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14/09/1999 | CJUE | N°C-171/98,

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et Grand-Duché de Luxembourg (C-202/98)., 14/09/1999, C-171/98,


Avis juridique important

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61998J0171

Arrêt de la Cour (première chambre) du 14 septembre 1999. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et Grand-Duché de Luxembourg (C-202/98). - Manquement d'Etat - Règlement (CEE) nº 4055/86 - Libre prestation des services - Trans

ports maritimes. - Affaires jointes C-171/98, C-201/98 et C-202/98.
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Avis juridique important

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61998J0171

Arrêt de la Cour (première chambre) du 14 septembre 1999. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et Grand-Duché de Luxembourg (C-202/98). - Manquement d'Etat - Règlement (CEE) nº 4055/86 - Libre prestation des services - Transports maritimes. - Affaires jointes C-171/98, C-201/98 et C-202/98.
Recueil de jurisprudence 1999 page I-05517

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1 Transports - Transports maritimes - Accord de partage des cargaisons entre un État membre et un pays tiers - Accord futur au sens de l'article 5, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86 - Notion

(Règlement du Conseil n_ 4055/86, art. 3, 4 et 5, § 1)

2 Transports - Transports maritimes - Accord de partage des cargaisons entre un État membre et un pays tiers - Obligation d'adapter un accord existant avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 4055/86 - Délai d'adaptation

(Règlement du Conseil n_ 4055/86, art. 4, § 1)

Sommaire

1 Constitue un accord futur au sens de l'article 5, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers, un accord, conclu entre un État membre et un pays tiers, contenant des arrangements en matière de partage de cargaisons entre les parties contractantes, qui n'est entré en vigueur qu'après le 1er janvier 1987, date d'entrée en vigueur dudit règlement. En
revanche, les accords entrés en vigueur avant cette date constituent des accords soumis aux dispositions des articles 3 et 4 dudit règlement.

2 L'article 4, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers, distingue, en ce qui concerne la détermination de la date à partir de laquelle il convient de procéder à l'adaptation d'un accord de partage des cargaisons conclu entre un État membre et un pays tiers, entre, d'une part, les trafics régis par le code de conduite des conférences maritimes des
Nations unies et, d'autre part, ceux non régis par ce code. Ce n'est qu'en ce qui concerne ces derniers trafics que ledit règlement accorde aux États membres un délai expirant le 1er janvier 1993 pour procéder à l'adaptation prévue. Pour les trafics régis par le code de conduite, aucun délai n'est consenti pour l'adaptation d'un accord.

Parties

Dans les affaires jointes C-171/98, C-201/98 et C-202/98,

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Frank Benyon, conseiller juridique, et Bernard Mongin, membre du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie requérante,

contre

Royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98), représenté par M. Jan Devadder, conseiller général à la direction générale des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade de Belgique, 4, rue des Girondins,

et

Grand-duché de Luxembourg (C-202/98), représenté par M. Nicolas Schmit, conseiller d'État, directeur des relations économiques internationales et de la coopération au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de ce même ministère, 5, rue Notre-Dame,

parties défenderesses,

ayant pour objet de faire constater que, en concluant et en maintenant en vigueur les accords contenant des arrangements en matière de partage des cargaisons avec la République togolaise (C-171/98 et C-202/98) et la république du Mali (C-201/98 et C-202/98) et en ne parvenant pas soit à adapter les accords avec la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire (C-201/98 et C-202/98) de manière à prévoir un accès équitable, libre et non discriminatoire des ressortissants de la Communauté aux
parts de cargaison revenant à la Belgique et au Luxembourg, soit à dénoncer ces accords, le royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et le grand-duché de Luxembourg (C-202/98) ont manqué aux obligations qui leur incombent en vertu du règlement (CEE) n_ 4055/86 du Conseil, du 22 décembre 1986, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (JO L 378, p. 1), et notamment de ses articles 3 et 4,
paragraphe 1, en ce qui concerne la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire, et de son article 5 en ce qui concerne la république du Mali et la République togolaise,

