Affaire C-417/05 P
Commission des Communautés européennes
contre
Maria Dolores Fernández Gómez
«Pourvoi — Agent temporaire — Article 2, sous a), du RAA — Période accomplie au sein de la Commission en tant qu'expert national détaché — Demande en annulation — Recevabilité — Demande au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut — Notion — Acte faisant grief»
Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 14 septembre 2006
Sommaire de l'arrêt
1. Fonctionnaires — Recours — Demande au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut — Notion
(Statut des fonctionnaires, art. 90, § 1)
2. Fonctionnaires — Recours — Acte faisant grief — Notion
(Statut des fonctionnaires, art. 90, § 2)
1. La demande de prolongation du contrat d'un agent temporaire, introduite par le chef de l'unité au sein de laquelle il est affecté, ne constitue pas une demande de la part de cet agent temporaire au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut. Il ressort, en effet, des termes clairs de cette disposition que seules les personnes visées audit statut peuvent former une telle demande. Une note adressée par un service de la Commission à un autre ne rentre donc pas dans le cadre défini par cette
disposition et ne saurait être assimilée à une demande sous peine de permettre que la procédure établie par cette disposition soit contournée.
Un courrier électronique de cet agent temporaire adressé au service compétent et demandant certaines informations au sujet de son contrat, mais sans inviter ce service à prendre une décision à son égard ne constitue non plus une demande au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut.
(cf. points 37-39)
2. Seuls font griefs au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut les actes ou les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts du requérant en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci.
Tel n'est manifestement pas le cas d'un courrier électronique du service compétent informant le chef d'unité d'un agent temporaire de l'impossibilité de prolonger le contrat de celui-ci et ne contenant aucun élément nouveau par rapport aux stipulations du contrat, seule source d'effets juridiques pour les personnes visées au statut. Une telle communication constitue un acte purement confirmatif du contrat et ne saurait de ce fait avoir pour effet d'ouvrir un nouveau délai de recours.
(cf. points 42-46)
ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
14 septembre 2006 (*)
«Pourvoi – Agent temporaire – Article 2, sous a), du RAA – Période accomplie au sein de la Commission en tant qu’expert national détaché – Demande en annulation – Recevabilité – Demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut – Notion – Acte faisant grief»
Dans l’affaire C-417/05 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 24 novembre 2005,
Commission des Communautés européennes, représentée par M. D. Martin et M^me L. Lozano Palacios, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant:
Maria Dolores Fernández Gómez, représentée par M^e J. R. Iturriagagoitia, abogado,
partie requérante en première instance,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. R. Schintgen, P. Kūris, G. Arestis (rapporteur) et J. Klučka, juges,
avocat général: M. L. A. Geelhoed,
greffier: M^me M. Ferreira, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 mai 2006,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, la Commission des Communautés européennes demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 13 septembre 2005, Fernández Gómez/Commission (T-272/03, non encore publié au Recueil, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci, d’une part, a annulé la décision de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement du 12 mai 2003 portant rejet de la demande de renouvellement du contrat de M^me Fernández Gómez (ci-après la
«décision litigieuse») et, d’autre part, a condamné la Commission à verser à cette dernière la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi en raison de cette décision ainsi qu’à supporter les dépens.
Cadre juridique, faits à l’origine du litige et procédure devant le Tribunal
2 Les articles 2 et 3 du règlement (CEE, Euratom, CECA) n° 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission (JO L 56, p. 1), tels qu’en vigueur jusqu’au 30 avril 2004, déterminent respectivement le statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le
«statut») et le régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le «RAA»).
3 Aux termes de l’article 2, sous a), du RAA, est considéré comme agent temporaire «l’agent engagé en vue d’occuper un emploi compris dans le tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à chaque institution et auquel les autorités budgétaires ont conféré un caractère temporaire».
4 L’article 8 du RAA précise notamment que l’engagement d’un agent temporaire visé par ledit article 2, sous a), peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée et que l’engagement à durée déterminée d’un tel agent ne peut être renouvelé qu’une fois à durée déterminée.
