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07/09/2022 | BELGIQUE | N°P.22.1111.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 septembre 2022, P.22.1111.F


N° P.22.1111.F
B. V.
condamné mis à la disposition du tribunal de l’application des peines,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Laura Danneau, avocat au barreau de Mons, et Ricardo Bruno, avocat au barreau de Charleroi.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 4 août 2022 par le tribunal de l’application des peines de Mons.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
L’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions r

eçues au greffe le 1er septembre 2022.
A l’audience du 7 septembre 2022, le conseiller Eric ...

N° P.22.1111.F
B. V.
condamné mis à la disposition du tribunal de l’application des peines,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Laura Danneau, avocat au barreau de Mons, et Ricardo Bruno, avocat au barreau de Charleroi.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 4 août 2022 par le tribunal de l’application des peines de Mons.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
L’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions reçues au greffe le 1er septembre 2022.
A l’audience du 7 septembre 2022, le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport et l’avocat général précité a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur l’ensemble du moyen :
1. Le demandeur est un condamné dont la peine d’emprisonnement principale a été assortie d’une peine complémentaire de mise à la disposition du tribunal de l’application des peines pour une période de cinq ans.
Le jugement attaqué révoque la mesure de libération sous surveillance qui lui a été accordée le 3 juin 2021.
2. Le moyen invoque la violation des articles 68, § 3, alinéa 1er, et 95/27, § 3, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine (ci-après, la loi du 17 mai 2006), ainsi que la méconnaissance des principes généraux du droit relatifs au respect des droits de la défense et au respect de la notion de présomption de fait.