LA COUR

(première chambre),

composée de MM. P. Jann, président de chambre, D. A. O. Edward (rapporteur) et L. Sevón, juges,

avocat général: M. A. La Pergola,

greffier: M. R. Grass,

vu le rapport du juge rapporteur,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 20 avril 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requêtes déposées au greffe de la Cour les 8 (C-171/98) et 25 mai 1998 (C-201/98 et C-202/98), la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 169 du traité CE (devenu article 226 CE), trois recours visant à faire constater que, en concluant et en maintenant en vigueur les accords contenant des arrangements en matière de partage des cargaisons avec la République togolaise (C-171/98 et C-202/98) et la république du Mali (C-201/98 et C-202/98) et en ne parvenant pas
soit à adapter les accords avec la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire (C-201/98 et C-202/98) de manière à prévoir un accès équitable, libre et non discriminatoire des ressortissants de la Communauté aux parts de cargaison revenant à la Belgique et au Luxembourg, soit à dénoncer ces accords, le royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et le grand-duché de Luxembourg (C-202/98) ont manqué aux obligations qui leur incombent en vertu du règlement (CEE) n_ 4055/86 du Conseil, du 22
décembre 1986, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (JO L 378, p. 1), et notamment de ses articles 3 et 4, paragraphe 1, en ce qui concerne la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire, et de son article 5, en ce qui concerne la république du Mali et la République togolaise.

2 Par ordonnance du président de la Cour du 15 juillet 1998, les affaires C-171/98, C-201/98 et C-202/98 ont été jointes aux fins de la procédure écrite et orale et de l'arrêt.

Sur le cadre juridique

3 L'article 1er, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86 dispose:

«La libre prestation des services de transport maritime entre États membres et entre États membres et pays tiers est applicable aux ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire des services.»

4 L'article 2 de ce même règlement prévoit:

«Par dérogation à l'article 1er, les restrictions nationales unilatérales applicables au transport de certaines marchandises dont l'acheminement est en tout ou en partie réservé aux navires battant pavillon national, existant avant le 1er juillet 1986, sont supprimées au plus tard aux dates prévues par le calendrier suivant:

- transport entre États membres effectué par des navires battant pavillon d'un État membre: le 31 décembre 1989,

- transport entre États membres et pays tiers effectué par des navires battant pavillon d'un État membre:le 31 décembre 1991,

- transport entre États membres et entre États membres et pays tiers effectué par d'autres navires:le 1er janvier 1993.»

5 Aux termes de l'article 3 du règlement n_ 4055/86:

«Les arrangements en matière de partage des cargaisons contenus dans les accords bilatéraux existants conclus par les États membres avec des pays tiers sont supprimés progressivement ou adaptés conformément aux dispositions de l'article 4.»

6 L'article 4, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86 dispose:

«Les arrangements existant en matière de partage des cargaisons non supprimés en vertu de l'article 3 sont adaptés conformément à la législation communautaire et notamment:

a) pour ce qui est des trafics régis par le code de conduite des conférences maritimes des Nations unies, ils respectent ce code et les obligations incombant aux États membres aux termes du règlement (CEE) n_ 954/79;

b) pour ce qui est des trafics non régis par le code de conduite des conférences maritimes des Nations unies, les accords sont adaptés dans les meilleurs délais et, en tout état de cause, avant le 1er janvier 1993, de manière à prévoir un accès équitable, libre et non discriminatoire de tous les ressortissants de la Communauté, tels qu'ils sont définis à l'article 1er, aux parts de cargaison revenant aux États membres concernés.»

7 L'article 5, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86 prévoit:

«Les arrangements en matière de partage des cargaisons contenus dans tout accord futur avec des pays tiers ne sont autorisés que dans les circonstances exceptionnelles où les compagnies de ligne maritimes communautaires ne disposeraient pas, dans le cas contraire, d'une possibilité effective de participer au trafic vers le pays tiers concerné et en provenance de celui-ci. Dans ces circonstances, ces arrangements peuvent être autorisés conformément aux dispositions de l'article 6.»

8 Conformément à son article 12, le règlement n_ 4055/86 est entré en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes, soit le 1er janvier 1987.

9 Aux termes de l'article 3, paragraphe 1, de l'accord conclu entre l'Union économique belgo-luxembourgeoise (ci-après l'«UEBL») et la république de Côte d'Ivoire, qui est entré en vigueur le 25 octobre 1979:

«En ce qui concerne le transport de marchandises de toute nature échangées entre les pays des deux Parties par la voie maritime, quel que soit le port d'embarquement ou de débarquement, le régime à appliquer par les Parties contractantes aux navires exploités par leurs armements respectifs reposera sur la clé de répartition 40/40/20, à l'égard des cargaisons en valeur du fret et en volume.»

