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28/04/1994 | CJUE | N°C-433/92

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung contre Otto Frick GmbH & Co. KG et Vinzenz Murr GmbH., 28/04/1994, C-433/92


Avis juridique important

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61992J0433

Arrêt de la Cour (première chambre) du 28 avril 1994. - Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung contre Otto Frick GmbH & Co. KG et Vinzenz Murr GmbH. - Demandes de décision préjudicielle: Bundesverwaltungsgericht - Allemagne. - Viande bovine - Aide au stockage priv

é - Moment du stockage - Sanction - Viande en l'état - Viande désossée...

Avis juridique important

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61992J0433

Arrêt de la Cour (première chambre) du 28 avril 1994. - Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung contre Otto Frick GmbH & Co. KG et Vinzenz Murr GmbH. - Demandes de décision préjudicielle: Bundesverwaltungsgericht - Allemagne. - Viande bovine - Aide au stockage privé - Moment du stockage - Sanction - Viande en l'état - Viande désossée - Taux forfaitaires de conversion - Application. - Affaires jointes C-433/92 et C-434/92.
Recueil de jurisprudence 1994 page I-01543

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1. Agriculture - Organisation commune des marchés - Viande bovine - Aide au stockage privé - Conditions d' octroi - Mise en stock après la conclusion du contrat de stockage - Début de la mise en stock - Notion

(Règlement de la Commission n 1071/68, art. 3, § 2)

2. Agriculture - Organisation commune des marchés - Viande bovine - Aide au stockage privé - Mise en stock prématurée - Perte du droit à l' aide - Exception commandée par le principe de proportionnalité

(Règlement de la Commission n 1071/68, art. 3, § 2)

3. Agriculture - Organisation commune des marchés - Viande bovine - Aide au stockage privé - Stockage de viande désossée - Quantité à prendre en considération pour déterminer le droit à l' aide - Clé de conversion par rapport à la viande en l' état - Application des taux forfaitaires de rendement

(Règlements de la Commission n 2471/77, art. 4, § 3, et n 1045/78, art. 4, § 2)

Sommaire

1. L' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68, concernant les modalités d' application de l' octroi d' aides au stockage privé dans le secteur de la viande bovine, doit être interprété en ce sens que le stockeur privé ne peut commencer la mise en stock de la quantité convenue qu' après la conclusion du contrat de stockage. L' opération marquant le début de la mise en stock au sens de cette disposition est, préalablement à toute congélation, l' entreposage de la viande à stocker dans la
chambre froide de l' entrepôt frigorifique.

2. L' obligation de ne commencer la mise en stock qu' après la conclusion du contrat de stockage, qui découle des dispositions de l' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68, concernant les modalités d' application de l' octroi d' aides au stockage privé dans le secteur de la viande bovine, constitue une obligation principale dont la violation entraîne en principe la suppression du droit à l' octroi d' une aide pour la quantité de viande concernée. Le principe de proportionnalité s' oppose
cependant à ce que ce droit soit perdu dans une hypothèse où, sans se voir opposer la moindre réserve de leur part, le stockeur privé a informé par téléphone les services de l' organisme d' intervention de son intention de procéder à la mise en stock anticipée de la quantité convenue, et où cette opération n' a pas affecté la possibilité pour cet organisme de pratiquer un contrôle effectif du respect par le stockeur des obligations qui lui incombent.

3. Pour calculer, en cas de désossage, la quantité de viande à prendre en considération quant au droit à l' aide au stockage de viande bovine, il doit être fait application des taux forfaitaires respectivement prévus aux articles 4, paragraphe 3, du règlement n 2471/77, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé de carcasses, demi-carcasses et quartiers compensés, fixée forfaitairement à l' avance, et 4, paragraphe 2, du règlement n 1405/78, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé
de quartiers avant, fixée forfaitairement à l' avance.