En sa première branche, le moyen reproche au jugement de refuser de faire droit à la demande de remise pour raisons médicales que le conseil du demandeur a formulée à l’audience du 28 juillet 2022, alors que, la veille, celui-ci avait communiqué un justificatif médical annonçant une hospitalisation sous anesthésie prévue le lendemain de l’audience, consécutive à un grave accident de la circulation survenu le 11 mars 2022, que son conseil était présent à l’audience pour expliquer l’état de santé du demandeur, et que le tribunal avait déjà accepté à trois reprises de reporter l’examen de la cause, également pour des raisons médicales résultant de cet accident. Le demandeur fait également valoir que, compte tenu de l’importance de la comparution personnelle du condamné devant le tribunal de l’application des peines, en particulier lorsqu’il s’agit d’une demande de révocation, suspension ou révision de la libération sous surveillance, le tribunal aurait à tout le moins dû recueillir des éléments d’information complémentaires. Le demandeur soutient également qu’en ayant refusé la remise au motif qu’aucun certificat médical ne précisait que les sorties étaient interdites ou qu’il était dans l’impossibilité de se déplacer le jour de l’audience, le tribunal de l’application des peines a déduit des conséquences sans liens suffisants avec le justificatif présenté par son conseil.
La seconde branche du moyen soutient qu’il résulte des dispositions légales invoquées que la présence du condamné est requise à l’audience à laquelle le tribunal examine une demande de révocation, suspension ou révision de la libération sous surveillance. Selon le demandeur, ce constat implique que la représentation du condamné mis à disposition est en principe proscrite, y compris lorsque le tribunal examine l’opportunité d’une révocation, suspension ou révision de la libération sous surveillance, et pas seulement dans le cas de l’examen de l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine.
A cet égard, le moyen fait valoir que les juges de l’application des peines n’ont pas pu légalement déduire de l’arrêt n° 35/2009 du 4 mars 2009 de la Cour constitutionnelle que, en dehors du cas où le tribunal examine une demande d’octroi à un condamné d’une modalité d’exécution de la peine, la représentation du condamné par son avocat est admissible. A l’appui de cette affirmation, le demandeur fait valoir, d’abord, que la libération sous surveillance n’est pas, à proprement parler, une modalité d’exécution de la peine, ensuite, que dans l’arrêt précité la Cour constitutionnelle s’est bornée à examiner la question de la représentation du condamné dans le cadre du régime de l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine, et non dans le cas où le ministère public sollicite la révocation de la modalité octroyée, enfin, que le tribunal de l’application des peines, s’il est saisi d’une demande de révocation, a la possibilité de réviser la modalité d’exécution de la peine ou la libération sous surveillance, notamment en modifiant les conditions particulières imposées, ce qui justifie la comparution personnelle du condamné à l’audience.
A titre subsidiaire, le demandeur sollicite de la Cour qu’elle pose à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle suivante :
« L’article 68, § 3, alinéa 1er, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, auquel l’article 95/27, § [3], de ladite loi renvoie dans le cadre de l’examen d’une demande de révocation, de la suspension ou de la révision de la libération sous surveillance, interprété comme faisant interdiction absolue au condamné de pouvoir être représenté à l’audience par son avocat, viole-t-il le principe constitutionnel énoncé aux articles 10 et 11 de la Constitution, contrairement à ce que la Cour constitutionnelle a jugé dans son arrêt n° 35/2009 du 4 mars 2009 s’agissant de l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine, alors même qu’une procédure de révocation, de suspension ou de révision de la libération sous surveillance suppose a priori la comparution personnelle du condamné pour des raisons identiques à celles ayant justifié sa présence lors de l’octroi de la mesure de libération sous surveillance (notamment son accord sur le respect des conditions particulières pouvant, le cas échéant, être actualisées, adaptées ou durcies, dans le cadre d’une procédure de révision) ? ».
3. Le juge apprécie souverainement la nécessité, l’utilité ou l’opportunité de la remise de l’examen d’une cause.
Le jugement attaqué constate que le conseil du demandeur a adressé un courrier au tribunal le 27 juillet 2022, exposant que ce dernier devait se faire hospitaliser en vue d’une opération au genou et qu’il en ferait part à l’audience fixée le lendemain, le cas échéant dans le cadre d’une nouvelle demande de report de l’examen de la cause.
Le tribunal a décidé de ne pas faire droit à la demande de remise que le conseil du demandeur a effectivement formulée à l’audience du 28 juillet 2022, aux motifs qu’« il résulte de l’examen des pièces jointes au courrier précité que [le demandeur] sera admis en hôpital de jour le 29 juillet 2022, tandis qu’aucun certificat médical ne précise que les sorties sont interdites ni qu’il est dans l’incapacité de se déplacer à la date du 28 juillet 2022 ».
Par ces motifs, le jugement constate que le demandeur n’établit pas qu’il lui était interdit de quitter son domicile le jour de l’audience ni que, à cette date, il était dans l’incapacité de se déplacer. En outre, il relève que l’opération annoncée était prévue le lendemain de l’audience, dans le cadre d’une admission en hôpital de jour.
Contrairement à ce que le moyen soutient, le tribunal de l’application des peines a pu considérer, au terme d’une appréciation en fait et sans avoir déduit de ses constatations des conséquences qu’elles ne sauraient justifier, que le demandeur ne se trouvait pas, le 28 juillet 2022, jour de l’audience, dans l’impossibilité de comparaître personnellement.
En tant qu’il soutient que le jugement attaqué viole la notion juridique de présomption de fait, le moyen ne peut être accueilli.
4. En vertu de l’article 95/27, § 3, de la loi du 17 mai 2006, l’article 68, §§ 1er à 4, de cette loi s’applique à l’examen d’une demande du ministère public de révoquer, suspendre ou réviser la libération sous surveillance du condamné mis à la disposition du tribunal de l’application des peines.
L’article 68, § 3, alinéa 1er, de la loi du 17 mai 2006 dispose : « Le juge de l’application des peines ou le tribunal de l’application des peines entend le condamné et son conseil ainsi que le ministère public ».
Ces dispositions ne font pas interdiction au tribunal de l’application des peines d’autoriser le conseil du condamné mis à disposition à le représenter dans le cadre d’une procédure de révocation, suspension ou révision de la libération sous surveillance.
Dans la mesure où il est fondé sur l’affirmation du contraire, le moyen manque en droit.
5. Le jugement relève que, à défaut de remise, le conseil du demandeur a indiqué être mandaté pour plaider et le représenter.
En acceptant, après avoir refusé de faire droit à la demande de remise pour les motifs précités, que le demandeur soit représenté par son avocat conformément à ce que son conseil mandaté à cette fin sollicitait à titre subsidiaire, le jugement ne méconnaît pas les droits de la défense du demandeur.
A cet égard également, le moyen ne peut être accueilli.
Il n’y a pas lieu de poser à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle proposée par le demandeur, qui repose sur la prémisse juridique erronée qu’un condamné mis à la disposition du tribunal de l’application des peines ne peut être autorisé à se faire représenter lorsque le tribunal examine une demande de révocation, suspension ou révision de la libération sous surveillance.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante-quatre euros quarante et un centimes.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du sept septembre deux mille vingt-deux par Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.22.1111.F
Date de la décision : 07/09/2022
Type d'affaire : Droit pénal - Autres

Analyses

Le juge apprécie souverainement la nécessité, l'utilité ou l'opportunité de la remise de l'examen d'une cause (1). (1) Voir les concl. du MP.

TRIBUNAUX - MATIERE REPRESSIVE - Action publique

Les articles 68, § 3, alinéa 1er, et 95/27, § 3, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine ne font pas interdiction au tribunal de l'application des peines d'autoriser le conseil du condamné mis à disposition à le représenter dans le cadre d'une procédure de révocation, suspension ou révision de la libération sous surveillance (1). (1) Voir les concl. du MP.

APPLICATION DES PEINES [notice4]


Références :

[notice4]

L. du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine - 17-05-2006 - Art. 68, § 3, al. 1er, et 95/27, § 3 - 35 / No pub 2006009456


Composition du Tribunal
Président : DE FORMANOIR DE LA CAZERIE ERIC
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : VANDERMEERSCH DAMIEN
Assesseurs : KONSEK TAMARA, LUGENTZ FREDERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS, DE LA SERNA IGNACIO

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-09-07;p.22.1111.f ?

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