi que les codes numériques y afférents, et à suivre l’ordre de numérotation du SH. Chaque partie contractante s’engage également à appliquer les règles générales pour l’interprétation du SH ainsi que toutes les notes
de sections, de chapitres et de sous-positions du SH et à ne pas modifier la portée de ces derniers.
5 L’OMD approuve, dans les conditions fixées à l’article 8 de la convention sur le SH, les notes explicatives et les avis de classement adoptés par le comité du SH.
6 Les notes explicatives du SH relatives à la position 8541 de ce système sont rédigées comme suit :
« A) Diodes, transistors et dispositifs similaires à semi-conducteur
[...]
Parmi ces dispositifs, on peut citer :
I.– Les diodes. Ce sont des dispositifs à deux bornes, ne comportant qu’une seule jonction PN et qui permettent le passage du courant dans un sens (sens passant) et offrent, en revanche, une très grande résistance dans l’autre sens (sens bloqué). Elles sont utilisées pour la détection, le redressement, la commutation, etc.
Les principaux types de diodes sont : les diodes de signal, les diodes redresseuses de puissance, les diodes régulatrices de tension, les diodes de tension de référence.
II.– Les transistors [...]
III.– Les dispositifs similaires à semi-conducteur [...]
Les dispositifs décrits ci-dessus relèvent de cette position, qu’ils soient présentés à l’état monté, c’est-à-dire déjà munis de leurs connexions ou encapsulés (composants), à l’état non monté (éléments) ou même sous forme de disques (wafers) non encore découpés.
[...]
B) Dispositifs photosensibles à semi-conducteurs
[...]
C) Diodes émettrices de lumière
Les diodes émettrices de lumière ou diodes électroluminescentes (notamment à l’arséniure de gallium ou au phosphure de gallium) sont des dispositifs qui transforment l’énergie électrique en rayonnements visibles, infrarouges ou ultraviolets. Elles sont utilisées notamment pour l’affichage ou la transmission de données dans les systèmes de traitement de l’information.
[...] »
7 Aux termes des notes explicatives du SH relatives à la position 8543 de ce système :
« La présente position englobe, sous réserve qu’ils ne soient pas exclus par les notes de la section ou du présent chapitre, l’ensemble des machines et appareils électriques qui ne sont ni dénommés ni compris dans d’autres positions du chapitre, ni couverts plus spécifiquement par une position quelconque d’un autre chapitre (notamment les chapitres 84 ou 90).
Sont à considérer comme des machines ou des appareils au sens de la présente position, les dispositifs électriques ayant une fonction propre. Les dispositions de la note explicative du no 84.79 relatives aux machines et aux appareils ayant une fonction propre, sont applicables mutatis mutandis aux machines et aux appareils de la présente position.
Ce sont, pour la plupart, des assemblages de dispositifs électriques élémentaires (lampes, transformateurs, condensateurs, selfs, résistances, etc.) assurant leur fonction exclusivement par un moyen purement électrique. Sont toutefois compris ici les articles électriques comportant des dispositifs mécaniques, à condition que ces dispositifs ne jouent qu’un rôle secondaire par rapport à celui des parties électriques de la machine ou de l’appareil. »
8 Les notes explicatives du SH relatives à la position 8479 de ce système sont rédigées comme suit :
« La présente position englobe les machines et appareils mécaniques ayant une fonction propre qui ne sont pas :
[...]
c) classés dans d’autres positions plus spécifiques du présent chapitre parce que :
[...]
1°) ils n’y sont pas spécialisés par leur fonction ou leur type ;
[...]
Les machines et appareils de la présente position se distinguent des parties de machines ou d’appareils à classer conformément aux dispositions générales relatives aux parties, par le fait qu’ils ont une fonction propre.
Sont à considérer comme ayant une fonction propre pour l’application des dispositions qui précèdent :
A) Les dispositifs mécaniques [...] dont la fonction peut être exercée d’une façon distincte et indépendante de tout autre machine, appareil ou engin. [...]
B) Les dispositifs mécaniques qui ne peuvent fonctionner que montés sur une autre machine, un autre appareil ou engin ou incorporés dans un ensemble plus complexe, à la condition cependant que leur fonction :
1°) soit distincte de celle de la machine, de l’appareil ou de l’engin sur lesquels ils doivent être montés ou de celle de l’ensemble dans lequel ils doivent être incorporés, et
2°) qu’elle ne participe pas d’une manière intégrante et indissociable au fonctionnement de cette machine, de cet appareil, engin ou ensemble.