5 Le 18 octobre 1994, la Commission a adopté un code de bonne conduite relatif aux dispositions d’ensemble régissant les relations entre les services de la Commission et certaines catégories de personnel (ci-après le «code de bonne conduite»).
6 Les différentes catégories de personnel visées par ce code sont le «personnel non statutaire» et «certaines catégories spécifiques [de personnel]». Aux termes du point I B dudit code, il faut entendre par «certaines catégories spécifiques [de personnel]» «certaines ressources relevant du statut, du RAA ou du droit public». Ces derniers termes visent les auxiliaires, les experts nationaux détachés (ci-après les «END»), les fonctionnaires ou agents en congé de convenance personnelle ou
travaillant à temps partiel, les anciens fonctionnaires et agents temporaires ainsi que les «autres agents des Communautés».
7 Le 13 novembre 1996, la Commission a arrêté la décision intitulée «Politique des agents temporaires relevant de l’article 2 a) du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (RAA)» (ci-après la «décision de la Commission du 13 novembre 1996»). Cette décision adopte, au titre de nouvelles orientations, des «dispositions opérationnelles» concernant le recrutement et la sélection des agents temporaires relevant de l’article 2, sous a), du RAA, la durée de leurs contrats, la
limitation du cumul dans le temps avec d’autres positions administratives ou contrats avec la Commission ainsi que les concours internes et externes susceptibles de les intéresser.
8 Le point 6, sous b) et c), de cette décision définit la durée des contrats ainsi que les modalités de la règle anti-cumul applicable aux agents temporaires relevant de l’article 2, sous a), du RAA auxquels une offre de contrat a été présentée à compter du 1^er décembre 1996 (ci-après la «règle anti-cumul»). Le point 6, sous c), précise notamment ce qui suit:
«La durée totale de présence d’un personnel non fonctionnaire à la Commission ne devra pas excéder un total de 6 années. Pour ce calcul de 6 ans, seront prises en compte les périodes passées comme agent temporaire 2-a) ou 2-b), agent auxiliaire et comme personnel non statutaire. […] Des recommandations seront adressées aux directions générales pour leur permettre d’appliquer cette limitation du cumul dans leurs propositions de recrutement.»
9 Le 14 novembre 1996, le directeur général de la direction générale «Personnel et administration» (ci-après la «DG IX») a adressé une lettre d’information au personnel relative à la «nouvelle politique des agents temporaires relevant de l’article 2-a) du RAA». S’agissant en particulier de la règle anti-cumul qui limite la durée totale d’exercice du personnel non permanent à un maximum de six ans, cette lettre expose que, pour le calcul de cette durée maximale, il convient notamment de prendre
en compte «les périodes passées […] comme END ou comme tout autre personnel non statutaire» au sein de la Commission.
10 M^me Fernández Gómez a travaillé à la Commission en qualité d’END pendant trois ans, du 1^er décembre 1997 au 30 novembre 2000. Elle y a ensuite été engagée, en tant qu’agent auxiliaire, pour une durée de deux mois et demi, du 1^er décembre 2000 au 15 février 2001.
11 Par la suite, elle a postulé un emploi publié dans l’avis de vacance 13T/TRADE/2000 visant à pourvoir quatre postes temporaires au sein de la direction générale «Commerce». S’agissant de la durée du contrat, cet avis indiquait:
«[L]ors de la nomination d’un candidat [...], la Commission devra appliquer les règles contenues dans sa décision du 13 novembre 1996 visant à limiter la durée des contrats conclus conformément à l’article 2, sous a), du [RAA] à une période maximale de trois ans, assortie d’une seule possibilité de renouvellement pour une période maximale d’un an.»
12 Sa candidature ayant été retenue, M^me Fernández Gómez a conclu avec la Commission un contrat d’agent temporaire au sens de l’article 2, sous a), du RAA. Ce contrat, daté du 17 janvier 2001, a pris effet le 16 février 2001. Selon l’article 4 dudit contrat, la durée de celui-ci était fixée à deux ans et neuf mois et demi, de sorte qu’il devait se terminer le 30 novembre 2003.
