ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
5Â juin 2014Â ( *1 )
«Agriculture — Politique agricole commune — Régime de paiement unique — Règlement (CE) no 73/2009 — Articles 34, 36 et 137 — Droits au paiement — Base de calcul — Primes versées pour le bétail et parcelles détenues par l’agriculteur au cours de la période de référence — Modification des modalités de détermination de la superficie des parcelles agricoles — Réduction du nombre d’hectares admissibles au bénéfice de l’aide — Demande de l’agriculteur en vue de l’obtention d’une diminution du nombre et
d’une augmentation de la valeur unitaire de ses droits au paiement — Règlement (CE) no 796/2004 — Article 73 bis, paragraphe 2 bis — Admissibilité»
Dans l’affaire C‑105/13,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le College van Beroep voor het bedrijfsleven (Pays-Bas), par décision du 27 février 2013, parvenue à la Cour le 4 mars 2013, dans la procédure
P. J. Vonk Noordegraaf
contre
Staatssecretaris van Economische Zaken,
LA COUR (première chambre),
composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet (rapporteur), E. Levits, Mme M. Berger et M. F. Biltgen, juges,
avocat général: Mme J. Kokott,
greffier: M. A. Calot Escobar,
considérant les observations présentées:
— pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Bulterman et B. Koopman, en qualité d’agents,
— pour la Commission européenne, par MM. H. Kranenborg et G. von Rintelen, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 février 2014,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 34, 36 et 137 du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003 (JO L 30,
p. 16, et rectificatif JO 2010, L 43, p. 7).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Vonk Noordegraaf au Staatssecretaris van Economische Zaken (secrétaire d’État aux Affaires économiques, ci-après le «Staatssecretaris»), au sujet d’une modification des droits au paiement unique à la suite d’un changement dans les modalités de détermination de la superficie admissible au bénéfice de l’aide.
Le cadre juridique
Le règlement (CE) no 1782/2003
3 Le règlement (CE) no 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) no 2019/93, (CE) no 1452/2001, (CE) no 1453/2001, (CE) no 1454/2001, (CE) no 1868/94, (CE) no 1251/1999, (CE) no 1254/1999, (CE) no 1673/2000, (CEE) no 2358/71 et (CE) no 2529/2001 (JO L 270, p. 1, et rectificatif JO
2004, L 94, p. 70), a établi, notamment, un régime d’aide au revenu des agriculteurs découplé de la production. Ce régime, désigné à l’article 1er, deuxième tiret, de ce règlement comme le «régime de paiement unique», regroupe un certain nombre de paiements directs versés aux agriculteurs au titre de différents régimes de soutien ayant existé jusqu’alors.
4 Aux fins de la mise en œuvre du régime de paiement unique, les États membres pouvaient opter pour le modèle dit «historique» ou le modèle dit «régional».
5 Dans le cadre du modèle dit «historique», les agriculteurs ayant bénéficié, au cours d’une période de référence comprenant les années civiles 2000 à  2002, d’un paiement au titre d’au moins un des régimes de soutien visés à l’annexe VI du règlement no 1782/2003 étaient en droit de bénéficier de «droits au paiement» calculés sur la base d’un montant de référence obtenu, pour chaque agriculteur, à partir de la moyenne annuelle, sur cette période, de l’ensemble des paiements qui lui ont été accordés
au titre desdits régimes.
6 L’article 43 de ce règlement, intitulé «Détermination des droits au paiement», disposait:
«1.   Sans préjudice de l’article 48, tout agriculteur bénéficie d’un droit au paiement par hectare qui est calculé en divisant le montant de référence par le nombre moyen calculé sur trois ans de l’ensemble des hectares qui a donné droit, au cours de la période de référence, aux paiements directs dont la liste figure à l’annexe VI.
Le nombre total de droits au paiement est égal au nombre moyen d’hectares susmentionné.
[...]
2.   Le nombre d’hectares visé au paragraphe 1 inclut également:
[...]
b) toutes les superficies fourragères au cours de la période de référence.
