ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
8 septembre 2016 ( *1 )
[Texte rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016]
«Renvoi préjudiciel — Tarif douanier commun — Nomenclature combinée — Classification des marchandises — Interprétation d’une sous-position de la nomenclature combinée — Directive 2008/118/CE — Importation de produits soumis à accise — Procédure douanière suspensive ou régime douanier suspensif — Conséquences d’une déclaration en douane indiquant une mauvaise sous-position de la nomenclature combinée — Irrégularités au cours des mouvements de produits soumis à accise»
Dans l’affaire C‑409/14,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Debreceni Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Debrecen, Hongrie), par décision du 15 juillet 2014, parvenue à la Cour le 28 août 2014, dans la procédure
Schenker Nemzetközi Szállítmányozási és Logisztikai Kft.
contre
Nemzeti Adó- és Vámhivatal Észak-alföldi Regionális Vám- és Pénzügyőri Főigazgatósága,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, M. A. Tizzano, vice-président de la Cour, faisant fonction de juge de la cinquième chambre, MM. A. Borg Barthet (rapporteur), E. Levits et Mme M. Berger, juges,
avocat général : Mme J. Kokott,
greffier : M. I. Illéssy, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 novembre 2015,
considérant les observations présentées :
— pour Schenker Nemzetközi Szállítmányozási és Logisztikai Kft., par Mes E. Czeglédi et E. Sieber-Fazakas, ügyvédek,
— pour la Nemzeti Adó- és Vámhivatal Észak-alföldi Regionális Vám- és Pénzügyőri Főigazgatósága, par Mmes A. Keresztesi et Gy. Kiss, en qualité d’agents,
— pour le gouvernement hongrois, par MM. M. Z. Fehér Miklós et G. Koós, en qualité d’agents,
— pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,
— pour la Commission européenne, par Mmes K. Talabér-Ritz, L. Grønfeldt et F. Tomat, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 février 2016,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des sous‑positions 2401 10 35 et 2403 10 90 de la nomenclature combinée (ci-après la « NC ») figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 861/2010 de la Commission, du 5 octobre 2010 (JO 2010, L 284, p. 1) (ci-après le « règlement no 2658/87 »), ainsi que
de l’article 2, sous b), de l’article 4, points 6 et 8, et de l’article 38 de la directive 2008/118/CE du Conseil, du 16 décembre 2008, relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE (JO 2009, L 9, p. 12).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Schenker Nemzetközi Szállítmányozási és Logisztikai Kft. (ci-après « Schenker ») à la Nemzeti Adó-és Vámhivatal Észak-Alföldi Regionális Vám- és Pénzügyőri Főigazgatósága (Direction générale des douanes et des finances pour la région d’Alföld-Nord de l’administration nationale des impôts et des douanes, Hongrie) (ci-après la « Direction générale des douanes ») au sujet du classement tarifaire du tabac light air cured au sein de la NC
et de son éventuelle soumission à accise.
Le cadre juridique
Le droit international
3 Le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes (OMD), a été institué par la convention portant création dudit conseil, conclue à Bruxelles le 15 décembre 1950. Le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le « SH ») a été élaboré par l’OMD et institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après la « convention sur le SH »), conclue à Bruxelles le 14 juin
1983 et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1).
4 En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la convention sur le SH, chaque partie contractante s’engage à ce que ses nomenclatures tarifaires et statistiques soient conformes au SH, à utiliser toutes les positions et les sous-positions de celui-ci, sans adjonction ni modification, ainsi que les codes y afférents, et à suivre l’ordre de numérotation dudit système. Chaque partie contractante s’engage également à appliquer les règles générales pour l’interprétation du SH ainsi que toutes les notes de
sections, de chapitres et de sous-positions du SH et à ne pas modifier la portée de ces derniers.
5 L’OMD approuve, dans les conditions fixées à l’article 8 de la convention sur le SH, les notes explicatives et les avis de classement adoptés par le comité du SH.
6 Les notes explicatives du SH relatives la position 2401 de la NC sont rédigées comme suit :
« 24.01 – Tabacs bruts ou non fabriqués ; déchets de tabac.
2401.10 – Tabacs non écôtés
2401.20 – Tabacs partiellement ou totalement écôtés
2401.30 – Déchets de tabac
Cette position comprend :
1) Le tabac à l’état naturel sous forme de plantes entières ou de feuilles et les feuilles séchées ou fermentées, ces feuilles pouvant être entières ou écôtées, rognées ou non, brisées ou découpées même sous une forme régulière, mais à la condition qu’il ne s’agisse pas d’un produit prêt à être fumé.
Les feuilles de tabac mélangées, écôtées, puis saucées dans un liquide de composition appropriée en vue principalement d’empêcher la moisissure et la dessiccation et, en outre, d’en sauvegarder le goût, sont également comprises dans la présente position.
2) Les déchets de tabac, tels que tiges, pétioles, nervures, rognures, poussières, provenant de la manutention des feuilles ou de la fabrication des produits finis.
[...] »
7 Aux termes des notes explicatives du SH relatives à la position 2403 de la NC :
« 24.03 – Autres tabacs et succédanés de tabac, fabriqués ; tabacs “homogénéisés” ou “reconstitués ” ; extraits et sauces de tabac.
2403.10 – Tabac à fumer, même contenant des succédanés de tabac en toute proportion
— Autres :
2403.91 – – Tabacs “homogénéisés” ou “reconstitués”
2403.99 – – Autres
Cette position comprend :
1) Le tabac à fumer, même contenant des succédanés de tabac en toute proportion, par exemple le tabac fabriqué utilisé pour la pipe ou pour la confection de cigarettes.
[...] »
Le droit de l’Union
La nomenclature combinée
8 Le classement douanier des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC.
9 En vertu de l’article 12, paragraphe 1, du règlement no 2658/87, la Commission européenne adopte chaque année un règlement reprenant la version complète de la NC et des taux des droits de douane, telle qu’elle résulte des mesures arrêtées par le Conseil de l’Union européenne ou par la Commission. Ce règlement est applicable à partir du 1er janvier de l’année suivante.
10 La version de la NC applicable aux faits en cause au principal, qui se sont déroulés au cours de l’année 2011, est celle résultant du règlement no 861/2010.
11 Les règles générales pour l’interprétation de la NC, qui figurent dans la première partie, titre I, A, de celle-ci, disposent :
« Le classement des marchandises dans la [NC] est effectué conformément aux principes ci-après.
1. Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.
[...]
2. a) Toute référence à un article dans une position déterminée couvre cet article même incomplet ou non fini à la condition qu’il présente, en l’état, les caractéristiques essentielles de l’article complet ou fini. Elle couvre également l’article complet ou fini, ou à considérer comme tel en vertu des dispositions qui précèdent, lorsqu’il est présenté à l’état démonté ou non monté.
b) Toute mention d’une matière dans une position déterminée se rapporte à cette matière soit à l’état pur, soit mélangée ou bien associée à d’autres matières. De même, toute mention d’ouvrages en une matière déterminée se rapporte aux ouvrages constitués entièrement ou partiellement de cette matière. Le classement de ces produits mélangés ou articles composites est effectué suivant les principes énoncés dans la règle 3.
3. Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit.
a) La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des matières constituant un produit mélangé ou un article composite ou à une partie seulement des articles dans le cas de marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques
même si l’une d’elles en donne par ailleurs une description plus précise ou plus complète.
b) Les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l’assemblage d’articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, dont le classement ne peut être effectué en application de la règle 3 a), sont classés d’après la matière ou l’article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu’il est possible d’opérer cette détermination.
c) Dans le cas où les règles 3 a) et 3 b) ne permettent pas d’effectuer le classement, la marchandise est classée dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d’être valablement prises en considération.
4. Les marchandises qui ne peuvent pas être classées en vertu des règles visées ci-dessus sont classées dans la position afférente aux articles les plus analogues.
[...]
6. Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette règle, les notes de sections et de chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »
12 La deuxième partie de la NC inclut une section IV, consacrée aux « [p]roduits des industries alimentaires ; boissons, liquides alcooliques et vinaigres ; tabacs et succédanés de tabac fabriqués ». Cette section comprend notamment le chapitre 24, intitulé « Tabacs et succédanés de tabac fabriqué ». Ce chapitre contient les positions tarifaires suivantes :
« 1. Le présent chapitre ne comprend pas les cigarettes médicamenteuses (chapitre 30).
