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17/01/2013 | CJUE | N°C-361/11

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Hewlett-Packard Europe BV contre Inspecteur van de Belastingdienst/Douane West, kantoor Hoofddorp., 17/01/2013, C-361/11


ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

17 janvier 2013 ( *1 )

«Tarif douanier commun — Nomenclature combinée — Classement tarifaire — Imprimantes multifonctionnelles constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur — Sous-position 8443 31 91 — Validité du règlement (CE) no 1031/2008»

Dans l’affaire C‑361/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Rechtbank Haarlem (Pays-Bas), par décision d

u 30 juin 2011, parvenue à la Cour le 8 juillet 2011, dans la procédure

Hewlett-Packard Europe BV

contre
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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

17 janvier 2013 ( *1 )

«Tarif douanier commun — Nomenclature combinée — Classement tarifaire — Imprimantes multifonctionnelles constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur — Sous-position 8443 31 91 — Validité du règlement (CE) no 1031/2008»

Dans l’affaire C‑361/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Rechtbank Haarlem (Pays-Bas), par décision du 30 juin 2011, parvenue à la Cour le 8 juillet 2011, dans la procédure

Hewlett-Packard Europe BV

contre

Inspecteur van de Belastingdienst/Douane West, kantoor Hoofddorp,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, M. Ilešič, M. Safjan (rapporteur) et Mme M. Berger, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 juillet 2012,

considérant les observations présentées:

— pour Hewlett-Packard Europe BV, par Mes H. de Bie et E. Zietse, advocaten,

— pour le gouvernement néerlandais, par Mmes C. Wissels et M. Noort, en qualité d’agents,

— pour la Commission européenne, par Mme L. Bouyon et M. B. Burggraaf, en qualité d’agents, assistés de M. E. Valerdi Rodriguez, en qualité d’expert,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO L 256, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 254/2000 du Conseil, du 31 janvier 2000 (JO L 28, p. 16, ci-après la «NC»), ainsi que sur la validité du droit de douane correspondant à la sous-position 8443 31 91 de la NC en ce qui
concerne des imprimantes multifonctionnelles constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Hewlett-Packard Europe BV (ci-après «Hewlett-Packard») à l’Inspecteur van de Belastingdienst/Douane West, kantoor Hoofddorp (Inspecteur du service des impôts/Douane Ouest, bureau Hoofddorp, ci-après l’«autorité douanière»), au sujet du classement tarifaire d’imprimantes multifonctionnelles mises en libre pratique au mois d’avril 2009.

Le cadre juridique

La NC

3 Le classement douanier des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC. La version de celle-ci en vigueur à la date des faits au principal est celle résultant du règlement (CE) no 1031/2008 de la Commission, du 19 septembre 2008, modifiant l’annexe I du règlement no 2658/87 (JO L 291, p. 1).

4 La NC est fondée sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le «SH»), élaboré par le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes, et institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après la «convention sur le SH»), conclue à Bruxelles le 14 juin 1983 et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique
européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO L 198, p. 1).

5 En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la convention sur le SH, chaque partie contractante s’engage à ce que ses nomenclatures tarifaires et statistiques soient conformes au SH, à utiliser toutes les positions et sous-positions de celui-ci, sans adjonction ni modification, ainsi que les codes y afférents, et à suivre l’ordre de numérotation dudit système. Chaque partie contractante s’engage également à appliquer les règles générales pour l’interprétation du SH ainsi que toutes les notes de
sections, de chapitres et de sous-positions du SH et à ne pas modifier la portée de ces derniers.

6 L’article 9, paragraphes 1 et 2, du règlement no 2658/87 est libellé comme suit:

«1.   Les mesures concernant les matières ci-après sont arrêtées selon la procédure définie à l’article 10:

a) application de la nomenclature combinée et du TARIC en ce qui concerne notamment:

— le classement des marchandises dans les nomenclatures visées à l’article 8,

— les notes [complémentaires],

[...]

b) modifications de la nomenclature combinée pour tenir compte de l’évolution des besoins en matière de statistiques ou de politique commerciale;

c) modifications de l’annexe II;

d) modifications de la nomenclature combinée et adaptations des droits conformément aux décisions arrêtées par le Conseil ou la Commission;

e) modifications de la nomenclature combinée visant à adapter celle-ci à l’évolution technologique ou commerciale ou tendant à l’alignement et à la clarification des textes;

f) modifications de la nomenclature combinée résultant des amendements de la nomenclature du système harmonisé;

[...]