10 L'article 4, paragraphe 2, de l'accord conclu entre l'UEBL et la république du Sénégal, qui est entré en vigueur le 3 septembre 1984, dispose notamment:

«En ce qui concerne le transport des marchandises échangées entre les pays des deux Parties par la voie maritime (lignes régulières), quel que soit le port d'embarquement, le régime à appliquer par les Parties contractantes aux navires exploités par leurs compagnies maritimes nationales respectives reposera sur la clé de répartition 40/40/20, à l'égard des cargaisons en valeur du fret et en volume».

11 Aux termes de l'article 4, paragraphe 2, de l'accord conclu entre l'UEBL et la république du Mali, qui est entré en vigueur le 26 juin 1987:

«En ce qui concerne le transport des marchandises échangées entre les pays des deux Parties par la voie maritime (trafic de ligne), quel que soit le port d'embarquement ou de débarquement, le régime à appliquer par les Parties contractantes aux navires exploités par leurs compagnies maritimes nationales respectives reposera sur la clé de répartition 40/40/20, à l'égard des cargaisons en valeur du fret et en volume. Au cas où les 20 % qui sont attribués aux pays tiers ne sont pas transportés par
ceux-ci, le restant sera partagé à parts égales en fret et en volume entre les compagnies maritimes nationales de la république du Mali et les compagnies maritimes nationales de l'UEBL.»

12 L'article 4, paragraphe 2, de l'accord conclu entre l'UEBL et la république togolaise, qui a été signé le 19 octobre 1984 et qui est entré en vigueur le 19 octobre 1987, dispose:

«En ce qui concerne le transport de marchandises échangées entre les pays des deux Parties par la voie maritime (lignes régulières), quel que soit le port d'embarquement ou de débarquement, les Parties contractantes s'accordent à appliquer le principe d'une répartition des cargaisons sur la base d'une stricte égalité des droits et suivant les critères de tonnage de l'unité payante et de la valeur du fret, ce dernier critère demeurant prépondérant.

La part du trafic réservé aux navires exploités par leurs compagnies maritimes respectives sera au moins égale à 40 % du trafic global, la part accessible aux armements des pays tiers ne pouvant dépasser 20 %.»

13 Aux termes de l'article 5 de ce dernier accord:

«Sans préjudice de ses engagements sur le plan international, chaque Partie contractante dispose souverainement des droits de trafic qui lui reviennent aux termes du présent accord.»

14 En vertu de l'article 21 de ce même accord:

«Le présent Accord entrera en vigueur dès que chacune des Parties contractantes aura notifié à l'autre Partie, par la voie diplomatique, l'accomplissement des procédures constitutionnelles requises.

Le présent Accord est conclu pour une durée de cinq ans. Il est renouvelable par tacite reconduction chaque fois pour la durée d'un an, sauf dénonciation par la voie diplomatique, par l'une des Parties contractantes, après un préavis de six mois.»

Sur la procédure précontentieuse

15 Par lettre du 10 avril 1991, adressée au gouvernement belge (C-171/98), et par deux lettres du 9 novembre 1995, respectivement adressées aux gouvernements belge (C-201/98) et luxembourgeois (C-202/98), la Commission a constaté que ces deux États membres n'avaient pas respecté les obligations qui leur incombaient en vertu du règlement n_ 4055/86, et notamment de ses articles 3 et 4, paragraphe 1, en ce qui concerne les accords de l'UEBL avec la république du Sénégal et la république de Côte
d'Ivoire, et de son article 5 pour les accords de l'UEBL avec la république du Mali et la République togolaise, en sorte qu'elle les a mis en demeure de présenter leurs observations dans un délai de deux mois.

16 Dans l'affaire C-171/98, la Commission a, par lettre du 11 octobre 1993, adressé un avis motivé au royaume de Belgique et lui a notifié un avis motivé complémentaire le 26 janvier 1996.