13 Ce contrat a été communiqué à la défenderesse au pourvoi par une lettre du 19 janvier 2001 dans laquelle le service compétent de la Commission attirait l’attention de M^me Fernández Gómez sur le fait que «le contrat [était] conclu pour une période déterminée de deux ans et neuf mois et demi et qu’il ne [pourrait] pas être renouvelé conformément à la décision de la Commission du 13 novembre 1996 fixant la durée maximale des différents types de contrats».
14 Le 13 février 2003, M^me Fernández Gómez a envoyé un courrier électronique à un agent de la DG IX, M. Daum. Ce courrier, intitulé «Questions concernant le détachement des END», était formulé comme suit:
«[…] je vous serais reconnaissante de bien vouloir me fournir les informations suivantes:
– la ‘règle anti-cumul’ (décision de la Commission du 13 novembre 1996) est-elle applicable aux détachements d’END qui ont débuté et se sont achevés avant le 5 janvier 2002? Dans l’affirmative,
– depuis quelle date est-elle applicable, et
– pour quelle raison une telle limitation ne figurait-elle pas dans la décision de la Commission du 9 février 2001 (qui régit les conditions d’emploi des END) et pour quelle raison les périodes de détachement des END ne sont-elles pas mentionnées dans la décision du 13 novembre 1996?
[…]»
15 Par note du 3 avril 2003 adressée à la DG IX, le chef de l’unité au sein de laquelle travaillait M^me Fernández Gómez a notamment sollicité la prolongation du contrat d’agent temporaire de celle-ci pour atteindre une durée totale de quatre ans qu’il considérait comme la durée maximale de ce contrat. Cette demande de prolongation exposait les raisons pour lesquelles le maintien de la personne concernée au sein de l’unité était «hautement souhaité». Par ailleurs, ladite note relevait que la
décision de la Commission du 13 novembre 1996 ne prévoit pas que la période de détachement en tant qu’END est prise en considération pour le calcul de la période de six ans prévue par la règle anti-cumul. Cette même note indiquait également que les END n’étaient pas repris en tant que «personnel non statutaire» dans le code de bonne conduite.
16 Le 12 mai 2003, un agent de la DG IX a adressé un courrier électronique à un agent de l’unité dont faisait partie M^me Fernández Gómez. Ce courrier était formulé comme suit:
«[On] m’a demandé de répondre [au] message concernant les prolongations demandées par votre note du 3 avril 2003 pour deux [agents temporaires] 2 a), M^me Fernández Gómez et M. [...]
M^me Fernández Gómez a contacté directement M. Daum concernant la question de la période END comptabilisée dans la règle anti-cumul; ce dernier lui a répondu qu’il était de pratique constante de comptabiliser cette période END comme période ‘personnel non statutaire’ [...]
Je confirme par conséquent que pour ces deux agents temporaires, comme pour tous les autres dans la même situation, il n’est pas prévu de neutraliser la période passée en tant qu’END ni de revoir leur échéance de contrat.
[…]»
17 Ce courrier a été transmis par courrier électronique du 18 juin 2003 à M^me Fernández Gómez.
18 Le 11 juillet 2003, celle-ci a introduit une réclamation sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, laquelle a été rejetée par décision de la Commission le 29 octobre 2003.
19 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 août 2003, M^me Fernández Gómez avait entre-temps introduit un recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision litigieuse et, d’autre part, à la condamnation de la Commission à payer la somme de 101 328,60 euros, augmentée des intérêts de retard, en réparation du préjudice subi.
20 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, M^me Fernández Gómez a également introduit une demande visant notamment à obtenir le sursis à l’exécution de la décision litigieuse.
21 Par ordonnance du 16 septembre 2003, Fernández Gómez/Commission (T-272/03 R, RecFP p. I-A-197 et II-979), le président du Tribunal a rejeté cette demande et a réservé les dépens.