[...] »
9 Les notes explicatives du SH relatives à la position 9405 sont ainsi libellées :
« On range également dans cette position, dès lors qu’elles sont reconnaissables comme telles et lorsqu’elles ne sont pas reprises plus spécifiquement ailleurs, les parties d’appareils d’éclairage, de lampes‑réclames, d’enseignes lumineuses, de plaques indicatrices lumineuses et d’articles similaires [...]
Les parties électriques de ces articles (douilles, commutateurs, interrupteurs, transformateurs, starters, ballasts, par exemple), présentées isolément, relèvent du Chapitre 85.
[...]
Sont également exclus de cette position :
[...]
h) Les lampes (ampoules) et tubes à incandescence ou à décharge (y compris ceux affectant la forme d’arabesques, de lettres, de chiffres, d’étoiles, etc.) ainsi que les lampes à arc (no 85.39).
[...] »
La NC
10 Le classement douanier des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC, laquelle est fondée sur le SH.
11 En vertu de l’article 12, paragraphe 1, du règlement no 2658/87, tel que modifié par le règlement (CE) no 254/2000 du Conseil, du 31 janvier 2000 (JO 2000, L 28, p. 16), la Commission européenne adopte, chaque année, un règlement reprenant la version complète de la NC et des taux des droits de douane, telle qu’elle résulte des mesures arrêtées par le Conseil de l’Union européenne ou par la Commission. Ce règlement est applicable à partir du 1er janvier de l’année suivante.
12 Les versions de la NC applicables aux faits en cause dans l’affaire au principal, qui se sont déroulés entre le mois de mai 2008 et celui de mars 2011, sont celles résultant successivement du règlement no 1214/2007, du règlement (CE) no 1031/2008 de la Commission, du 19 septembre 2008 (JO 2008, L 291, p. 1), du règlement (CE) no 948/2009 de la Commission, du 30 septembre 2009 (JO 2009, L 287, p. 1), et du règlement (UE) no 861/2010 de la Commission, du 5 octobre 2010 (JO 2010, L 284, p. 1). Le
libellé des dispositions de la NC applicables à ces faits n’ayant pas été affecté par ces modifications successives, il y a lieu de se référer à la version de cette nomenclature résultant du règlement no 1214/2007.
13 La première partie de la NC comporte un ensemble de dispositions préliminaires. Dans cette partie, sous le titre I, consacré aux dispositions générales, la section A, intitulée « Règles générales pour l’interprétation de la [NC] », dispose :
« Le classement des marchandises dans la [NC] est effectué conformément aux principes ci-après.
1. Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.
[...]
4. Les marchandises qui ne peuvent pas être classées en vertu des règles visées ci-dessus sont classées dans la position afférente aux articles les plus analogues.
[...]
6. Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette règle, les notes de sections et de chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »
14 La deuxième partie de la NC, intitulée « Tableau des droits », contient, notamment, la section XVI, dont la note 4 prévoit :
« Lorsqu’une machine ou une combinaison de machines sont constituées par des éléments distincts (même séparés ou reliés entre eux par des conduites, des dispositifs de transmission, des câbles électriques ou autre aménagement) en vue d’assurer concurremment une fonction bien déterminée comprise dans l’une des positions du chapitre 84 ou du chapitre 85, l’ensemble est à classer dans la position correspondant à la fonction qu’il assure. »
15 La section XVI de la NC contient un chapitre 85, intitulé « Machines, appareils et matériels électriques et leurs parties ; appareils d’enregistrement ou de reproduction du son, appareils d’enregistrement ou de reproduction des images et du son en télévision, et parties et accessoires de ces appareils ».
16 La note 8 du chapitre 85 de la NC énonce :
« Au sens des nos 8541 et 8542, on considère comme :
“diodes, transistors et dispositifs similaires à semi-conducteur”, les dispositifs de l’espèce dont le fonctionnement repose sur la variation de la résistivité sous l’influence d’un champ électrique ;
[...]