17 Dans les affaires C-201/98 et C-202/98, la Commission a notifié, le 16 juin 1997, un avis motivé au royaume de Belgique et, le 29 juillet 1997, au grand-duché de Luxembourg.

18 S'agissant de l'affaire C-171/98, la Commission, en réponse à une lettre du gouvernement belge du 7 juin 1991 dans laquelle ce dernier indiquait que, selon lui, l'accord conclu entre l'UEBL et la République togolaise était un accord existant au sens des articles 3 et 4 du règlement n_ 4055/86, a précisé, dans l'avis motivé complémentaire qu'elle lui a adressé, les raisons pour lesquelles ledit accord devait être considéré comme un accord futur, relevant de l'article 5 du règlement n_ 4055/86. A
cet égard, la Commission a expliqué qu'il résulte de l'article 21 de l'accord entre l'UEBL et la République togolaise que chacune des parties contractantes doit avoir accompli les «procédures constitutionnelles requises» avant d'être effectivement liée par l'accord. Dans ces conditions, la signature de l'accord en 1984 ne faisait qu'authentifier les textes et c'est avec la loi belge du 9 octobre 1987 «portant approbation de l'accord» que le royaume de Belgique a effectivement approuvé l'accord avec
la République togolaise, soit après la date d'entrée en vigueur du règlement n_ 4055/86.

19 Le gouvernement belge, dans sa réponse du 30 avril 1996, a contesté cette position de la Commission en faisant valoir que les dispositions de l'accord avec la République togolaise avaient été, dans les faits, mises en oeuvre avant l'accomplissement des procédures constitutionnelles. Il a également soutenu que:

- la distinction entre les accords existants et les accords futurs est inconnue de la terminologie usuelle du droit des traités,

- à compter de la signature de l'accord, les parties contractantes doivent s'abstenir de tout acte contraire à cet accord,

- les parties à l'accord ont exprimé leur volonté d'être liées par l'accord à compter de sa conclusion,

- la volonté exprimée des parties est l'élément essentiel,

- l'accord a produit des effets dès sa signature sans qu'il soit besoin d'attendre sa ratification.

20 Dans l'affaire C-201/98, le gouvernement belge a indiqué, dans sa réponse du 7 février 1996 à la lettre de mise en demeure de la Commission, que les accords conclus entre l'UEBL et la république du Sénégal, la république de Côte d'Ivoire et la république du Mali étaient en voie d'adaptation. Le 31 octobre 1996, le gouvernement belge a envoyé à la Commission une copie de la lettre du 26 février 1996 du ministère des Affaires étrangères sénégalais marquant l'acceptation par ce pays de l'adaptation
de l'accord bilatéral. Toutefois, aucune indication quant à la substance de cet accord n'a été fournie à la Commission.

21 En ce qui concerne l'affaire C-202/98, le gouvernement luxembourgeois a précisé, dans sa réponse du 14 mars 1996 à la lettre du mise en demeure de la Commission, que le royaume de Belgique avait conclu des accords maritimes au nom de l'UEBL, dans la tradition de la convention UEBL, et que la pratique consistait à ne pas soumettre de tels accords au processus de ratification du grand-duché de Luxembourg ni même à publier ces accords au Mémorial. En outre, le gouvernement luxembourgeois s'est
demandé si le grand-duché de Luxembourg, par opposition à l'UEBL, était en infraction étant donné que l'accord nomme l'administration belge comme autorité compétente, qu'il contient plusieurs dispositions sans conséquences réelles pour lui et qu'il n'est pas prouvé que des compagnies maritimes luxembourgeoises soient impliquées.

22 Constatant que les procédures de modifications n'avaient pas été achevées, la Commission a introduit les présents recours en manquement.

Sur les recours

23 La Commission relève qu'il ressort de l'article 1er du règlement n_ 4055/86 que ce dernier applique la libre prestation des services de transport maritime entre États membres et entre États membres et pays tiers aux ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire des services. Les articles 3 et 5 du règlement n_ 4055/86 couvrent la situation à l'égard des pays tiers, l'article 3 s'appliquant aux accords existants, alors que l'article 5 vise plutôt les
accord futurs.