3.   Aux fins du paragraphe 2, point b), du présent article, on entend par ‘superficie fourragère’ la superficie de l’exploitation disponible pendant toute l’année civile, conformément à l’article 5 du règlement (CE) no 2419/2001 de la Commission, [...] pour l’élevage d’animaux, y compris les superficies utilisées en commun et les superficies soumises à une culture mixte. Ne sont pas comptés dans cette superficie:
— les bâtiments, les bois, les étangs, les chemins,
— les superficies utilisées pour d’autres cultures admissibles au bénéfice d’une aide communautaire, pour des cultures permanentes ou pour des cultures horticoles,
— les superficies bénéficiant du régime de soutien aux agriculteurs produisant certaines grandes cultures, qui sont utilisées dans le cadre du régime d’aide concernant les fourrages séchés ou soumises à un programme national ou communautaire de gel des terres.
[...]»
Le règlement no 73/2009
7 Le règlement no 73/2009 a abrogé et remplacé le règlement no 1782/2003 à compter du 1er janvier 2009. Son considérant 49 est ainsi libellé:
«Lors de la première attribution de droits au paiement par les États membres, certaines erreurs se sont traduites par des paiements particulièrement élevés pour les agriculteurs. Cette irrégularité fait normalement l’objet d’une correction financière jusqu’à ce que des mesures correctives soient prises. Toutefois, compte tenu du temps écoulé depuis la première attribution des droits au paiement, les mesures nécessaires entraîneraient pour les États membres des contraintes juridiques et
administratives disproportionnées. Il y a donc lieu, à des fins de sécurité juridique, de régulariser l’attribution de ces paiements.»
8 Aux termes de l’article 2, sous h), du règlement no 73/2009, on entend par «‘surface agricole’, l’ensemble de la superficie des terres arables, des pâturages permanents ou des cultures permanentes».
9 L’article 14 de ce règlement prévoit:
«Chaque État membre établit et gère un système intégré de gestion et de contrôle, ci-après dénommé ‘système intégré’.
[...]»
10 Selon l’article 33, paragraphe 1, du règlement no 73/2009:
«Peuvent bénéficier de l’aide au titre du régime de paiement unique les agriculteurs qui:
a) détiennent des droits au paiement attribués conformément au règlement (CE) no 1782/2003;
[...]»
11 L’article 34 du règlement no 73/2009 prévoit:
«1.   L’aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par hectare admissible. Les droits au paiement activés donnent droit au paiement des montants qu’ils fixent.
2.   Aux fins du présent règlement, on entend par ‘hectare admissible’:
a) toute surface agricole de l’exploitation et les surfaces plantées de taillis à courte rotation (code NC ex 0602 90 41) utilisées aux fins d’une activité agricole ou, en cas d’utilisation également pour des activités autres qu’agricoles, essentiellement utilisées à des fins agricoles [...]».
12 L’article 36 dudit règlement prévoit:
«Sauf disposition contraire du présent règlement, les droits au paiement par hectare ne sont pas modifiés.
La Commission établit, conformément à la procédure visée à l’article 141, paragraphe 2, les modalités régissant la modification des droits au paiement à partir de 2010, notamment en ce qui concerne les fractions de droits.»
13 Aux termes de l’article 137 du règlement no 73/2009:
«1.   Les droits au paiement attribués aux agriculteurs avant le 1er janvier 2009 sont réputés légaux et réguliers à partir du 1er janvier 2010.
2.   Le paragraphe 1 du présent article ne s’applique pas aux droits au paiement attribués aux agriculteurs sur la base de demandes présentant des erreurs matérielles, sauf si celles-ci ne pouvaient raisonnablement être décelées par l’agriculteur.
3.   Le paragraphe 1 du présent article ne préjuge pas du droit de la Commission à prendre des décisions visées à l’article 31 du règlement (CE) no 1290/2005 en ce qui concerne des dépenses engagées pour des paiements octroyés au titre de toute année civile jusqu’à l’année 2009 incluse.»
