CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. ALAIN DUTHEILLET DE LAMOTHE,
PRÉSENTÉES LE 12 OCTOBRE 1971
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
En 1970, la république fédérale d'Allemagne, pour des raisons diverses et qui sont sans intérêt pour l'intelligence de la présente affaire, prohibait l'importation sur son territoire de champignons originaires de Chine populaire.
Cette prohibition était facile à faire respecter lorsque l'importateur allemand voulait procéder à une importation directe de Chine populaire ou d'un pays tiers en Allemagne, à une importation «en droiture», pour employer le jargon usuel en la matière.
En revanche, le problème était beaucoup plus délicat lorsque l'importateur désirait acheter des champignons chinois mis en libre pratique dans l'un des pays de la Communauté.
En effet, depuis l'intervention du règlement no 865/68 du 28 juin 1968, les autorités allemandes étaient normalement tenues de délivrer automatiquement et dans des délais très brefs la licence demandée puisque la marchandise était en libre pratique dans un État membre.
Elles ne pouvaient la refuser que si elles avaient préalablement reçu de la Commission l'autorisation prévue à l'article 115, alinéa 1, du traité, autorisation qui permet dans des cas exceptionnels, et notamment en cas de détournement de trafic, à un État membre d'exclure du traitement communautaire certains produits originaires de pays tiers mais déjà en libre pratique dans un ou plusieurs des autres États membres.
Mais une telle autorisation, en ce qui concerne les champignons originaires de Chine populaire, ne fut demandée par la République fédérale allemande que le 11 septembre 1970 et ne fut donnée par la Commission que le 15 septembre.
C'est cette situation qui est à l'origine du présent litige.
Le 4 septembre 1970, la firme Bock demanda une licence d'importation pour un lot de champignons chinois d'une valeur de 150000 DM pour lequel elle avait une offre ferme et qui, d'après ses dires, était en libre pratique aux Pays-Bas.
Le 9 septembre 1970, elle rappela cette demande à l'organisme allemand compétent, c'est-à-dire l'Office fédéral pour l'alimentation et la sylviculture.
Le 11 septembre enfin, elle réitéra sa demande par télex.
Ce télex déclencha une vive activité de la part des services allemands. Le même jour en effet :
1. La représentation allemande à Bruxelles, alertée par le ministère allemand de l'agriculture, informa par télex les services de la Commission que les autorités allemandes étaient saisies d'une demande de licence pour l'importation d'un lot de champignons chinois d'une valeur de 125000 DM et que le gouvernement fédéral demandait à la Commission d'autoriser d'urgence l'Allemagne à exclure du traitement communautaire de telles importations «y compris (nous citons) l'importation envisagée» dans la
demande susvisée.
2. L'Office allemand répondit à la firme Bock qu'il avait résolu de rejeter sa demande de licence dès que (nous citons) «la Commission aura donné son autorisation conformément à l'article 115 du traité».
La firme Bock fit de nouvelles démarches qui demeurèrent vaines.
Le 15 septembre, la Commission prit la décision demandée autorisant l'Allemagne à exclure du traitement communautaire les champignons originaires de Chine populaire en libre pratique au Benelux. Cette décision comportait une phrase sur laquelle nous reviendrons tout à l'heure et qui concernait les demandes de licence «actuellement et régulièrement en instance auprès de l'Administration allemande».
Se fondant sur cette autorisation, l'Office allemand confirma expressément à la firme Bock, le 21 septembre, le rejet de sa demande.
La firme Bock saisit alors les juridictions administratives allemandes d'une action tendant à faire constater l'illégalité du comportement de l'Office.
En même temps, elle vous a saisis de la présente requête qui tend à l'annulation de la disposition de la décision de la Commission en date du 15 septembre 1970 précisant que «l'autorisation d'exclusion du traitement communautaire vise également les importations de ces produits pour lesquelles des demandes de licence sont actuellement et régulièrement en instance».
I
La première question que pose cette affaire est une question de recevabilité.
A — La Commission, par une argumentation fort subtile, soutient à titre principal que la firme Bock n'était en aucune manière concernée par la disposition qu'elle attaque et ne peut donc se prévaloir des dispositions de l'article 173, paragraphe 2, du traité.