Parties

Dans les affaires jointes C-433/92 et C-434/92,

ayant pour objet des demandes adressées à la Cour, en application de l' article 177 du traité CEE, par le Bundesverwaltungsgericht (Allemagne) et tendant à obtenir, dans les litiges pendants devant cette juridiction entre

Bundesanstalt fuer landwirtschaftliche Marktordnung (BALM)

et

Otto Frick GmbH & Co. KG,

Vinzenz Murr GmbH,

une décision à titre préjudiciel sur l' interprétation de l' article 3, paragraphe 2, du règlement (CEE) n 1071/68 de la Commission, du 25 juillet 1968, concernant les modalités d' application de l' octroi d' aides au stockage privé dans le secteur de la viande bovine (JO L 180, p. 19), de l' article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement (CEE) n 2471/77 de la Commission, du 8 novembre 1977, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé de carcasses, demi-carcasses et quartiers compensés, fixée
forfaitairement à l' avance, dans le secteur de la viande bovine (JO L 286, p. 20), et de l' article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement (CEE) n 1405/78 de la Commission, du 22 juin 1978, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé des quartiers avant, fixée forfaitairement à l' avance, dans le secteur de la viande bovine (JO L 170, p. 20),

LA COUR (première chambre),

composée de MM. D. A. O. Edward (rapporteur), président de chambre, R. Joliet et G. C. Rodríguez Iglesias, juges,

avocat général: M. M. Darmon

greffier: M. H. A. Ruehl, administrateur principal

considérant les observations écrites présentées:

- pour Vinzenz Murr GmbH, par Me Andreas Reiners, avocat au barreau de Munich,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Ulrich Woelker, membre du service juridique, en qualité d' agent, assisté de Mes Hans-Juergen Rabe et Georg M. Berrisch, avocats, du cabinet Schoen Nolte Finkelnburg & Clemm, Bruxelles et Hambourg,

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les observations orales de Otto Frick GmbH, représentée par Me Karl-Chr. Scheel, avocat au barreau de Flensburg, de Vinzenz Murr GmbH et de la Commission, à l' audience du 13 janvier 1994,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 24 février 1994,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par ordonnances du 29 octobre 1992, parvenues à la Cour le 24 décembre suivant, le Bundesverwaltungsgericht (Allemagne) a posé, en vertu de l' article 177 du traité CEE, une question préjudicielle dans l' affaire C-433/92, Frick, et cinq questions préjudicielles dans l' affaire C-434/92, Murr, sur l' interprétation de l' article 3, paragraphe 2, du règlement (CEE) n 1071/68 de la Commission, du 25 juillet 1968, concernant les modalités d' application de l' octroi d' aides au stockage privé dans le
secteur de la viande bovine (JO L 180, p. 19), de l' article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement (CEE) n 2471/77 de la Commission, du 8 novembre 1977, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé de carcasses, demi-carcasses et quartiers compensés, fixée forfaitairement à l' avance, dans le secteur de la viande bovine (JO L 286, p. 20), et de l' article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement (CEE) n 1405/78 de la Commission, du 22 juin 1978, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé des
quartiers avant, fixée forfaitairement à l' avance, dans le secteur de la viande bovine (JO L 170, p. 20).

2 Ces questions ont été posées dans le cadre de deux litiges opposant respectivement les sociétés Otto Frick GmbH & Co. KG (ci-après "Frick") et Vinzenz Murr GmbH (ci-après "Murr") à la Bundesanstalt fuer landwirtschaftliche Marktordnung (Office fédéral pour l' organisation du marché agricole, ci-après "BALM") au sujet de demandes de restitution de la totalité d' aides au stockage privé de viande bovine, dirigées par la BALM contre Frick et Murr.