Le règlement (CE) no 796/2004
14 Aux termes de l’article 73 bis du règlement (CE) no 796/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par les règlements du Conseil (CE) no 1782/2003 et (CE) no 73/2009, ainsi que de la conditionnalité prévue par le règlement (CE) no 479/2008 du Conseil (JO L 141, p. 18, et rectificatifs JO 2005, L 37, p. 22, et JO 2006, L 144, p. 30), tel que modifié par le règlement (CE)
no 380/2009 de la Commission, du 8 mai 2009 (JO L 116, p. 9, ci-après le «règlement no 796/2004»):
«1.   Lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004, il est établi que certains droits au paiement ont été alloués indûment, l’agriculteur concerné cède les droits indûment alloués à la réserve nationale visée à l’article 42 du règlement (CE) no 1782/2003.
[...]
Les droits indûment alloués sont considérés comme n’ayant pas été attribués dès le départ.
2.   Lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004, il est établi que la valeur des droits au paiement est trop élevée, cette valeur est ajustée en conséquence. Cet ajustement s’effectue également pour les droits au paiement qui ont entre-temps été transférés à d’autres agriculteurs. La valeur de la réduction est allouée à la réserve nationale visée à l’article 42 du règlement (CE) no 1782/2003.
Les droits au paiement sont considérés comme ayant été alloués dès le départ à la valeur résultant de l’ajustement.
2bis.   Lorsque, aux fins de l’application des paragraphes 1 et 2, il est établi que le nombre de droits alloués à un agriculteur conformément au règlement (CE) no 795/2004 est inexact, et lorsque l’allocation indue n’a aucune incidence sur la valeur totale des droits que l’agriculteur a reçus, l’État membre recalcule les droits au paiement et corrige, le cas échéant, le type de droits alloués à l’agriculteur. Cependant, cette disposition ne s’applique pas si les erreurs auraient pu
raisonnablement être détectées par les agriculteurs.»
15 Le paragraphe 2 bis de l’article 73 bis du règlement no 796/2004 a été inséré par le règlement (CE) no 972/2007 de la Commission, du 20 août 2007 (JO L 216, p. 3), dont le considérant 19 est ainsi libellé:
«Dans certains cas des allocations indues de droits n’ont pas eu d’incidence sur la valeur totale, mais uniquement sur le nombre de droits de l’agriculteur. Dans ces cas, les États membres doivent corriger l’allocation ou, le cas échéant, le type de droits, sans réduire la valeur correspondante. La disposition ne doit s’appliquer que si l’agriculteur n’a pas pu déceler l’erreur.»
Le règlement (CE) no 1122/2009
16 Aux termes de l’article 81 du règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement no 73/2009 en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide
prévu pour le secteur vitivinicole (JO L 316, p. 65, et rectificatif JO 2013, L 246, p. 3):
«1.   Sans préjudice de l’article 137 du règlement (CE) no 73/2009, lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004 ou au règlement (CE) no 1120/2009, il est établi que certains droits au paiement ont été alloués indûment, l’agriculteur concerné cède les droits indûment alloués à la réserve nationale visée à l’article 41 du règlement (CE) no 73/2009.
[...]
2.   Sans préjudice de l’article 137 du règlement (CE) no 73/2009, lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004 ou au règlement (CE) no 1120/2009, il est établi que la valeur des droits au paiement est trop élevée, cette valeur est ajustée en conséquence. Cet ajustement s’effectue également pour les droits au paiement qui entre‑temps ont été transférés à d’autres agriculteurs. La valeur de la réduction est allouée à la
réserve nationale visée à l’article 41 du règlement (CE) no 73/2009.
Les droits au paiement sont considérés comme ayant été alloués dès le départ à la valeur résultant de l’ajustement.
3.   Lorsque, aux fins des paragraphes 1 et 2, il est établi que le nombre de droits alloués à un agriculteur conformément au règlement (CE) no 795/2004 ou au règlement (CE) no 1120/2009 est inexact, et lorsque l’allocation indue n’a aucune incidence sur la valeur totale des droits que l’agriculteur a reçus, l’État membre recalcule les droits au paiement et corrige, le cas échéant, le type de droits alloués à l’agriculteur.