Le raisonnement de la Commission est le suivant.
Lorsque ses services ont fait état, dans la disposition incriminée, des demandes actuellement et régulièrement en instance, ils n'ont pas entendu viser par l'expression «régulièrement» la régularité du dépôt de la demande, c'est-à-dire la forme, les pièces justificatives etc …, mais la régularité du comportement de l'Administration nationale qui avait maintenu en instance ladite demande. On aurait voulu, par cette disposition, éviter de légitimer des retards dans la délivrance des licences,
retards qui, contraires à la réglementation communautaire, avaient de ce fait un caractère illicite.
Or, poursuit la Commission, si l'on interprète dans ce sens la décision attaquée, il est visible qu'elle ne concerne pas la requérante.
Le règlement no 865/68 applicable aux produits en cause interdit toute restriction quantitative dans le commerce entre États membres et une directive de la Commission du 22 décembre 1969 assimile à une restriction quantitative le fait de n'accorder les licences demandées que dans des délais anormalement longs.
Or en l'espèce, dit la Commission, l'Office allemand a méconnu cette obligation de promptitude puisque, saisi au plus tard le 7 septembre d'une demande dont on lui avait signalé l'urgence, il n'avait pas encore statué le 11 lorsque le gouvernement allemand a saisi la Commission. Ainsi, pour la défenderesse, la demande de la firme Bock aurait été irrégulièrement gardée en instance par l'Office allemand lorsqu'est intervenue la décision du 15 septembre, et dès lors la disposition de cette
décision, visant les demandes régulièrement en instance, lui aurait été inapplicable et ne la concernerait donc pas.
Cette argumentation est à bien des égards séduisante.
Elle se trouve même renforcée en un certain sens par le fait qu'un tribunal allemand a déjà expressément censuré le comportement de l'Office en relevant qu'il avait commis une illégalité en ne délivrant pas la licence demandée à une date très nettement antérieure à l'intervention de la décision de la Commission. Toutefois, nous avons quelques scrupules à vous proposer d'accueillir une fin de non-recevoir fondée sur une telle interprétation de la disposition attaquée, et cela pour plusieurs
raisons.
1. Le jugement du tribunal administratif allemand se fonde non sur une violation de textes communautaires, mais sur la violation d'obligations résultant uniquement du droit interne allemand; et il est donc bien difficile d'en tirer un argument décisif pour l'interprétation de l'acte communautaire attaqué.
2. Il est exact que le texte, aussi bien en français qu'en allemand, est ambigu.
S'il prévoyait qu'il s'applique «aux demandes régulièrement déposées et actuellement en instance» auprès des administrations allemandes, la thèse de la Commission serait certainement erronée.
S'il disposait au contraire qu'il s'applique aux demandes «déposées et actuellement régulièrement en instance» auprès des administrations allemandes compétentes, la thèse de la Commission serait certainement fondée.
Mais la difficulté vient de ce que la formule «qui sont actuellement et régulièrement en instance» peut littéralement avoir aussi bien le sens que lui prête la Commission que celui que lui attribue la requérante, et que lui ont d'ailleurs attribué les autorités allemandes.
3. Toute interprétation littérale étant donc impossible, il faut donc, à notre avis, rechercher le sens de ces dispositions en les rapprochant de la demande à la suite de laquelle elles ont été prises et du contexte général dans lequel le problème s'est posé à cette époque à la Commission.
Un point est certain: le gouvernement allemand avait demandé à la Commission une autorisation au titre de l'article 115, alinéa 1er, du traité destinée non seulement à faire obstacle à des importations futures, mais également à une importation pour laquelle une licence lui avait été demandée.
Le texte de la communication de la représentation permanente allemande est clair.
Nous vous en citons les passages principaux :
«Honneur faire part que gouvernement allemand se trouve en présence demande importation de conserves de champignons … originaires RP Chine en libre pratique aux Pays-Bas pour une valeur de 125000 DM …
Il est donc demandé d'autoriser le gouvernement allemand par procédure d'urgence à exclure du traitement communautaire l'importation de conserves de la position tarifaire 20 02 21 originaires RP Chine provenant de la libre pratique de tous les États membres (il faut en effet s'attendre, de la part du demandeur connu, à d'autres importations par voies détournées), à l'inclusion de l'importation envisagée par la demande d'importation considérée.»