Code NC Désignation des marchandises Taux du droit conventionnel (%) Unité supplémentaire
1 2 3 4
2401 Tabacs bruts ou non fabriqués; déchets de tabac :
2401 10 – Tabacs non écôtés :
2401 10 35 – – Tabacs light air cured 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/net ––
2401 10 60 – – Tabacs sun cured du type oriental 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/ net ––
2401 10 70 – – Tabacs dark air cured 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/net ––
2401 10 85 – – Tabacs flue cured 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/net ––
2401 10 95 – – Autres 10 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/net ––
2401 20 – Tabacs partiellement ou totalement écôtés
2401 20 35 – – Tabacs light air cured 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/ net ––
2401 20 60 – – Tabacs sun cured du type oriental 11,2 MIN 22 [eruos] MAX 56 [euros]/100 kg/ net ––
2401 20 70 – – Tabacs dark air cured 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [eruos]/100 kg/ net ––
2401 20 85 – – Tabacs flue cured 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/ net ––
2401 20 95 – – Autres 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/ net ––
2401 30 00 – Déchets de tabac 11,2 MIN 22 [euros] MAX 56 [euros]/100 kg/ net ––
2402 Cigares (y compris ceux à bouts coupés), cigarillos et cigarettes, en tabac ou en succédanés de tabac :
2402 10 00 – Cigares (y compris ceux à bouts coupés) et cigarillos, contenant du tabac 26 1 000 p/st
2402 20 – Cigarettes contenant du tabac
2402 20 10 – – Contenant des girofles 10 1 000 p/st
2402 20 90 – – Autres 57,6 1 000 p/st
2402 90 00 – Autres 57,6 ––
2403 Autres tabacs et succédanés de tabac, fabriqués ; tabacs “homogénéisés” ou “reconstitués” ; extraits et sauces de tabac :
2403 10 – Tabac à fumer, même contenant des succédanés de tabac en toute proportion
2403 10 10 – – En emballages immédiats d’un contenu net n’excédant pas 500 g 74,9 ––
2403 10 90 – – Autres 74,9 ––
– Autres
2403 91 00 – – Tabacs “homogénéisés” ou “reconstitués” 16,6 ––
2403 99 – – Autres
2403 99 10 – – – Tabac à mâcher et tabac à priser 41,6 ––
2403 99 90 – – – Autres 16,6 –– »
13 Les notes explicatives de la nomenclature combinée des Communautés européennes (JO 2008, C 133, p. 1), élaborées par la Commission, dans leur version applicable à la date des faits au principal, sont rédigées comme suit en ce qui concerne la position 2401 de la NC :
« 2401 Tabacs bruts ou non fabriqués ; déchets de tabac
En ce qui concerne les tabacs bruts ou non fabriqués, voir les notes explicatives du SH, no 2401, chiffre 1.
On entend par :
[...]
b) tabacs light air cured du type Burley, y compris les hybrides de Burley : les tabacs qui ont été séchés à l’air chaud dans des conditions atmosphériques naturelles et qui ne dégagent pas une odeur de fumée lorsqu’ils ont été soumis à la chaleur ou au passage d’air supplémentaire ; les feuilles ont une couleur qui peut aller de tan clair à rougeâtre. D’autres couleurs et combinaisons de couleurs découlent fréquemment de différences de maturité ou des techniques de culture ou de séchage ;
c) tabacs light air cured du type Maryland : les tabacs qui ont été séchés à l’air chaud dans des conditions atmosphériques naturelles et qui ne dégagent pas une odeur de fumée lorsqu’ils ont été soumis à la chaleur ou au passage d’air supplémentaire ; les feuilles ont une couleur qui peut aller de jaune clair à cerise foncé. D’autres couleurs et combinaisons de couleurs découlent fréquemment de différences de maturité ou des techniques de culture ou de séchage ;
[...] »
14 Aux termes des notes explicatives de la NC concernant la sous-position 24 03 10 90 de la NC :
« Tabac à fumer, même contenant des succédanés de tabac en toute proportion
Le tabac à fumer est du tabac coupé ou fractionné d’une autre façon, filé ou pressé en plaques, qui est susceptible d’être fumé sans devoir au préalable subir une autre transformation industrielle.
Les déchets de tabac sont à considérer comme tabac à fumer, lorsqu’ils sont conditionnés pour la vente au détail, qu’ils sont susceptibles d’être fumés et qu’ils ne sont pas classés comme cigares, cigarillos ou cigarettes (voir les notes explicatives des sous-positions 2402 10 00, 2402 20 10 et 2402 20 90 [de la NC]).
Relèvent également des présentes sous-positions les produits constitués exclusivement ou partiellement de substances autres que le tabac et qui répondent à la définition ci-dessus. Sont en revanche exclus les produits constitués exclusivement de substances autres que le tabac qui sont destinés à des usages médicaux (chapitre 30).
Relève aussi de ces sous-positions le tabac coupé ([cut cigarette rag]), mélange définitif de tabac utilisé pour la fabrication des cigarettes. »
Le code des douanes
15 L’article 4, point 19, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 955/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 1999 (JO 1999, L 119, p. 1) et par le règlement (CE) no 648/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005 (JO 2005, L 117, p. 13) (ci-après le « code des douanes »), est libellé comme suit :
« Aux fins du présent code, on entend par :
[...]
19) présentation en douane : communication aux autorités douanières, dans les formes requises, du fait de l’arrivée des marchandises au bureau de douane ou en tout autre lieu désigné ou agréé par les autorités douanières ».
16 L’article 37 du code des douanes prévoit :
« 1. Les marchandises qui sont introduites dans le territoire douanier de la Communauté sont, dès cette introduction, soumises à la surveillance douanière. Elles peuvent faire l’objet de contrôles douaniers conformément aux dispositions en vigueur.
2. Elles restent sous cette surveillance aussi longtemps qu’il est nécessaire pour déterminer leur statut douanier et, s’agissant de marchandises non communautaires et sans préjudice de l’article 82 paragraphe 1, jusqu’à ce qu’elles, soit changent de statut douanier, soit sont introduites dans une zone franche ou un entrepôt franc, soit sont réexportées ou détruites conformément à l’article 182. »
17 L’article 38, paragraphe 1, du code des douanes dispose :
« Les marchandises qui sont introduites dans le territoire douanier de la Communauté doivent être conduites sans délai par la personne qui a procédé à cette introduction, en utilisant, le cas échéant, la voie déterminée par les autorités douanières et selon les modalités fixées par ces autorités :
a) soit au bureau de douane désigné par les autorités douanières ou en tout autre lieu désigné ou agréé par ces autorités ;
b) soit dans une zone franche, si l’introduction des marchandises dans cette zone franche doit s’effectuer directement :
— soit par voie maritime ou aérienne,
— soit par voie terrestre sans emprunt d’une autre partie du territoire douanier de la Communauté, lorsqu’il s’agit d’une zone franche contiguë à la frontière terrestre entre un État membre et un pays tiers. »
18 L’article 40 du code des douanes énonce :
« Les marchandises qui entrent sur le territoire douanier de la Communauté sont présentées en douane par la personne qui les a introduites sur ce territoire ou, le cas échéant, par la personne qui prend en charge le transport des marchandises après que cette introduction a eu lieu, sauf dans le cas de marchandises acheminées par des moyens de transport qui ne font que transiter, sans interruption, par les eaux territoriales ou l’espace aérien du territoire douanier de la Communauté. La personne
qui présente les marchandises fait mention de la déclaration sommaire ou de la déclaration en douane déposée au préalable pour ces marchandises. »
19 Aux termes de l’article 79 du code des douanes :
« La mise en libre pratique confère le statut douanier de marchandise communautaire à une marchandise non communautaire.
Elle comporte l’application des mesures de politique commerciale, l’accomplissement des autres formalités prévues pour l’importation d’une marchandise ainsi que l’application des droits légalement dus. »
20 L’article 84, paragraphe 1, du code des douanes prévoit :
« Aux articles 85 à 90 :
a) lorsque le terme “régime suspensif” est utilisé, il s’entend comme s’appliquant, dans le cas de marchandises non communautaires, aux régimes suivants :
— le transit externe,
— l’entrepôt douanier,
— le perfectionnement actif sous forme du système de la suspension,
— la transformation sous douane
et
— l’admission temporaire ;
[...] »
21 L’article 91 du code des douanes énonce :
« 1. Le régime du transit externe permet la circulation d’un point à un autre du territoire douanier de la Communauté :
a) de marchandises non communautaires sans que ces marchandises soient soumises aux droits à l’importation et aux autres impositions ni aux mesures de politique commerciale ;
b) de marchandises communautaires, dans les cas et les conditions déterminés selon la procédure du comité, afin d'éviter que les produits qui font l'objet ou bénéficient de mesures à l'exportation ne puissent, selon le cas, échapper à ces mesures ou en bénéficier indûment.