22 Par acte déposé le 29 janvier 2004, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité conformément à l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.
23 Par ordonnance du 30 avril 2004, le Tribunal a décidé de joindre l’exception d’irrecevabilité au fond.
24 Par l’arrêt attaqué, après avoir déclaré le recours recevable, le Tribunal a annulé la décision litigieuse et a condamné la Commission à verser à M^me Fernández Gómez la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi.
Conclusions des parties
25 Par son pourvoi, la Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:
– annuler l’arrêt attaqué;
– statuant sur le litige, faire droit à ses conclusions présentées devant le Tribunal et rejeter le recours;
– à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant le Tribunal;
– condamner M^me Fernández Gómez aux dépens de l’instance, y compris ses dépens dans la procédure devant le Tribunal.
26 La défenderesse au pourvoi conclut à ce qu’il plaise à la Cour:
– rejeter le pourvoi dans son ensemble;
– condamner la Commission aux dépens afférents au recours devant le Tribunal et au pourvoi devant la Cour.
27 Par lettre déposée au greffe de la Cour le 23 février 2006, la Commission a demandé, conformément à l’article 117 du règlement de procédure de la Cour, l’autorisation de déposer un mémoire en réplique. Par décision du 8 mars 2006, le président de la Cour a rejeté cette demande.
Sur le pourvoi
28 À l’appui de son pourvoi, la Commission invoque trois moyens. Le premier est tiré d’une erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal en considérant comme recevable le recours contre la décision litigieuse. Le deuxième moyen est tiré d’une erreur de droit concernant l’article 8 du RAA et la règle anti-cumul. Le troisième moyen est tiré d’une erreur de droit en ce qui concerne la détermination et l’évaluation du préjudice prétendument subi par la défenderesse au pourvoi.
Sur le premier moyen
29 Le Tribunal a tout d’abord constaté au point 37 de l’arrêt attaqué que la décision litigieuse, à savoir le courrier électronique du 12 mai 2003, contient la réponse donnée par l’administration à la demande de prolongation du contrat de M^me Fernández Gómez présentée par son chef d’unité le 3 avril 2003.
30 Selon le point 38 du même arrêt, la décision litigieuse écarte cette demande au motif que la période de trois ans que la défenderesse au pourvoi a passée au service de la Commission en tant qu’END doit être comptabilisée pour la mise en œuvre de la règle anti-cumul, ladite période s’ajoutant à celles, d’une part, de deux mois et demi qu’elle y a passée en tant qu’agent auxiliaire et, d’autre part, de deux ans et neuf mois et demi qu’elle y a passée en tant qu’agent temporaire, ce qui
correspond, au total, à la période maximale de six ans de présence au sein de l’institution prévue par la règle anti-cumul.
31 Ensuite, en réponse à la fin de non-recevoir soulevée par la Commission, selon laquelle la décision litigieuse ne ferait que confirmer le contenu du contrat d’agent temporaire de la défenderesse au pourvoi, le Tribunal a considéré, au point 43 de l’arrêt attaqué, que la comparaison de la décision litigieuse avec le contrat et la lettre du 19 janvier 2001 opérant transmission de ce contrat permet de constater que ladite décision contient un élément nouveau en ce qu’elle refuse la demande de
prolongation dudit contrat au motif que la période passée au service de la Commission en tant qu’END doit être prise en compte pour la mise en œuvre de la règle anti-cumul, alors que les actes antérieurs ne prenaient position que sur la seule question de la durée du contrat sans se prononcer sur celle de son éventuelle prolongation lorsque ce contrat serait arrivé à son terme, renvoyant sur ce point aux règles applicables.
32 Après avoir estimé en conséquence, au point 44 de l’arrêt attaqué, que la décision litigieuse n’est pas un acte confirmatif d’une décision antérieure, mais un acte faisant grief à la défenderesse au pourvoi, le Tribunal a enfin considéré, aux points 45 et 46 du même arrêt, que les délais statutaires ont été respectés, pour conclure, au point 47 dudit arrêt, que le recours est recevable dans son ensemble.