24 Pour les trafics régis par le code de conduite des conférences maritimes des Nations unies (ci-après le «code de conduite») couverts par l'article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement n_ 4055/86, aucun délai n'est accordé pour l'adaptation d'un accord. En revanche, en ce qui concerne les trafics non régis par ce code de conduite, l'article 4, paragraphe 1, sous b), dudit règlement prévoit un délai jusqu'au 1er janvier 1993 au plus tard. La Commission constate donc que, quelle que soit la
disposition applicable aux différents trafics, à savoir l'article 4, paragraphe 1, sous a), ou l'article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n_ 4055/86, l'adaptation des accords en cause aurait du être effectuée depuis longtemps.

25 Étant donné que les accords conclus par l'UEBL avec la république du Sénégal, la république de Côte d'Ivoire, la république du Mali et la République togolaise contiennent des arrangements en matière de partage des cargaisons qui réservent une partie du trafic aux compagnies maritimes belges ou luxembourgeoises à l'exclusion des compagnies maritimes des autres États membres de la Communauté, la Commission estime qu'ils sont contraires au règlement n_ 4055/86.

26 Dans la mesure où les accords entre l'UEBL et la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire sont respectivement entrés en vigueur les 3 septembre 1984 et 25 octobre 1979, soit avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 4055/86, la Commission estime qu'il s'agit d'accords existants relevant des articles 3 et 4 dudit règlement et que, étant discriminatoires, ces accords devraient être, selon l'article 3 du règlement n_ 4055/86, supprimés ou adaptés conformément aux dispositions de
l'article 4.

27 Les accords conclus entre, d'une part, l'UEBL et, d'autre part, la république du Mali et la République togolaise sont respectivement entrés en vigueur les 26 juin 1987 et 19 octobre 1987. La Commission estime que ces accords sont, au sens de l'article 5 du règlement n_ 4055/86, des «accords futurs», en sorte qu'ils devraient être supprimés ou modifiés selon les termes de cette disposition.

28 Dans le cadre de l'affaire C-171/98, le gouvernement belge indique que, par échanges verbaux, constituant un accord entre l'UEBL et la République togolaise, les articles 4 et 5 de l'accord, qui sont considérés comme contraires à l'article 5, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86, ont été modifiés conformément aux souhaits de la Commission. Toutefois, à la suite d'une erreur matérielle, il s'avérerait indispensable de procéder à de nouveaux échanges verbaux, ce qui devrait être prochainement
réalisé.

29 S'agissant de l'affaire C-201/98, le gouvernement belge relève que, depuis le début de la procédure, il a toujours précisé qu'il n'avait jamais eu l'intention de se dérober à ses obligations en ce qui concerne la mise en oeuvre du règlement n_ 4055/86. Néanmoins, les négociations avec les différents pays auraient pris plus de temps que prévu.

30 Par lettre du 25 novembre 1998, le gouvernement belge a informé la Commission que les obligations qui découlent du règlement n_ 4055/86 sont dorénavant respectées en ce qui concerne les accords conclus avec la république du Mali et la république du Sénégal.

31 Dans l'affaire C-202/98, le gouvernement luxembourgeois se rallie aux observations formulées par le gouvernement belge dans son mémoire en défense dans l'affaire C-201/98.

32 Il convient de préciser, en premier lieu, que dès lors que la loi belge approuvant l'accord entre l'UEBL et la République togolaise a été adoptée le 9 octobre 1987, soit après la date d'entrée en vigueur du règlement n_ 4055/86, cet accord est à qualifier d'accord futur au sens de l'article 5 du règlement n_ 4055/86. De même, dans la mesure où il est entré en vigueur le 26 juin 1987, l'accord conclu entre l'UEBL et la république du Mali constitue également un accord futur. En revanche, les
accords entre l'UEBL et la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire sont respectivement entrés en vigueur les 3 septembre 1984 et 25 octobre 1979, soit avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 4055/86, en sorte qu'ils constituent des accords soumis aux dispositions des articles 3 et 4 dudit règlement.

33 En second lieu, il convient de constater que, pour ce qui concerne la détermination de la date à partir de laquelle il y avait lieu de procéder à l'adaptation d'un accord contesté, l'article 4, paragraphe 1, du règlement n_ 4055/86 distingue entre, d'une part, les trafic régis par le code de conduite et, d'autre part, ceux non régis par ledit code. Ce n'est qu'en ce qui concerne ces derniers trafics que ledit règlement accorde aux États membres un délai expirant le 1er janvier 1993 pour procéder
à l'adaptation prévue. Pour les trafics régis par le code de conduite, aucun délai n'est consenti pour l'adaptation d'un accord.