3 Aux termes de l' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68, le contrat d' aide au stockage privé doit prévoir pour le stockeur les obligations suivantes:

"...

a) mettre en stock et stocker, dans les délais prévus, la quantité convenue du produit en cause à son compte et à ses risques propres;

b) prévenir l' organisme d' intervention avec lequel il est engagé du jour et du lieu de l' entreposage ainsi que de la nature et de la quantité des produits à stocker;

c) transmettre incessamment audit organisme d' intervention les documents justificatifs des opérations d' entreposage;

...

e) permettre à l' organisme d' intervention de contrôler à tout moment le respect des obligations considérées".

4 Aux termes de l' article 5, paragraphe 1, du même règlement, "le montant de l' aide est fixé par unité de poids et se réfère au poids constaté avant congélation lors de la mise en stock".

5 Selon l' article 4, paragraphe 1, de chacun des règlements n s 2471/77 et 1405/78:

"Le contractant peut, avant la mise en stock, découper et désosser les produits visés ... en tout ou en partie, à condition que toute la viande résultant de l' opération de désossage ou de découpage soit mise en stock".

6 L' article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement n 2471/77 et l' article 4, paragraphe 3, du règlement n 1405/78 disposent que si la quantité de viande mise en stock est inférieure à 85 % de la quantité pour laquelle le contrat a été conclu, l' aide n' est pas payée, tandis que si la quantité mise en stock est égale ou supérieure à ce pourcentage, sans atteindre la quantité contractuelle, le montant de l' aide est proportionnellement réduit.

7 Afin de tenir compte des différences entre la viande en l' état et la viande désossée, le règlement n 2471/77 dispose, dans son article 4, paragraphe 3:

"Aux fins de l' application du présent règlement, 100 kilogrammes de viandes non désossées ... équivalent à:

a) 77 kilogrammes de viandes désossées, en cas de découpage et désossage de toute la quantité pour laquelle le contrat est conclu ou, en cas de découpage et désossage, du même nombre de quartiers avant et de quartiers arrière;

b) 70 kilogrammes de viandes désossées, en cas de découpage et désossage de tous les quartiers avant".

8 De la même façon, le règlement n 1405/78 (quartiers avant) énonce dans son article 4, paragraphe 2, qu' "aux fins de l' application du présent règlement, 100 kilogrammes de viandes non désossées équivalent à 70 kilogrammes de viandes désossées".

Sur les circonstances de l' affaire C-433/92, Frick

9 Frick avait conclu avec la BALM un accord portant sur l' octroi d' une aide au stockage privé de 30 000 kg de viande bovine, pour une durée de six mois. Elle avait perçu une aide de 41 693,50 DM pour le stockage de 22 157,4 kg de viande désossée obtenus à partir de 29 571 kg avant désossage, soit avec un taux de rendement effectif de 74,93 %. A la suite du déstockage anticipé de 3 220,8 kg, la BALM avait réclamé à Frick le remboursement de la totalité de l' aide accordée, au motif que, du fait du
prélèvement, le seuil de 85 % de la quantité contractuelle à stocker, imposé par le règlement n 1405/78 pour bénéficier d' une telle aide, n' était plus atteint. En effet, selon la BALM, avec un rendement de 74,93 %, les 3 220,8 kg de viande déstockés prématurément équivalaient à 4 298 kg de viande en l' état, de sorte qu' en déduisant cette quantité des 29 571 kg stockés initialement, il restait 25 273 kg de viande en l' état stockés régulièrement jusqu' à la fin de la période contractuelle,
quantité inférieure au seuil de 85 % de la quantité de 30 000 kg convenue.

10 Frick conteste l' application du taux de rendement effectif et prétend que seul le taux forfaitaire prévu par le règlement n 1405/78 devrait être retenu. Si l' on appliquait le taux forfaitaire de 70 %, on constaterait que la quantité de viande encore en stock dépassait le seuil de 85 %, et le montant de l' aide serait donc seulement proportionnellement réduit.