[...] »
22 L’article 202 du code des douanes prévoit :
« 1. Fait naître une dette douanière à l’importation :
a) l’introduction irrégulière dans le territoire douanier de la Communauté d’une marchandise passible de droits à l’importation
ou
b) s’agissant d’une telle marchandise se trouvant dans une zone franche ou en entrepôt franc, son introduction irrégulière dans une autre partie de ce territoire.
Au sens du présent article, on entend par introduction irrégulière, toute introduction en violation des articles 38 à 41 et article 177 deuxième tiret.
2. La dette douanière naît au moment de l’introduction irrégulière.
[...] »
23 Aux termes de l’article 204, paragraphe 1, du code des douanes :
« Fait naître une dette douanière à l’importation :
a) l’inexécution d’une des obligations qu’entraîne pour une marchandise passible de droits à l’importation son séjour en dépôt temporaire ou l’utilisation du régime douanier sous lequel elle a été placée
ou
b) l’inobservation d’une des conditions fixées pour le placement d’une marchandise sous ce régime ou pour l’octroi d’un droit à l’importation réduit ou nul en raison de l’utilisation de la marchandise à des fins particulières,
dans des cas autres que ceux visés à l’article 203, à moins qu’il ne soit établi que ces manquements sont restés sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du dépôt temporaire ou du régime douanier considéré. »
[Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] Le règlement no 2454/93
24 [Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] L’article 186, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92 (JO 1993, L 253, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 312/2009 de la Commission, du 16 avril 2009 (JO 2009, L 98, p. 3) énonce :
« Les marchandises non communautaires présentées en douane sont couvertes par une déclaration sommaire de dépôt temporaire selon les instructions des autorités douanières. »
25 [Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] Aux termes de l’article 859 du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement (CE) no 444/2002 de la Commission, du 11 mars 2002 (JO 2002, L 68, p. 11) :
« Sont considérés comme restés sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du dépôt temporaire ou du régime douanier considéré au sens de l’article 204 paragraphe 1 du code [des douanes] les manquements suivants pour autant :
— qu’ils ne constituent pas de tentative de soustraction à la surveillance douanière de la marchandise,
— qu’ils n’impliquent pas de négligence manifeste de la part de l’intéressé,
— que toutes les formalités nécessaires pour régulariser la situation de la marchandise soient accomplies a posteriori :
[...]
2) s’agissant d’une marchandise placée sous un régime de transit, l’inexécution d’une des obligations qu’entraîne l’utilisation du régime lorsque les conditions suivantes sont remplies :
a) la marchandise placée sous le régime a effectivement été présentée intacte au bureau de destination ;
b) le bureau de destination a été en mesure de garantir que cette même marchandise a reçu une destination douanière ou a été placée en dépôt temporaire à l’issue de l’opération de transit,
et
c) lorsque le délai fixé conformément à l’article 356 n’a pas été respecté et que le paragraphe 3 dudit article n’est pas applicable, la marchandise a néanmoins été présentée au bureau de destination dans un délai raisonnable ;
[...] »
La directive 2008/118
26 Aux termes du considérant 7 de la directive 2008/118 :
« Étant donné que les régimes suspensifs dans le cadre du [...] code des douanes [...] prévoient des mesures de contrôle appropriées, tandis que les produits soumis à accise font l’objet des dispositions dudit règlement, il n’y a pas lieu de prévoir l’application séparée d’un système de contrôle de l’accise lorsque les produits soumis à accise font l’objet d’une procédure douanière suspensive ou d’un régime douanier suspensif de la Communauté. »
27 L’article 1er, paragraphe 1, sous c), de cette directive prévoit :
« La présente directive établit le régime général des droits d’accise frappant directement ou indirectement la consommation des produits suivants, ci-après dénommés “produits soumis à accise” :
[...]
c) les tabacs manufacturés relevant des directives 95/59/CE, 92/79/CEE et 92/80/CEE. »
28 L’article 2 de la directive 2008/118 dispose :
« Les produits soumis à accise sont soumis aux droits d’accise au moment :
a) de leur production, y compris, le cas échéant, de leur extraction, sur le territoire de la Communauté ;
b) de leur importation sur le territoire de la Communauté. »
29 L’article 3, paragraphe 4, de cette directive dispose :
« Les chapitres III et IV ne s’appliquent pas aux produits soumis à accise couverts par une procédure douanière suspensive ou par un régime douanier suspensif. »
30 L’article 4, points 6 et 8, de ladite directive énonce :
« Aux fins de la présente directive et de ses modalités d’application, on entend par :
[...]
6) “procédure douanière suspensive ou régime douanier suspensif”, l’un des régimes spéciaux prévus par le règlement (CEE) no 2913/92 relatif à la surveillance douanière dont font l’objet les marchandises non communautaires lors de l’entrée sur le territoire douanier de la Communauté, le dépôt temporaire, les zones franches ou les entrepôts francs, ainsi que l’un des régimes visés à l’article 84, paragraphe 1, point a), dudit règlement ;
[...]
8) “importation de produits soumis à accise”, l’introduction, sur le territoire de la Communauté, de produits soumis à accise qui, au moment de leur introduction dans la Communauté, ne sont pas placés sous une procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif, ainsi que la sortie de produits soumis à accise d’une procédure douanière suspensive ou d’un régime douanier suspensif ».
31 Aux termes de l’article 7, paragraphe 2, de la même directive :
« Aux fins de la présente directive, on entend par “mise à la consommation” :
a) la sortie, y compris la sortie irrégulière, de produits soumis à accise, d’un régime de suspension de droits ;
[...]
d) l’importation, y compris l’importation irrégulière, de produits soumis à accise, sauf si les produits soumis à accise sont placés, immédiatement après leur importation, sous un régime de suspension de droits. »
32 Aux termes de l’article 33, paragraphe 1, de la directive 2008/118 :
« Sans préjudice de l’article 36, paragraphe 1, dans les cas où des produits soumis à accise ayant déjà été mis à la consommation dans un État membre sont détenus à des fins commerciales dans un autre État membre pour y être livrés ou y être utilisés, ils sont soumis aux droits d’accise, et les droits d’accise deviennent exigibles dans cet autre État membre.
[...] »
33 L’article 38 de cette directive prévoit :
« 1. Lorsqu’une irrégularité a été commise au cours d’un mouvement de produits soumis à accise conformément à l’article 33, paragraphe 1, ou à l’article 36, paragraphe 1, dans un État membre autre que l’État membre dans lequel ils ont été mis à la consommation, ils sont soumis aux droits d’accise, et les droits d’accise sont exigibles dans l’État membre où l’irrégularité a été commise.
2. Lorsqu’une irrégularité a été constatée au cours d’un mouvement de produits soumis à accise conformément à l’article 33, paragraphe 1, ou à l’article 36, paragraphe 1, dans un État membre autre que l’État membre dans lequel ils ont été mis à la consommation et qu’il n’est pas possible de déterminer le lieu où l’irrégularité a été commise, celle-ci est réputée avoir été commise et les droits d’accise sont exigibles dans l’État membre où elle a été constatée.
Toutefois, si, avant l’expiration d’une période de trois ans à partir de la date d’acquisition des produits soumis à accise, l’État membre dans lequel l’irrégularité a réellement été commise vient à être déterminé, les dispositions du paragraphe 1 s’appliquent.
[...]
4. Aux fins du présent article, on entend par “irrégularité” une situation se produisant au cours d’un mouvement de produits soumis à accise conformément à l’article 33, paragraphe 1, ou à l’article 36, paragraphe 1, autre que celle visée à l’article 37, en raison de laquelle un mouvement ou une partie d’un mouvement de produits soumis à accise n’a pas pris fin régulièrement. »
Le droit hongrois
34 L’a jövedéki adóról és a jövedéki termékek forgalmazásának különös szabályairól szóló 2003. évi CXXVII. törvény (loi no CXXVII de 2003, relative à l’accise et aux règles spécifiques de mise sur le marché des produits soumis à accise, ci-après la « loi relative à l’accise ») prévoit, à son article 1er, paragraphes 1 et 2 :
« 1. L’accise est perçue en cas de production sur le territoire national et en cas d’importation sur celui-ci de tout produit soumis à accise.
