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06/06/1996 | CJUE | N°C-198/94

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, République italienne contre Commission des Communautés européennes., 06/06/1996, C-198/94


Avis juridique important

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61994J0198

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 6 juin 1996. - République italienne contre Commission des Communautés européennes. - Apurement des comptes FEOGA - Exercice 1991. - Affaire C-198/94.
Recueil de jurisprudence 1996 page I-02797

Sommaire
Parties
Mo

tifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

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Avis juridique important

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61994J0198

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 6 juin 1996. - République italienne contre Commission des Communautés européennes. - Apurement des comptes FEOGA - Exercice 1991. - Affaire C-198/94.
Recueil de jurisprudence 1996 page I-02797

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1. Agriculture ° Politique agricole commune ° Financement par le FEOGA ° Procédure d' apurement des comptes ° Champ d' application ° Dépenses effectuées par un État membre au titre d' interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles ° Action d' urgence pour la fourniture de produits agricoles destinés à la population de l' Union soviétique ° Inclusion

(Règlements du Conseil n s 729/70 et 598/91)

2. Agriculture ° FEOGA ° Apurement des comptes ° Refus de prise en charge de dépenses découlant d' irrégularités dans l' application de la réglementation communautaire ° Contestation par l' État membre concerné ° Charge de la preuve

(Règlements du Conseil n s 729/70 et 598/91)

Sommaire

1. Le règlement n 598/91, relatif à une action d' urgence pour la fourniture de produits agricoles destinés à la population de l' Union soviétique, étant fondé sur l' article 43 du traité et l' action qu' il envisage devant être réalisée en priorité par l' écoulement des produits agricoles stockés à la suite de mesures d' intervention, ce qui est considéré comme pouvant contribuer à la régularisation des marchés agricoles, ladite action entre dans le champ d' application du règlement n 729/70,
relatif au financement de la politique agricole commune, de sorte que les dépenses effectuées par un État membre à ce titre font l' objet d' une procédure d' apurement des comptes. Dans le cadre de cette procédure, il est décidé de l' imputation des charges soit au budget communautaire, soit à l' État membre concerné, selon qu' elles correspondent ou non à des dépenses entreprises "selon les règles communautaires".

2. Lorsque la Commission refuse de mettre à la charge du FEOGA certaines dépenses, au motif qu' elles ont été provoquées par des infractions à la réglementation communautaire imputables à un État membre, il appartient à cet État de démontrer que les conditions sont réunies pour obtenir le financement refusé. Cette même charge de la preuve pèse sur l' État membre dont la Commission estime, sur la base des résultats probants d' analyses d' échantillons et d' une inspection des établissements de
production, qu' il n' a pas satisfait à l' obligation de vérifier de manière appropriée, avant de libérer la caution de livraison et de verser au producteur le montant indiqué dans son offre, la qualité de la viande en conserve livrée dans le cadre de l' action d' urgence pour la fourniture de produits agricoles destinés à la population de l' Union soviétique mise en place par le règlement n 598/91.

Parties

Dans l' affaire C-198/94,

République italienne, représentée par M. Umberto Leanza, chef du service du contentieux diplomatique du ministère des Affaires étrangères, en qualité d' agent, assisté de M. Maurizio Fiorilli, avvocato dello Stato, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l' ambassade d' Italie, 5, rue Marie-Adélaïde,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Eugenio de March, conseiller juridique, en qualité d' agent, assisté de Me Alberto Dal Ferro, avocat au barreau de Vicence, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l' annulation de la décision C(94) 1011 final de la Commission, du 29 avril 1994, relative à l' apurement des comptes de l' Italie au titre de certaines dépenses financées par le Fonds européen d' orientation et de garantie agricole (FEOGA), section "garantie", pour l' exercice 1991,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de MM. D. A. O. Edward, président de chambre, J.-P. Puissochet, J. C. Moitinho de Almeida, C. Gulmann (rapporteur) et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: M. H. A. Ruehl, administrateur principal,

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 18 janvier 1996,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 29 février 1996,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 7 juillet 1994, la République italienne a demandé, conformément à l' article 173 du traité CE, l' annulation de la décision C(94) 1011 final de la Commission, du 29 avril 1994, relative à l' apurement des comptes de l' Italie au titre de certaines dépenses financées par le Fonds européen d' orientation et de garantie agricole (FEOGA), section "garantie", pour l' exercice 1991, en ce qu' elle exclut la somme de 18 934 858 259 LIT du financement
communautaire. Cette décision a été publiée, sous le numéro 94/281/CE, au Journal officiel des Communautés européennes, L 120, p. 59.

