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22/01/2002 | CJUE | N°C-31/00

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Conseil national de l'ordre des architectes contre Nicolas Dreessen., 22/01/2002, C-31/00


Avis juridique important

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62000J0031

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 22 janvier 2002. - Conseil national de l'ordre des architectes contre Nicolas Dreessen. - Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - Belgique. - Renvoi préjudiciel - Articles 10 CE et 43 CE - Législation nationale subordonnant

l'accès à la profession d'architecte à la possession d'un diplôme ou d'...

Avis juridique important

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62000J0031

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 22 janvier 2002. - Conseil national de l'ordre des architectes contre Nicolas Dreessen. - Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - Belgique. - Renvoi préjudiciel - Articles 10 CE et 43 CE - Législation nationale subordonnant l'accès à la profession d'architecte à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle - Ressortissant communautaire titulaire d'un diplôme ne figurant pas parmi ceux énumérés par la directive 85/384/CEE -
Obligation pour l'Etat membre d'accueil, saisi d'une demande d'exercer la profession d'architecte sur son territoire, de procéder à une comparaison des compétences attestées par le diplôme et l'expérience acquise avec les qualifications exigées par sa législation nationale. - Affaire C-31/00.
Recueil de jurisprudence 2002 page I-00663

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Restrictions résultant de la réglementation de l'État membre d'établissement relative à l'exercice de certaines activités - Existence d'une directive, dans le secteur concerné, sur la reconnaissance mutuelle des diplômes - Application n'aboutissant pas à la reconnaissance automatique des titres de l'intéressé - Obligation de l'État membre d'examiner la correspondance entre les diplômes et qualifications exigés par le droit national et ceux
obtenus par l'intéressé

rt. 43 CE et 47 CE)

Sommaire

$$L'article 43 CE doit être interprété en ce sens que, lorsqu'un ressortissant communautaire présente aux autorités compétentes d'un État membre une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle, ou encore à des périodes d'expérience pratique, ces autorités sont tenues de prendre en considération l'ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que
l'expérience pertinente de l'intéressé, en procédant à une comparaison entre, d'une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d'autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale, même lorsqu'une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes a été adoptée pour la profession en cause, mais que l'application de cette directive ne permet pas d'aboutir à la reconnaissance automatique du ou des titres du demandeur.

Il est sans importance, à cet égard, que l'intéressé, bien qu'il justifie d'un diplôme dans un domaine dans lequel a été adoptée une telle directive, ne puisse pas invoquer le mécanisme de reconnaissance automatique prévue par cette directive parce que son diplôme a été délivré dans un pays tiers ou parce que, pour d'autres raisons, les conditions d'application de ce mécanisme ne sont pas réunies.

( voir points 28, 31 et disp. )

Parties

Dans l'affaire C-31/00,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par la Cour de cassation (Belgique) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Conseil national de l'ordre des architectes

et

Nicolas Dreessen,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 10 CE et 43 CE,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de MM. P. Jann, président de chambre, S. von Bahr, D. A. O. Edward (rapporteur), A. La Pergola et C. W. A. Timmermans, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour le Conseil national de l'ordre des architectes, par Mes P. Henry, F. Moïses et V. Bertrand, avocats,

- pour M. Dreessen, par Mes L. Misson et P. Mbaya Kapita, avocats,

- pour le gouvernement italien, par M. U. Leanza, en qualité d'agent, assisté de Mme F. Quadri, avvocato dello Stato,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. B. Mongin, en qualité d'agent,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales du Conseil national de l'ordre des architectes, représenté par Me V. Bertrand, de M. Dreessen, représenté par Me P. Mbaya Kapita, du gouvernement français, représenté par M. S. Pailler, en qualité d'agent, du gouvernement italien, représenté par Mme F. Quadri, et de la Commission, représentée par M. B. Mongin, à l'audience du 8 mars 2001,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 17 mai 2001,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par décision du 21 janvier 2000, parvenue à la Cour le 7 février suivant, la Cour de cassation a posé, en application de l'article 234 CE, une question préjudicielle sur l'interprétation des articles 10 CE et 43 CE.