2. En vue de l’exécution et du contrôle de l’obligation à l’accise, les exigences suivantes doivent être satisfaites :
a) le produit soumis à accise donnant lieu à la perception de l’accise doit être exclusivement produit dans un entrepôt fiscal, à moins d’être produit sous surveillance douanière,
b) le produit soumis à accise importé sur le territoire national sans paiement de l’accise – sauf s’il s’agit d’un produit sous surveillance douanière ou importé pour être livré à un opérateur enregistré – doit être mis en entrepôt fiscal, ou livré à l’exploitation ou à l’entrepôt d’un utilisateur exonéré, et
c) le produit soumis à accise pour lequel l’accise n’a pas été payée doit uniquement – sauf s’il se trouve sous surveillance douanière – être stocké ou entreposé en entrepôt fiscal, ou dans l’exploitation ou l’entrepôt d’un utilisateur exonéré. »
35 L’article 3, paragraphe 1, de la loi relative à l’accise dispose :
« Les dispositions de la présente loi sont applicables aux taxes payables sur les produits soumis à accise, à la taxe sur la valeur ajoutée relative aux tabacs manufacturés, à la production et à la mise sur le marché des produits soumis à accise, ainsi qu’aux autres affaires en matière d’accise. »
36 En vertu de l’article 3, paragraphe 2, sous g), de la loi relative à l’accise, les tabacs manufacturés sont un produit soumis à accise.
37 L’article 7 de ladite loi prévoit les définitions suivantes :
« 2) Importation de produits soumis à accise : importation sur le territoire national de produits soumis à accise soit directement d’un pays tiers, soit en empruntant le territoire d’un ou de plusieurs autres États membres, à condition que, si les produits entrent sur le territoire national sous un régime douanier, l’importation ait lieu en même temps que la clôture de la procédure prévue par ce régime par laquelle les produits sont mis à la consommation selon le droit douanier.
7/I) Sortie irrégulière d’un régime de suspension de droits : tout acte ou fait qui, pour un produit soumis à accise circulant sous un régime communautaire de suspension de droits, ne donne pas lieu à l’exonération, telle que prévue à l’article 21, paragraphe 1, ainsi qu’à l’article 26/B, paragraphe 3, de l’obligation suspendue de fixer et de payer le montant de l’impôt.
22) Mise à la consommation : sortie du produit soumis à accise d’un entrepôt fiscal ou d’un entrepôt fiscal d’un autre État membre, ou de l’exploitation d’un utilisateur exonéré, sauf si le produit est transféré à un entrepôt fiscal, à un entrepôt fiscal d’un autre État membre, à un opérateur enregistré d’un autre État membre, vers un pays tiers ou à un utilisateur exonéré ; réception du produit soumis à accise par un opérateur enregistré ; utilisation de vin de raisin par le producteur pour la
vente en vrac en entrepôt fiscal ; accomplissement de formalités douanières pour un produit soumis à accise importé d’un pays tiers, résultant en une mise à la consommation selon le droit douanier, ou mesure prise par une autorité douanière dont l’effet est que le produit doit être considéré comme mis à la consommation selon le droit douanier, si le produit n’est pas, après les formalités ou la mesure, stocké en entrepôt fiscal ou chez un utilisateur exonéré, ou qu’un expéditeur enregistré ne
l’expédie pas, en vertu de l’article 18, paragraphe 2, vers une destination visée à l’article 18, paragraphe 1. »
38 L’article 8, paragraphe 1, de la même loi énonce :
« Sauf disposition contraire de la présente loi, l’obligation à l’accise naît si :
a) un produit soumis à accise est produit sur le territoire national ;
b) un produit soumis à accise est importé sur le territoire national. »
39 L’article 15, paragraphe 2, de la loi relative à l’accise prévoit :
« L’accise est exigible lorsque :
a) un produit soumis à accise donnant lieu à la perception de l’accise est illégalement produit hors d’un entrepôt fiscal ;
b) un produit soumis à accise est acquis, détenu, transporté, utilisé ou mis en circulation après avoir été illégalement produit hors d’un entrepôt fiscal ou illégalement importé et reçu d’un pays tiers ou d’un autre État membre dans le territoire national, à l’exception du cas où une personne physique n’exerçant pas une activité indépendante avec ledit produit prouve avoir pu, dans les circonstances du cas concret, conclure sans équivoque que l’acquisition du produit était légale. »
40 Aux termes de l’article 48, paragraphe 1, de ladite loi :
« Les dispositions de la législation douanière sont appliquées en conformité avec celles de la présente loi aux produits soumis à accise importés de pays tiers tant qu’ils conservent leur caractère de marchandises non communautaires et, en ce qui concerne l’accomplissement des formalités prévues par la législation douanière, aux produits soumis à accise importés des territoires visés à l’article 7, paragraphe 3, sous a), point ab), ainsi qu’aux produits soumis à accise non imposés destinés à être
transportés du territoire national vers un pays tiers. »
41 En vertu de l’article 114, paragraphe 1, de la même loi, toute personne physique, sauf si elle exerce une activité commerciale à titre indépendant avec le produit en question, est tenue de payer une amende proportionnelle à la quantité du produit si « le produit soumis à accise qu’elle détient, transporte, vend ou utilise n’a pas été produit dans un entrepôt fiscal ou n’a pas, en cas d’importation, fait l’objet de formalités douanières ».
42 L’article 114, paragraphe 2, de la loi relative à l’accise prévoit qu’il y a lieu de considérer comme relevant du paragraphe 1 de cet article « tout produit soumis à accise dont le détenteur, le transporteur, le vendeur ou l’utilisateur ne peut certifier, dans une facture, une facture simplifiée, un document d’accompagnement du produit, un document relatif à la vente en vrac de vin, un document d’accompagnement simplifié, un document douanier, ou par d’autres moyens concluants, qu’il a été imposé
ou qu’il circule sous un régime de suspension de droits ».
43 Selon les termes de l’article 114, paragraphe 4, de ladite loi, un opérateur économique, sauf s’il s’agit d’une personne qui n’exerce pas une activité commerciale à titre indépendant avec le produit en question, est, s’il commet l’un des actes visés au paragraphe 1, sous a) et b), de cet article, tenu de payer une amende d’un montant correspondant au double de l’assiette définie au paragraphe 3 dudit article, ou au quintuple de celle-ci si le produit faisant l’objet de l’acte en question atteint
une quantité commerciale.
Le litige au principal et les questions préjudicielles
44 Schenker est une société commerciale, établie en Hongrie, qui fournit des services de représentation en douane et de logistique. Le 21 janvier 2011, elle a été chargée par Nyíregyháza Logisztik Centrum Kft., société commerciale, enregistrée en Hongrie, de mettre en « dépôt temporaire » deux chargements de tabac en raison d’un manque d’espace. Par la suite, elle a également mis deux autres chargements de tabac en « dépôt temporaire ».
45 Les chargements de tabac sont entrés sur le territoire de l’Union européenne, en Slovénie, et leur pays de destination était l’Ukraine. Selon les documents d’accompagnement, les quatre chargements en question sont arrivés en Hongrie dans le cadre de la procédure de transit externe « T1 » prévue par le code des douanes.
46 Les documents « T1 » contenaient l’indication NC 2401 10 35 (« Tabacs non écôtés – Tabacs light air cured ») qui ne constitue pas un produit soumis à accise.
47 Après le déchargement de la marchandise concernée, Schenker a entreposé les chargements de tabac sous le régime du « dépôt temporaire ».
48 Le 1er février 2011, l’un des conteneurs a été transféré sur le site de Nyíregyháza Logisztik Centrum et Schenker a, le 8 mars 2011, entreposé les trois conteneurs restants dans son entrepôt douanier public agréé de « type A », exploité à Debrecen (Hongrie).
49 Le Nemzeti Adó- és Vámhivatal Hajdú-Bihar Megyei Vám- és Pénzügyőri Igazgatóság (Direction des douanes et des finances pour le département de Hajdú-Bihar de l’administration nationale des Impôts et des Douanes, Hongrie) (ci-après l’« autorité administrative de premier niveau ») a, le 20 avril 2011, effectué un contrôle par sondage des trois conteneurs.