Aux fins du classement des articles définis dans la présente note, les nos 8541 et 8542 ont priorité sur toute autre position de la nomenclature, à l’exception du no 8523 susceptible de les couvrir en raison notamment de leur fonction. »
17 La note 9 du chapitre 85 de la NC prévoit :
« Au sens du no 8548, on entend par “piles et batteries de piles électriques hors d’usage et accumulateurs électriques hors d’usage” ceux qui sont devenus inutilisables en tant que tels par suite de bris, découpage, usure ou autres motifs ou qui ne sont pas susceptibles d’être rechargés. »
18 Le chapitre 85 de la NC comprend les positions tarifaires suivantes :
« 8539 Lampes et tubes électriques à incandescence ou à décharge, y compris les articles dits “phares et projecteurs scellés” et les lampes et tubes à rayons ultraviolets ou infrarouges ; lampes à arc :
[...] [...]
8541 Diodes, transistors et dispositifs similaires à semi‑conducteur ; dispositifs photosensibles à semi‑conducteur, y compris les cellules photovoltaïques même assemblées en modules ou constituées en panneaux ; diodes émettrices de lumière ; cristaux piézo‑électriques montés :
[...] [...]
8543 Machines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le présent chapitre :
[...] [...]
8548 Déchets et débris de piles, de batteries de piles et d’accumulateurs électriques ; piles et batteries de piles électriques hors d’usage et accumulateurs électriques hors d’usage ; parties électriques de machines ou d’appareils, non dénommées ni comprises ailleurs dans le présent chapitre :
[...] »
19 Le chapitre 94 de la NC, figurant sous la section XX de cette nomenclature, porte le titre « Meubles ; mobilier médico-chirurgical ; articles de literie et similaires ; appareils d’éclairage non dénommés ni compris ailleurs ; lampes‑réclames, enseignes lumineuses, plaques indicatrices lumineuses et articles similaires ; constructions préfabriquées ». Ce chapitre comprend la position tarifaire 9405, rédigée comme suit :
« Appareils d’éclairage (y compris les projecteurs) et leurs parties, non dénommés ni compris ailleurs ; lampes-réclames, enseignes lumineuses, plaques indicatrices lumineuses et articles similaires, possédant une source d’éclairage fixée à demeure, et leurs parties non dénommées ni comprises ailleurs :
[...] »
Le litige au principal et la question préjudicielle
20 Au cours de la période allant du mois de mai 2008 au mois de mars 2011, Lemnis Lighting a déposé des déclarations de mise en libre pratique pour des lampes à LED.
21 Les lampes à LED sont constituées de différents composants électroniques, d’une enveloppe en verre et d’une douille en métal. Elles sont destinées à être placées dans un luminaire et servent à éclairer.
22 L’un des composants électroniques est un circuit imprimé (printed circuit board, ci-après un « PCB »), présentant une forme carrée de 14 mm de côté, sur lequel sont placées six diodes émettrices de lumière (light emitting diodes, ci-après les « diodes émettrices de lumière »). Les diodes émettrices de lumière transforment l’énergie électrique provenant du réseau électrique en lumière visible dès qu’un courant électrique traverse la diode dans le sens du passage.
23 Le PCB doté des diodes émettrices de lumière est enveloppé d’une sphère en verre. Les lampes à LED comportent, en outre, une douille munie d’un culot à vis dit « Edison » d’un diamètre de 27 mm (douille dite « E27 », ci-après la « douille »). Les lampes à LED peuvent ainsi être placées dans un luminaire.
24 Les diodes émettrices de lumière nécessitent un courant électrique continu. C’est la raison pour laquelle un composant électronique, dont la fonction est d’intercepter les courants électriques qui passent dans le réseau électrique, est placé entre la douille et le PCB. Ce composant électronique comporte notamment des diodes, des transistors, des résistances, des condensateurs et des bobines ainsi que des circuits intégrés.
25 Les lampes à LED ont été déclarées par Lemnis Lighting comme relevant de la sous-position 8541 40 10 de la NC, soumise au paiement de droits de douane au taux de 0 %.
26 L’administration des douanes a considéré que les lampes à LED devaient relever de la sous-position 8543 70 90 de la NC, assortie d’un tarif douanier de 3,7 %, et a adressé à Lemnis Lighting des avis de paiement de droits de douane à due concurrence.