La réglementation applicable

2 Le règlement (CEE) n 598/91 du Conseil, du 5 mars 1991, relatif à une action d' urgence pour la fourniture de produits agricoles destinés à la population de l' Union soviétique (JO L 67, p. 19), dispose en son article 2 que, pour la mise en oeuvre de l' action, la Communauté cède gratuitement à l' Union soviétique des produits agricoles disponibles à la suite d' une mesure d' intervention. La fourniture est prise en charge financièrement par la Communauté et attribuée par voie d' adjudication. Les
frais de transport sont supportés par la Communauté, pour autant que le pays bénéficiaire de l' action ne prenne pas lui-même en charge dans la Communauté les produits.

3 L' article 5 de ce règlement charge la Commission de l' exécution de l' action. Conformément à la procédure prévue au paragraphe 2 de cet article, cette institution a, le 11 juin 1991, arrêté le règlement (CEE) n 1582/91, fixant certaines modalités d' application du règlement (CEE) n 598/91 (JO L 147, p. 20).

4 Aux termes de l' article 1er du règlement n 1582/91, une procédure d' adjudication est engagée pour la fourniture de conserves de viande bovine d' intervention.

5 Selon l' article 2 de ce règlement, la fourniture comprend, d' une part, la transformation et le conditionnement de cette viande et, d' autre part, la livraison effective des conserves de viande à l' organisation désignée par la Commission pour effectuer le transport de l' aide alimentaire jusqu' à sa destination.

6 L' article 3, paragraphe 2, prévoit que les soumissionnaires font leur offre par écrit aux organismes d' intervention nationaux.

7 Selon l' article 4, les organismes d' intervention transmettent à la Commission les offres présentées. Sur la base des offres reçues, cette dernière décide ou de fixer un montant maximal des coûts ou de ne pas donner suite à l' adjudication. Si le montant maximal des coûts est fixé, les offres ne dépassant pas ce montant sont acceptées. Dans les trois jours ouvrables suivant la date à laquelle la décision de la Commission a été notifiée aux États membres, l' organisme d' intervention intéressé
informe tous les soumissionnaires de cette décision. Si une offre est acceptée, le contrat est réputé conclu à la date de la notification adressée par l' organisme d' intervention à l' adjudicataire.

8 L' adjudicataire doit, selon l' article 8, veiller à ce que les conserves de viande produites soient placées et conservées en entrepôt sous forme de lots facilement identifiables.

9 L' article 9 prévoit que les organismes d' intervention sont responsables de la surveillance de tous les mouvements et opérations relatifs aux viandes bovines en cause jusqu' au moment où les conserves de viande sont prises en charge par le transporteur. La surveillance doit comprendre, premièrement, un contrôle physique permanent pour vérifier que toutes les viandes prises en charge sont utilisées pour la fabrication de conserves de viande bovine conformément aux spécifications de l' annexe I et,
deuxièmement, en cas de livraison effective, un contrôle physique pour vérifier que les conserves de viande bovine produites et stockées sont entièrement conformes aux conserves de viande bovine à livrer. Pour tout contrat de livraison, il est établi un rapport indiquant les résultats de l' opération de surveillance. Si ceux-ci sont considérés comme satisfaisants par le fonctionnaire responsable, ce dernier établit le certificat approprié à l' intention de l' adjudicataire.

10 Aux termes de l' article 10, paragraphe 2, toutes les conserves sont livrées au transporteur contre remise du certificat de prise en charge.

11 L' article 11 prévoit que, lorsque la demande de paiement est présentée, accompagnée des certificats de prise en charge et de conformité, l' organisme d' intervention considéré verse immédiatement à l' adjudicataire le montant indiqué dans son offre.

12 La caution de livraison, constituée auprès de l' organisme d' intervention, est, selon l' article 12, libérée immédiatement après que l' adjudicataire a transmis à l' organisme d' intervention les deux certificats précités.

13 Le règlement (CEE) n 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), prévoit, en ses articles 2 et 3, que seules les dépenses effectuées en conformité avec les règles communautaires dans le cadre de l' organisation commune des marchés agricoles sont prises en charge par le FEOGA.