50 Parmi les marchandises non communautaires placées sous contrôle physique dans l’entrepôt douanier et conditionnées sous la forme de boîtes scellées à l’aide de rubans rigides et de bandes autoadhésives, les contrôleurs de l’autorité administrative de premier niveau ont choisi trois boîtes au hasard et ont, après les avoir ouvertes, constaté que, eu égard aux caractéristiques organoleptiques du produit contenu dans ces boîtes, il s’agissait non pas de « tabac non écôté », comme indiqué dans les
documents, mais de tabac coupé. Par conséquent, il ne relevait pas de la sous-position 2401 10 35 de la NC.
51 L’autorité administrative de premier niveau a alors, en contrôlant un à un les cartons d’un chargement qui en comportait 1260 en tout, conclu que chacun contenait du tabac coupé, d’une quantité totale de 37800 kg en poids net selon les documents d’entreposage.
52 Le 22 avril 2011, les 37800 kg de tabac coupé ont été mis sous la garde de l’administration des douanes.
53 Le 5 mai 2011, des échantillons du tabac coupé ont été pris en conformité avec les règles gouvernant les prélèvements d’échantillons.
54 Après avoir analysé les caractéristiques organoleptiques externes du produit, le Nemzeti Adó- és Vámhivatal Szakértői Intézete (le service d’expertise de l’administration nationale des Impôts et des Douanes, Hongrie) (ci‑après le « service d’expertise ») a tiré les conclusions suivantes :
« L’échantillon consiste en du tabac coupé de façon non homogène, de couleur brun clair et foncé, à particules fines et dégageant une odeur caractéristique de tabac. L’échantillon est surtout constitué de filaments minces, mais longs. En plus, il contient une quantité assez importante de particules de diamètre plus large/grand, parmi lesquels on peut également trouver des restes de côtes. Dans le bas du sac à échantillon, le tabac peut également être trouvé sous forme de poussière. »
55 Le procès-verbal du prélèvement d’échantillon comprend les indications suivantes :
« Conditionnement, forme de l’échantillon :
— “En vrac, aggloméré dans des cartons doublés de plastique” ;
— le poids net d’un carton est de 30 kg. »
56 Le service d’expertise a également analysé la largeur des brins de tabac et conclu que, « [d]ans l’échantillon examiné, plus de 25 % en poids des particules de tabac présentent une largeur de coupe inférieure à 1 millimètre ».
57 Après avoir testé le produit examiné, le service d’expertise a conclu que l’échantillon en question constituait du « tabac prêt à être fumé ».
58 À la suite du rapport rendu par le service d’expertise, l’autorité administrative de premier niveau a estimé que le produit dans le conteneur était du tabac à fumer fine coupe, à savoir un produit soumis à accise.
59 En outre, elle a estimé que, puisque les documents accompagnant le produit soumis à accise indiquaient un code NC qui ne correspondait pas à la sous-position de la NC dont relevait la marchandise réelle, lesdits documents ne convenaient pas pour certifier l’origine de la marchandise en tant que produit soumis à accise.
60 En conséquence, l’autorité administrative de premier niveau a, par sa décision no 5214-9/2011, du 21 juin 2011, ordonné à Schenker de verser une amende, au titre de l’accise, d’un montant de 1485540000 forints hongrois (HUF) (environ 4732052,83 euros). Selon les motifs de cette décision, Schenker aurait enfreint la législation sur l’accise par l’entreposage, le stockage et la détention d’un produit soumis à accise sans avoir payé l’impôt sur ce produit, et sans en avoir certifié l’origine et la
provenance.
61 Saisie d’un recours administratif formé par Schenker, la Direction générale des douanes a, par sa décision no 2177-18/2012, du 28 mars 2012, confirmé la décision rendue par l’autorité administrative de premier niveau.
62 Schenker a introduit devant le Debreceni Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Debrecen, Hongrie) une demande tendant au contrôle juridictionnel de cette décision, dans laquelle elle a conclu que celle-ci était illégale pour plusieurs motifs.
63 Tout d’abord, elle a soutenu que la Direction générale des douanes avait classé à tort la marchandise litigieuse dans la sous-position 2403 10 90 du chapitre 24 de la NC.
64 Ensuite, Schenker a contesté le fait que la marchandise puisse entrer dans le champ d’application de la législation sur l’accise, car, selon elle, il ne s’est pas produit de mise à la consommation de ladite marchandise.
65 Enfin, elle a soutenu que la marchandise en cause devait être considérée comme relevant d’un régime douanier suspensif, indépendamment du fait que le code NC indiqué sur les documents d’accompagnement ne correspondait pas à la description figurant à la sous-position de la NC dont la marchandise relevait réellement.
66 Selon un avis d’expert produit par Schenker, la position 2401 de la NC ne comprend pas seulement le tabac non écôté, mais admet aussi qu’on y classe les feuilles de tabac hachées ou coupées, si elles doivent faire l’objet d’une transformation industrielle ultérieure. Selon cet avis, l’application de la position 2401 de la NC n’est pas illégale, bien que le produit fût coupé dans son intégralité, car ce produit exige une transformation ultérieure et peut, comme tel, être classé dans la
sous-position 2401 30 00 de la NC.
67 La Direction générale des douanes a, sur le fond, conclu au rejet de la demande. Selon elle, il ne pouvait être considéré que le produit ait été présenté en douane, dans la mesure où les documents de transit qui l’accompagnaient l’identifiaient comme du « tabac non écôté » relevant de la position tarifaire 2401 10 3510 de la NC, alors que la marchandise en cause consistait réellement en du « tabac à fumer fine coupe » relevant de la position 2403 10 9000 de la NC, conditionné en un poids net
supérieur à 500 g, à savoir que le contenu des documents de transit qui accompagnaient cette marchandise n’était pas conforme à la réalité.
68 Selon la Direction générale des douanes, les documents d’accompagnement n’étaient pas à même de prouver ou de rendre vraisemblable l’origine de la marchandise détenue par Schenker.
69 Dans ces conditions, le Debreceni Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Debrecen) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Faut-il interpréter la description des produits couverts par l’appellation “Tabacs light air cured” de la sous-position tarifaire 2401 10 35 de la NC, au chapitre 24 (Tabacs et succédanés de tabac fabriqués) du règlement (UE) no 861/2010, comme ne comprenant que le tabac light air cured non écôté qui
— consiste en feuilles entières de la plante de tabac,
— n’est ni haché, ni pressé ou aggloméré,
— n’admet pas de façonnage (par exemple, l’écôtage, le hachage des feuilles ou leur agglomération) autres qu’une “fabrication” consistant dans le séchage par voie naturelle du tabac air cured de la sous-position tarifaire 2401 10 35 de la NC non écôté et
— n’est pas propre à être fumé ?
2) Faut-il interpréter la notion de “procédure douanière suspensive ou régime douanier suspensif”, prévue à l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, en ce sens qu’une marchandise (produit soumis à accise) en relève également si elle est, lors de son transfert dans le cadre d’une procédure de transit externe, et de son placement sous le régime du dépôt temporaire et sous le régime d’entrepôt douanier, accompagnée de documents sur lesquels la position tarifaire a été mal indiquée (à savoir
[2401 10 35 de la NC] au lieu de [2403 10 9000 de la NC]), tandis que le chapitre de la [NC] dont relève la marchandise (à savoir le chapitre 24 – Tabacs) y est mentionné correctement, de même que toutes les autres données (numéro de conteneur, quantité, poids net), et que les scellés sont intacts ?
(Autrement dit, la soumission d’une marchandise donnée à la procédure ou au régime douanier suspensif peut-elle être remise en cause lorsque le chapitre du tarif douanier commun dont relève la marchandise est correctement mentionné dans la documentation accompagnant celle-ci, tandis que la sous-position spécifique y est mal indiquée ?)
3) Faut-il interpréter les notions d’“importation” figurant à l’article 2, sous b), de la directive 2008/118, et d’“importation de produits soumis à accise” figurant à l’article 4, point 8, de cette même directive, en ce sens qu’il se produit une importation dans le cas également où la sous-position tarifaire de la marchandise réelle placée en transit externe et celle qui est indiquée dans la documentation accompagnant ladite marchandise divergent, tandis que l’indication du chapitre dont elle
relève (à savoir le chapitre 24 – Tabacs) est conforme, et que, au-delà de cette divergence, la quantité et le poids net de la marchandise réelle correspondent à ce qui est mentionné sur les documents qui l’accompagnent ?