27 Lemnis Lighting a introduit une réclamation contre cette décision de classement, qui a été rejetée par l’administration des douanes. Elle a alors introduit un recours contre cette décision de rejet devant le Rechtbank te Haarlem (tribunal de Harlem, Pays-Bas) qui l’a déclaré non fondé. Lemnis Lighting a interjeté appel de ce jugement auprès du Gerechtshof Amsterdam (cour d’appel d’Amsterdam, Pays-Bas).
28 La juridiction d’appel a jugé que les lampes à LED peuvent, par application de la règle 4 des règles générales pour l’interprétation de la NC, être classées dans la sous-position 8539 22 90 de ladite nomenclature, assortie d’un tarif douanier de 2,7 %, étant donné que les lampes à incandescence, visées à la position 8539 de la NC, sont les plus proches des lampes à LED.
29 L’administration des douanes a introduit un pourvoi en cassation contre cet arrêt du Gerechtshof Amsterdam (cour d’appel d’Amsterdam) devant la juridiction de renvoi, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas), et Lemnis Lighting a formé un pourvoi incident contre ce même arrêt. Cette juridiction émet des doutes quant au classement tarifaire des lampes à LED.
30 En effet, elle estime que, dans la mesure où aucune des positions 8539, 8541 et 8543 de la NC n’ont, selon elle, vocation à s’appliquer au titre de la règle 1 des règles générales pour l’interprétation de la NC, le classement des lampes à LED peut s’effectuer en ayant recours aux règles 2, 3 ou éventuellement 4 de ces règles générales. Elle fait également valoir que, si les lampes à LED devaient être considérées comme des « parties électriques de machines ou d’appareils » ou comme « des appareils
d’éclairage et leurs parties », se poserait la question de savoir si elles sont susceptibles de relever, respectivement, des positions 8548 ou 9405 de la NC.
31 Dans ces conditions, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« Convient-il d’interpréter les positions 8539, 8541, 8543, 8548 et 9405 de la NC en ce sens que des produits tels que les lampes à LED, qui sont constituées de diodes électroluminescentes et d’autres composants [électroniques], ainsi que d’une enveloppe en verre et d’une douille “Edison”, et qui servent à éclairer après avoir été placées dans un appareil d’éclairage, doivent être classés dans l’une de ces positions ? Dans l’affirmative, dans laquelle de ces positions ces produits doivent‑ils
être classés ? Dans la négative, dans quelle autre position le classement doit‑il se faire ? »
Sur la question préjudicielle
32 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, de laquelle des positions 8539, 8541, 8543, 8548 ou 9405 de la NC relèvent des marchandises telles que les lampes à LED en cause au principal.
33 À titre liminaire, il convient de rappeler que, lorsque la Cour est saisie d’un renvoi préjudiciel en matière de classement tarifaire, sa fonction consiste davantage à éclairer la juridiction nationale sur les critères dont la mise en œuvre permettra à cette dernière de classer correctement les produits en cause dans la NC qu’à procéder elle-même à ce classement, et ce d’autant plus qu’elle ne dispose pas nécessairement de tous les éléments indispensables à cet égard. Ainsi, la juridiction
nationale apparaît, en tout état de cause, mieux placée pour ce faire (arrêt du 12 juin 2014, Lukoyl Neftohim Burgas,C‑330/13, EU:C:2014:1757, point 27 et jurisprudence citée).
34 Il appartiendra donc à la juridiction de renvoi de procéder au classement des produits en cause au principal au regard des éléments de réponse fournis par la Cour à la question qu’elle lui a soumise.
35 Afin de donner une réponse utile à la juridiction de renvoi, il importe de souligner, d’emblée, que, d’une part, ainsi qu’il ressort du point 13 du présent arrêt, les règles générales pour l’interprétation de la NC prévoient que le classement des marchandises est déterminé selon les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres, les libellés des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres étant considérés comme n’ayant qu’une valeur indicative.
36 D’autre part, selon une jurisprudence constante de la Cour, dans l’intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la NC et des notes de sections ou de chapitres (arrêt du 12 juin 2014, Lukoyl Neftohim Burgas, C‑330/13, EU:C:2014:1757, point 34 et jurisprudence
citée).
37 S’agissant des notes explicatives du SH, il y a lieu d’ajouter que, en dépit de leur absence de force contraignante, elles constituent des instruments importants aux fins d’assurer une application uniforme du tarif douanier commun et fournissent, en tant que telles, des éléments valables pour son interprétation (arrêt du 17 mars 2016, Sonos Europe, C‑84/15, EU:C:2016:184, point 33 et jurisprudence citée).