33 La Commission soutient que le Tribunal a, ce faisant, commis plusieurs erreurs de droit. À cet égard, elle fait valoir, notamment, que la défenderesse au pourvoi n’a pas formulé une demande, au sens du statut, concernant la prolongation de son contrat d’agent temporaire, de sorte que le recours, de ce seul chef, serait irrecevable. La Commission ajoute que, en tout état de cause, la décision litigieuse, étant une simple lettre d’information sans portée décisionnelle, ne constitue pas un acte
faisant grief.
34 Il y a lieu de rappeler les termes de l’article 90, paragraphes 1 et 2, du statut, selon lesquels:
«1. Toute personne visée au présent statut peut saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination [ci-après l’«AIPN»] d’une demande l’invitant à prendre à son égard une décision. L’autorité notifie sa décision motivée à l’intéressé dans un délai de quatre mois à partir du jour de l’introduction de la demande. À l’expiration de ce délai, le défaut de réponse à la demande vaut décision implicite de rejet susceptible de faire l’objet d’une réclamation au sens du paragraphe 2.
2. Toute personne visée au présent statut peut saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination d’une réclamation dirigée contre un acte lui faisant grief, soit que ladite autorité ait pris une décision, soit qu’elle se soit abstenue de prendre une mesure imposée par le statut. […]
[…]»
35 Il convient de constater qu’il résulte de l’article 90, paragraphe 1, du statut qu’une demande ne peut être adressée à l’AIPN que par une personne visée au statut.
36 En tant qu’agent temporaire, la défenderesse au pourvoi fait partie des personnes visées à l’article 90, paragraphe 1, du statut et peut donc, à ce titre, introduire une demande prévue à cette disposition. Il convient dès lors d’examiner si elle a effectivement introduit une telle demande.
37 Ainsi qu’il ressort du dossier soumis à la Cour, la défenderesse au pourvoi a contacté la DG IX par le courrier électronique du 13 février 2003 cité au point 14 du présent arrêt au sujet de son contrat. Sans insister particulièrement sur le fait que ce courrier constitue une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, la défenderesse au pourvoi prétend que la demande de prolongation de son contrat a été introduite, à la suite de ses démarches personnelles, par le chef de l’unité
au sein de laquelle elle travaillait.
38 Il est certes vrai que, par une note du 3 avril 2003, ledit chef d’unité a demandé la prolongation du contrat de la défenderesse au pourvoi. Toutefois, ainsi qu’il ressort des termes clairs de l’article 90, paragraphe 1, du statut, reproduits au point 34 du présent arrêt, seules les personnes visées audit statut peuvent former une telle demande. Une note adressée par un service de la Commission à un autre ne rentre donc pas dans le cadre défini par cette disposition. Il apparaît, en outre,
qu’une telle note ne saurait être assimilée à une demande visée à ladite disposition, sous peine de permettre que la procédure établie par cette disposition soit contournée.
39 Par ailleurs, il ressort également du courrier électronique du 13 février 2003 susvisé que la défenderesse au pourvoi n’a pas invité l’AIPN à prendre une décision à son égard. En effet, par ce courrier, intitulé «Questions concernant le détachement des END», la défenderesse au pourvoi s’est limitée à demander des informations au sujet de l’application, dans son cas, de la règle anti-cumul.
40 Il s’ensuit que la défenderesse au pourvoi n’a formulé aucune demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut.
41 Dans ces conditions, il convient encore d’examiner si, à défaut d’une telle demande, la décision litigieuse constitue un acte faisant grief, étant donné que la défenderesse au pourvoi a, en tout état de cause, introduit, contre cet acte, une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut.
42 À cet égard, il y a lieu d’indiquer que seuls font griefs les actes ou les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts du requérant en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci.
43 Il convient de constater d’emblée que le courrier électronique de la DG IX du 12 mai 2003 ne constitue manifestement pas un tel acte.