Le litige

14 A la suite d' une procédure d' adjudication engagée en application du règlement n 1582/91, certaines sociétés du groupe italien BECA se sont vu adjuger une part du marché de la fourniture de conserves de viande bovine destinées à la population de l' Union soviétique. La viande provenant de l' organisme d' intervention allemand (le BALM) a donc été transformée par certaines sociétés de ce groupe. Un lot important de viande a été notamment transformé et mis en conserve par la société Nuova Irpinia
dans son usine d' Avellino.

15 L' organisme d' intervention italien (l' AIMA) chargé, en application du règlement n 1582/91, du contrôle de la régularité des opérations de transformation et de mise en conserve a confié à l' Institut national des conserves alimentaires (ci-après l' "INCA") la surveillance des opérations relatives aux viandes bovines. L' INCA ayant certifié la conformité des conserves provenant des établissements de la société Nuova Irpinia avec les caractéristiques exigées par le règlement n 1582/91, l' AIMA a
payé à l' entreprise adjudicataire le montant de la transformation des viandes bovines et libéré la caution qui s' y rapportait. La société de transport Wesotra a assuré le transport des conserves aux populations des anciennes républiques soviétiques.

16 Les autorités de certaines de ces républiques ayant contesté la comestibilité des conserves ainsi livrées, la Commission a mené des investigations. Elle a notamment fait procéder à l' inspection des établissements de la société Nuova Irpinia et à l' analyse de plusieurs séries d' échantillons pour vérifier la qualité du produit suspect.

17 Les résultats de ces investigations ont convaincu la Commission que les griefs avancés étaient fondés et que l' origine de la non-comestibilité de la viande en boîtes livrée aux anciennes républiques soviétiques résidait dans l' insuffisance de la stérilisation des conserves pratiquée par la société Nuova Irpinia. En raison du défaut d' identification des lots de ces conserves, la Commission a estimé nécessaire d' organiser le rapatriement de l' ensemble de la production de la société Nuova
Irpinia. Les analyses effectuées sur les conserves après leur rapatriement ont conforté la Commission dans son appréciation des faits.

La décision litigieuse

18 La Commission a donc décidé d' exclure de la prise en charge par le FEOGA un montant de 18 934 858 259 LIT, lequel correspond aux dépenses engagées par ce fonds au titre des conserves de viande produites dans les établissements de la société Nuova Irpinia pour le compte de BECA. Il ressort du dossier que la décision attaquée repose principalement sur les motifs suivants:

° une partie considérable des conserves fabriquées dans les établissements de la société Nuova Irpinia et fournies aux anciennes républiques soviétiques s' est révélée impropre à la consommation humaine;

° la cause de la détérioration d' une partie de la marchandise est à rechercher dans l' insuffisance de l' opération de stérilisation des viandes à transformer;

° la totalité de la marchandise suspecte a dû être retirée et devra être détruite, les conserves affectées n' étant pas, contrairement aux prescriptions communautaires, identifiables par lots;

° il est apparu, lors d' une inspection effectuée par des fonctionnaires de la Commission dans les établissements de la société Nuova Irpinia, que de nombreuses irrégularités avaient été commises durant le cycle de production et que les autorités de contrôle italiennes ne les avaient pas relevées;

° dès lors, les contrôles physiques permanents qui auraient dû être effectués conformément à l' article 9 du règlement n 1582/91 apparaissent comme n' étant ni fiables ni exhaustifs;

° en conséquence, l' organisme d' intervention italien a, à tort, payé les frais de transformation en cause.

Les moyens du recours

19 Selon la République italienne, il résulte de l' analyse des règlements en cause que la fourniture de conserves de viande bovine fait l' objet, à la suite d' une procédure d' adjudication pour le conditionnement de la viande d' intervention, de contrats entre la Commission et les entreprises adjudicataires. A partir de cette analyse sont développés deux moyens interdépendants. Par son premier moyen, la requérante fait valoir en substance que, compte tenu de la nature contractuelle des liens
juridiques unissant BECA et la Commission, celle-ci aurait dû agir selon les règles du droit contractuel. Le second moyen revient à contester les formes et résultats des investigations menées par la Commission.