2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'un litige opposant M. Dreessen au Conseil national de l'ordre des architectes (ci-après le «Conseil national») au sujet de son inscription à l'ordre des architectes de la province de Liège.

Le cadre juridique

3 La directive 85/384/CEE du Conseil, du 10 juin 1985, visant à la reconnaissance mutuelle des diplômes, certificats et autres titres du domaine de l'architecture et comportant des mesures destinées à faciliter l'exercice effectif du droit d'établissement et de libre prestation de services (JO L 223, p. 15), prévoit la reconnaissance automatique de certains titres dans le cadre de deux régimes distincts.

4 D'une part, les articles 2 à 9 de la directive 85/384, qui figurent au chapitre II, intitulé «Diplômes, certificats et autres titres donnant accès aux activités du domaine de l'architecture sous le titre professionnel d'architecte», établissent un régime général de reconnaissance mutuelle automatique de tous les titres du domaine de l'architecture qui réunissent les conditions qu'ils édictent. L'article 2 dispose ainsi que «[c]haque État membre reconnaît les diplômes, certificats et autres titres
obtenus par une formation répondant aux exigences des articles 3 et 4 et délivrés aux ressortissants des États membres par les autres États membres».

5 D'autre part, les articles 10 à 15 de la directive 85/384, qui figurent au chapitre III, intitulé «Diplômes, certificats et autres titres donnant accès aux activités du domaine de l'architecture, en vertu de droits acquis ou de dispositions nationales existantes», instaurent un régime transitoire de reconnaissance mutuelle de certains titres limitativement énumérés. Aux termes de l'article 10, «[c]haque État membre reconnaît les diplômes, certificats et autres titres, visés à l'article 11,
délivrés par les autres États membres aux ressortissants des États membres qui sont déjà en possession de ces qualifications à la date de la notification de la présente directive ou ayant commencé leurs études sanctionnées par ces diplômes, certificats et autres titres au plus tard au cours de la troisième année académique suivant ladite notification, même s'ils ne répondent pas aux exigences minimales des titres visés au chapitre II». L'année à laquelle se réfère cette disposition est l'année
académique 1987/1988.

6 Parmi les diplômes, certificats et autres titres allemands susceptibles de bénéficier de la reconnaissance en vertu du second régime figurent, aux termes de l'article 11, sous a), quatrième tiret, de la directive 85/384, les certificats délivrés avant le 1er janvier 1973 par les «Ingenieurschulen», section architecture («Architektur»), accompagnés d'une attestation des autorités compétentes certifiant que l'intéressé a satisfait à une épreuve sur titre conformément à l'article 13 de ladite
directive.

Le litige au principal et la question préjudicielle

7 M. Dreessen, de nationalité belge, est titulaire d'un diplôme d'ingénieur délivré en Allemagne le 16 février 1966 par la Staatliche Ingenieurschule für Bauwesen Aachen (École supérieure d'État du bâtiment d'Aix-la-Chapelle), section «Allgemeiner Hochbau» (construction), à l'issue d'études d'ingénieur en bâtiment-construction («Ingenieurkunde, Fachrichtung Hochbau»). Il a travaillé en Belgique pendant 25 ans comme salarié dans différents bureaux d'architectes situés à Liège.

8 À la suite de la mise en liquidation de la société qui l'employait, M. Dreessen a demandé, le 12 décembre 1991, au conseil de l'ordre des architectes de la province de Liège (ci-après le «conseil provincial») son inscription au tableau de cet ordre, afin d'exercer la profession d'architecte à titre indépendant. Cette inscription lui a été refusée le 29 avril 1993 au motif que son diplôme ne correspondait pas à un diplôme délivré par une section d'architecture au sens de l'article 11, sous a),
quatrième tiret, de la directive 85/384 et n'était donc pas visé à cet article.

9 M. Dreessen ayant fait appel de ce refus devant le conseil d'appel d'expression française de l'ordre des architectes (ci-après le «conseil d'appel»), ce dernier a, par décision du 17 novembre 1993, formé un renvoi préjudiciel devant la Cour.