4) Les faits de l’affaire au principal sont-ils constitutifs d’une “irrégularité” au sens de l’article 38 de la directive 2008/118, lorsque la marchandise suit la procédure ou le régime douanier suspensif avec une indication inexacte, dans la documentation d’accompagnement, de sa sous-position de la NC selon l’annexe I du règlement no 2658/87 ? »
Sur les questions préjudicielles
Sur la première question
70 À titre liminaire, il convient, d’une part, de rappeler que, lorsque la Cour est saisie d’un renvoi préjudiciel en matière de classement tarifaire, sa fonction consiste davantage à éclairer la juridiction nationale sur les critères dont la mise en œuvre permettra à cette dernière de classer correctement les produits en cause dans la NC qu’à procéder elle-même à ce classement, et ce d’autant plus qu’elle ne dispose pas nécessairement de tous les éléments indispensables à cet égard. Ainsi, la
juridiction nationale apparaît, en tout état de cause, mieux placée pour le faire (arrêts du 7 novembre 2002, Lohmann et Medi Bayreuth, C‑260/00 à C‑263/00, EU:C:2002:637, point 26, ainsi que du 16 février 2006, Proxxon, C‑500/04, EU:C:2006:111, point 23).
71 Il appartiendra donc à la juridiction de renvoi de procéder au classement des produits en cause au principal au regard des réponses apportées par la Cour aux questions qu’elle lui a soumises.
72 Il y a lieu, d’autre part, de souligner que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises (arrêts du 17 juillet 1997, Krüger, C‑334/95, EU:C:1997:378,
points 22 et 23, ainsi que du 4 octobre 2012, Byankov, C‑249/11, EU:C:2012:608, point 57).
73 En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, par sa première question, la juridiction nationale s’interroge, en réalité, sur l’interprétation des positions 2401 et 2403 de la NC aux fins du classement tarifaire d’un produit présentant des caractéristiques telles que celles en cause au principal.
74 Ainsi, il y a lieu de considérer, par cette question, que la juridiction de renvoi demande, en substance, si le règlement no 2658/87 doit être interprété en ce sens qu’une marchandise, telle que celle en cause au principal, relève de la position 2401 de la NC, et plus spécifiquement des sous-positions 2401 10 35 ou 2401 30 00 de la NC, ou de la position 2403 de la NC et, en l’occurrence, de la sous-position 2403 10 90 de la NC.
75 Afin de répondre à ladite question, d’une part, il importe de souligner que les règles générales pour l’interprétation de la NC prévoient que le classement des marchandises est déterminé selon les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres, les libellés des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres étant considérés comme n’ayant qu’une valeur indicative (arrêt du 11 juin 2015, Baby Dan, C‑272/14, EU:C:2015:388, point 25).
76 D’autre part, il échoit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans l’intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et leurs propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la NC et des notes de sections ou de chapitres (voir, notamment, arrêts du 16 septembre 2004, DFDS, C‑396/02, EU:C:2004:536,
point 27 ; du 15 septembre 2005, Intermodal Transports, C‑495/03, EU:C:2005:552, point 47, et du 15 février 2007, RUMA, C‑183/06, EU:C:2007:110, point 27).
77 S’agissant des notes explicatives du SH, il y a lieu d’ajouter que, en dépit de leur absence de force contraignante, elles constituent des instruments importants aux fins d’assurer une application uniforme du tarif douanier commun et fournissent, en tant que telles, des éléments valables pour son interprétation (arrêts du 18 juin 2009, Kloosterboer Services, C‑173/08, EU:C:2009:382, point 25, et du 20 juin 2013, Agroferm, C‑568/11, EU:C:2013:407, point 28). Il en est de même des notes
explicatives de la NC (voir arrêts du 16 juin 1994, Develop Dr. Eisbein, C‑35/93, EU:C:1994:252, point 21, ainsi que du 14 avril 2011, British Sky Broadcasting Group et Pace, C‑288/09 et C‑289/09, EU:C:2011:248, point 92).
78 Aux fins du classement dans la position appropriée, la destination du produit peut constituer un critère objectif de classification pour autant qu’elle est inhérente audit produit, l’inhérence devant pouvoir s’apprécier en fonction des caractéristiques et des propriétés objectives de celui-ci (voir arrêt du 4 mars 2004, Krings, C‑130/02, EU:C:2004:122, point 30 et jurisprudence citée).
79 Il ressort de la décision de renvoi que la marchandise litigieuse consiste en du tabac coupé de façon non homogène, surtout constitué de filaments minces, mais longs et qu’elle contient une quantité assez importante de particules de diamètre plus large parmi lesquelles se trouvent des restes de côtes ainsi que du tabac sous la forme de poussière. La décision de renvoi précise également qu’il s’agit de « tabac prêt à être fumé ».
80 Schenker faisant valoir que la marchandise relève de la position 2401 de la NC, il convient d’indiquer les caractéristiques que doit remplir une marchandise pour relever de cette position.
81 À cet égard, d’après son libellé, la position 2401 de la NC comprend les « tabacs bruts ou non fabriqués ; déchets de tabac ».
82 En ce qui concerne les « tabacs bruts ou non fabriqués », les notes explicatives de la NC concernant la position 2401 de la NC renvoient au point 1 des notes explicatives du SH relatives à cette position qui précise que ladite position comprend le tabac à l’état naturel sous la forme de plantes entières ou de feuilles et les feuilles séchées ou fermentées, ces feuilles pouvant être entières ou écôtées, rognées ou non, brisées ou découpées même sous une forme régulière, mais à la condition qu’il
ne s’agisse pas d’un produit prêt à être fumé.
83 S’agissant des « déchets de tabacs », le point 2 des notes explicatives du SH relatives à la position 2401 de la NC spécifie que cette notion regroupe les tiges, les pétioles, les nervures, les rognures et les poussières provenant de la manutention des feuilles ou de la fabrication des produits finis.
84 Dans la mesure où il ressort de la décision de renvoi que la marchandise en cause au principal se compose d’éléments susceptibles d’être qualifiés de « déchets de tabac », mais que le produit constitue également à la fois du « tabac prêt à être fumé », il est nécessaire, en vertu de la règle énoncée au point 3, sous b), des règles générales pour l’interprétation de la NC, pour procéder au classement tarifaire de ce produit, d’établir quelle est, parmi les matières qui le composent, celle qui lui
donne son caractère essentiel, ce qui peut être fait en se demandant si le produit, privé de l’un ou de l’autre de ses composants, garderait ou non les propriétés qui le caractérisent (arrêt du 18 juin 2009, Kloosterboer Services, C‑173/08, EU:C:2009:382, point 31).
85 De même, ainsi que l’indique le point VIII de la note explicative du SH relative à la règle énoncée au point 3, sous b), des règles générales pour l’interprétation de la NC, le facteur qui détermine le caractère essentiel peut, suivant le type de produit, ressortir par exemple de la nature de la matière constitutive ou des articles qui les composent, de leur volume, de leur quantité, de leur poids, de leur valeur ou de l’importance de l’une des matières constitutives en vue de l’utilisation de
ces produits.
86 En l’espèce, la décision de renvoi précise que la marchandise en cause consiste non pas en des feuilles de tabac séchées à l’état naturel, mais, prise dans son ensemble, en du tabac prêt à être fumé. Partant, dès lors que la juridiction de renvoi considère que la présence de déchets de tabac ne fait pas obstacle à ce que le produit dans son ensemble constitue du tabac prêt à être fumé, ce produit ne saurait relever de la position 2401 de la NC.
87 À cet égard, en vertu des notes explicatives du SH relatives à la position 2403 de la NC, cette position inclut le tabac à fumer.
88 Plus spécifiquement, les notes explicatives de la NC précisent, en ce qui concerne la sous-position 2403 10 90 de la NC, que le tabac à fumer est du tabac coupé susceptible d’être fumé sans devoir préalablement subir une autre transformation industrielle.
89 Ainsi, la délimitation entre le tabac brut ou non fabriqué et le tabac fabriqué porte, ainsi que Mme l’avocat général l’a souligné au point 60 de ses conclusions, sur le point de savoir si le tabac peut être qualifié de « prêt à être fumé ».
90 Par conséquent, comme le relève à juste titre le gouvernement hongrois, le critère déterminant permettant de classer un produit dans la position 2403 de la NC plutôt que dans la position 2401 de la NC repose sur le point de savoir si les feuilles ont fait l’objet d’une fabrication à un degré tel qu’il est question d’un tabac fabriqué prêt à être consommé sans davantage de transformation industrielle.
