Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 mars et 25 juin 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE DU CREDIT DU NORD, dont le siège est 28 place Rihour à Lille (59800) ; la SOCIETE DU CREDIT DU NORD demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 23 janvier 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 7 avril 2003 du tribunal administratif de Nice annulant la décision du 21 octobre 1999 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. Guy A, salarié protégé, pour mise à la retraite d'office ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 7 avril 2003 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabrice Benkimoun, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE DU CREDIT DU NORD et de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public,
- la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE DU CREDIT DU NORD et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêt attaqué n'aurait pas visé les conclusions et les moyens des parties manque en fait ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision de l'inspecteur du travail attaquée, autorisant le licenciement de M. A, salarié protégé : La mise à la retraite s'entend par la possibilité donnée à l'entreprise de rompre le contrat de travail d'un salarié qui peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein, au sens du chapitre Ier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale, et qui remplit les conditions d'ouverture à la pension de vieillesse, ou, si elles existent, les conditions d'âge prévues par la convention ou l'accord collectif, ou le contrat de travail. Si les conditions de mise à la retraite ne sont pas remplies, la rupture du contrat de travail par l'employeur constitue un licenciement. ; que, dans le cas où la demande de rupture du contrat de travail d'un salarié protégé par l'employeur est motivée par la survenance de l'âge, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de vérifier sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'une part, que la mesure envisagée n'est pas en rapport avec les fonctions représentatives exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé, et d'autre part, que les conditions légales de mise à la retraite sont remplies ; que cette rupture doit suivre la procédure prévue en cas de licenciement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.122-14 du code du travail, en vigueur à la date de la décision attaquée : L'employeur ou son représentant qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre... L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié ; qu'en vertu de l'article R. 436-1 du même code, l'entretien prévu à l'article L. 122-14 précède, dans tous les cas, la présentation à l'inspecteur du travail de la demande d'autorisation de licenciement ; que, par suite, la mise à la retraite d'un salarié protégé à l'initiative de l'employeur doit d'être précédée de l'entretien préalable prévu par l'article L. 122-14 précité ; qu'ainsi, en affirmant l'obligation d'un tel entretien préalablement à la mise à la retraite d'office de M. A, salarié protégé, et en confirmant, en raison de l'absence d'un tel entretien, l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail prononcée par le tribunal administratif, la cour administrative d'appel n'a, contrairement à ce que soutient la société requérante, entaché sa décision d'aucune erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE DU CREDIT DU NORD n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Marseille ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la SOCIETE DU CREDIT DU NORD le versement à M. A de la somme de 3 000 euros que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE DU CREDIT DU NORD est rejeté.
Article 2 : La SOCIETE DU CREDIT DU NORD versera à M. A la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DU CREDIT DU NORD, à M. Guy A et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.