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16/02/2022 | BELGIQUE | N°P.21.1153.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 février 2022, P.21.1153.F


N° P.21.1153.F
I. A. O.
ayant pour conseil Maître Nathan Mallants, avocat au barreau de Liège,
II. F. M.
ayant pour conseils Maîtres Antoine Moreau, avocat au barreau de Liège, et Sandra Berbuto, avocat au barreau de Liège,
prévenus,
demandeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 28 juillet 2021 par la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle.
Les demandeurs invoquent trois moyens, chacun dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller

François Stévenart Meeûs a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. ...

N° P.21.1153.F
I. A. O.
ayant pour conseil Maître Nathan Mallants, avocat au barreau de Liège,
II. F. M.
ayant pour conseils Maîtres Antoine Moreau, avocat au barreau de Liège, et Sandra Berbuto, avocat au barreau de Liège,
prévenus,
demandeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 28 juillet 2021 par la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle.
Les demandeurs invoquent trois moyens, chacun dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller François Stévenart Meeûs a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. Sur le pourvoi de O. A. :
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, des articles 3, 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant, 49 de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse et 56 du décret du 18 janvier 2018 portant le Code de la prévention, de l’aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse.
Il soutient que des éléments retenus par l’arrêt, la cour d’appel ne pouvait déduire que le demandeur avait atteint l’âge de la majorité au moment de la commission des faits.
Les juridictions répressives ont le pouvoir d'apprécier souverainement en fait si la minorité alléguée par un inculpé ou un prévenu est établie, sans que la loi n'assujettisse la question à un mode spécial de preuve.
Il ressort notamment de l’arrêt que
- le premier juge, comme les juges d’appel, se sont appuyés sur les résultats de plusieurs tests scientifiques réalisés par des médecins et des spécialistes qui concluent de manière unanime à un âge très probable d’au moins 18 ans, même en tenant compte d’une marge d’erreur affectant certains tests,
- l’analyse médicale (par plusieurs personnes) des données récoltées à la suite de la réalisation d’un triple test osseux le 2 février 2021 sur le demandeur indique qu’il est majeur avec « un âge de plus de 18 ans, 20,6 ans avec une déviation standard de 2 ans »,
- le demandeur n’a pas exercé de voie de recours contre la décision administrative du service de tutelle du Service public fédéral Justice de le considérer comme majeur, alors que cette faculté lui était précisée dans la lettre lui notifiant cette décision et qu’il disposait d’un conseil dans le cadre de sa comparution devant les juridictions d’instruction.
Sur la base de ces constatations et considérations, les juges d’appel ont pu déduire avec « une certitude raisonnable », que le demandeur avait atteint l’âge de la majorité pénale au moment de la commission des faits et que, partant, ils étaient compétents pour juger ceux-ci.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le deuxième moyen :
Pris notamment de la méconnaissance du principe général du droit relatif à la présomption d’innocence, le moyen soutient que l’arrêt renverse la charge de la preuve en déduisant l’état de majorité du demandeur de l’absence de tout document de nature à démontrer son état de minorité, et de son audition sur ses conditions de vie.
Ainsi qu’il ressort de la réponse au premier moyen, l’arrêt constate légalement que le demandeur était majeur au moment des faits.
En ajoutant la considération critiquée, l’arrêt ne renverse pas la charge de la preuve mais se borne à indiquer que les allégations du demandeur, selon lesquelles il est mineur d’âge, ne sont corroborées par aucun élément.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le troisième moyen :
Le demandeur soutient que la cour d’appel ne pouvait connaître des préventions s’étendant du 1er août 2020 au 6 décembre 2020, dès lors que, sur la base des résultats du triple test osseux admettant une déviation standard de deux ans, il était mineur d’âge jusqu’au 1er août 2020 inclus.
La circonstance que les faits antérieurs au dix-huitième anniversaire de la personne poursuivie ne ressortissent pas à la compétence du tribunal correctionnel, ne prive pas celui-ci du pouvoir de connaître de l’action publique régulièrement exercée du chef des faits commis à compter dudit anniversaire.
Dans cette mesure, le moyen manque en droit.
Ainsi qu’il ressort de la réponse au premier moyen, l’arrêt ne se fonde pas sur ce seul élément, mais s’appuie sur d’autres éléments, non critiqués par le demandeur, pour justifier la conviction des juges d’appel relative à la majorité pénale.
Procédant d’une lecture incomplète de l’arrêt, le moyen manque, à cet égard, en fait.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. Sur le pourvoi de M. F. :
Sur le premier moyen :
Selon le demandeur, en énonçant que les analyses des données des tests multiples par des professionnels doivent être retenues comme éléments d’appréciation de l’âge du demandeur lorsqu’elles aboutissent, comme en l’espèce, à une évaluation en tenant compte d’une marge d’erreur importante, l’arrêt méconnaît la foi due aux actes.
Par la considération critiquée, l’arrêt ne se réfère pas aux radiographies des 6 décembre 2020 et 13 janvier 2021. Partant, il ne saurait violer la foi due aux documents qui actent le résultat de ces examens.
Pour le surplus, ne précisant pas quel autre acte aurait été violé, le moyen est irrecevable.
Sur le deuxième moyen :
Quant à la première branche :
Pris de la violation de l’article 149 de la Constitution, le moyen soutient que l’arrêt ne répond pas aux conclusions du demandeur qui renvoyaient à l’intérêt supérieur de l’enfant et aux droits reconnus aux enfants privés de liberté, visés aux articles 3 et 37 de la Convention relative aux droits de l’enfant.
Le juge n’est pas tenu de répondre à un moyen devenu sans pertinence en raison de sa décision.
Après avoir décidé que le demandeur avait atteint l’âge de la majorité au moment des faits, la cour d’appel n’était pas tenue de répondre à l’argument relatif à sa minorité alléguée.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
Pris de la violation de l’article 149 de la Constitution, le moyen reproche aux juges d’appel de ne pas avoir individualisé leur décision de se déclarer compétents pour connaître de la cause.
Ni l’article 149 de la Constitution, ni aucune autre disposition n’imposent au juge de viser spécifiquement chacun des prévenus comparaissant devant lui lorsqu’il relève les éléments dont il déduit sa compétence pour l’ensemble des faits qui lui sont soumis, pourvu que la motivation de sa décision permette à chacun d’eux de comprendre les raisons pour lesquelles il s’est déclaré compétent.
L’arrêt énonce qu’en l’absence de tout document de nature à démontrer l’état de minorité des demandeurs, la cour a pris le soin d’entendre ceux-ci notamment sur leur famille, leur vie et leurs activités au Maroc, ainsi que sur les objectifs qu’ils ont poursuivis et qui les ont conduits en Belgique, et qu’elle a pu de visu se convaincre de leur stature et de leur maturité d’adulte. Il ajoute que les constatations policières et leurs déclarations aux enquêteurs permettent d’appréhender leur maturité au regard de la faculté d’adaptation qu’ils ont tous deux développée, pour mettre au point leur commerce frauduleux et survivre en trouvant un logement, en seulement deux ou trois mois selon eux.
Cette énonciation permet au demandeur de comprendre les raisons pour lesquelles la cour d’appel a considéré que ses allégations relatives à sa prétendue minorité ne sont pas crédibles.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le troisième moyen :
Le moyen est pris de la violation de la notion légale de présomption de fait.
Selon le demandeur, en concluant à sa majorité sur le fondement de son audition révélant « une stature et une majorité d’adulte », les juges d’appel ont déduit de faits souverainement constatés par eux, des conséquences qui seraient sans aucun lien avec ceux-ci ou qui ne seraient susceptibles, sur leur fondement, d’aucune justification.
Mais aux termes des motifs rappelés en réponse au premier moyen du premier demandeur, à cet égard identique, l’arrêt attaqué ne se fonde pas uniquement sur cette considération pour conclure à la majorité du demandeur.
Reposant sur une lecture incomplète de l’arrêt attaqué, le moyen manque en fait.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette les pourvois ;
Condamne chacun des demandeurs aux frais de son pourvoi.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de cent trente-cinq euros nonante et un centimes dont I) sur le pourvoi d’O. A. : soixante-sept euros nonante-cinq centimes dus et II) sur le pourvoi de M. F. : soixante-sept euros nonante-six centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, Sidney Berneman, Eric de Formanoir, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du seize février deux mille vingt-deux par Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.21.1153.F
Date de la décision : 16/02/2022
Type d'affaire : Droit du travail - Droit civil - Droit pénal - Autres