11 Après une réclamation auprès de la BALM demeurée sans résultat, Frick a engagé une action devant le Verwaltungsgericht, qui a annulé, le 18 juillet 1985, les décisions attaquées. Par arrêt du 26 août 1991, le Verwaltungsgerichtshof a partiellement réformé ce jugement, n' annulant les décisions attaquées que dans la mesure où elles demandaient la restitution totale de l' aide et non pas la réduction proportionnelle de celle-ci.

12 La BALM l' ayant saisi en "Revision" afin de l' entendre déclarer que le taux minimal de 85 % doit être calculé par rapport au rendement effectivement atteint lors du désossage, et estimant que l' issue du recours dépendait de l' interprétation qu' il convenait de donner aux dispositions de l' article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement n 1405/78, le Bundesverwaltungsgericht a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

"Pour déterminer, en application de l' article 4, paragraphe 3, du règlement (CEE) n 1405/78 de la Commission, du 22 juin 1978 (JO L 170, p. 20), la quantité à mettre en stock en vertu du contrat, y a-t-il lieu, dans le cas de la viande désossée, de se fonder sur le rendement effectivement atteint ou sur le taux de rendement de 70 % prévu à l' article 4, paragraphe 2, dudit règlement?"

Sur les circonstances de l' affaire C-434/92, Murr

13 Murr avait obtenu une aide au stockage privé pour 40 tonnes de viande bovine à raison de 1 330,90 DM par tonne, pour une durée de six mois. Le jour même de sa demande d' aide, elle avait informé l' antenne locale de la BALM par téléphone qu' elle allait commencer immédiatement à désosser et découper une partie de cette quantité. Par la suite, Murr avait confirmé qu' après avoir désossé et découpé 40 686 kg de viande, elle avait mis en stock 31 367 kg de viande désossée avec un rendement effectif
de 77,09 %. S' étant avisée que 5 175,8 kg de viande désossée avaient été stockés avant la conclusion du contrat, la BALM, considérant que cette mise en stock n' avait pas été autorisée, avait demandé la restitution de la totalité de l' aide. Elle estimait que, en appliquant à la quantité de 5 175,8 kg le taux de rendement effectif de 77,09 % et en déduisant le poids ainsi obtenu, à savoir 6 713 kg de viande en l' état, de la quantité initiale de 40 686 kg, la quantité restant en stock, soit 33 973
kg, était inférieure au seuil de 85 % imposé par le règlement concerné.

14 Murr soutient que le stockage de la viande peut commencer avant la conclusion du contrat et que, dans le cas d' espèce, la BALM avait eu la possibilité de contrôler les opérations de mise en stock aussi efficacement qu' après cette conclusion, puisqu' elle avait été prévenue par téléphone de l' intention de Murr - à laquelle elle ne s' était pas opposée - de découper et de désosser la quantité de viande considérée le jour même de la réception de la demande d' aide. De plus, tout comme Frick, Murr
estime que seul le taux forfaitaire de rendement figurant, en ce qui la concerne, dans le règlement n 2471/77, à savoir 77 %, doit être retenu pour déterminer si le seuil de 85 % est ou non atteint. Si l' on appliquait ce taux forfaitaire, le seuil de 85 % serait ainsi légèrement dépassé.

15 Après une réclamation auprès de la BALM demeurée sans résultat, Murr a engagé une action devant le Verwaltungsgericht, qui l' a accueillie par jugement du 14 mars 1985, pour des motifs tirés des règles procédurales applicables. Par arrêt du 9 septembre 1991, le Verwaltungsgerichtshof a partiellement réformé ce jugement, n' annulant la décision de la BALM que dans la mesure où elle demandait la restitution totale de l' aide et non pas la réduction proportionnelle de celle-ci.

16 La BALM l' ayant saisi d' un recours en "Revision" et Murr l' ayant saisi d' un recours en "Revision" incident, et estimant que l' issue des recours dépendait de l' interprétation qu' il convenait de donner aux dispositions de l' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68 et aux dispositions de l' article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement n 2471/77, le Bundesverwaltungsgericht a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

"1) Faut-il interpréter l' article 3, paragraphe 2, du règlement (CEE) n 1071/68 de la Commission, du 25 juillet 1968 (JO L 180, p. 19), en ce sens que le stockeur privé ne peut commencer la mise en stock de la quantité convenue qu' après la conclusion du contrat de stockage?