34 Ce code de conduite a été ratifié par le royaume de Belgique le 30 mars 1988. En revanche, le grand-duché de Luxembourg ne l'a pas ratifié.

35 Toutefois, ainsi que l'a relevé la Commission, quel que soit le délai applicable, l'adaptation ou la suppression des accords en cause dans les présentes affaires aurait dû être effectuée depuis longtemps par le royaume de Belgique et le grand-duché de Luxembourg.

36 Le gouvernement belge ne conteste pas l'existence d'un manquement et déclare qu'il n'a jamais eu l'intention de se dérober à ses obligations en ce qui concerne la mise en oeuvre du règlement n_ 4055/86. En revanche, le grand-duché de Luxembourg conteste l'existence de ce manquement. Cependant, en renvoyant sur le fond aux observations du gouvernement belge, le gouvernement luxembourgeois ne fait que contester le manquement d'un point de vue formel.

37 Dans ces conditions, la modification des accords conclus par l'UEBL avec, respectivement, la république du Mali, la République togolaise, la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire n'ayant pas été réalisée dans les délais prescrits, il y a lieu de considérer comme fondé le recours intenté par la Commission.

38 Dès lors, il convient de constater que, en concluant et en maintenant en vigueur les accords concernant des arrangements en matière de partage des cargaisons avec la République togolaise (C-171/98 et C-202/98) et la république du Mali (C-201/98 et C-202/98) et en ne parvenant pas soit à adapter les accords avec la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire (C-201/98 et C-202/98) de manière à prévoir un accès équitable, libre et non discriminatoire des ressortissants de la Communauté
aux parts de cargaison revenant à la Belgique et au Luxembourg, soit à dénoncer ces accords, le royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et le grand-duché de Luxembourg (C-202/98) ont manqué aux obligations qui leur incombent en vertu du règlement n_ 4055/86, et notamment de ses articles 3 et 4, paragraphe 1, en ce qui concerne la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire, et de son article 5, en ce qui concerne la république du Mali et la République togolaise.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

39 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le royaume de Belgique ayant succombé en ses moyens dans les affaires C-171/98 et C-201/98, il y a lieu de le condamner aux dépens. Le grand-duché de Luxembourg ayant succombé en ses moyens dans l'affaire C-202/98, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR

(première chambre)

déclare et arrête:

40 En concluant et en maintenant en vigueur les accords contenant des arrangements en matière de partage des cargaisons avec la République togolaise (C-171/98 et C-202/98) et la république du Mali (C-201/98 et C-202/98) et en ne parvenant pas soit à adapter les accords avec la république du Sénégal et la république de Côte d'Ivoire (C-201/98 et C-202/98) de manière à prévoir un accès équitable, libre et non discriminatoire des ressortissants de la Communauté aux parts de cargaison revenant à la
Belgique et au Luxembourg, soit à dénoncer ces accords, le royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et le grand-duché de Luxembourg (C-202/98) ont manqué aux obligations qui leur incombent en vertu du règlement (CEE) n_ 4055/86 du Conseil, du 22 décembre 1986, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers, et notamment de ses articles 3 et 4, paragraphe 1, en ce qui concerne la république du
Sénégal et la république de Côte d'Ivoire, et de son article 5, en ce qui concerne la république du Mali et la République togolaise.

41 Dans les affaires C-171/98 et C-201/98, le royaume de Belgique est condamné aux dépens et, dans l'affaire C-202/98, le grand-duché de Luxembourg est condamné aux dépens.


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : C-171/98,
Date de la décision : 14/09/1999
Type de recours : Recours en constatation de manquement - fondé

Analyses

Manquement d'Etat - Règlement (CEE) nº 4055/86 - Libre prestation des services - Transports maritimes.

Transports

Libre prestation des services


Parties
Demandeurs : Commission des Communautés européennes
Défendeurs : Royaume de Belgique (C-171/98 et C-201/98) et Grand-Duché de Luxembourg (C-202/98).

Composition du Tribunal
Avocat général : La Pergola
Rapporteur ?: Edward

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1999:412

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