Cependant, le premier alinéa ne s’applique pas si les erreurs auraient pu raisonnablement être détectées par les agriculteurs.»
17 Aux termes de l’article 86, paragraphe 1, du règlement no 1122/2009:
«Le règlement (CE) no 796/2004 est abrogé avec effet au 1er janvier 2010.
Néanmoins, il reste applicable pour les demandes d’aides relatives aux campagnes de commercialisation ou aux périodes de référence des primes commençant avant le 1er janvier 2010.»
Le litige au principal et la question préjudicielle
18 Par décision du 18 juillet 2006, le Staatssecretaris a, en application de l’article 43 du règlement no 1782/2003, fixé le nombre et la valeur des droits au paiement attribués à M. Vonk Noordegraaf.
19 À cette fin, la valeur moyenne des montants totaux des primes qui lui ont été versées pour ses bovins au cours de la période 2000-2002 a été divisée par le nombre moyen, calculé sur la même période, de l’ensemble des hectares dont il disposait, le résultat ainsi obtenu étant son «droit au paiement par hectare».
20 Selon la juridiction de renvoi, le nombre moyen d’hectares dont disposait M. Vonk Noordegraaf au cours de ladite période a alors été fixé à  10,76 hectares.
21 En 2009, M. Vonk Noordegraaf disposait de 9,79 droits au paiement et, dans sa demande de paiement unique au titre de cette année, il a déclaré une superficie de 10,76 hectares.
22 Toutefois, par décision du 30 juin 2010, le Staatssecretaris a retenu un nombre d’hectares inférieur à celui mentionné par M. Vonk Noordegraaf dans sa demande. En effet, au cours de l’année 2009, les autorités néerlandaises ont, à la suite de remarques formulées par la Commission, modifié les modalités de détermination de la superficie des parcelles agricoles aux Pays-Bas. Il a ainsi été décidé d’utiliser, à compter de l’année 2009, un registre des parcelles tenant compte de la «superficie nette»
de celles-ci, c’est-à -dire les terres cultivables à l’exclusion, désormais, des parties non éligibles telles que les fossés, les berges et les chemins.
23 Cette décision a eu pour conséquence une réduction du montant de l’aide versée à M. Vonk Noordegraaf au titre du régime de paiement unique pour l’année 2009 par rapport aux années précédentes.
24 M. Vonk Noordegraaf a alors contesté la décision du 30 juin 2010 devant le Staatssecretaris lequel a, par décision du 29 octobre 2010, déclaré partiellement fondée la réclamation de M. Vonk Noordegraaf.
25 Celui-ci a interjeté appel de cette dernière décision et, par décision révisée du 19 mai 2011 (ci-après la «décision du 19 mai 2011»), le Staatssecretaris a, au titre de l’année 2009, fixé la superficie déterminée des parcelles de M. Vonk Noordegraaf à  8,34 hectares.
26 Les parties au principal s’accordent sur cette superficie, ainsi que sur le fait que la réduction de celle-ci par rapport à celle retenue au titre des années antérieures résulte uniquement de la modification de la méthode de mesure des parcelles concernées.
27 Devant la juridiction de renvoi, M. Vonk Noordegraaf soutient cependant que l’introduction du nouveau système d’identification des parcelles a eu pour conséquence une réduction de la superficie agricole qu’il peut désormais faire valoir aux fins de l’activation de ses droits au paiement. En conséquence, il demande que le nombre et la valeur de ses droits au paiement soient recalculés sur la base du nombre d’hectares fixé par la décision du 19 mai 2011.
28 Dans ces conditions, le College van Beroep voor het bedrijfsleven a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:
«Le règlement (CE) no 73/2009 et, en particulier, ses articles 34, 36 et 137 sont‑ils correctement appliqués si, en utilisant des droits au paiement acquis à partir d’une production non liée au sol, qui ont été imputés à la superficie en sa possession, un agriculteur n’obtient pas le versement d’une partie importante de ces droits, alors qu’il a déclaré de bonne foi, conformément à la méthode de mesure appliquée par l’État membre dans le cadre de l’activation des droits au paiement au titre de
l’article 34 de ce règlement, mais rejetée par la suite par la Commission, la superficie admissible des hectares invariablement en sa possession, et ce pour l’unique motif que la superficie admissible déterminée pour le paiement s’avère inférieure du fait d’une modification de la méthode de calcul?»
