Nr. D.19.0016.N
F. C.,
Me Patricia Vanlersberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
ORDRE DES MÉDECINS,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre la décision rendue le 4 novembre 2019 par le conseil d’appel d’expression néerlandaise de l’Ordre des médecins.
Le premier avocat général Ria Mortier a déposé des conclusions le 2 décembre 2020.
Le président de section Koen Mestdagh a fait rapport.
Le premier avocat général Ria Mortier a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
1. En vertu de l’article 6, 1°, de l'arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des médecins, les conseils provinciaux sont compétents pour dresser le tableau de l’Ordre. Ils peuvent refuser ou différer l'inscription au tableau, soit si le demandeur s'est rendu coupable d'un fait dont la gravité entraînerait pour un membre de l'Ordre la radiation du tableau ou d'une faute grave qui entache l'honneur ou la dignité de la profession, soit sur la base d'informations communiquées par l'État d'origine ou de provenance s'il s'agit d'un ressortissant d'un État membre de l’Union européenne désireux de s'établir dans le ressort du conseil provincial.
En vertu de l’article 16, alinéa 1er, de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967, les sanctions dont dispose le conseil provincial sont : l'avertissement, la censure, la réprimande, la suspension du droit d'exercer l'art médical pendant un terme qui ne peut excéder deux années et la radiation du tableau de l'Ordre.
2. Il résulte de ces dispositions que le conseil provincial est libre de réinscrire au tableau le médecin qui a été radié.
Par conséquent, le fait qu'un médecin soit radié du tableau de l'ordre du chef de certaines infractions disciplinaires n'empêche pas que l'intéressé fasse l’objet d’une suspension du droit d'exercer l'art médical.
Dans la mesure où il repose sur une autre conception juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
3. La violation alléguée des articles 149 de la Constitution et 1138, 4°, du Code judiciaire est entièrement déduite du grief précité, vainement invoqué.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est irrecevable.
[…]
Quant à la quatrième branche :
8. En vertu de l’article 16, alinéa 1er, de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967, les sanctions dont dispose le conseil provincial sont : l'avertissement, la censure, la réprimande, la suspension du droit d'exercer l'art médical pendant un terme qui ne peut excéder deux années et la radiation du tableau de l'Ordre.
9. Aucune de ces sanctions, même si leur proportionnalité doit pouvoir faire l’objet d’un contrôle, ne peut être considérée comme un traitement ou une peine au sens de l'article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Dans la mesure où il invoque la violation de cet article 3, le moyen, en cette branche, est irrecevable.
10. L'article 6.1 de la Convention et le principe général du droit relatif au respect des droits de la défense exigent que le juge puisse examiner la légalité d'une sanction et notamment vérifier si la sanction est conciliable avec les exigences impératives des conventions internationales et du droit interne, y compris les principes généraux du droit, ce qui implique également que le juge puisse vérifier si une sanction n'est pas disproportionnée à l'infraction, mais la circonstance qu'une sanction disciplinaire disproportionnée aurait été infligée ne constitue pas en soi une violation de l'article 6. 1 de la Convention ou du principe général du droit visé.
Dans la mesure où il suppose qu'une sanction disciplinaire disproportionnée est contraire à l'article 6.1 de la Convention et au principe général de droit relatif au respect des droits de la défense, le moyen, en cette branche, est fondé sur une prémisse juridique erronée et manque en droit.
11. Dans la mesure où il conteste la considération des juges d'appel selon laquelle les préventions a, b et c ont été sont notamment établies au motif que le demandeur ne nie pas avoir continué à exercer après le 14 avril 2017 jusqu'au 11 août 2017, le moyen, en cette branche, est irrecevable pour le motif indiqué en réponse à la deuxième branche du moyen.
12. Pour le surplus, les juges d'appel ont fondé la sanction disciplinaire de radiation pour les préventions a, b et c sur les motifs que :
- le demandeur a continué à exercer l’art médical pendant la suspension qui lui a été infligée ;
- le demandeur a fait semblant de se conformer à la suspension qui lui a été infligée du droit d'exercer l’art médical, mais il a été établi qu'il traitait en réalité lui-même les patients et que la mise en circuit de médecins suppléants ne servait que les apparences ;
- il n’est ainsi plus possible de faire confiance au demandeur.
Dans la mesure où il fait valoir que les juges d'appel ont infligé la sanction disciplinaire de radiation de la liste du barreau également au motif que le demandeur ne nie pas avoir continué à exercer après le 14 avril 2017 jusqu'au 11 août 2017, le moyen, en cette branche, se fonde sur une lecture erronée de la décision attaquée et, dès lors, manque en fait.
13. Pour le surplus, en précisant que les sanctions disciplinaires infligées sont proportionnées et dans un rapport raisonnable de proportionnalité avec les fautes disciplinaires très graves, les juges d'appel ont considéré que les sanctions infligées sont proportionnées et dans un rapport raisonnable de proportionnalité avec les préventions qui ont été déclarées légalement établies, sans viser par là l'ensemble des faits sur lesquels se fonde la décision de déclarer les préventions établies.
Dans cette mesure également, le moyen, en cette branche, repose sur une lecture erronée de la décision attaquée et, dès lors, manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, les présidents de section Koen Mestdagh et Geert Jocqué, les conseillers Bart Wylleman et Ilse Couwenberg, et prononcé en audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt et un par le président de section Eric Dirix, en présence du premier avocat général Ria Mortier, avec l’assistance du greffier Vanity Vanden Hende.
Traduction établie sous le contrôle du président de section Mireille Delange et transcrite avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.