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10/12/2020 | BELGIQUE | N°C.20.0110.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 décembre 2020, C.20.0110.F


N° C.20.0110.F
D. M.,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,
contre
V. G., avocat, agissant en qualité d'administrateur provisoire de la succession de C. G.,
défendeur en cassation,
admis au bénéfice de l'assistance judiciaire par ordonnance du premier président du 12 mai 2020 (n° G.20.0095.F),
représenté par Maître Gilles Genicot, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi

à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devan...

N° C.20.0110.F
D. M.,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,
contre
V. G., avocat, agissant en qualité d'administrateur provisoire de la succession de C. G.,
défendeur en cassation,
admis au bénéfice de l'assistance judiciaire par ordonnance du premier président du 12 mai 2020 (n° G.20.0095.F),
représenté par Maître Gilles Genicot, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2019 par la cour d'appel de Mons.
Le 24 novembre 2020, l'avocat général Philippe de Koster a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport et l'avocat général Philippe de Koster a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Aux termes de l'article 82, alinéas 1er et 2, de la loi du 8 août 1997 sur les faillites, si le failli est déclaré excusable, il ne peut plus être poursuivi par ses créanciers ; le conjoint du failli qui est personnellement obligé à la dette de son époux ou l'ex-conjoint qui est personnellement obligé à la dette de son époux contractée du temps du mariage est libéré de cette obligation par l'effet de l'excusabilité.
Le conjoint ou l'ex-conjoint n'est libéré de son obligation personnelle à la dette de son époux résultant de la loi que si cette obligation lui incombe en raison des liens du mariage.
Aux termes de l'article 50, alinéa 1er, du Code pénal, tous les individus condamnés pour une même infraction sont tenus solidairement des restitutions et des dommages et intérêts.
Il s'ensuit que, lorsque le conjoint ou l'ex-conjoint est condamné, en sa qualité de coauteur d'une même infraction, solidairement avec le failli, aux restitutions et dommages et intérêts, il n'est pas tenu à la dette de son époux en raison des liens du mariage et n'est dès lors pas libéré de cette obligation par l'effet de l'excusabilité du failli.
L'arrêt attaqué constate que, à la suite d'une plainte déposée par le défendeur « suspectant [la demanderesse et son époux] d'avoir détourné des fonds au préjudice de son administrée, cette procédure pénale s'est terminée par un arrêt de la chambre des mises en accusation du 22 décembre 2006 qui décide qu'il existe des charges suffisantes à l'égard des deux inculpés, [la demanderesse et son époux], du chef de la prévention d'avoir détourné une somme de 74.472,17 euros au préjudice de C. G. ou de ses ayants droit et qui prononce la suspension du prononcé à leur égard », qu'« ensuite de cette décision pénale, le tribunal de première instance de Namur, statuant au civil, a, par jugement du 15 novembre 2013, condamné [la demanderesse et son époux] à payer [au défendeur], en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession de feue C. G., la somme de 74.472,17 euros », que cette décision est confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Liège du 20 mai 2015, que l'époux de la demanderesse « a fait aveu de faillite pour l'activité qu'il exerçait en personne physique, en date du 26 juin 2015 » et que, « par jugement du 14 avril 2016, [il] a bénéficié de l'excusabilité », sa faillite étant par la suite clôturée.
Après avoir énoncé que « la ratio legis de l'extension du bénéfice de l'excusabilité au conjoint du failli vise uniquement à protéger le failli » en lui permettant de « placer les revenus de [sa] nouvelle activité [...] à l'abri [et] de prendre un nouveau départ », l'arrêt attaqué relève que « la dette litigieuse résulte d'une condamnation civile prononcée à charge de [la demanderesse et de son époux], ensuite d'une décision judiciaire reconnaissant établie une prévention pénale », que « l'article 1407 du Code civil prévoit que les dettes résultant d'une condamnation pénale, d'un délit ou d'un quasi-délit commis par un époux lui restent ‘propres' » et que, si « l'article 50 du Code pénal organise une responsabilité solidaire entre les coauteurs d'une même infraction pour la réparation des conséquences civiles de celle-ci, [il] n'instaure pas une solidarité ‘entre époux' mais entre coauteurs ».
En considérant, sur la base de ces énonciations, que « ce n'est pas en sa qualité de conjoint [que la demanderesse] est tenue ‘personnellement' à la dette de [son époux], mais en sa qualité de co-responsable d'une infraction pénale déclarée établie dans son chef », en sorte que « la dette en cause n'est pas rendue solidaire entre eux en raison de leur statut de conjoints », l'arrêt attaqué justifie légalement sa décision que la demanderesse ne peut en être libérée.
Le moyen ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de neuf cent soixante et un euros cinquante-cinq centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l'État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le conseiller faisant fonction de président Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du dix décembre deux mille vingt par le conseiller faisant fonction de président Michel Lemal, en présence de l'avocat général Philippe de Koster, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.20.0110.F
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Droit de l'insolvabilité

Analyses

Lorsque le conjoint ou l'ex-conjoint est condamné, en sa qualité de coauteur d'une même infraction, solidairement avec le failli, aux restitutions et dommages et intérêts, il n'est pas tenu à la dette de son époux en raison des liens du mariage et n'est dès lors pas libéré de cette obligation par l'effet de l'excusabilité du failli (1). (1) Voir les concl. du MP.

FAILLITE ET CONCORDATS - EFFETS (PERSONNES, BIENS, OBLIGATIONS) - Failli - Excusabilité - Conjoint ou ex-conjoint - Obligation personnelle - Lien du mariage - Libération - Failli - Excusabilité - Conjoint ou ex-conjoint - Condamnation pénale - Dommages et intérêts - Condamnation solidaire avec le failli [notice1]


Références :

[notice1]

CODE DE COMMERCE LIVRE III - Loi sur les faillites - 08-08-1997 - Art. 82, al. 1er et 2 - 80 / No pub 1997009766 ;

Code pénal - 08-06-1867 - Art. 50 - 01 / No pub 1867060850


Composition du Tribunal
Président : LEMAL MICHEL
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : DE KOSTER PHILIPPE
Assesseurs : ERNOTTE MARIE-CLAIRE, JACQUEMIN ARIANE, MARCHANDISE MAXIME, MORIS MARIELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-12-10;c.20.0110.f ?

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