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31/01/2008 | CJUE | N°C-147/07

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Commission des Communautés européennes contre République française., 31/01/2008, C-147/07


ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

31 janvier 2008 (*)

«Manquement d’État – Directives 80/778/CEE et 98/83/CE – Qualité des eaux destinées à la consommation humaine – Concentration maximale en nitrates et en pesticides – Application incorrecte»

Dans l’affaire C‑147/07,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 13 mars 2007,

Commission des Communautés européennes, représentée par M^mes S. Pardo Quintillán, J. Hottiaux et M. J.-B. Laignelot, en qualité d’agents, ayant él

u domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République française, représentée par M. G. de ...

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

31 janvier 2008 (*)

«Manquement d’État – Directives 80/778/CEE et 98/83/CE – Qualité des eaux destinées à la consommation humaine – Concentration maximale en nitrates et en pesticides – Application incorrecte»

Dans l’affaire C‑147/07,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 13 mars 2007,

Commission des Communautés européennes, représentée par M^mes S. Pardo Quintillán, J. Hottiaux et M. J.-B. Laignelot, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République française, représentée par M. G. de Bergues et M^me S. Gasri, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. Lõhmus, président de chambre, M. J. N. Cunha Rodrigues et M^me P. Lindh (rapporteur), juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en ne prenant pas toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’article 4 de la directive 98/83/CE du Conseil, du 3 novembre 1998, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (JO L 330, p. 32), la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions de cette directive.

2 En vertu de cet article 4, lequel renvoie à l’annexe 1 de la directive 98/83, la concentration en nitrates et en pesticides des eaux destinées à la consommation humaine ne doit pas dépasser certains seuils.

3 Cette directive a abrogé la directive 80/778/CEE du Conseil, du 15 juillet 1980, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (JO L 229, p. 11), tout en énonçant à son article 16, que cette abrogation est sans préjudice des obligations des États membres concernant les délais impartis pour la transposition dans la législation nationale de la directive 80/778, ainsi que pour son application, et que toute référence à celle-ci s’entend comme une référence à la directive
98/83.

4 Conformément à l’article 19 de la directive 80/778, les États membres devaient prendre les dispositions nécessaires pour se conformer à celle‑ci dans un délai de cinq ans à compter de sa notification, à savoir au 17 juillet 1985.

5 La directive 80/778 faisait également référence à la directive 75/440/CEE du Conseil, du 16 juin 1975, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire dans les États membres (JO L 194, p. 26).

La procédure précontentieuse

6 Considérant que la République française n’avait pas correctement appliqué les directives 80/778 et 75/440, la Commission a engagé la procédure en manquement prévue à l’article 226, premier alinéa, CE. Le 23 octobre 2001, elle a adressé à la République française une lettre de mise en demeure.

7 Par un avis motivé daté du 11 juillet 2003, la Commission a considéré que cet État membre avait mal appliqué l’article 7, paragraphes 1 et 3, de la directive 80/778 et l’a invité à prendre les mesures nécessaires pour se conformer audit avis dans un délai de deux mois à compter de sa réception.

8 Considérant que la République française n’avait pas pris ces mesures dans le délai prescrit, la Commission a décidé d’introduire le présent recours en se fondant sur l’article 4 de la directive 98/83.

Sur le recours

9 La Commission fait valoir que, en invoquant cet article 4, au lieu de l’article 7, paragraphes 1 et 3, de la directive 80/778, elle ne modifie ni la définition ni le fondement du manquement allégué, dès lors que cette dernière disposition aurait un contenu substantiellement identique et le même objet que ledit article 4.

10 La Commission soutient que, dans trois départements français, à savoir la Vendée, les Deux-Sèvres et la Charente-Maritime, la qualité des eaux destinées à la consommation humaine était, en 1998 et jusqu’à la date d’introduction du présent recours, non conforme aux dispositions de l’article 4 de la directive 98/83. Les résultats de mesure de qualité de l’eau dans ces trois départements révéleraient des dépassements répétés des seuils pour la pollution de l’eau par les nitrates et par les
pesticides.