44 En effet, à supposer que le courrier en question contienne une décision, selon la jurisprudence, seul le contrat d’emploi est source d’effets juridiques pour les personnes visées au statut (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 1987, Castagnoli/Commission, 329/85, Rec. p. 3281, points 10 et 11, et ordonnance du 4 mai 1988, Contini/Commission, 95/87, Rec. p. 2537, point 8). Or, il est constant que la défenderesse au pourvoi n’a jamais contesté les stipulations de son contrat, telles
qu’explicitées dans la lettre d’accompagnement du 19 janvier 2000, dans les délais statutaires.
45 En outre, s’agissant du courrier du 12 mai 2003, il convient de constater que celui-ci ne contient, par rapport auxdits stipulations, aucun élément nouveau en ce qui concerne la date à laquelle le contrat de la défenderesse au pourvoi arrive à son terme et la question de la prolongation dudit contrat.
46 Or, un acte qui ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur constitue un acte purement confirmatif de celui-ci et ne saurait de ce fait avoir pour effet d’ouvrir un nouveau délai de recours (voir, arrêt du 10 décembre 1980, Grasselli/Commission, 23/80, Rec. p. 3709, point 18).
47 Il convient donc de constater que, en considérant, au point 37 de l’arrêt attaqué, que la décision litigieuse expose la réponse donnée par l’administration à la demande de prolongation du contrat de M^me Fernández Gómez présentée par son chef d’unité le 3 avril 2003, puis, au point 44 dudit arrêt, que la décision litigieuse constitue un acte faisant grief, pour conclure, au point 47 du même arrêt, que le recours de la défenderesse au pourvoi est recevable, le Tribunal a violé les articles 90
et 91 du statut.
48 Dès lors, il y a lieu d’accueillir le premier moyen du pourvoi et d’annuler l’arrêt attaqué, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens invoqués par la Commission. Par voie de conséquence, il y a également lieu d’annuler l’arrêt attaqué pour autant qu’il a condamné la Commission à réparer le préjudice prétendument subi par M^me Fernández Gómez en raison de l’adoption de la décision litigieuse.
Sur le recours devant le Tribunal
49 Conformément à l’article 61, premier alinéa, seconde phrase, du statut de la Cour de justice, cette dernière peut, en cas d’annulation de l’arrêt du Tribunal, statuer définitivement sur le litige lorsque celui-ci est en état d’être jugé. Tel est le cas en l’espèce.
50 Il résulte des points 43 à 47 ci-dessus que l’exception d’irrecevabilité soulevée devant le Tribunal par la Commission doit être accueillie. En conséquence, il y a lieu de rejeter comme irrecevable le recours de M^me Fernández Gómez pour autant qu’il tend à l’annulation de la décision litigieuse.
51 À cet égard, il convient de préciser que l’irrecevabilité d’une demande en annulation d’un acte entraîne celle de la demande en indemnisation lorsque, comme c’est manifestement le cas en l’espèce, il existe un lien étroit entre ces deux demandes.
52 Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter comme irrecevable le recours de M^me Fernández Gómez dans son ensemble.
Sur les dépens
53 Conformément à l’article 122, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle‑même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.
54 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, premier alinéa, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
55 Toutefois, suivant l’article 70 dudit règlement, applicable aux pourvois formés par les institutions en vertu des articles 118 et 122 de celui-ci, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent, en principe, à la charge de celles-ci. Dans ces conditions, chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:
1) L’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 13 septembre 2005, Fernández Gómez/Commission (T-272/03), est annulé.
2) Le recours introduit par M^me Fernández Gómez devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes, tendant à l’annulation de la décision de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagements du 12 mai 2003 portant rejet de la demande de renouvellement du contrat de M^me Fernández Gómez et à l’indemnisation du préjudice allégué comme étant la conséquence de cette décision, est rejeté comme irrecevable.
3) Chaque partie supportera ses propres dépens en ce qui concerne tant la procédure de première instance que le pourvoi.
Signatures
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* Langue de procédure: le français.