10 Par arrêt du 9 août 1994, Dreessen (C-447/93, Rec. p. I-4087), la Cour a jugé qu'un diplôme délivré en 1966 par la section «Allgemeiner Hochbau» de la Staatliche Ingenieurschule für Bauwesen Aachen n'est pas assimilable aux certificats visés à l'article 11, sous a), quatrième tiret, de la directive 85/384.

11 Sur le fondement de cet arrêt, le conseil d'appel a, par décision du 15 février 1995, rejeté le recours de M. Dreessen. Le pourvoi formé par ce dernier a été rejeté par la Cour de cassation par arrêt du 25 novembre 1995.

12 Le 25 octobre 1997, M. Dreessen a fait une nouvelle demande d'inscription auprès du conseil provincial, en faisant principalement valoir que son diplôme ne figurait pas dans la liste mentionnée à l'article 11, sous a), de la directive 85/384 à la suite d'une erreur des autorités allemandes et qu'il aurait dû être procédé à un examen comparatif des formations reçues, conformément à l'arrêt du 7 mai 1991, Vlassopoulou (C-340/89, Rec. p. I-2357).

13 Cette nouvelle demande a été rejetée par le conseil provincial par décision du 5 février 1998 aux motifs qu'il n'avait pas à tenir compte des connaissances et des qualifications de M. Dreessen, ni à les apprécier, et que, la demande ayant déjà été présentée et rejetée, elle était irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée. Réformant cette décision, le conseil d'appel a, le 16 juin 1999, ordonné l'inscription de M. Dreessen au tableau de l'ordre des architectes de la province de Liège,
en constatant qu'il justifiait des qualifications et des connaissances exigées par la législation belge.

14 Le Conseil national a formé un pourvoi en cassation en faisant valoir que, lorsqu'une directive a été arrêtée sur la base de l'article 47, paragraphe 1, CE afin de déterminer les conditions de reconnaissance mutuelle des diplômes requis pour l'accès à une profession, les autorités compétentes d'un État membre saisies d'une demande d'autorisation d'exercer cette profession doivent se limiter à vérifier si les conditions prévues par la directive sont réunies, mais ne peuvent procéder, lorsque
lesdites conditions ne sont pas réunies, à une comparaison des qualifications et des connaissances du requérant avec celles qu'exigent les dispositions nationales régissant l'accès à la profession - comme l'aurait fait à tort le conseil d'appel sur le fondement de l'article 43 CE.

15 Éprouvant des doutes sur l'interprétation correcte du droit communautaire applicable en la matière, la Cour de cassation a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Les articles 5 [du traité CE (devenu article 10 CE)] et 52 du traité [CE (devenu, après modification, article 43 CE)] impliquent-ils que l'État membre, dont une autorité compétente a été saisie, par un ressortissant communautaire, titulaire d'un diplôme obtenu dans un autre État membre, d'une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle, est tenu de prendre en
considération le diplôme invoqué par le requérant et de procéder à une comparaison entre les compétences et qualifications attestées par ce diplôme et les compétences et qualifications exigées par les règles nationales, même dans le cas où il existe, à l'égard de la profession concernée, une directive arrêtée par le Conseil sur pied de l'article 57, paragraphes 1 et 2, [du] traité [CE (devenu, après modification, article 47, paragraphes 1 et 2, CE)], que cette directive prévoit, pour ce qui est des
cycles d'études entrepris ou poursuivis au cours d'une période transitoire, une énumération exhaustive des diplômes ou certificats, délivrés dans les divers États membres, devant permettre l'exercice de la profession concernée dans les autres États membres, que le requérant relève de ce régime transitoire et que le diplôme invoqué par lui ne figure pas dans cette énumération exhaustive?»

Sur la question préjudicielle

Observations soumises à la Cour

16 Le Conseil national et le gouvernement italien soutiennent que la réponse à la question préjudicielle doit être négative. Selon eux, en effet, son diplôme n'étant pas visé à l'article 11 de la directive 85/384, M. Dreessen n'a pas droit à la reconnaissance de celui-ci dans un autre État membre, sans qu'il y ait lieu de procéder à une comparaison entre les compétences et qualifications attestées par ce diplôme et les compétences et qualifications exigées par les dispositions nationales.