11 La République française reconnaît que, dans les trois départements visés par la Commission, les mesures de qualité de l’eau font apparaître des dépassements de la concentration maximale admissible pour les paramètres nitrates et pesticides dans certaines unités de distribution d’eau. Toutefois, cet État membre soutient que la qualité de l’eau s’est nettement améliorée en 2003 par rapport aux années 1998 ainsi que 2000 et s’est encore améliorée depuis 2003.

12 Il considère ainsi que, compte tenu de l’évolution de la situation entre l’expiration du délai figurant dans l’avis motivé et l’introduction du recours en manquement, il aurait été préférable que la Commission, plutôt que d’introduire le présent recours, émette un avis motivé complémentaire adaptant ses griefs à la lumière de l’évolution durant la période écoulée depuis l’année 2003. À l’appui de son argument, cet État membre cite l’arrêt du 9 décembre 2004, Commission/France (C‑177/03, Rec.
p. I‑11671, points 15 à 22).

13 La République française ajoute que les efforts entrepris devraient prochainement aboutir à une amélioration encore plus nette de la situation de l’eau.

14 Selon une jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et les changements intervenus par la suite ne peuvent être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêt du 6 mars 2003, Commission/Luxembourg, C‑211/02, Rec. p. I‑2429, point 6).

15 À l’expiration de cette date, de nouveaux contacts ont eu lieu entre la République française et la Commission. Celle-ci n’a toutefois pas pu démontrer que les résultats de mesures de la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine étaient conformes aux exigences prévues par les directives 80/778 et 98/83. Dans ses mémoires présentés dans le cadre du présent recours, la République française reconnaît qu’elle n’avait pas pleinement respecté ces exigences à cette date ni par la suite.

16 La Commission n’était donc pas tenue d’émettre un nouvel avis motivé même si des améliorations ont pu être constatées. Ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante, c’est à la Commission qu’il incombe d’apprécier l’opportunité d’agir contre un État membre, de déterminer les dispositions qu’il aurait violées et de choisir le moment où elle initiera la procédure en manquement à son encontre, les considérations qui déterminent ce choix ne pouvant affecter la recevabilité de l’action (voir,
notamment, arrêt du 8 décembre 2005, Commission/Luxembourg, C‑33/04, Rec. p. I‑10629, point 66).

17 L’arrêt Commission/France, précité, sur lequel la République française s’appuie ne change en rien cette constatation.

18 La Cour a jugé dans cet arrêt que, lorsque les dispositions nationales pertinentes ont fondamentalement changé entre l’expiration du délai fixé pour le respect de l’avis motivé et l’introduction du recours en manquement, cette évolution peut priver l’arrêt à prononcer par la Cour d’une part importante de son utilité. Dans une telle situation, il pourrait être préférable que la Commission ne forme pas un recours, mais émette un nouvel avis motivé précisant les griefs qu’elle entend retenir au
vu des circonstances modifiées (arrêt Commission/France, précité, point 21).

19 La Cour a toutefois jugé que, même dans de telles circonstances, il n’y avait pas lieu de rejeter le recours comme irrecevable (arrêt Commission/France, précité, point 22).

20 Par ailleurs, s’agissant du présent recours, il suffit de constater que, en tout état de cause, malgré les améliorations relevées dans les trois départements visés, il n’est pas contesté que les dispositions de la directive 98/83 n’étaient toujours pas pleinement respectées en 2003, à l’expiration du délai figurant dans l’avis motivé, ni même à la date d’introduction du présent recours.

21 En conséquence, il convient de constater que, en ne prenant pas toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’article 4 de la directive 98/83, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions de cette directive.

Sur les dépens

22 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République française et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête:

1) En ne prenant pas toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’article 4 de la directive 98/83/CE du Conseil, du 3 novembre 1998, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions de cette directive.

2) La République française est condamnée aux dépens.

Signatures

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* Langue de procédure: le français.


Synthèse
Formation : Septième chambre
Numéro d'arrêt : C-147/07
Date de la décision : 31/01/2008
Type de recours : Recours en constatation de manquement - fondé

Analyses

Manquement d’État - Directives 80/778/CEE et 98/83/CE - Qualité des eaux destinées à la consommation humaine - Concentration maximale en nitrates et en pesticides - Application incorrecte.

Environnement


Parties
Demandeurs : Commission des Communautés européennes
Défendeurs : République française.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mazák
Rapporteur ?: Lindh

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2008:67

Source

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