Avis juridique important
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61999J0319
Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 23 novembre 2000. - Commission des Communautés européennes contre République française. - Manquement d'Etat - Non-transposition de la directive 95/47/CE. - Affaire C-319/99.
Recueil de jurisprudence 2000 page I-10439
Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
Mots clés
tats membres - Obligations - Exécution des directives - Manquement - Justification - Inadmissibilité
(Art. 226 CE)
Sommaire
$$Un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l'inobservation des obligations et délais prescrits par une directive.
Les gouvernements des États membres participent aux travaux préparatoires des directives et doivent, dès lors, être en mesure d'élaborer les dispositions législatives nécessaires à leur mise en oeuvre dans le délai fixé. (voir point 10)
Parties
Dans l'affaire C-319/99,
Commission des Communautés européennes, représentée par M. M. Nolin, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,
partie requérante,
contre
République française, représentée par Mmes K. Rispal-Bellanger, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et A. Maitrepierre, chargé de mission à la même direction, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade de France, 8 B, boulevard Joseph II,
partie défenderesse,
ayant pour objet de faire constater que, en ne communiquant pas, dans le délai prévu, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 95/47/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à l'utilisation de normes pour la transmission de signaux de télévision (JO L 281, p. 51), ou en ne prenant pas les mesures nécessaires pour s'y conformer, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu
de cette directive,
LA COUR
(troisième chambre),
composée de MM. C. Gulmann (rapporteur), président de chambre, J.-P. Puissochet et Mme F. Macken, juges,
avocat général: M. A. Saggio,
greffier: M. R. Grass,
vu le rapport du juge rapporteur,
ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 20 juin 2000,
rend le présent
Arrêt
Motifs de l'arrêt
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 26 août 1999, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 226 CE, un recours visant à faire constater que, en ne communiquant pas, dans le délai prévu, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 95/47/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à l'utilisation de normes pour la transmission de signaux de télévision (JO L 281, p.
51), ou en ne prenant pas les mesures nécessaires pour s'y conformer, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
2 L'article 8 de la directive 95/47 prévoit que les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour s'y conformer au plus tard neuf mois après la date de son entrée en vigueur et qu'ils en informent immédiatement la Commission. La directive étant entrée en vigueur le 23 novembre 1995, le délai de transposition imparti aux États membres a donc expiré le 23 août 1996.
3 La Commission n'ayant été informée d'aucune mesure relative à la transposition de la directive 95/47 par la République française, elle lui a envoyé le 16 janvier 1997 une lettre de mise en demeure l'invitant à lui faire connaître, dans un délai de deux mois, ses observations sur l'absence, supposée faute d'informations, de dispositions nécessaires à la transposition de ladite directive en droit interne.
4 Le 14 octobre 1998, n'ayant toujours reçu de la part du gouvernement français aucune information concernant ladite transposition, la Commission a adressé à la République française un avis motivé constatant que, en ne prenant pas, ou en ne communiquant pas, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 95/47, elle avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive, et l'invitant à se conformer à cet avis dans un
délai de deux mois à compter de sa notification.
5 Par lettre du 15 décembre 1998, le gouvernement français a fait savoir à la Commission que le retard pris dans la transposition de la directive 95/47 était dû à un changement de gouvernement. Il a sollicité un délai supplémentaire de deux mois afin de définir un calendrier précis de transposition de la directive 95/47 et souhaité une rencontre avec les services compétents de la Commission en vue de présenter les textes de transposition en cours d'élaboration. Cette réunion a eu lieu le 22 janvier
1999.
6 Le 8 juin 1999, le gouvernement français a informé la Commission qu'un amendement transposant la directive 95/47 avait été adopté le 26 mai 1999 par l'Assemblée nationale dans le cadre de la discussion en première lecture d'un projet de loi sur l'audiovisuel. Il a précisé que la poursuite de l'examen de ce projet de loi se ferait au Sénat à l'automne 1999.
7 Le 23 août 1999, aucune mesure de transposition de la directive 95/47 ne lui ayant été communiquée par les autorités françaises, la Commission a décidé d'introduire le présent recours.
8 Dans son mémoire en défense, le gouvernement français ne conteste pas que les dispositions internes nécessaires à la mise en oeuvre de la directive 95/47 n'ont pas été adoptées. Il se borne à confirmer que les procédures de transposition sont en cours et qu'elles devraient aboutir à l'adoption définitive des dispositions législatives décrites dans sa lettre du 8 juin 1999 en réponse à l'avis motivé, ainsi qu'à celle d'une série d'actes de nature réglementaire. En tout état de cause, le
gouvernement français assure qu'il a déployé de très grands efforts pour procéder à une transposition complète de la directive 95/47 dans les plus brefs délais.
9 Le gouvernement français fait remarquer que le délai de neuf mois prévu à l'article 8 de la directive 95/47 en vue de sa transposition par les États membres était particulièrement court, notamment compte tenu du fait que, en vertu de son article 7, cette directive remplace, en l'abrogeant, la directive 92/38/CEE du Conseil, du 11 mai 1992, relative à l'adoption de normes pour la diffusion par satellite de signaux de télévision (JO L 137, p. 17). Selon le gouvernement français, cette situation
n'est pas des plus simples en termes de sécurité juridique et elle rend particulièrement complexe la transposition de la directive en droit interne. Ce gouvernement reconnaît cependant que la durée limitée du délai accordé aux États membres pour la transposition de la directive ne saurait valablement justifier son retard dans l'adoption des mesures nationales de transposition nécessaires.
10 À cet égard, il convient de préciser, d'une part, que, selon une jurisprudence constante, un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l'inobservation des obligations et délais prescrits par une directive (voir, notamment, arrêt du 15 juin 2000, Commission/Grèce, C-470/98, non encore publié au Recueil, point 11) et, d'autre part, que les gouvernements des États membres participent aux travaux préparatoires des directives
et doivent, dès lors, être en mesure d'élaborer les dispositions législatives nécessaires à leur mise en oeuvre dans le délai fixé (voir arrêt du 1er mars 1983, Commission/Belgique, 301/81, Rec. p. 467, point 11).
11 En l'espèce, la transposition de la directive 95/47 n'ayant pas été réalisée dans le délai fixé par celle-ci, il y a lieu de considérer comme fondé le recours introduit par la Commission.
12 Dès lors, il y a lieu de constater que, en ne prenant pas, dans le délai prévu, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 95/47, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
Décisions sur les dépenses
Sur les dépens
13 En vertu de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République française et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Dispositif
Par ces motifs,
LA COUR
(troisième chambre)
déclare et arrête:
1) En ne prenant pas, dans le délai prévu, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 95/47/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à l'utilisation de normes pour la transmission de signaux de télévision, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
2) La République française est condamnée aux dépens.