Sur le premier moyen

20 La République italienne soutient que l' action intentée par la Commission à son encontre est dépourvue de fondement juridique. A cet égard, elle observe que le contrat de fourniture a été conclu entre la Commission et BECA dans le cadre d' une initiative humanitaire qui ne relève pas du domaine de la politique agricole commune, de sorte que les dispositions et principes propres à cette politique ne s' appliquent pas aux rapports juridiques nés dans le cadre de cette initiative. Selon le
gouvernement italien, la Commission était tenue, à la suite du refus des marchandises par les autorités des pays destinataires, de vérifier l' existence et l' origine des vices reprochés, au cours d' un entretien contradictoire avec les sujets intéressés, à savoir l' entreprise qui avait transformé la marchandise, l' organisme d' intervention national et la société chargée du transport. Au cas où la preuve du caractère inconsommable du produit aurait été fournie et où le fournisseur n' aurait pas
démontré qu' il n' en était pas responsable, ce dernier aurait dû restituer les sommes encaissées. Le gouvernement requérant conclut que ce n' est que dans le cas d' une impossibilité vérifiée de récupérer les sommes versées en contrepartie de la fourniture que la Commission aurait pu, le cas échéant, agir en responsabilité contre la République italienne.

21 La Commission rétorque que le règlement n 598/91 s' inscrit entièrement dans le cadre de la politique agricole commune. A cet égard, elle observe que les actions humanitaires, ayant également pour finalité de réduire les stocks d' intervention, font partie intégrante des instruments de la politique agricole. Elle illustre son propos en évoquant notamment les distributions gratuites aux personnes les plus démunies.

22 La Commission, tout en réfutant l' existence d' un lien contractuel entre elle et les entreprises adjudicataires, et notamment BECA, fait également observer que la question de savoir s' il existe un contrat entre la Commission et BECA est sans intérêt en l' espèce, car la décision attaquée a simplement refusé de mettre à la charge du FEOGA les paiements irréguliers effectués par l' AIMA à l' entreprise adjudicataire en raison de la violation de l' obligation de surveillance des marchandises qui
lui incombait en vertu de l' article 9 du règlement n 1582/91.

23 A cet égard, il convient de relever que le règlement n 598/91 est expressément fondé sur l' article 43 du traité CEE, devenu traité CE, relatif à la politique agricole commune. Il ressort des premier et deuxième considérants de ce règlement que l' action envisagée, tout en poursuivant pour l' essentiel un objectif d' aide humanitaire ° raison pour laquelle le législateur communautaire a également fondé ce règlement sur l' article 235 du traité CEE °, devait être réalisée en priorité par l'
écoulement des produits agricoles stockés à la suite de mesures d' intervention. En outre, ce déstockage de produits d' intervention a été considéré comme pouvant contribuer à la régularisation des marchés agricoles. Or, aux termes de l' article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement n 729/70, les interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles sont financées par le FEOGA, section "garantie". D' ailleurs, l' article 3 du règlement n 598/91 renvoie à la procédure prévue à l'
article 13 du règlement n 729/70 pour ce qui concerne la fixation de la valeur à comptabiliser des produits cédés à l' Union soviétique.

24 Il découle de ce qui précède que l' action d' urgence pour la fourniture de produits agricoles destinés à la population de l' Union soviétique, visée par le règlement n 598/91, entre dans le champ d' application du règlement n 729/70. Dès lors, les rapports entre la Commission et les États membres, et, en particulier, la République italienne, relèvent des règles de fonctionnement et de financement du FEOGA, section "garantie".

25 Or, ainsi qu' il ressort tant des articles 2, 3 et 5, paragraphe 2, sous b), du règlement n 729/70 que de la jurisprudence de la Cour (arrêt du 7 février 1979, Pays-Bas/Commission, 11/76, Rec. p. 245), les dépenses effectuées par un État membre au titre d' interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles, tout comme les autres dépenses rentrant dans le cadre de la politique agricole commune, font l' objet d' une procédure d' apurement des comptes lors de laquelle il est décidé de
l' imputation des charges soit au budget communautaire, soit à l' État membre concerné, selon qu' elles correspondent ou non à des dépenses entreprises "selon les règles communautaires".

26 En conséquence, le premier moyen invoqué par le gouvernement italien doit être rejeté.

Sur le second moyen

27 Selon le gouvernement requérant, la Commission a, lorsqu' elle a rassemblé les éléments de preuve relatifs à la qualité défectueuse de la marchandise, violé le principe du contradictoire au détriment de l' organisme d' intervention italien chargé de la surveillance des opérations de transformation du produit.

28 A cet égard, la République italienne observe que la Commission a chargé l' entreprise qui avait effectué le transport des boîtes de conserve dans les territoires de l' ancienne Union soviétique et qui était donc impliquée dans l' action entreprise, voire même responsable contractuellement envers la Commission, de recueillir et de lui expédier les échantillons à faire analyser, sans même que les autorités italiennes soient associées à cette opération.