Il y a controverse entre les parties sur un point. La Commission soutient que la demande de licence à laquelle se réfère le télex de la représentation permanente est une demande déposée par la firme Lütjens pour une importation d'un montant de 125000 DM et non la demande de la firme Bock qui concerne 150000 DM.
La requérante affirme que le gouvernement fédéral se réfère non seulement à l'importation envisagée par Lütjens, mais encore à l'importation envisagée par elle-même.
La question est délicate, car s'il semble bien que la seule demande de licence visée avec précision est celle de Lütjens (125000 DM), le gouvernement allemand fait également allusion, comme vous avez pu le remarquer, à d'autres importations prévisibles du même type.
Mais le point est, à notre avis, d'importance mineure pour la solution de la question qui vous est posée aujourd'hui. En effet, un point est certain: la Commission savait parfaitement qu'au moins depuis le 11 septembre, sinon depuis beaucoup plus longtemps, une demande de licence était en instance.
Elle affirme aujourd'hui que le délai imparti aux autorités allemandes pour statuer sur une telle demande était au plus de 4 jours.
Mais, si on la suit sur ce point, cela veut dire que, lorsque la Commission a pris sa décision le 15, elle ne pouvait ignorer que la demande de licence pour laquelle on lui avait demandé une disposition particulière n'était plus, selon sa thèse actuelle, régulièrement en instance devant l'administration allemande.
Si elle avait donc voulu exclure toute demande qui n'était plus régulièrement en instance du champ d'application de sa décision, il lui aurait fallu alors rédiger celle-ci sous une forme négative ou sous une forme restrictive en précisant par exemple : «la présente autorisation est applicable aux importations de ces produits non encore réalisées, sauf lorsque les licences demandées auraient dû être délivrées avant l'intervention de la présente décision», ou toute autre formule du même genre.
Mais ce n'est pas ce qu'elle a fait. La formule qu'elle a employée pouvait être interprétée et a été en fait interprétée, aussi bien par l'Office allemand que par la requérante, comme destinée à «couvrir», si l'on nous permet cette expression, le cas de firmes se trouvant dans la même situation que la firme Bock.
Connaissant, comme vous la connaissez, la bonne foi et la loyauté de la Commission, on ne saurait imaginer qu'elle ait à dessein employé une formule ambiguë destinée, en cas de difficultés contentieuses, à reporter sur les organismes allemands les responsabilités pouvant dériver de l'autorisation demandée.
L'interprétation la plus vraisemblable est donc, à notre avis, que la Commission a voulu, par la disposition attaquée, étendre la portée de l'autorisation qu'elle donnait aux autorités allemandes pour leur permettre d'écarter les demandes qui
— d'une part, étaient régulières en la forme,
— d'autre part, n'avaient encore fait l'objet ni d'une décision d'octroi, ni d'une décision de refus.
Ce n'est, à notre avis, que beaucoup plus tard et lorsque l'affaire a été au stade du contentieux que les services juridiques de la Commission ont cherché à donner à la disposition attaquée une interprétation compatible avec la position prise par leurs collègues d'autres services quant à l'obligation pour les États membres d'accorder en matière d'échanges intracommunautaires les licences demandées dans les délais les plus courts.
Une dernière considération nous paraît déterminante pour vous proposer cette interprétation.
Si les dispositions du droit communautaire indiquaient un délai fixe pour l'octroi, par les autorités nationales, des licences exigées par les importations intracommunautaires, la thèse de la Commission pourrait, peut-être, être admise.
Mais de ces textes il résulte seulement que ces délais ne doivent pas être (nous citons) «excessifs par rapport au déroulement normal des diverses opérations» auxquelles ils s'appliquent.
Il en résulte que, dans le système proposé par la Commission, vous devriez, en cas de recours contre l'une des nombreuses dispositions communautaires ayant le même objet et la même portée que la disposition attaquée, apprécier la recevabilité de la requête
1) en jugeant un problème de fond, celui du caractère excessif ou normal du délai dans lequel l'Administration nationale a statué sur une demande de licence ;
2) en jugeant vous-mêmes ce problème de fond qui apparaît à première vue comme entrant dans la compétence du juge national, sous réserve pour celui-ci de vous demander, par la voie prévue par l'article 177 du traité, les éclaircissements nécessaires.