2) Dans l' hypothèse d' une réponse affirmative à la première question: quelle est l' opération (la constatation du poids de la viande à stocker avant désossage et découpage, le désossage et le découpage, le nouveau pesage de la viande désossée et découpée, la congélation ou le transfert de la marchandise dans la chambre froide de l' entrepôt frigorifique) qui marque le début de la mise en stock au sens de l' article 3, paragraphe 2, du règlement (CEE) n 1071/68?

3) Dans l' hypothèse d' une réponse affirmative à la première question: l' obligation de ne procéder aux opérations de mise en stock qu' après la conclusion du contrat constitue-t-elle une obligation contractuelle tellement importante (obligation principale) que sa violation entraîne la suppression du droit à l' octroi d' une aide pour la quantité de viande en question, ou s' agit-il d' une obligation secondaire, à caractère essentiellement administratif, dont la violation ne justifie pas une
sanction aussi grave?

4) Dans l' hypothèse d' une réponse affirmative, dans son principe, à la troisième question: le droit à l' octroi d' une aide est-il également perdu lorsque la mise en stock anticipée n' a commencé que le jour où la demande du stockeur privé en vue de l' octroi d' une aide a été reçue par l' administration compétente et alors que, le même jour, le stockeur a informé par téléphone l' antenne locale de cette administration de la mise en stock projetée sans que ladite antenne ait formulé des réserves?
Le fait que la congélation de la viande est finalement intervenue avant ou seulement après la conclusion du contrat a-t-il de l' importance dans ce contexte?

5) Pour déterminer la quantité pour laquelle le contrat a été conclu au sens de l' article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement (CEE) n 2471/77 de la Commission, du 8 novembre 1977 (JO L 286, p. 20), faut-il, dans le cas de la viande désossée, se fonder sur le rendement effectivement atteint ou sur les taux de rendement prévus à l' article 4, paragraphe 3, dudit règlement?"

Sur la jonction des affaires C-433/92 et C-434/92

17 La question unique posée dans l' affaire C-433/92 étant analogue à la cinquième question posée dans l' affaire C-434/92, le président de la Cour, par ordonnance du 25 novembre 1993, a ordonné la jonction des deux affaires aux fins de la procédure orale et de l' arrêt, conformément à l' article 43 du règlement de procédure.

Sur les questions particulières à l' affaire C-434/92, Murr

Première question

18 Par sa première question, le Bundesverwaltungsgericht demande si la mise en stock de la quantité convenue ne peut commencer qu' après la conclusion du contrat de stockage.

19 Comme l' avocat général l' a souligné dans ses conclusions du 24 février 1994, le règlement n 1071/68 ne comportant pas de précision à cet égard, une lecture combinée des dispositions de l' article 3, paragraphe 2, sous b), c) et e), conduit à considérer que la mise en stock doit avoir lieu après la conclusion du contrat. En effet, si la mise en stock a lieu avant la conclusion du contrat, le contrôle ne peut se faire qu' a posteriori, au risque d' être affecté dans sa fiabilité.

20 Il y a donc lieu de répondre à la première question que l' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68 doit être interprété en ce sens que le stockeur privé ne peut commencer la mise en stock de la quantité convenue qu' après la conclusion du contrat de stockage.

Deuxième question

21 Par sa deuxième question, le juge a quo demande quelle est l' opération marquant le début de la mise en stock au sens de l' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68.

22 Il résulte de l' article 5, paragraphe 1, du règlement n 1071/68, que la mise en stock a lieu après le pesage et avant la congélation. Cette solution permet à l' organisme d' intervention de procéder à tout contrôle utile.