Sur la question préjudicielle
29 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que les droits au paiement d’un agriculteur doivent faire l’objet d’un nouveau calcul lorsque, dans le cadre de la détermination initiale de ses droits au paiement, le montant de référence de cet agriculteur a été divisé par un nombre trop élevé d’hectares du fait des modalités de détermination de la superficie des parcelles agricoles alors appliquées dans l’État membre
concerné.
30 À titre liminaire, il convient de rappeler que, à la suite de l’intégration, par le règlement no 1782/2003, des anciens régimes de soutien dans le régime de paiement unique, la valeur des droits au paiement de chaque agriculteur a été calculée, dans les États membres ayant opté pour le modèle dit «historique», sur la base du niveau des aides que l’agriculteur concerné a perçues au cours d’une période de référence correspondant aux années 2000 à  2002.
31 Chaque agriculteur éligible s’est ainsi vu octroyer un certain nombre de droits au paiement, dont le nombre et la valeur étaient obtenus en divisant la moyenne des paiements dont il a bénéficié au cours de ladite période de référence par le nombre moyen, calculé sur la même période, d’hectares ayant donné droit à ces paiements ou, conformément à ce que prévoyait l’article 43, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1782/2003, par le nombre moyen d’hectares disponibles pour l’élevage d’animaux.
32 Conformément à ce que prévoit l’article 34 du règlement no 73/2009, l’aide est versée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par hectare admissible, seuls les droits au paiement activés donnant droit au paiement des montants qu’ils fixent.
33 Dans l’affaire au principal, M. Vonk Noordegraaf s’est vu allouer, au cours de l’année 2006, des droits au paiement calculés sur la base des primes qui lui ont été versées pour ses bovins au cours de la période de référence et des parcelles qui étaient à sa disposition au cours de cette même période.
34 Cependant, à la suite d’une modification, au cours de l’année 2009, des modalités de détermination de la superficie des parcelles agricoles aux Pays-Bas, la superficie des parcelles de M. Vonk Noordegraaf a été révisée à la baisse par les autorités néerlandaises, ce qui a eu pour conséquence que le nombre d’hectares admissible au bénéfice de l’aide qu’il a pu dès lors faire valoir aux fins de l’activation de ses droits au paiement est devenu inférieur au nombre de droits au paiement dont il
disposait.
35 Dans la mesure où il ne peut plus percevoir l’aide au titre de la totalité de ses droits au paiement, M. Vonk Noordegraaf demande aux autorités néerlandaises d’augmenter la valeur unitaire de ceux-ci, tout en réduisant proportionnellement leur nombre afin que la valeur totale de ses droits au paiement demeure inchangée.
36 En d’autres termes, M. Vonk Noordegraaf demande à l’autorité compétente de recalculer le nombre et la valeur de ses droits au paiement en se fondant sur la superficie nette de ses parcelles telle que définie dans la décision du 19 mai 2011.
37 À cet égard, il y a lieu de rappeler, d’emblée, que l’article 36 du règlement no 73/2009 prévoit que les droits au paiement par hectare ne sont pas modifiés, sauf disposition contraire de ce règlement.
38 En effet, dans la mesure où tout droit au paiement activé donne droit au paiement du montant qu’il fixe, une modification de ce montant aurait pour conséquence une diminution, ou une augmentation, du montant de l’aide versée à l’agriculteur concerné. Or, ainsi qu’il ressort du considérant 29 du règlement no 1782/2003, l’un des objectifs du régime de paiement unique est de permettre à chaque agriculteur de continuer à bénéficier d’un niveau d’aide équivalant aux montants qui lui ont été accordés
au cours de la période de référence.
39 C’est précisément ce que revendique M. Vonk Noordegraaf dans le litige qui l’oppose au Staatssecretaris.
40 Force est, cependant, de constater qu’aucune disposition du règlement no 73/2009 ne prévoit expressément la possibilité de modifier les droits au paiement d’un agriculteur qui se trouverait dans une situation comparable à celle de M. Vonk Noordegraaf.