Pour toutes ces raisons, nous pensons donc que le cas de l'entreprise Bock entrait dans le champ d'application de la disposition attaquée, et que celle-ci, dès lors, la concernait.
B — Si vous l'admettez comme nous, le second problème de recevabilité soulevé par la Commission nous paraît relativement plus simple.
La Commission soutient en effet à titre subsidiaire que, même si l'on admet que la disposition attaquée «concernait» la firme Bock, elle ne la concernait ni directement ni individuellement.
Les circonstances de fait de l'espèce, rapprochées des principes dégagés par votre arrêt Toepfer contre Commission du 1er juillet 1965, Recueil, XI-1965, p. 532, nous conduisent à vous proposer d'écarter cette argumentation.
1. Certes, la disposition attaquée ne faisait qu'autoriser le gouvernement allemand à exclure du traitement communautaire l'importation envisagée. Mais, comme nous vous l'avons dit tout à l'heure en vous citant le télex du gouvernement allemand, cette disposition ayant été prise précisément pour faire obstacle à des importations du même genre et de plus et surtout l'Office allemand compétent ayant indiqué à la firme Bock avant qu'intervienne la décision de la Commission qu'il n'attendait que
cette décision pour rejeter expressément la demande de licence, ce serait à notre avis faire preuve d'un formalisme excessif que d'admettre qu'en réalité ladite disposition ne concernait pas directement la firme Bock.
2. Si cette disposition concernait la firme Bock, elle la concernait, à notre avis, individuellement.
Le tribunal administratif allemand a estimé que seule la firme Bock avait, avant le 15 septembre, une demande de licence d'importation de champignons chinois encore en instance, et a ajouté que ce fait n'était pas contesté.
La Commission et l'organisme allemand affirment qu'il y avait également la firme Lütjens dont nous vous avons parlé à propos du télex de la représentation permanente allemande à la Commission en date du 11 septembre.
Quoi qu'il en soit, le nombre et l'indication de ces importateurs étaient «déterminés et vérifiables».
Or, comme vous l'avez constate dans votre arrêt Toepfer, cette circonstance permet aux intéressés de bénéficier des dispositions de l'article 173, paragraphe 2. Aussi, si l'on admet que la disposition attaquée concernait la firme Bock, seul point à notre avis assez délicat du problème de recevabilité soulevé, on se trouve bien dans le cas d'un acte qui, bien que pris sous l'apparence d'une décision adressée au gouvernement allemand, concerne directement et individuellement la firme Bock dont la
requête est alors recevable.
II
Si le recours est recevable, il nous paraît fondé.
La requérante fait en effet valoir deux moyens de fond: la rétroactivité et la violation du principe de proportionnalité.
Nous aurions eu quelques scrupules à admettre qu'en lui-même le caractère rétroactif qu'a, dans une certaine mesure et en quelque sorte, la disposition attaquée serait suffisant pour motiver l'annulation de ladite disposition.
Les exigences du droit économique ont déjà amené la Cour à dépasser une conception trop étroite du principe de la non-rétroactivité.
Comme nous vous le disions dans l'affaire Rewe Zentrale, ces exigences doivent parfois amener à distinguer entre la rétroactivité «stricto sensu» et une nouvelle situation que certains spécialistes contemporains du droit public appellent «l'application immédiate de dispositions nouvelles à des situations préexistantes».
Mais en tout cas, chaque fois que vous avez jugé légitime ce qui peut paraître comme une certaine atteinte au principe général de la sécurité des situations juridiques, vous avez toujours tenu à souligner que la légitimité de cette atteinte résultait de la nécessité, pour atteindre le but poursuivi, d'enfreindre plus ou moins un principe général du droit.
Vous avez en réalité, par une construction très originale et très intéressante, interprété en quelque sorte le principe de la non-rétroactivité en fonction du principe de proportionnalité.
La ligne de cette jurisprudence nous paraît devoir vous conduire en l'espèce à annuler la disposition attaquée en constatant que l'extension qu'elle prévoit des règles posées pour le futur à des situations préexistantes n'était pas absolument nécessaire pour atteindre le but poursuivi.