2.   Les dispositions arrêtées au titre du paragraphe 1 ne peuvent modifier:

— les taux des droits de douane,

[...]»

7 La deuxième partie de la NC, qui contient le tableau des droits de douane, inclut une section XVI, intitulée «Machines et appareils, matériel électrique et leurs parties; appareils d’enregistrement ou de reproduction du son, appareils d’enregistrement ou de reproduction des images et du son en télévision, et parties et accessoires de ces appareils». Le chapitre 84 qui figure sous cette section est intitulé «Réacteurs nucléaires, chaudières, machines, appareils et engins mécaniques; parties de ces
machines ou appareils».

8 Le tableau des droits de douane repris sous ce chapitre 84 de la NC a fait l’objet de plusieurs modifications. Dans sa version issue du règlement (CE) no 1719/2005 de la Commission, du 27 octobre 2005, modifiant l’annexe I du règlement no 2658/87 (JO L 286, p. 1), entré en vigueur le 1er janvier 2006, ce tableau comportait une position 8471 qui se lisait comme suit:

«8471 Machines automatiques de traitement de l’information et leurs unités; lecteurs magnétiques ou optiques, machines de mise d’informations sur support sous forme codée et machines de traitement de ces informations, non dénommés ni compris ailleurs:

[...]

8471 60 – Unités d’entrée ou de sortie, pouvant comporter, sous la même enveloppe, des unités de mémoire:

8471 60 20 – – Imprimantes

[...]»

9 Les marchandises relevant de la sous-position 8471 60 20 étaient exemptes de droits de douane.

10 La position 9009 de la NC était libellée de la façon suivante:

«9009 Appareils de photocopie à système optique ou par contact et appareils de thermocopie:

— Appareils de photocopie électrostatiques:

9009 11 00 ‐ ‐ fonctionnant par reproduction directe de l’image de l’original sur la copie (procédé direct)

9009 12 00 ‐ ‐ fonctionnant par reproduction de l’image de l’original sur la copie au moyen d’un support intermédiaire (procédé indirect)»

11 Les marchandises relevant de la sous-position 9009 11 00 étaient exemptes de droits de douane, tandis que celles relevant de la sous-position 9009 12 00 étaient soumises à un droit de douane de 6 %.

12 Le règlement no 1719/2005 a été implicitement abrogé, avec effet au 1er janvier 2007, par le règlement (CE) no 1549/2006 de la Commission, du 17 octobre 2006, modifiant l’annexe I du règlement no 2658/87 (JO L 301, p. 1). Le règlement no 1549/2006 a supprimé la position 9009 et la sous-position 8471 60 20 de la NC.

13 Le règlement no 1031/2008, entré en vigueur le 1er janvier 2009, n’a pas rétabli ces position et sous-position dans la NC.

14 Par ailleurs, le règlement no 1549/2006 a modifié la position 8443 de la NC, désormais libellée de la façon suivante:

«8443 Machines et appareils servant à l’impression au moyen de planches, cylindres et autres organes imprimants du no 8442; autres imprimantes, machines à copier et machines à télécopier, même combinées entre elles; parties et accessoires:

[...]

‐ autres imprimantes, machines à copier et machines à télécopier, même combinées entre elles:

8443 31 ‐ ‐ Machines qui assurent au moins deux des fonctions suivantes: impression, copie ou transmission de télécopie, aptes à être connectées à une machine automatique de traitement de l’information ou à un réseau:

8443 31 10 ‐ ‐ ‐ Machines assurant les fonctions de copie et de transmission de copie, même munies d’une fonction impression, dont la vitesse de copie n’excède pas 12 pages monochromes par minute

‐ ‐ ‐ autres:

8443 31 91 ‐ ‐ ‐ ‐ Machines assurant les fonctions de copie par scannage de l’original et impression des copies au moyen d’un procédé électrostatique

[...]»

15 Les marchandises relevant de la sous-position 8443 31 91 sont soumises à un droit de douane de 6 %.

16 Le règlement no 1031/2008 n’a modifié ni le libellé de cette position et de ces sous-positions ni le taux des droits de douane applicable aux marchandises relevant de la sous-position 8443 31 91.

Les accords OMC

17 Par la décision 94/800/CE, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1), le Conseil a approuvé l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ainsi que les accords figurant aux annexes 1 à 4 de cet accord (ci-après les «accords OMC»), au nombre desquels figure le mémorandum d’accord sur les
règles et procédures régissant le règlement des différends (ci-après le «MRD»).