Analyses

Les juridictions répressives ont le pouvoir d'apprécier souverainement en fait si la minorité alléguée par un inculpé ou un prévenu est établie, sans que la loi n'assujettisse la question à un mode spécial de preuve (1). (1) Cass. 4 mars 2010, RG P.10.0325.F, Pas. 2010, n° 151.

MINORITE - PROTECTION DE LA JEUNESSE - COMPETENCE ET RESSORT - MATIERE REPRESSIVE - Compétence - APPRECIATION SOUVERAINE PAR LE JUGE DU FOND [notice1]

Le juge n’est pas tenu de répondre à un moyen devenu sans pertinence en raison de sa décision (1). (1) Cass. 11 septembre 2019, RG P.19.0433.F, Pas. 2019, n° 450, avec concl. MP.

MOTIFS DES JUGEMENTS ET ARRETS - EN CAS DE DEPOT DE CONCLUSIONS - Matière répressive (y compris les boissons spiritueuses et les douanes et accises)


Références :

[notice1]

L. du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse - 08-04-1965 - Art. 36, 4° - 03 / No pub 1965040806


Composition du Tribunal
Président : ROGGEN FRANCOISE
Greffier : FENAUX TATIANA
Ministère public : VANDERMEERSCH DAMIEN
Assesseurs : BERNEMAN SIDNEY, KONSEK TAMARA, LUGENTZ FREDERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-02-16;p.21.1153.f ?

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