91 Dans ces conditions, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort du point 78 du présent arrêt, la juridiction de renvoi a précisé que la marchandise en cause au principal consiste en du tabac prêt à être fumé, qui de plus est emballé en vrac, aggloméré dans des cartons doublés de plastique et que le poids net d’un carton est de 30 kg, elle relève de la sous-position 2403 10 90 de la NC.
92 En effet, la sous-position 2403 10 10 de la NC concerne les marchandises contenues dans des « emballages immédiats d’un contenu net n’excédant pas 500 g ».
93 Partant, il convient de répondre à la première question posée que le règlement no 2658/87 doit être interprété en ce sens que ne relève pas de la position 2401 de la NC une marchandise, telle que celle en cause au principal, consistant en du tabac à fumer, malgré la présence de déchets de tabac, dès lors que ces derniers ne font pas obstacle à cette destination du produit en cause. Une telle marchandise est toutefois susceptible de relever de la position 2403 de la NC, et plus particulièrement de
la sous-position 2403 10 90 de la NC, lorsqu’elle est conditionnée en vrac, agglomérée et dans des cartons doublés de plastique d’un poids net de 30 kilogrammes.
Sur les deuxième et troisième questions
94 Par ses deuxième et troisième questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la notion de « procédure douanière suspensive ou régime douanier suspensif », prévue à l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, doit être interprétée en ce sens que la soumission d’une marchandise donnée à la procédure ou au régime douanier suspensif peut être remise en cause lorsque le chapitre du tarif douanier commun dont relève cette marchandise est
correctement mentionné dans les documents accompagnant celle-ci, mais que la sous-position spécifique y est mal indiquée et si l’article 2, sous b), et l’article 4, point 8, de la directive 2008/118 doivent être interprétés en ce sens que, dans un tel cas, il y a eu importation de ladite marchandise.
95 À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 2, sous b), de la directive 2008/118, les produits soumis à accise sont soumis aux droits d’accise à la date de leur importation sur le territoire de l’Union.
96 Il y a lieu de vérifier, dans un premier temps, si une marchandise telle que celle en cause au principal a fait l’objet d’une « importation », au sens de l’article 2, sous b), de la directive 2008/118.
97 En vertu de l’article 4, point 8, de la directive 2008/118, est considérée comme une « importation de produits soumis à accise » l’introduction, sur le territoire de l’Union, de produits soumis à accise qui, au moment de leur introduction dans l’Union, ne sont pas placés sous une procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif, ainsi que la sortie de produits soumis à accise d’une procédure douanière suspensive ou d’un régime douanier suspensif.
98 Par ailleurs, aux termes de l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, on entend par « procédure douanière suspensive ou régime douanier suspensif » l’un des régimes spéciaux prévus par le code des douanes relatif à la surveillance douanière dont font l’objet les marchandises non communautaires lors de l’entrée sur le territoire douanier de l’Union, le dépôt temporaire, les zones franches ou les entrepôts francs, ainsi que l’un des régimes visés à l’article 84, paragraphe 1, sous a), de ce
code.
99 Il ressort de la décision de renvoi que les marchandises en cause au principal ont été présentées en douane en Slovénie lors de leur introduction sur le territoire douanier de l’Union et qu’elles sont arrivées en Hongrie dans le cadre de la procédure de transit externe où elles ont été placées sous le régime du dépôt temporaire, puis de l’entrepôt douanier.
100 Par conséquent, ces marchandises ont été placées, depuis leur entrée sur le territoire douanier de l’Union, sous une « procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif », au sens de l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, qui renvoie à l’article 84, paragraphe 1, sous a), du code des douanes.
101 En l’occurrence, il conviendra d’examiner si l’indication d’une position tarifaire erronée dans une déclaration sommaire de dépôt temporaire entraînerait ou non la sortie desdites marchandises de la procédure douanière suspensive ou du régime douanier suspensif concerné, en donnant lieu, le cas échéant, à la naissance d’une dette douanière en vertu des articles 202 et 204 du code des douanes et à l’exigibilité de l’accise.
102 En ce qui concerne l’article 202 du code des douanes, celui-ci définit l’« introduction irrégulière » comme toute introduction, en violation des articles 38 à 41 et de l’article 177, deuxième tiret, de ce code, d’une marchandise passible de droits à l’importation soit dans le territoire douanier de l’Union, soit dans une autre partie de ce territoire, alors qu’elle se trouve dans une zone franche ou un entrepôt franc (arrêt du 3 mars 2005, Papismedov e.a., C‑195/03, EU:C:2005:131, point 25).
103 Ainsi, constitue une introduction irrégulière l’importation de marchandises qui ne respecte pas les étapes suivantes prévues par le code des douanes. En premier lieu, selon l’article 38, paragraphe 1, de ce code, les marchandises qui sont introduites dans le territoire douanier de l’Union doivent être conduites sans délai, soit au bureau de douane désigné, soit dans une zone franche. En second lieu, conformément à l’article 40 dudit code, lorsque les marchandises arrivent au bureau de douane,
elles doivent y être présentées. La présentation en douane des marchandises est définie à l’article 4, point 19, du même code comme la communication aux autorités douanières, dans les formes requises, du fait de l’arrivée des marchandises à ce bureau ou en tout autre lieu désigné ou agréé (arrêt du 3 mars 2005, Papismedov e.a., C‑195/03, EU:C:2005:131, point 26).
104 En interprétant les articles 40 et 43 à 45 du code des douanes, la Cour a jugé que la présentation des marchandises comportait en effet, une obligation corrélative de déposer à bref délai une déclaration sommaire ou d’accomplir dans le même délai les formalités en vue de donner aux marchandises concernées une destination douanière, à savoir, au cas où il était demandé qu’elles soient placées sous un régime douanier, d’effectuer une déclaration en douane. En particulier, il ressortait des termes
mêmes de l’article 43, deuxième alinéa, de ce code que les deux opérations étaient effectuées, en règle générale, simultanément, car le délai que les autorités douanières pouvaient accorder pour ce dépôt expirait au plus tard le premier jour ouvrable suivant celui de la présentation en douane des marchandises. Par ailleurs, en application de l’article 44, paragraphe 1, dudit code, la déclaration sommaire devait contenir les énonciations nécessaires à l’identification des marchandises (voir, en
ce sens, arrêt du 3 mars 2005, Papismedov e.a., C‑195/03, EU:C:2005:131, point 30).
105 [Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] Certes, les articles 43 à 45 du code des douanes ont été supprimés par le règlement no 648/2005. Néanmoins, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 122 de ses conclusions, le lien entre la présentation en douane aux termes de l’article 40 du code des douanes et la déclaration sommaire est désormais expressément prévu à l’article 186, paragraphe 1, premier alinéa du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 312/2009.
106 [Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] Dans ces conditions, il convient de constater que, lorsque la présentation en douane des marchandises, prévue à l’article 40 du code des douanes, s’accompagne du dépôt d’une déclaration sommaire de dépôt temporaire aux termes de l’article 186 du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 312/2009, qui donne une description du type de marchandises qui n’a aucun rapport avec la réalité, la communication aux autorités douanières du
fait de l’arrivée des marchandises, au sens de l’article 4, point 19, du même code, fait défaut. Lorsque cette déclaration ne fait pas mention de la présence d’une partie significative des marchandises présentées en douane, il faut considérer que celles-ci ont fait l’objet d’une introduction irrégulière (voir, par analogie, arrêt du 3 mars 2005, Papismedov e.a., C‑195/03, EU:C:2005:131, point 31).
107 À cet égard, il découle de la décision de renvoi que, dans l’affaire au principal, contrairement aux faits examinés dans l’arrêt du 3 mars 2005, Papismedov e.a. (C‑195/03, EU:C:2005:131), la déclaration sommaire contenait les informations nécessaires à l’identification des marchandises. En effet, selon la juridiction de renvoi, la marchandise a été déclarée sous une dénomination correcte, seule la sous‑position tarifaire étant erronée, et la marchandise a été correctement identifiée quant à son
type, à sa quantité et à son conditionnement.
108 Dans ces conditions, les marchandises en cause au principal ne sauraient être considérées comme étant entrées irrégulièrement sur le territoire douanier de l’Union au sens de l’article 202 du code des douanes. Elles pouvaient donc être valablement placées, lors de leur entrée en Slovénie, sous une « procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif », au sens de l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, aucune importation n’ayant eu lieu au sens de l’article 2, sous b), de
cette directive et l’accise n’étant pas devenue exigible.