18 Conformément au MRD, un organe de règlement des différends (ci-après l’«ORD») a été institué au sein de l’OMC. L’article 3, paragraphe 2, du MRD énonce:

«[...] Les membres reconnaissent [que le système de règlement des différends de l’OMC] a pour objet de préserver les droits et les obligations résultant pour les membres des accords visés [à l’appendice 1 du présent mémorandum d’accord], et de clarifier les dispositions existantes de ces accords conformément aux règles coutumières d’interprétation du droit international public. Les recommandations et décisions de l’ORD ne peuvent pas accroître ou diminuer les droits et obligations énoncés dans
les accords visés.»

19 L’article 21 du MRD, intitulé «Surveillance de la mise en œuvre des recommandations et décisions», dispose:

«1.   Pour que les différends soient résolus efficacement dans l’intérêt de tous les membres, il est indispensable de donner suite dans les moindres délais aux recommandations ou décisions de l’ORD.

[...]

3.   À une réunion de l’ORD qui se tiendra dans les 30 jours suivant la date d’adoption du rapport du groupe spécial ou de l’organe d’appel, le membre concerné informera l’ORD de ses intentions au sujet de la mise en œuvre des recommandations et décisions de celui-ci. S’il est irréalisable pour un membre de se conformer immédiatement aux recommandations et décisions, ce membre aura un délai raisonnable pour le faire. Le délai raisonnable sera:

a) le délai proposé par le membre concerné, [...] approuvé par l’ORD; ou, en l’absence d’une telle approbation,

b) un délai mutuellement convenu par les parties au différend [...]; ou, en l’absence d’un tel accord,

c) un délai déterminé par arbitrage contraignant [...]

[...]»

20 L’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1994 (ci-après le «GATT 1994») et, notamment, le mémorandum d’accord sur l’interprétation de l’article II, paragraphe 1, sous b), du GATT 1994 font partie de l’accord instituant l’OMC.

21 L’accord sur le commerce des produits des technologies de l’information, constitué de la déclaration ministérielle sur le commerce des produits des technologies de l’information adoptée le 13 décembre 1996 lors de la première conférence de l’OMC à Singapour ainsi que des annexes et appendices de celle-ci (ci-après l’«ATI»), et la communication sur sa mise en œuvre ont été approuvés, au nom de la Communauté, par la décision 97/359/CE du Conseil, du 24 mars 1997, concernant l’élimination des droits
de douane sur les produits des technologies de l’information (JO L 155, p. 1).

22 L’ATI précise, à son paragraphe 1, que le régime commercial de chaque partie contractante devrait évoluer de manière à améliorer les possibilités d’accès aux marchés pour les produits des technologies de l’information. En vertu du paragraphe 2 de l’ATI, chaque partie contractante consolidera et éliminera les droits de douane et autres droits et impositions de toute nature, au sens de l’article II, paragraphe 1, sous b), du GATT 1994, pour certains produits classés dans le SH de l’année 1996,
parmi lesquels les «machines automatiques de traitement de l’information et leurs unités; lecteurs magnétiques ou optiques, machines de mise d’informations sur support sous forme codée et machines de traitement de ces informations, non dénommés ni compris ailleurs» et les «appareils de photocopie électrostatiques numériques fonctionnant par reproduction de l’image de l’original sur la copie au moyen d’un support intermédiaire (procédé indirect)».

Le litige au principal et les questions préjudicielles

23 Il ressort de la décision de renvoi que l’autorité douanière a adressé à Hewlett-Packard un avis de paiement au titre de droits de douane et de droits complémentaires pour des marchandises mises en libre pratique entre le 1er et le 30 avril 2009. Ces droits incluaient ceux afférents à la déclaration à l’importation d’imprimantes multifonctionnelles dans la sous-position 8443 31 91 de la NC.

24 Par décision du 30 juillet 2009, l’autorité douanière a rejeté la réclamation introduite par Hewlett-Packard à l’encontre de cet avis de paiement. Hewlett-Packard a introduit un recours contre cette décision devant le Rechtbank Haarlem.