41 Néanmoins, dans le cadre de l’exercice des compétences d’exécution qui lui ont été conférées par l’article 36, paragraphe 2, dudit règlement, la Commission a adopté le règlement no 796/2004 dont l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, prévoit que, lorsqu’un agriculteur s’est vu allouer indûment certains droits au paiement mais qu’une telle allocation est sans incidence sur la valeur totale des droits qui lui ont été octroyés, ces derniers doivent faire l’objet d’un nouveau calcul, sous réserve que
les erreurs n’aient pu raisonnablement être décelées par l’agriculteur.
42 Dans le litige au principal, il est constant que la valeur totale des droits au paiement qui ont été alloués à M. Vonk Noordegraaf correspond à la moyenne des aides perçues par celui-ci avant l’introduction du régime de paiement unique.
43 Cependant, le gouvernement néerlandais fait valoir que, dès lors qu’elle a été élaborée conformément aux règles et aux exigences en vigueur à la date de son adoption, la décision du 18 juillet 2006, par laquelle le Staatssecretaris a fixé le nombre et la valeur des droits au paiement octroyés à M. Vonk Noordegraaf, n’est pas erronée.
44 À cet égard, d’abord, il convient de rappeler que M. Vonk Noordegraaf s’est initialement vu allouer un nombre de droits au paiement calculé sur la base de la superficie «brute» des parcelles qu’il détenait pendant la période de référence, et ce conformément à la méthode alors appliquée par les autorités néerlandaises.
45 Par la suite, dans le contexte de l’adoption de la décision du 30 juin 2010, les autorités néerlandaises ont procédé à un nouveau mesurage des parcelles de M. Vonk Noordegraaf. Elles ont, cette fois, exclu certains éléments du paysage tels que les berges, les fossés et les chemins afin d’obtenir la superficie «nette» des parcelles en question.
46 Ensuite, il convient de relever que, selon l’article 43, paragraphe 3, du règlement no 1782/2003, les superficies fourragères ne comprennent pas, notamment, les étangs et les chemins. Il ressort en outre d’une lecture a contrario de l’article 30, paragraphe 2, du règlement no 796/2004 que des éléments du paysage tels que les haies, les fossés et les murs ne sauraient, en principe, faire partie des superficies admissibles au bénéfice de l’aide.
47 Ainsi, des éléments du paysage tels que les berges, les chemins et les fossés ne sauraient, en principe, être pris en considération aux fins de la détermination de la superficie admissible au bénéfice de l’aide.
48 Il s’ensuit, logiquement, que de tels éléments du paysage ne sauraient non plus être pris en considération aux fins de l’établissement des droits au paiement d’un agriculteur, sans quoi celui-ci, à l’instar de M. Vonk Noordegraaf, disposerait d’un nombre de droits au paiement supérieur au nombre d’hectares qu’il pourra ensuite faire valoir aux fins de l’activation de ses droits.
49 Partant, lorsque, comme dans le litige au principal, les autorités compétentes ont pris en compte ces éléments aux fins de la détermination des parcelles agricoles d’un agriculteur, il y a lieu de considérer que le nombre de droits au paiement octroyés à celui-ci était «inexact», au sens de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004.
50 Enfin, il y a lieu de présumer qu’un agriculteur dans la situation de M. Vonk Noordegraaf n’aurait pas pu raisonnablement déceler les erreurs relatives à l’établissement de la superficie de ses parcelles dans la mesure où celles-ci étaient la conséquence directe de la méthode alors appliquée par les autorités nationales compétentes.
51 Par conséquent, il y a lieu de considérer que, conformément à l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, les droits au paiement d’un agriculteur doivent faire l’objet d’un nouveau calcul lorsque, en raison des modalités incorrectes de détermination de la superficie des parcelles agricoles appliquées dans l’État membre concerné, l’agriculteur s’est vu allouer indûment un certain nombre de droits au paiement parce que son montant de référence a été divisé par un nombre trop élevé
d’hectares.