38 En l’occurrence, les lampes à LED, telles que celles en cause au principal, ne sont visées explicitement ni par le libellé des positions 8539, 8541, 8548 et 9405 de la NC, ni par celui des notes de sections, ou de chapitres de cette dernière, ni par les notes explicatives de la NC ou du SH.
39 Il importe, toutefois, d’examiner si lesdites lampes à LED sont susceptibles d’être classées dans l’une de ces positions de la NC.
40 S’agissant de la position 8539 de la NC, il ressort de son libellé que celle-ci se réfère spécifiquement et exclusivement aux « lampes et tubes électriques à incandescence ou à décharge, y compris les articles dits “phares et projecteurs scellés” et les lampes et tubes à rayons ultraviolets ou infrarouges ; lampes à arc ». Partant, cette position concerne uniquement les lampes qui utilisent une technique particulière en vue de produire de la lumière.
41 Or, les caractéristiques et les propriétés objectives des marchandises, telles que celles en cause dans l’affaire au principal, ne correspondent pas à ce libellé. En effet, les lampes à LED émettent de la lumière au moyen de diodes émettrices de lumière, soit un processus de diffusion de la lumière qui n’est pas couvert par la position 8539 de la NC.
42 Dès lors, des marchandises telles que celles en cause au principal ne sauraient relever de la position 8539 de la NC.
43 En ce qui concerne la position 8541 de la NC, celle-ci est relative, notamment, aux « diodes émettrices de lumière ». Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi et des observations déposées devant la Cour, il est constant que les lampes à LED sont constituées de ces diodes.
44 Il importe de relever à cet égard que, selon la note explicative du SH relative à la position 8541, cette position regroupe notamment les diodes émettrices de lumière ou diodes électroluminescentes qui sont des dispositifs qui transforment l’énergie électrique en rayonnements visibles, infrarouges ou ultraviolets. Elles sont utilisées notamment pour l’affichage ou la transmission de données dans les systèmes de traitement de l’information.
45 Il en résulte que la position 8541 de la NC comprend les diodes émettrices de lumière qui ne sont pas assemblées avec d’autres composants électroniques. Or, force est de constater que les lampes à LED sont constituées non seulement de diodes émettrices de lumière, mais également de nombreux autres composants nécessaires à leur fonctionnement, tels qu’une ampoule en verre, un PCB et une douille.
46 Par conséquent, les lampes à LED ne sauraient relever de la position 8541 de la NC.
47 S’agissant de la position 8548 de la NC, il convient de constater que celle-ci comprend notamment les « parties électriques de machines ou d’appareils ».
48 Il convient de rappeler que, bien que la NC ne définisse pas la notion de « parties », au sens de la position 8548 de la NC, il résulte de la jurisprudence de la Cour, développée dans le contexte des chapitres 84 et 85 de la section XVI ainsi que du chapitre 90 de la section XVIII de la NC, que la notion de « parties » implique la présence d’un ensemble pour le fonctionnement duquel celles-ci sont indispensables. Il résulte de cette jurisprudence que, pour pouvoir qualifier un article de
« parties », au sens desdits chapitres, il n’est pas suffisant de démontrer que, sans cet article, la machine ou l’appareil n’est pas en mesure de répondre aux besoins auxquels il est destiné. Encore faut-il établir que le fonctionnement mécanique ou électrique de la machine ou de l’appareil en cause est conditionné par ledit article (arrêt du 12 décembre 2013, HARK, C‑450/12, EU:C:2013:824, point 36 et jurisprudence citée).
49 En l’occurrence, il ressort des constatations factuelles de la juridiction de renvoi que les lampes à LED en cause au principal peuvent être placées dans un luminaire. En outre, les diodes émettrices de lumière nécessitent un courant continu. Or, ainsi que le soutient la Commission dans ses observations écrites, bien qu’un appareil d’éclairage sans lampe ne soit pas susceptible de diffuser de la lumière, le fonctionnement mécanique ou électrique de l’appareil d’éclairage ne dépend pas de la
présence ou non de la lampe à LED.
50 Dès lors, il convient de constater que la lampe à LED n’est pas indispensable au fonctionnement d’un luminaire. Eu égard à la jurisprudence de la Cour citée au point 48 du présent arrêt, une telle lampe n’est, dès lors, pas susceptible d’être qualifiée de « parties » d’un luminaire et, partant, de relever de la position 8548 de la NC.