17 Ils ajoutent que l'obligation de procéder à une telle comparaison, énoncée dans l'arrêt Vlassopoulou, précité, est strictement limitée aux professions pour lesquelles aucune directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes n'a été adoptée. Le Conseil national va plus loin en soutenant que, lorsqu'une telle directive existe, comme dans l'affaire au principal, les autorités nationales devraient se borner à déterminer si les conditions prévues par cette directive sont réunies.

18 M. Dreessen considère que l'article 47 CE a simplement pour objectif de coordonner la reconnaissance mutuelle des qualifications exigées pour l'exercice de certaines professions, mais ne remplace pas le droit fondamental à la liberté d'établissement consacré à l'article 43 CE pour toutes les professions, quelle que soit leur nature.

19 La Commission fait également valoir que, si la directive 85/384 dresse la liste exhaustive des diplômes dans le domaine de l'architecture qui bénéficient d'une reconnaissance automatique, elle ne s'oppose pas, pour les diplômes qui n'entrent pas dans son champ d'application, à l'application de la jurisprudence découlant de l'arrêt Vlassopoulou, précité.

Appréciation de la Cour

20 Il ressort de l'arrêt Dreessen, précité, que le diplôme d'ingénieur de M. Dreessen ne réunit pas les conditions nécessaires pour être assimilé aux certificats visés à l'article 11, sous a), quatrième tiret, de la directive 85/384 et que, en conséquence, ledit diplôme ne bénéficie pas de la reconnaissance automatique des diplômes d'architecture prévue à l'article 10 de cette directive.

21 Il convient toutefois de souligner que, en raison du libellé même de la demande préjudicielle ayant donné lieu à l'arrêt Dreessen, précité, qui portait uniquement sur l'interprétation de l'article 11 de la directive 85/384, la Cour ne s'est pas prononcée dans cet arrêt sur la question de la reconnaissance éventuelle des qualifications de M. Dreessen sur le fondement de l'interprétation qu'elle a donnée à l'article 43 CE dans l'arrêt Vlassopoulou, précité.

22 En revanche, dans la présente affaire, la demande préjudicielle porte précisément sur cette question.

23 Le présent renvoi préjudiciel n'a donc pas pour objet de savoir si, dans l'affaire au principal, les autorités nationales sont tenues de reconnaître le diplôme de M. Dreessen comme équivalant aux titres du domaine de l'architecture visés par la directive 85/384, mais de savoir si lesdites autorités doivent rechercher si les qualifications et l'expérience professionnelles de M. Dreessen répondent totalement ou partiellement aux exigences et aux conditions d'accès à la profession d'architecte en
Belgique pour, le cas échéant, lui reconnaître le droit d'y exercer cette profession.

24 À cet égard, il convient de rappeler que les autorités d'un État membre, saisies d'une demande d'autorisation, présentée par un ressortissant communautaire, d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonnée à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle, ou encore à des périodes d'expérience pratique, sont tenues de prendre en considération l'ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l'expérience pertinente de
l'intéressé, en procédant à une comparaison entre, d'une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d'autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale (voir, notamment, arrêts Vlassopoulou, précité, points 16, 19 et 20; du 9 février 1994, Haim, C-319/92, Rec. p. I-425, points 27 et 28, et du 14 septembre 2000, Hocsman, C-238/98, Rec. p. I-6623, point 23).

25 La Cour a souligné que cette jurisprudence n'est que l'expression jurisprudentielle d'un principe inhérent aux libertés fondamentales du traité et que ce principe ne saurait perdre une partie de sa valeur juridique du fait de l'adoption de directives relatives à la reconnaissance mutuelle des diplômes (arrêt Hocsman, précité, points 24 et 31).

26 En effet, ainsi qu'il ressort de l'article 47, paragraphe 1, CE, de telles directives ont pour objectif de faciliter la reconnaissance mutuelle des diplômes, certificats et autres titres en établissant des règles et des critères communs qui aboutissent, dans la mesure du possible, à la reconnaissance automatique desdits diplômes, certificats et autres titres. En revanche, elles n'ont pas pour but et ne sauraient avoir pour effet de rendre plus difficile la reconnaissance de tels diplômes,
certificats et autres titres dans les situations non couvertes par elles.