25 Selon la juridiction de renvoi, ces imprimantes, destinées à un usage domestique ainsi que dans les petites et moyennes entreprises, étaient constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur. Elles disposaient des fonctions de numérisation et d’impression lorsqu’elles étaient reliées directement ou par un réseau à une machine automatique de traitement de l’information. Elles possédaient également la fonction de copieur, qui pouvait être utilisée indépendamment
d’une machine automatique de traitement de l’information. Certaines des imprimantes en cause disposaient aussi de la fonction de télécopie.

26 L’impression et la copie étaient effectuées par la même unité d’impression, qui constituait le composant principal des imprimantes en cause. Si la fonction de copie nécessitait au préalable la numérisation du document, la vitesse d’impression était la même dans le cadre des fonctions d’impression et de copie. La juridiction de renvoi indique également que les différents bacs d’alimentation qui munissaient certaines des imprimantes en cause pouvaient être utiles tant à la copie qu’à l’impression.
Le tiroir d’alimentation servait aux fonctions de copie, de numérisation et de télécopie.

27 La juridiction de renvoi relève que, en vertu de la NC applicable avant le 1er janvier 2007, les imprimantes multifonctionnelles pouvaient être classées, selon leurs caractéristiques et leurs propriétés objectives, dans les sous-positions 8471 60 20 ou 9009 11 00, lesquelles prévoyaient une exemption de droits de douane, ou encore dans la sous-position 9009 12 00, à laquelle s’appliquait un droit de douane de 6 %.

28 La juridiction de renvoi ajoute que, dans son arrêt du 11 décembre 2008, Kip Europe e.a. (C-362/07 et C-363/07, Rec. p. I-9489), la Cour a donné des indications sur le classement dans la NC des appareils multifonctionnels et que, sur la base de ces indications, il est possible que, si elles avaient été importées avant le 1er janvier 2007, des imprimantes multifonctionnelles telles que celles en cause dans l’affaire au principal auraient été classées dans la sous-position 8471 60 20.

29 Or, en raison des modifications apportées à la NC par le règlement no 1549/2006, entré en vigueur le 1er janvier 2007, de telles imprimantes ne pourraient plus être classées dans la sous-position 8471 60 20 et relèveraient de la sous-position 8443 31 91 de la NC, à laquelle correspond un droit de douane de 6 %.

30 Il en découlerait que, si ces imprimantes avaient été classées avant le 1er janvier 2007 dans la sous-position 8471 60 20 de la NC, le droit de douane serait passé, à la suite de l’entrée en vigueur du règlement no 1549/2006, de 0 % à 6 %.

31 La juridiction de renvoi se demande si, dans une telle hypothèse, la Commission a agi en violation de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 2658/87 en modifiant la NC par le règlement no 1549/2006.

32 Par ailleurs, la juridiction de renvoi se réfère à un arrêt de la cour d’appel de Paris (France), du 20 mai 2010, qui concernerait des imprimantes multifonctionnelles présentant les mêmes caractéristiques et propriétés objectives que les imprimantes en cause dans l’affaire au principal. Selon cet arrêt, «n’étant pas un copieur à titre principal ni un scanner, la fonction d’imprimante est prédominante; qu’en effet [...], l’imprimante représente non seulement l’essentiel du volume et du poids de
l’appareil, mais également de sa valeur; qu’en conséquence, les appareils en cause relèvent de la sous-position 8471 60 [de la NC]».

33 La juridiction de renvoi souligne également que, selon Hewlett-Packard, les imprimantes en cause dans l’affaire au principal relèvent de l’ATI et que, dès lors, elles devraient être exemptées de droits de douane.

34 C’est dans ces circonstances que le Rechtbank Haarlem a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Eu égard aux considérations du Rechtbank [Haarlem] concernant la vitesse d’impression et de copie, quelle signification convient-il d’y donner si la vitesse d’impression et la vitesse de copie sont déterminées par la même unité d’impression et si la différence de vitesse entre ces fonctions est simplement due au fait que la copie s’opère d’abord par une numérisation avant une impression?

2) Eu égard aux considérations du Rechtbank [Haarlem] concernant le nombre de bacs d’alimentation en papier et la présence d’un tiroir d’alimentation, convient-il d’interpréter les indications de la Cour à cet égard dans l’arrêt Kip Europe e.a. [, précité,] en ce sens que la présence de plusieurs bacs d’alimentation en papier et d’un tiroir d’alimentation constituent des caractéristiques objectives indiquant qu’il s’agit d’un appareil de copie plutôt que d’une unité d’impression?