52 Contrairement à ce que fait valoir le gouvernement néerlandais, cette appréciation n’est pas remise en cause par l’article 137, paragraphe 1, du règlement no 73/2009, aux termes duquel les droits au paiement attribués aux agriculteurs avant le 1er janvier 2009 sont réputés légaux et réguliers à partir du 1er janvier 2010.
53 Ainsi qu’il ressort du considérant 49 du règlement no 73/2009, cette disposition vise en effet à permettre aux États membres de renoncer au recouvrement des paiements indus effectués à certains agriculteurs, compte tenu des contraintes juridiques et administratives disproportionnées qu’impliquerait l’adoption des mesures correctives nécessaires. L’article 137, paragraphe 2, du règlement no 73/2009 limite par ailleurs la portée du paragraphe 1 en excluant de son champ d’application les droits au
paiement alloués sur la base de demandes présentant des erreurs matérielles.
54 Il découle de ce qui précède que la finalité de l’article 137, paragraphe 1, du règlement no 73/2009 est, pour des raisons tenant au principe de sécurité juridique, de protéger les agriculteurs de bonne foi ayant bénéficié de paiements indus et non de pénaliser pour l’avenir les agriculteurs qui, à l’instar de M. Vonk Noordegraaf, se sont vu octroyer un nombre trop élevé de droits au paiement parce que, en raison des modalités incorrectes de détermination de la superficie des parcelles agricoles
alors appliquées dans l’État membre concerné, leur montant de référence a été divisé par un nombre trop élevé d’hectares.
55 Partant, il y a lieu de considérer que l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 ne relève pas du champ d’application de l’article 137, paragraphe 1, du règlement no 73/2009.
56 Cette interprétation est corroborée par le règlement no 1122/2009, qui a abrogé et remplacé le règlement no 796/2004, applicable ratione temporis aux faits du litige au principal, et en particulier par l’économie de l’article 81 de celui-ci.
57 En effet, aux paragraphes 1 et 2 de cet article, le législateur de l’Union a expressément indiqué que les règles que prévoient ces deux dispositions, à savoir, respectivement, que les droits au paiement alloués indûment doivent être cédés à la réserve nationale et que la valeur des droits au paiement doit être ajustée s’il est établi que celle-ci est trop élevée, s’appliquent sans préjudice des dispositions de l’article 137 du règlement no 73/2009.
58 En revanche, le paragraphe 3 de l’article 81 du règlement no 1122/2009, dont le libellé correspond à celui de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, ne comporte aucun renvoi à l’article 137 du règlement no 73/2009, de sorte que cette disposition ne relève pas du champ d’application de ce dernier.
59 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 doit être interprété en ce sens que les droits au paiement d’un agriculteur doivent faire l’objet d’un nouveau calcul lorsque, dans le cadre de la détermination initiale de ses droits au paiement, le montant de référence de cet agriculteur a été divisé par un nombre trop élevé d’hectares du fait des modalités de détermination de la
superficie des parcelles agricoles alors appliquées dans l’État membre concerné. L’article 137 du règlement no 73/2009 n’est pas applicable à une correction au titre de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004.
Sur les dépens
60 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
 Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:
L’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement (CE) no 796/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par les règlements du Conseil (CE) no 1782/2003 et (CE) no 73/2009, ainsi que de la conditionnalité prévue par le règlement (CE) no 479/2008 du Conseil, tel que modifié par le règlement (CE) no 380/2009 de la Commission, du 8 mai 2009, doit être interprété en ce sens que
 les droits au paiement d’un agriculteur doivent faire l’objet d’un nouveau calcul lorsque, dans le cadre de la détermination initiale de ses droits au paiement, le montant de référence de cet agriculteur a été divisé par un nombre trop élevé d’hectares du fait des modalités de détermination de la superficie des parcelles agricoles alors appliquées dans l’État membre concerné. L’article 137 du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes
de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003, n’est pas applicable à une correction au titre de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004.
 Signatures
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( *1 ) Langue de procédure: le néerlandais.