27 Il s'ensuit que les États membres doivent respecter leurs obligations en matière de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, telles qu'elles résultent de l'interprétation donnée par la Cour aux articles 43 CE et 47 CE (voir, notamment, arrêts précités Vlassopoulou, Haim et Hocsman), lors de tout examen d'une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme ou d'une qualification
professionnelle, ou encore à des périodes d'expérience pratique, lorsque le diplôme dont le ressortissant communautaire est titulaire ne fait pas l'objet d'une reconnaissance automatique en vertu d'une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes, quand bien même une telle directive a été adoptée dans le domaine professionnel concerné.

28 Il est sans importance, à cet égard, que l'intéressé, bien qu'il justifie d'un diplôme dans un domaine dans lequel a été adoptée une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes, ne puisse pas invoquer le mécanisme de reconnaissance automatique prévue par cette directive parce que son diplôme a été délivré dans un pays tiers (comme c'est le cas dans l'affaire Hocsman, précitée) ou parce que, pour d'autres raisons, les conditions d'application de ce mécanisme ne sont pas réunies
(comme c'est le cas dans l'affaire Dreessen, précitée, et dans la présente affaire).

29 L'importance de respecter les principes dégagés dans l'arrêt Vlassopoulou, précité, et dans la jurisprudence qui en découle dans des situations non couvertes par une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes est soulignée par le fait que ce peut être à la suite d'une erreur que le type de diplôme en cause ne figure pas au nombre des titres visés par ladite directive. À cet égard, la Commission relève, sans qu'il y ait lieu pour la Cour de se prononcer sur ce point, que c'est
par erreur que le type de diplôme obtenu par M. Dreessen n'a pas été inclus dans la liste figurant à l'article 11 de la directive 85/384.

30 Au vu des considérations qui précèdent, il n'apparaît pas nécessaire d'interpréter l'article 10 CE, la seule interprétation de l'article 43 CE suffisant pour apporter une réponse utile à la juridiction de renvoi.

31 Il convient donc de répondre à la question préjudicielle que l'article 43 CE doit être interprété en ce sens que, lorsqu'un ressortissant communautaire présente aux autorités compétentes d'un État membre une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle, ou encore à des périodes d'expérience pratique, ces autorités sont tenues de prendre en considération l'ensemble
des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l'expérience pertinente de l'intéressé, en procédant à une comparaison entre, d'une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d'autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale, même lorsqu'une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes a été adoptée pour la profession en cause, mais que l'application de cette directive ne permet pas d'aboutir à la reconnaissance
automatique du ou des titres du demandeur.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

32 Les frais exposés par les gouvernements français et italien, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre),

statuant sur la question à elle soumise par la Cour de cassation, par décision du 21 janvier 2000, dit pour droit:

L'article 43 CE doit être interprété en ce sens que, lorsqu'un ressortissant communautaire présente aux autorités compétentes d'un État membre une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle, ou encore à des périodes d'expérience pratique, ces autorités sont tenues de prendre en considération l'ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l'expérience
pertinente de l'intéressé, en procédant à une comparaison entre, d'une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d'autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale, même lorsqu'une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes a été adoptée pour la profession en cause, mais que l'application de cette directive ne permet pas d'aboutir à la reconnaissance automatique du ou des titres du demandeur.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-31/00
Date de la décision : 22/01/2002
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - Belgique.

Renvoi préjudiciel - Articles 10 CE et 43 CE - Législation nationale subordonnant l'accès à la profession d'architecte à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle - Ressortissant communautaire titulaire d'un diplôme ne figurant pas parmi ceux énumérés par la directive 85/384/CEE - Obligation pour l'Etat membre d'accueil, saisi d'une demande d'exercer la profession d'architecte sur son territoire, de procéder à une comparaison des compétences attestées par le diplôme et l'expérience acquise avec les qualifications exigées par sa législation nationale.

Droit d'établissement


Parties
Demandeurs : Conseil national de l'ordre des architectes
Défendeurs : Nicolas Dreessen.

Composition du Tribunal
Avocat général : Léger
Rapporteur ?: Edward

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2002:35

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