109 En ce qui concerne l’article 204 du code des douanes, il convient de vérifier si les marchandises en cause au principal ont, par la suite, correctement été placées sous le régime du transit externe et, en Hongrie, sous le régime de l’entrepôt douanier afin d’examiner si l’accise est ou non devenue exigible en application de l’article 4, point 8, de la directive 2008/118.
110 Aux termes de l’article 59, paragraphe 1, du code des douanes, toute marchandise destinée à être placée sous un régime douanier doit faire l’objet d’une déclaration pour ce régime douanier.
111 À cet égard, la Cour, lors de son analyse de la nature et de la portée de la déclaration en douane, a jugé, au point 40 de l’arrêt du 15 septembre 2011, DP grup (C‑138/10, EU:C:2011:587), que l’obligation pesant sur le déclarant de fournir des informations exactes s’étend également à la détermination de la sous-position correcte lors du classement tarifaire des marchandises, ledit déclarant pouvant, en cas de doute, demander préalablement aux autorités douanières un renseignement tarifaire
contraignant, en application de l’article 12 du code des douanes.
112 Ainsi, il n’est pas exclu qu’une dette douanière puisse naître sur le fondement de l’article 204 du code des douanes.
113 Selon l’article 204, paragraphe 1, sous a), dudit code, une dette douanière à l’importation naît de l’inexécution d’une des obligations qu’entraîne pour une marchandise passible de droits à l’importation son séjour en dépôt temporaire ou l’utilisation du régime douanier sous lequel elle a été placée, à moins qu’il ne soit établi que ce manquement est resté sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du régime douanier considéré.
114 Dans la situation en cause au principal, les marchandises ont été classées dans un chapitre correct de la NC, mais dans une sous-position incorrecte de cette dernière.
115 [Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] Il importe de rappeler que l’article 859 du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 444/2002, met valablement en place un régime régissant de manière exhaustive les manquements, au sens de l’article 204 du code des douanes, qui « sont restés sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du dépôt temporaire ou du régime douanier considéré » (arrêt du 6 septembre 2012, Eurogate Distribution, C‑28/11, EU:C:2012:533,
point 34).
116 [Tel que rectifié par ordonnance du 6 octobre 2016] À cet égard, il y a lieu de souligner que l’article 859 du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 444/2002, permet de considérer comme étant restée sans conséquence réelle sur le fonctionnement d’un régime de transit l’inexécution d’une des obligations qu’entraîne l’utilisation dudit régime dès lors que les trois conditions énumérées au point 2 de cet article sont remplies et pour autant que les trois conditions énumérées au
premier alinéa dudit article sont réunies.
117 Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si l’ensemble de ces conditions sont remplies s’agissant du litige au principal.
118 En cas de réponse affirmative, l’erreur dans le classement des marchandises peut être alors considérée comme étant sans conséquence réelle sur le fonctionnement des régimes douaniers consécutifs.
119 Ce n’est qu’à la suite des vérifications auxquelles se réfèrent le point 114, qu’il est possible au juge de renvoi d’établir si la marchandise en cause au principal a été placée sous une « procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif », au sens de l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, depuis son entrée sur le territoire de l’Union.
120 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux deuxième et troisième questions posées que la notion de « procédure douanière suspensive ou de régime douanier suspensif », prévue à l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, doit être interprétée en ce sens que la soumission d’une marchandise donnée à la procédure ou au régime douanier suspensif ne peut être remise en cause lorsque le chapitre du tarif douanier commun dont relève cette marchandise est
correctement mentionné dans les documents accompagnant celle-ci, mais que la sous-position spécifique y est mal indiquée. Dans un tel cas, l’article 2, sous b), et l’article 4, point 8, de la directive 2008/118 doivent être interprétés en ce sens qu’il n’y a pas eu importation de ladite marchandise et que celle-ci n’est pas soumise aux droits d’accise.
Sur la quatrième question
121 Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si, dans une situation telle que celle en cause au principal, la notion d’« irrégularité », au sens de l’article 38 de la directive 2008/118, doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre une marchandise placée sous « une procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif », au sens de l’article 4, point 6, de cette directive, accompagnée d’un document mentionnant un classement tarifaire incorrect.
122 L’article 38, paragraphe 1, de la directive 2008/118 énonce que, lorsqu’une irrégularité a été commise au cours d’un mouvement de produits soumis à accise dans un État membre autre que l’État membre dans lequel ces produits ont été mis à la consommation, ces derniers sont soumis aux droits d’accise, et les droits d’accise sont exigibles dans l’État membre où cette irrégularité a été commise.
123 Selon l’article 38, paragraphe 2, de ladite directive, lorsqu’une irrégularité a été constatée au cours d’un mouvement de produits soumis à accise et qu’il n’est pas possible de déterminer le lieu où cette irrégularité a été commise, celle-ci est réputée avoir été commise et les droits d’accise sont exigibles dans l’État membre où elle a été constatée.
124 L’article 38, paragraphe 1, de la directive 2008/118 se réfère aux irrégularités dont la définition figure à son paragraphe 4. Celui-ci prévoit qu’il convient d’entendre par « irrégularité » une situation se produisant au cours d’un mouvement de produits soumis à accise conformément, notamment, à l’article 33, paragraphe 1, de cette directive en raison de laquelle un mouvement ou une partie d’un mouvement de produits soumis à accise n’a pas pris fin régulièrement.
125 Il y a donc mouvement de produits soumis à accise, au sens de l’article 33, paragraphe 1, de ladite directive, lorsque des produits soumis à accise ont déjà été mis à la consommation dans un État membre et sont détenus à des fins commerciales dans un autre État membre pour y être livrés ou y être utilisés.
126 Dans une situation telle que celle à l’origine du litige au principal, il y a lieu de considérer que les conditions de l’article 38, paragraphe 4, de la directive 2008/118, lues en combinaison avec l’article 33, paragraphe 1, de cette directive, ne sont pas remplies.
127 En effet, d’une part, les marchandises en cause au principal n’ont pas été mises à la consommation en Slovénie étant donné qu’elles ont été placées sous une « procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif », au sens de l’article 4, point 6, de la directive 2008/118, et, d’autre part, elles n’ont pas fait l’objet d’une détention commerciale en Hongrie pour y être livrées ou utilisées, mais sont destinées à être réexportées vers l’Ukraine.
128 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de répondre à la quatrième question posée que, dans une situation telle que celle en cause au principal, la notion d’« irrégularité », au sens de l’article 38 de la directive 2008/118, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne couvre pas une marchandise placée sous une procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif accompagnée d’un document mentionnant un classement tarifaire incorrect.
Sur les dépens
129 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :
1) Le règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, tel que modifié par le règlement (UE) no 861/2010 de la Commission, du 5 octobre 2010, doit être interprété en ce sens que ne relève pas de la position 2401 de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement no 2658/87, tel que modifié par le règlement no 861/2010, une marchandise, telle que celle en cause au principal, consistant en du tabac
à fumer, malgré la présence de déchets de tabac, dès lors que ces derniers ne font pas obstacle à cette destination du produit en cause. Une telle marchandise est toutefois susceptible de relever de la position 2403 de cette nomenclature, et plus particulièrement de la sous-position 2403 10 90 de ladite nomenclature, lorsqu’elle est conditionnée en vrac, agglomérée et dans des cartons doublés de plastique d’un poids net de 30 kilogrammes.
2) La notion de « procédure douanière suspensive ou de régime douanier suspensif », prévue à l’article 4, point 6, de la directive 2008/118/CE du Conseil, du 16 décembre 2008, relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE, doit être interprétée en ce sens que la soumission d’une marchandise donnée à la procédure ou au régime douanier suspensif ne peut être remise en cause lorsque le chapitre du tarif douanier commun dont relève cette marchandise est correctement mentionné
dans les documents accompagnant celle-ci, mais que la sous-position spécifique y est mal indiquée. Dans un tel cas, l’article 2, sous b), et l’article 4, point 8, de la directive 2008/118 doivent être interprétés en ce sens qu’il n’y a pas eu importation de ladite marchandise et que celle-ci n’est pas soumise aux droits d’accise.
3) Dans une situation telle que celle en cause au principal, la notion d’« irrégularité », au sens de l’article 38 de la directive 2008/118, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne couvre pas une marchandise placée sous une procédure douanière suspensive ou un régime douanier suspensif accompagnée d’un document mentionnant un classement tarifaire incorrect.
Signatures
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( *1 ) Langue de procédure : le hongrois.