3) Eu égard aux considérations du Rechtbank [Haarlem] concernant la réponse à la question relative au caractère essentiel des appareils en cause, notamment à la lumière des critères dégagés à cet égard par la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 20 mai 2010 concernant des appareils analogues à celui en cause, convient-il d’attribuer la valeur et le poids de l’unité centrale d’impression (print engine) à la fonction d’impression ou à la fonction de copie et convient-il d’attribuer –
éventuellement partiellement – la valeur et le poids du numériseur à la fonction de copie?

4) Eu égard aux considérations du Rechtbank [Haarlem], le droit de douane de 6 % correspondant à la sous-position de la [NC] 8443 31 91 dans le règlement no 1031/2008 est-il valable en ce qu’il concerne des imprimantes multifonctionnelles qui, selon les indications de la Cour dans l’arrêt Kip Europe e.a. [, précité], auraient dû être classées dans la sous-position 8471 60 20 de la [NC] si elles avaient été importées avant le 1er janvier 2007?»

Sur les questions préjudicielles

35 À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises (arrêts du 17 juillet 1997, Krüger, C-334/95, Rec. p. I-4517, points 22 et 23, ainsi que du
4 octobre 2012, Byankov, C‑249/11, point 57).

36 En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, par ses quatre questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si le règlement no 1031/2008 est valide en ce qu’il classe dans la sous-position 8443 31 91 de la NC des imprimantes multifonctionnelles, telles que celles qui font l’objet du litige au principal, constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur, mises en libre
pratique au mois d’avril 2009.

37 À cet égard, il y a lieu, d’une part, de relever qu’il n’est pas contesté que, à la date de leur mise en libre pratique, des imprimantes multifonctionnelles telles que celles en cause dans l’affaire au principal ont été classées dans la sous-position 8443 31 91 de la NC, soumise à un droit de douane de 6 %.

38 D’autre part, il importe de constater que cette sous-position 8443 31 91 n’existait pas dans la version de la NC applicable avant le 1er janvier 2007. Elle a été introduite dans cette dernière par le règlement no 1549/2006 et a été reprise dans le règlement no 1031/2008.

39 Or, selon une jurisprudence constante, le Conseil a conféré à la Commission, agissant en coopération avec les experts douaniers des États membres, un large pouvoir d’appréciation pour préciser le contenu des positions tarifaires entrant en ligne de compte pour le classement d’une marchandise déterminée. Toutefois, le pouvoir de la Commission d’arrêter des mesures visées à l’article 9, paragraphe 1, sous a), b), d) et e), du règlement no 2658/87, comme des notes complémentaires, ne l’autorise pas
à modifier le contenu des positions tarifaires qui ont été établies sur la base du SH, instauré par la convention sur le SH, dont l’Union s’est engagée, en vertu de l’article 3 de cette dernière, à ne pas modifier la portée (voir arrêts du 14 décembre 1995, France/Commission, C-267/94, Rec. p. I-4845, points 19 et 20; du 27 avril 2006, Kawasaki Motors Europe, C-15/05, Rec. p. I-3657, point 35, ainsi que du 29 octobre 2009, Dinter et Europol Frost-Food, C-522/07 et C-65/08, Rec. p. I-10333,
point 32).

40 En outre, il résulte de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 2658/87 que la Commission n’a pas compétence pour modifier de manière autonome les taux des droits de douane.

41 Il découle de ce qui précède que, s’il devait être établi que des imprimantes telles que celles en cause dans l’affaire au principal, importées avant le 1er janvier 2007, auraient dû être classées dans la sous-position 8471 60 20 de la NC et, partant, auraient dû être exemptées de droits de douane tandis que ces mêmes imprimantes, importées postérieurement à cette date, ont été soumises à un droit de douane de 6 %, la Commission aurait dépassé les limites des pouvoirs qui lui sont conférés par
l’article 9 du règlement no 2658/87.

42 Dès lors, il y a lieu d’examiner si, comme le demande la juridiction de renvoi, eu égard à leurs caractéristiques et à leurs propriétés objectives, de telles imprimantes auraient été classées, avant le 1er janvier 2007, dans la sous-position 8471 60 20 ou dans la sous-position 9009 12 00 de la NC.

43 À cet égard, il convient de rappeler que la position 8471 de la NC visait les «machines automatiques de traitement de l’information» et que la sous-position 8471 60 20 de cette nomenclature était relative aux «imprimantes». Quant à la position 9009 de la NC, elle concernait les «appareils de photocopie à système optique ou par contact et appareils de thermocopie» et la sous-position 9009 12 00 de celle-ci portait sur «les appareils de photocopie électrostatiques fonctionnant par reproduction de
l’image de l’original sur la copie au moyen d’un support intermédiaire (procédé indirect)».