29 Le gouvernement requérant fait valoir en outre que, de toute manière, l' ensemble des moyens de preuve dont s' est prévalue la Commission pour arrêter la décision litigieuse n' apporte pas la preuve de la responsabilité de l' AIMA dans la non -réalisation de l' objectif de l' action communautaire, ce qui rend illégale la mesure de récupération pour détournement de pouvoir.

30 La Commission conteste ces griefs.

31 En ce qui concerne les prétendus vices de procédure dans l' administration de la preuve, elle souligne que le prélèvement d' échantillons auquel se réfère le gouvernement italien a été effectué par les autorités locales et non par l' entreprise chargée du transport.

32 Quant à la prétendue insuffisance des preuves fournies à l' appui de la décision litigieuse, la Commission soutient qu' il a été suffisamment démontré à la fois que la non-comestibilité de la viande était due à une mauvaise stérilisation lors de la phase de la transformation et que l' obligation de surveillance qui incombait à l' AIMA n' avait pas été remplie conformément à l' article 9 du règlement n 1582/91.

33 S' agissant du prétendu vice de procédure dans l' administration de la preuve, il y a lieu de relever que, même à supposer que les griefs avancés par la République italienne sur ce point soient fondés, le rejet des preuves en cause ne saurait en lui-même entraîner l' annulation de la décision litigieuse. En effet, il ressort du dossier que la Commission a estimé que les résultats des analyses effectuées sur la viande rapatriée en Italie, à l' égard desquelles la République italienne n' excipe d'
aucune irrégularité procédurale, étaient en eux-mêmes suffisants à fournir la preuve nécessaire pour sa décision. Ainsi, même en l' absence des preuves mises en cause par le gouvernement italien, le contenu de la décision n' aurait pas été différent.

34 Quant au second grief invoqué par le gouvernement italien dans le cadre du présent moyen, à savoir l' insuffisance des preuves fondant l' acte attaqué, il importe de constater en premier lieu que, ainsi qu' il résulte du dossier, d' une part, il a été prouvé, notamment par les résultats des analyses effectuées par les laboratoires italiens, qu' une partie des boîtes de viande envoyées dans les anciennes républiques soviétiques était avariée, et que, d' autre part, ces mêmes analyses, dont le
gouvernement requérant n' a pas contesté la régularité procédurale, ont indiqué un défaut de stérilisation comme cause probable des vices de la marchandise.

35 En second lieu, l' inspection, par des agents de la Commission, des établissements où avait été transformée la viande en cause a révélé que des irrégularités avaient été commises lors de la production des conserves incriminées et que les autorités italiennes, auxquelles incombait une obligation de surveillance en vertu de l' article 9 du règlement n 1582/91, ne les avaient pas relevées.

36 A cet égard, il convient de rappeler que, lorsque la Commission refuse de mettre à la charge du FEOGA certaines dépenses, au motif qu' elles ont été provoquées par des infractions à la réglementation communautaire imputables à un État membre, il appartient à celui-ci de démontrer que les conditions sont réunies pour obtenir le financement refusé (arrêt du 20 mai 1992, Grèce/Commission, C-385/89, Rec. p. I-3225, point 30). Cette jurisprudence est également applicable dans un cas comme celui de l'
espèce où la Commission, sur la base des résultats probants d' analyses d' échantillons et d' une inspection des établissements de production, estime que l' État membre en cause n' a pas satisfait à l' obligation de vérifier de manière appropriée la qualité de la viande en conserve avant de libérer la caution de livraison et de verser au producteur le montant indiqué dans son offre.

37 Or, en l' occurrence, la République italienne n' a fourni aucun élément concret et significatif qui permette de mettre en doute l' exactitude des résultats auxquels la Commission est parvenue ou des conséquences qu' elle en a tirées.

38 Dès lors, le second moyen doit également être rejeté.

39 Il découle des développements qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

40 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s' il est conclu en ce sens. La Commission a conclu à la condamnation de la République italienne aux dépens. Celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) La République italienne est condamnée aux dépens.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-198/94
Date de la décision : 06/06/1996
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

Apurement des comptes FEOGA - Exercice 1991.

Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA)

Aide alimentaire

Agriculture et Pêche

Relations extérieures


Parties
Demandeurs : République italienne
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Léger
Rapporteur ?: Gulmann

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1996:223

Source

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