23 Il y a donc lieu de répondre à la deuxième question que l' opération marquant le début de la mise en stock au sens de l' article 3, paragraphe 2, du règlement n 1071/68 est, préalablement à toute congélation, l' entreposage de la viande à stocker dans la chambre froide de l' entrepôt frigorifique.

Troisième question

24 La troisième question posée par le juge a quo vise à déterminer si le contractant qui a stocké un lot avant la conclusion du contrat perd tout droit à une aide au titre de ce lot et, partant, si l' obligation de stocker la viande seulement après la conclusion du contrat est une obligation principale dont la violation peut entraîner la perte du droit à une aide, ou bien simplement une obligation secondaire, à caractère essentiellement administratif, qui ne justifie pas une telle sanction.

25 Il y a lieu de relever que le stockage doit s' effectuer dans le respect de certaines conditions propres à en assurer l' efficacité et à permettre à l' organisme d' intervention d' exercer son contrôle et de prévenir les irrégularités et fraudes.

26 Il y a donc lieu de répondre à la troisième question que l' obligation de ne commencer la mise en stock qu' après la conclusion du contrat de stockage constitue une obligation principale dont la violation entraîne en principe la suppression du droit à l' octroi d' une aide pour la quantité de viande concernée.

Quatrième question

27 Compte tenu de la réponse donnée à la troisième question, le juge a quo demande si la suppression du droit à l' octroi d' une aide est encourue même dans l' hypothèse où l' administration a eu la possibilité de contrôler la mise en stock aussi efficacement que si elle avait eu lieu régulièrement, après la conclusion du contrat de stockage.

28 Tant le Bundesverwaltungsgericht, que la Commission et Murr, sont d' accord sur le fait - dont l' appréciation souveraine appartient au juge national - que dans la présente affaire, Murr ayant communiqué ses intentions à l' antenne locale de la BALM, celle-ci avait la possibilité soit de contrôler la mise en stock proposée, aussi efficacement qu' elle aurait pu le faire après la conclusion du contrat de stockage, soit de s' opposer à l' entreposage anticipé, ce qu' elle n' a pas fait.

29 Dans ces conditions, le refus de toute aide, au motif qu' une faible proportion de la viande avait été mise en stock avant la conclusion formelle du contrat, n' apparaît pas comme justifié par rapport aux objectifs relevés au point 25 ci-dessus et serait donc disproportionné.

30 Il convient donc de répondre à la quatrième question que le droit à une aide au stockage de viande n' est pas perdu lorsque, sans se voir opposer la moindre réserve de leur part, le stockeur privé a informé par téléphone les services de l' organisme d' intervention de son intention de procéder à la mise en stock anticipée de la quantité convenue, et que cette opération n' a pas affecté la possibilité pour cet organisme de pratiquer un contrôle effectif du respect par le stockeur des obligations
qui lui incombent.

Sur la question commune aux deux affaires

31 Par la question unique dans l' affaire C-433/92, Frick, et la cinquième question dans l' affaire C-434/92, Murr, il est demandé à la Cour de préciser la clé de conversion - taux effectif ou taux forfaitaire - à retenir dans le cas de la viande désossée, afin de déterminer la quantité minimale à stocker pour bénéficier de l' aide.

32 S' appuyant sur l' article 4, paragraphe 1, des règlements n s 2471/77 et 1405/78, selon lequel le stockeur doit mettre en stock toute la viande résultant effectivement de l' opération de désossage et de découpage, la Commission considère qu' il faut appliquer le taux de rendement effectif obtenu lors du désossage et du découpage.

33 Il y a lieu cependant de relever que les articles 4, respectivement paragraphes 3 et 2, des règlements n s 2471/77 et 1405/78 déterminent une clé de conversion "aux fins de l' application du présent règlement ..." sans l' assortir d' aucune exception.

34 L' application du taux de rendement effectivement atteint lors du désossage ou du découpage de la viande n' est prévue par aucune disposition des règlements.