44 Selon Hewlett-Packard, des imprimantes telles que celles en cause dans l’affaire au principal, si elles avaient été importées avant le 1er janvier 2007, auraient été classées dans la sous-position 8471 60 20.

45 Le Royaume des Pays-Bas et la Commission font valoir que de telles imprimantes auraient été classées dans la sous-position 9009 12 00.

46 À cet égard, premièrement, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que la position 9009 de la NC comprenait, outre les appareils de photocopie à système optique et à reproduction directe, ceux qui disposaient d’un support intermédiaire pour une reproduction indirecte, lequel incluait le procédé constitué par la transformation de l’image en données numériques (voir, en ce sens, arrêt du 9 octobre 1997, Rank Xerox, C-67/95, Rec. p. I-5401, point 21).

47 Par ailleurs, la Cour a jugé que, en classant dans la sous-position 9009 12 00 des appareils aptes à effectuer les opérations d’impression, de balayage électronique point par point et de reprographie, au motif qu’aucune des fonctions correspondant à ces opérations ne peut être considérée comme conférant à ces appareils leur caractère essentiel, sans poser en principe que tous les appareils réunissant ces trois fonctions doivent être classés en tant que photocopieurs, le règlement de la Commission
concerné était valide (voir, en ce sens, arrêt Kip Europe e.a., précité, point 62).

48 En l’occurrence, il découle des caractéristiques des imprimantes faisant l’objet du litige au principal, telles que mentionnées aux points 25 et 26 du présent arrêt, que, de la même façon que les appareils en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Kip Europe e.a., précité, celles-ci assurent plusieurs fonctions, à savoir la numérisation, l’impression, la copie ainsi que la télécopie pour certaines d’entre elles, dont aucune ne peut être considérée comme leur conférant leur caractère
essentiel.

49 Dans ces conditions, les imprimantes en cause dans l’affaire au principal, si elles avaient été importées avant le 1er janvier 2007, auraient été classées, en application de la jurisprudence de la Cour, dans la sous-position 9009 12 00 de la NC.

50 Par conséquent, il y a lieu de constater que, en classant des imprimantes multifonctionnelles telles que celles qui font l’objet du litige au principal dans la sous-position 8443 31 91 de la NC, la Commission n’a pas modifié le droit de douane de 6 % qui leur était applicable. Cette institution n’a donc pas dépassé les limites des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 9 du règlement no 2658/87.

51 Deuxièmement, dans le cadre de l’ATI, un groupe spécial de l’OMC a publié, le 16 août 2010, ses rapports dans les affaires WT/DS375/R, WT/DS376/R et WT/DS377/R (Communautés européennes et leurs États membres – Traitement tarifaire de certains produits des technologies de l’information), lesquels ont été adoptés le 21 septembre 2010 par l’ORD.

52 Ces rapports précisent notamment que, «comme les [machines numériques multifonctions] aptes à être connectées à une machine automatique de traitement de l’information en cause ne sont pas des photocopieurs à système optique qui fonctionnent en reproduisant l’image de l’original sur la copie au moyen d’un support intermédiaire (procédé indirect), elles ne peuvent pas être visées par la concession figurant dans la sous-position 9009 12 de la [liste de concessions des Communautés européennes annexée
au GATT 1994], indépendamment du caractère primaire, secondaire ou équivalent de la fonction de copie par rapport aux autres fonctions de ces machines».

53 Le délai raisonnable imparti à l’Union pour mettre en œuvre ces rapports adoptés par l’ORD est venu à expiration le 30 juin 2011.

54 La Commission a pris en compte les rapports du groupe spécial de l’OMC en adoptant le règlement d’exécution (UE) no 620/2011, du 24 juin 2011, modifiant le règlement no 2658/87 (JO L 166, p. 16). Conformément à son article 2, ce règlement est entré en vigueur le 1er juillet 2011.

55 Selon le considérant 2 dudit règlement, «[d]’après le rapport du groupe spécial de l’OMC, il convient que la copie numérique ne soit pas assimilée à la photocopie au sens du GATT 1994 et que la vitesse de copie ne soit pas le seul critère de classement. Il y a donc lieu de modifier en conséquence la sous-position 8443 31 de [la NC] et le taux de droit correspondant». L’annexe de ce règlement prévoit ainsi que la sous-position 8443 31 91 de la NC est supprimée.

