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01/04/2022 | BELGIQUE | N°C.21.0338.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 01 avril 2022, C.21.0338.F


N° C.21.0338.F
VILLE D’ATH, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Ath, rue de Pintamont, 54, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0207.281.476,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
1. M. B., et
2. R. C.,
défendeurs en cassation,
représentés par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet

est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile.
I. La procé...

N° C.21.0338.F
VILLE D’ATH, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Ath, rue de Pintamont, 54, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0207.281.476,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
1. M. B., et
2. R. C.,
défendeurs en cassation,
représentés par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 18 décembre 2020 par la cour d’appel de Mons.
Le 16 mars 2022, l’avocat général Philippe de Koster a déposé des conclusions au greffe.
Le président de section Michel Lemal a fait rapport et l’avocat général
Philippe de Koster a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
D’une part, le juge, qui, aux fins de rétablir entièrement dans ses droits une partie lésée, ordonne la réparation en nature de son préjudice en prescrivant à l’administration de prendre des mesures destinées à mettre fin à l’illégalité dommageable, doit indiquer l’illégalité à laquelle ces mesures doivent mettre fin et, sans priver cette autorité de sa liberté d’appréciation ni se substituer à celle-ci, préciser leur portée de sorte qu’elle ne puisse susciter pour cette administration aucun doute raisonnable.
D’autre part, lorsque, conformément à l'article 1385bis du Code judiciaire, le juge lie une astreinte au respect d'une condamnation principale, la condamnation principale doit être formulée de manière suffisamment précise.
L’arrêt considère que « la voirie, telle qu’elle est aménagée devant l’immeuble [des défendeurs], est dangereuse, tant pour les usagers que pour [les défendeurs] eux-mêmes », que « cette dangerosité est établie par le dossier photographique produit par [les défendeurs], montrant qu’il n’y a aucune visibilité pour les véhicules sortant de leurs garages qui avancent directement sur la piste cyclable longeant l’immeuble [des défendeurs] ; le rapport établi le 9 février 2017 par l’assureur protection juridique [du défendeur] qui montre qu’alors que l’aménagement de la voie reste identique (chaussée bordée, à l’approche de la place ..., de petites haies qui la séparent de la piste cyclable), un simple panneau routier marque la fin de la piste cyclable (mais uniquement dans un seul sens de circulation) au niveau du pignon de l’immeuble [des défendeurs] et un nouveau panneau D7 marque la reprise de cette piste cyclable à la limite de leur immeuble […] ; le reportage photographique effectué par [les défendeurs], montrant la proximité des cycliste, cyclomotoriste et cavalier circulant sur la piste cyclable longeant leur habitation et leurs garages – nonobstant la signalisation en place […] ; les constatations des verbalisants dans le cadre du dossier répressif classé sans suite relatif à l’accident survenu entre [le défendeur], qui sortait de son garage au volant de son véhicule, et […] un cyclomotoriste qui circulait sur la piste cyclable située à gauche par rapport à son sens de circulation, indiquant ‘Constatons que, suite à la configuration des lieux, [le défendeur] n’est pas en mesure de voir ce qui arrive sur sa gauche en sortant de son garage. De plus, ce dernier est contraint de franchir la piste cyclable pour atteindre la chaussée’ […] ; l’accident du 16 juin 2016, qui, même s’il n’a occasionné que des dégâts matériels (scooter hors d’état de marche, avant droit du véhicule [du défendeur] endommagé et avant du véhicule d’un tiers complètement enfoncé) et de légères blessures (douleurs au niveau des jambes du cyclomotoriste), aurait pu être très grave puisque le cyclomotoriste a été projeté sur un véhicule circulant en sens inverse », qu’« une situation aussi dangereuse ne fait pas partie des risques normaux inhérents à la circulation sur la voie publique », qu’« il n’est pas normal de n’avoir pas d’autre choix que de s’engager avec un véhicule automobile sur une piste cyclable sans avoir la moindre visibilité sur les usagers circulant dans les deux sens sur cette piste cyclable » et qu’« en s’abstenant de prendre les mesures utiles à obvier au danger anormal que présente la configuration particulière de la voirie, la [demanderesse] manque à son obligation d’assurer la sécurité de la voirie ».
Il ajoute que « le fait de ne pouvoir entrer et sortir de chez eux et de ne pouvoir emprunter la voie publique qui longe leur immeuble sans craindre un accident constitue un dommage né et actuel ou, plus exactement, un dommage certain, dans le chef [des défendeurs] » et que, « si la voirie telle qu’elle est aménagée devant l’immeuble [des défendeurs] ne présentait pas cette configuration anormalement dangereuse, ces derniers ne subiraient pas le préjudice qu’ils subissent ».
S’agissant de la réparation de ce dommage, il considère que « la réparation en nature du dommage est en principe le mode normal de réparation du dommage », que « l’injonction donnée [par le premier juge] à la [demanderesse], consistant à lui enjoindre de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de la voirie au niveau de l’immeuble appartenant [aux défendeurs] situé place ... […] et principalement pour écarter tout danger anormal au niveau de l’entrée et du garage de cet immeuble, n’est pas trop vague ; [qu’]elle est exécutable, y compris dans sa souplesse quant aux moyens que la [demanderesse] choisira de mettre en œuvre » et qu’« il suffira en effet aux parties de vérifier si le nouvel aménagement des lieux, quel qu’il soit, permettra [aux défendeurs] de rentrer et sortir de leur habitation et de leurs garages sans risque de collision avec les autres usagers de la voie publique, notamment en leur offrant une visibilité suffisante sur la survenue de ces autres usagers au moment où leur véhicule entre ou sort de leurs garages ».
L’arrêt, qui, par confirmation du jugement entrepris, condamne la demanderesse « à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de la voirie au niveau de l’immeuble appartenant [aux défendeurs] et situé place ... […] et principalement pour écarter tout danger anormal au niveau de l’entrée et du garage de cet immeuble », sous peine d’astreinte, définit avec une clarté suffisante les mesures destinées à mettre fin à l'illégalité dommageable pour les défendeurs et ne viole aucune des dispositions légales visées au moyen.
Celui-ci ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de cinq cent soixante-huit euros cinq centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du premier avril deux mille vingt-deux par le président de section Michel Lemal, en présence de l’avocat général Philippe de Koster, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.21.0338.F
Date de la décision : 01/04/2022
Type d'affaire : Droit civil

Analyses

Le juge, qui, aux fins de rétablir entièrement dans ses droits une partie lésée, ordonne la réparation en nature de son préjudice en prescrivant à l'administration des mesures destinées à mettre fin à l'illégalité dommageable, doit indiquer l'illégalité à laquelle ces mesures doivent mettre fin et, sans priver cette autorité de sa liberté d'appréciation ni se substituer à celle-ci, préciser ces mesures de sorte que leur portée ne puisse susciter pour cette administration aucun doute raisonnable (1). (1) Voir les concl. du MP.

RESPONSABILITE HORS CONTRAT - OBLIGATION DE REPARER - Etat. Pouvoirs publics


Composition du Tribunal
Président : LEMAL MICHEL
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : DE KOSTER PHILIPPE
Assesseurs : ERNOTTE MARIE-CLAIRE, JACQUEMIN ARIANE, MARCHANDISE MAXIME, MORIS MARIELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-04-01;c.21.0338.f ?

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