35 Si l' article 4, paragraphe 1, des règlements n s 2471/77 et 1405/78 impose une obligation de stocker la totalité de la viande résultant de ces opérations, il n' en reste pas moins vrai qu' aux termes de l' article 5, paragraphe 1, du règlement n 1071/68, qui fixe les modalités d' application de l' octroi de l' aide, le montant de celle-ci est fixé uniquement en fonction du poids constaté avant congélation lors de la mise en stock.

36 L' article 4, paragraphe 1, des règlements n s 2471/77 et 1405/78 ne peut donc être interprété comme introduisant une exception implicite au principe énoncé aux articles 4, respectivement paragraphes 3 et 2, desdits règlements concernant la clé de conversion.

37 Il y a donc lieu de répondre à cette question que pour calculer, en cas de désossage, la quantité de viande à prendre en considération quant au droit à l' aide au stockage, il doit être fait application des taux forfaitaires respectivement prévus aux articles 4, paragraphe 3, du règlement n 2471/77 et 4, paragraphe 2, du règlement n 1405/78.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

38 Les frais exposés par la Commission des Communautés européennes, qui a soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l' objet d' un remboursement. La procédure revêtant, à l' égard des parties au principal, le caractère d' un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (première chambre),

statuant sur les questions à elle soumises par le Bundesverwaltungsgericht, par ordonnances du 29 octobre 1992, dit pour droit:

1) L' article 3, paragraphe 2, du règlement (CEE) n 1071/68 de la Commission, du 25 juillet 1968, concernant les modalités d' application de l' octroi d' aides au stockage privé dans le secteur de la viande bovine, doit être interprété en ce sens que le stockeur privé ne peut commencer la mise en stock de la quantité convenue qu' après la conclusion du contrat de stockage.

2) L' opération marquant le début de la mise en stock au sens de cette disposition est, préalablement à toute congélation, l' entreposage de la viande à stocker dans la chambre froide de l' entrepôt frigorifique.

3) L' obligation de ne commencer la mise en stock qu' après la conclusion du contrat de stockage constitue une obligation principale dont la violation entraîne en principe la suppression du droit à l' octroi d' une aide pour la quantité de viande concernée.

4) Ce droit n' est cependant pas perdu lorsque, sans se voir opposer la moindre réserve de leur part, le stockeur privé a informé par téléphone les services de l' organisme d' intervention de son intention de procéder à la mise en stock anticipée de la quantité convenue, et que cette opération n' a pas affecté la possibilité pour cet organisme de pratiquer un contrôle effectif du respect par le stockeur des obligations qui lui incombent.

5) Pour calculer, en cas de désossage, la quantité de viande à prendre en considération quant au droit à l' aide au stockage, il doit être fait application des taux forfaitaires respectivement prévus aux articles 4, paragraphe 3, du règlement (CEE) n 2471/77 de la Commission, du 8 novembre 1977, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé de carcasses, demi-carcasses et quartiers compensés, fixée forfaitairement à l' avance, dans le secteur de la viande bovine, et 4, paragraphe 2, du règlement
(CEE) n 1405/78 de la Commission, du 22 juin 1978, prévoyant l' octroi d' une aide au stockage privé de quartiers avant, fixée forfaitairement à l' avance, dans le secteur de la viande bovine.


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : C-433/92
Date de la décision : 28/04/1994
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demandes de décision préjudicielle: Bundesverwaltungsgericht - Allemagne.

Viande bovine - Aide au stockage privé - Moment du stockage - Sanction - Viande en l'état - Viande désossée - Taux forfaitaires de conversion - Application.

Viande bovine

Agriculture et Pêche


Parties
Demandeurs : Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung
Défendeurs : Otto Frick GmbH & Co. KG et Vinzenz Murr GmbH.

Composition du Tribunal
Avocat général : Darmon
Rapporteur ?: Edward

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1994:176

Source

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