51 En outre, les lampes à LED ne sauraient être considérées comme des « appareils d’éclairage (y compris les projecteurs) et leurs parties », au sens de la position 9405 de la NC.
52 En effet, dans l’intérêt de l’application cohérente et uniforme du tarif douanier commun, la notion de « parties », au sens de la position 9405 de la NC, devrait recevoir la même définition que celle résultant de la jurisprudence de la Cour relative à d’autres chapitres de la NC, telle que celle rappelée au point 48 du présent arrêt.
53 Par conséquent, les lampes à LED ne sauraient relever de la position 9405 de la NC, celles-ci ne pouvant, ainsi qu’il découle des points 49 et 50 du présent arrêt, être considérées comme des « parties » d’appareils d’éclairage pour le fonctionnement duquel ces lampes sont indispensables.
54 En ce qui concerne la positon 8543 de la NC, il ressort du libellé de ladite position que celle-ci comprend les « machines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le chapitre [85 de la NC] ». Ainsi, le classement d’un produit sous la même position n’est envisageable que s’il n’est pas possible de classer ce produit sous une autre position de ce chapitre 85. Or, il découle des points 42, 46 et 50 du présent arrêt que tel est le cas en l’espèce
(voir, par analogie, arrêt du 25 février 2016, G. E. Security, C‑143/15, EU:C:2016:115, point 71).
55 En outre, la position 8543 de la NC n’est applicable à une machine ou à un appareil électrique que s’ils possèdent une fonction propre (voir arrêt du 20 novembre 2014, Rohm Semiconductor, C‑66/13, EU:C:2014:2388, point 27).
56 En effet, les notes explicatives du SH relatives à la position 8543 de ce système énoncent que sont à considérer comme des « machines ou des appareils », au sens de cette position, les dispositifs électriques ayant une fonction propre. Ces notes rappellent également que ces machines et appareils sont, pour la plupart, des assemblages de dispositifs électriques élémentaires (lampes, transformateurs, condensateurs, selfs, résistances, etc.) assurant leur fonction exclusivement par un moyen purement
électrique et que sont toutefois compris ici les articles électriques comportant des dispositifs mécaniques, à condition que ces dispositifs ne jouent qu’un rôle secondaire par rapport à celui des parties électriques de la machine ou de l’appareil. De plus, ce point précise que les dispositions de la note explicative de la position 8479 du SH relatives aux machines et aux appareils ayant une fonction propre sont applicables mutatis mutandis aux machines et aux appareils de la position 8543 du SH.
57 À cet égard, les notes explicatives du SH relatives à la position 8479 de ce système précisent, d’une part, que celle-ci englobe les machines et les appareils mécaniques ayant une fonction propre qui ne sont pas classés dans d’autres positions plus spécifiques du chapitre 84 du SH parce qu’ils n’y sont pas spécialisés par leur fonction ou leur type et, d’autre part, que les machines et les appareils relevant de ladite position se distinguent des parties de machines ou d’appareils à classer
conformément aux dispositions générales relatives aux parties, par le fait qu’ils ont une fonction propre.
58 En l’occurrence, les lampes à LED ont une fonction d’éclairage. Cette fonction est assurée grâce aux diodes émettrices de lumière au travers desquelles circule un courant continu. À cet égard, lesdites lampes n’ont pas nécessairement besoin d’être intégrées dans un luminaire afin d’exercer la fonction d’éclairage, un courant électrique étant suffisant pour les faire fonctionner. Ainsi, les lampes à LED ont une fonction propre.
59 Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que la NC doit être interprétée en ce sens que des marchandises telles que les lampes à LED en cause au principal relèvent, sous réserve de l’appréciation par la juridiction de renvoi de l’ensemble des éléments factuels dont elle dispose, de la position 8543 de la NC.
Sur les dépens
60 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :
La nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, dans sa version résultant du règlement (CE) no 1214/2007 de la Commission, du 20 septembre 2007, doit être interprétée en ce sens que des marchandises telles que les lampes à diodes émettrices de lumière en cause au principal relèvent, sous réserve de l’appréciation par la juridiction de renvoi de l’ensemble des
éléments factuels dont elle dispose, de la position 8543 de cette nomenclature.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le néerlandais.