Nous sommes d'accord avec la Commission quand elle dit que le danger de détournements de trafic justifie à lui seul que soient prises les mesures prévues par l'article 115 et, sur ce point, la validité des dispositions de la décision de la Commission qui visent uniquement l'avenir nous paraît indiscutable.
Mais le risque que comportait la non-application de ces mesures décidées pour le futur à la demande ou au maximum aux deux demandes de licence en instance devant les autorités allemandes était vraiment trop insignifiant, selon nous, pour qu'il puisse justifier une atteinte même légère au principe de la non-rétroactivité.
Le tribunal administratif allemand a calculé que la licence demandée par la firme Bock représentait 0,8 pour mille des importations annuelles des produits en cause en République fédérale allemande, y compris les importations en provenance de Taiwan-Formose qui, elles, étaient simplement contingentées.
Même si l'on admet, comme la Commission, qu'il faut ajouter à la demande de la firme Bock celle de la firme Lütjens, comme la demande de cette dernière, d'après le prix global que nous connaissons, paraît porter sur des quantités légèrement inférieures ou au plus égales à celles que voulait importer la firme Bock, on en arrive à la conclusion que le tonnage maximum pour lequel des licences étaient en instance à la date considérée concernait au plus 1,5 ou 1,6 pour mille des importations allemandes
du produit dont s'agit.
On est vraiment dans le domaine de «l'infiniment petit».
Dans ces conditions, il nous paraît difficile d'admettre que le souci d'empêcher des opérations d'aussi faible envergure pouvait justifier l'application de dispositions prises pour le futur à des opérations déjà engagées.
Reste alors à examiner un moyen de forme soulevé par la requérante.
Celle-ci soutient en effet que, d'après l'article 115 du traité, la Commission, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'un État membre tendant à ce que soient exclues du traitement communautaire des marchandises en provenance d'un ou de plusieurs autres États membres, doit
adresser à ce ou à ces États une recommandation et que c'est seulement «à défaut» d'effet de cette recommandation que la Commission peut autoriser l'exclusion du traitement communautaire. L'interprétation de l'article 115 du traité faite par la requérante nous paraît correcte.
La procédure prévue nous paraît bien comporter deux phases :
— la phase de la recommandation, puis, si celle-ci ne donne pas les résultats recherchés.
— la phase de l'autorisation d'exclusion du traitement communautaire.
Certes, dans les textes français et italien du traité, la disposition à interpréter n'est pas très claire sur ce point, mais les textes allemand et néerlandais sont beaucoup plus explicites.
Il est également exact qu'en l'espèce aucune recommandation n'a été adressée aux États du Benelux avant qu'intervienne l'autorisation donnée par la Commission à la République fédérale allemande.
Le moyen cependant ne nous paraît pas pouvoir être accueilli pour deux motifs dont le second n'a, à nos yeux, qu'un caractère très subsidiaire.
1. Les règles de procédure instituées par l'article 115 du traité fixent les modalités de rapports entre la Commission et des États membres. Il s'ensuit qu'à notre avis elles n'ont pas d'effet direct, n'engendrent pas de droits pour les particuliers et que ceux-ci sont sans intérêt et dès lors irrecevables à s'en prévaloir.
2. Au surplus et à titre tout à fait subsidiaire, le vice de forme allégué serait en l'espèce, croyons-nous, sans influence sur la régularité de la disposition attaquée.
La Commission en effet vous a expliqué, et nous a personnellement convaincu, que, si elle n'avait pas pris formellement de recommandation, elle était intervenue depuis très longtemps et à maintes reprises auprès des États intéressés sans obtenir aucun résultat et qu'il en aurait été à peu près certainement de même si elle avait pris formellement une recommandation.
Dans ces conditions, l'omission d'une formalité que l'on savait inutile ne constituerait pas, croyons-nous, un vice suffisamment substantiel pour entacher d'irrégularité la disposition attaquée.
Mais celle-ci, comme nous vous l'avons dit tout à l'heure, nous paraît irrégulière pour des motifs non de forme mais de fond.
Nous concluons donc à son annulation et à ce que les dépens soient mis à la charge de la Commission.