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11/12/2020 | BELGIQUE | N°C.18.0380.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 11 décembre 2020, C.18.0380.N


N° C.18.0380.N
J. D.,
Me Patricia Vanlersberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
M. V.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 5 février 2018 par la cour d’appel de Gand.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
Le premier avocat général Ria Mortier a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.
III. La décision

de la Cour
Sur le premier moyen :
Sur la recevabilité du moyen :
1. La défenderesse oppose au moyen...

N° C.18.0380.N
J. D.,
Me Patricia Vanlersberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
M. V.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 5 février 2018 par la cour d’appel de Gand.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
Le premier avocat général Ria Mortier a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Sur la recevabilité du moyen :
1. La défenderesse oppose au moyen une première fin de non-recevoir déduite de ce qu’il critique, en substance, la décision du juge d’appel que le demandeur supporte la charge de la preuve du fait qu’il aurait prétendument mis la somme de 49.200 euros à la disposition de la défenderesse, somme qu’elle aurait ensuite, sur son ordre, versée au compte de la société et ce, en exécution de l’obligation de paiement du demandeur pour l’achat de 80 p.c. des actions de la société anonyme MJ QUORUM ; la base légale de la répartition de la charge de la preuve réside tant dans l’article 1315 de l’ancien Code civil que dans l’article 870 du Code judiciaire, tels qu’ils s’appliquent au litige ; le moyen omet d’invoquer également la violation de l’article 870 du Code judiciaire.
2. La violation alléguée des dispositions légales mentionnées au moyen suffit à entraîner la cassation.
La première fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
3. La défenderesse oppose au moyen une seconde fin de non-recevoir déduite de ce qu’il ne peut entraîner la cassation et est, dès lors, dénué d’intérêt, puisque la décision est également justifiée par le motif non critiqué que le demandeur n’a jamais contesté l’existence d’un mandat entre les parties.
4. Contrairement à ce qu’affirme la fin de non-recevoir, le juge d’appel n’a pas fondé sa décision sur la constatation que le demandeur n’a jamais contesté avoir donné l’ordre à la défenderesse de libérer le capital correspondant à sa quote-part, mais a considéré que cela ne suffit pas.
Dès lors qu’elle repose sur une lecture inexacte de l’arrêt, la seconde fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen :
5. En vertu de l’article 1356, alinéa 3, de l’ancien Code civil, un aveu ne peut être divisé au détriment de celui qui l’a fait.
La reconnaissance de l’existence d’une obligation et de son exécution est indivisible au sens de cette disposition.
Cette indivisibilité ne modifie pas les règles relatives à la charge de la preuve.
6. Conformément à l’article 1315, alinéa 1er, de l’ancien Code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
S’il invoque l’aveu de celui qui s’est obligé à titre de preuve de l’existence de l’obligation, il ne peut pas faire abstraction de l’exécution de l’obligation alléguée dans ce même aveu.
Celui qui s’est obligé ne doit pas prouver cette allégation qui ne constitue pas une exception au sens de l’article 1315, alinéa 2, de l’ancien Code civil.
7. Le juge d’appel a considéré que :
- le fondement juridique le plus évident de la relation dans laquelle un associé libère le capital pour un autre associé est celui du mandat, la défenderesse étant ici la mandataire ;
- le demandeur lui a donné mandat pour libérer le capital correspondant à sa quote-part ;
- non seulement le demandeur n’a jamais contesté ce mandat mais, bien au contraire, il soutient en outre qu’il a donné lui-même l’ordre de verser les fonds qu’il avait, selon ses propres dires, mis à la disposition de la défenderesse ;
- le demandeur ne prouve pas à suffisance qu’il a mis la somme de 49.200 euros à la disposition de la défenderesse, somme qu’elle devait verser, sur son ordre, au compte de la société afin de respecter son obligation de paiement pour l’achat de 80 p.c. des actions de la société anonyme MJ QUORUM ;
- il suit de ce qui précède que la défenderesse s’est acquittée, au moyen de fonds propres, de l’obligation de libération incombant aux deux associés ;
- à tout le moins, il n’est pas établi que cette obligation ait été acquittée au moyen de fonds appartenant ou destinés au demandeur.
Par ces motifs, le juge d’appel a divisé l’aveu du demandeur et, ce faisant, a violé les articles 1315, 1354 et 1356 de l’ancien Code civil.
Le moyen est fondé.
Sur les autres griefs :
8. Les autres griefs ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué, sauf en tant qu’il reçoit l’appel ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel d’Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Koen Mestdagh, président, le président de section
Geert Jocqué, les conseillers Bart Wylleman, Koenraad Moens et
Sven Mosselmans, et prononcé en audience publique du onze décembre deux mille vingt par le président de section Koen Mestdagh, en présence du premier avocat général Ria Mortier, avec l’assistance du greffier Mike Van Beneden.
Traduction établie sous le contrôle du président de section Michel Lemal et transcrite avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1n - eerste kamer
Numéro d'arrêt : C.18.0380.N
Date de la décision : 11/12/2020
Type d'affaire : Droit civil

Analyses

La reconnaissance de l'existence d'une obligation et de son exécution est indivisible, sans que cette indivisibilité modifie les règles relatives à la charge de la preuve; celui qui invoque l'aveu de l'existence d'une obligation à titre de preuve de l'existence de celle-ci ne peut pas faire abstraction de l'exécution de l'obligation alléguée dans ce même aveu (1). (1) Voir Cass. 10 mai 2013, RG C.11.0781.N, Pas. 2013, n° 289.

PREUVE - MATIERE CIVILE - Aveu - Aveu indivisible - Obligation - Conséquence [notice1]


Références :

[notice1]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 1315, al. 1er, et 1356, al. 3 - 30 / No pub 1804032150


Composition du Tribunal
Président : MESTDAGH KOEN
Greffier : VANDEN HENDE VANITY
Ministère public : MORTIER RIA
Assesseurs : JOCQUE GEERT, WYLLEMAN BART, MOENS KOENRAAD, MOSSELMANS SVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-12-11;c.18.0380.n ?

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