56 Lors de l’audience, la Commission a indiqué que, à la suite de cette suppression, des imprimantes multifonctionnelles pouvaient être classées dans la sous-position 8443 31 20 de la NC et être, de ce fait, soumises à un droit de douane de 2,2 %, ou dans la sous-position 8443 31 80 de cette même nomenclature et être exemptées de droits de douane. Ces deux sous-positions sont libellées de la façon suivante:

«8443 31 20 – – – ayant comme fonction principale la copie numérique, la copie étant assurée par scannage de l’original et impression des copies au moyen d’un dispositif d’impression électrostatique

[...]

8443 31 80 – – – autres»

57 Selon une jurisprudence constante de la Cour, compte tenu de leur nature et de leur économie, les accords OMC ne figurent pas en principe parmi les normes au regard desquelles la Cour contrôle la légalité des actes des institutions de l’Union. Ce n’est que dans l’hypothèse où l’Union a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC ou dans l’occurrence où l’acte de l’Union renvoie expressément à des dispositions précises des accords OMC qu’il appartient à la
Cour de contrôler la légalité de l’acte en cause au regard des règles de l’OMC (voir arrêts du 1er mars 2005, Van Parys, C-377/02, Rec. p. I-1465, points 39 et 40, ainsi que du 10 novembre 2011, X et X BV, C‑319/10 et C‑320/10, point 35).

58 En tout état de cause, pour la période antérieure à la date d’expiration du délai raisonnable accordé à l’Union, conformément au MRD, pour se conformer aux recommandations ou aux décisions de l’ORD, le juge de l’Union ne saurait exercer un contrôle de la légalité des actes de l’Union au regard des règles de l’OMC, sous peine de priver d’effet l’octroi d’un tel délai (voir, en ce sens, arrêts du 30 septembre 2003, Biret International/Conseil, C-93/02 P, Rec. p. I-10497, points 61 et 62, ainsi que
X et X BV, précité, point 41).

59 Par ailleurs, si le règlement no 620/2011 traduit la volonté de l’Union de donner suite aux rapports du groupe spécial de l’OMC adoptés par l’ORD, auxquels il renvoie expressément, ce règlement est postérieur aux faits du litige au principal et a, par son article 2, été privé de tout effet rétroactif.

60 Par conséquent, dans ces circonstances, il n’est pas possible de se prévaloir rétroactivement des rapports du groupe spécial dans le cadre de l’appréciation de la validité du règlement no 1031/2008 en ce qu’il classe des imprimantes telles que celles en cause dans l’affaire au principal dans la sous-position 8443 31 91 de la NC.

61 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’examen des questions préjudicielles n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité du règlement no 1031/2008 en ce qu’il classe dans la sous-position 8443 31 91 de la NC des imprimantes multifonctionnelles, telles que celles qui font l’objet du litige au principal, constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur, mises en libre pratique au mois
d’avril 2009.

Sur les dépens

62 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

  L’examen des questions préjudicielles n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité du règlement (CE) no 1031/2008 de la Commission, du 19 septembre 2008, modifiant l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, en ce qu’il classe dans la sous-position 8443 31 91 de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement no 2658/87, tel que modifié par le règlement (CE) no 254/2000 du Conseil, du
31 janvier 2000, des imprimantes multifonctionnelles, telles que celles qui font l’objet du litige au principal, constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur, mises en libre pratique au mois d’avril 2009.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure: le néerlandais.


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : C-361/11
Date de la décision : 17/01/2013
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Rechtbank te Haarlem - Pays-Bas.

Tarif douanier commun - Nomenclature combinée - Classement tarifaire - Imprimantes multifonctionnelles constituées de l’assemblage d’un module d’impression laser et d’un module numériseur, avec fonction de copieur - Sous-position 8443 31 91 - Validité du règlement (CE) nº 1031/2008.

Politique commerciale

Organisation mondiale du commerce

Union douanière

Tarif douanier commun

Libre circulation des marchandises

Relations extérieures


Parties
Demandeurs : Hewlett-Packard Europe BV
Défendeurs : Inspecteur van de Belastingdienst/Douane West, kantoor Hoofddorp.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mengozzi
Rapporteur ?: Safjan

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2013:18

Source

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