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28/11/2016 | FRANCE | N°16-70009

France | France, Cour de cassation, Avis, 28 novembre 2016, 16-70009


N° C1670009 Séance du 28 novembre 2016

Demande d'avis du 9 septembre 2016 émanant du

tribunal d'instance de Villefranche-sur-Saône

Société Credipar

c/

Mme Fatima X...

_____________________

Rapporteur : Samuel Vitse

Avis n° 16011P

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COUR DE CASSATION

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;

Vu la demande d'avis formulée le 6 septembre 2016 par le tribunal d'instance de Vil

lefranche-sur-Saône, et ainsi libellée :

"Faut-il réputer non écrites comme abusives, les stipulations insérées au contrat de cr...

N° C1670009 Séance du 28 novembre 2016

Demande d'avis du 9 septembre 2016 émanant du

tribunal d'instance de Villefranche-sur-Saône

Société Credipar

c/

Mme Fatima X...

_____________________

Rapporteur : Samuel Vitse

Avis n° 16011P

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COUR DE CASSATION

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;

Vu la demande d'avis formulée le 6 septembre 2016 par le tribunal d'instance de Villefranche-sur-Saône, et ainsi libellée :

"Faut-il réputer non écrites comme abusives, les stipulations insérées au contrat de crédit litigieux prévoyant :

- une subrogation par acte sous seing privé du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur, par application des dispositions de l'article 1250,1°, du code civil,

- un cumul de ladite garantie avec un gage sans dépossession,

- une valeur du bien repris déterminée par son seul prix de revente ?"

Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Sassoust, avocat général, entendu en ses observations orales ;

MOTIFS

1re demande d'avis :

L'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, prévoit que le créancier subrogeant doit recevoir son paiement d'une tierce personne.

N'est pas l'auteur du paiement le prêteur qui se borne à verser au vendeur les fonds empruntés par son client afin de financer l'acquisition d'un véhicule, ce client étant devenu, dès la conclusion du contrat de crédit, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur.

Il s'ensuit qu'est inopérante la subrogation consentie par le vendeur au prêteur dans la réserve de propriété du véhicule.

La clause prévoyant une telle subrogation laisse faussement croire à l'emprunteur, devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, ce qui entrave l'exercice de son droit de propriété et a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

2e demande d'avis :

Si aucune disposition n'interdit au prêteur de bénéficier successivement d'une réserve de propriété, puis d'un gage, sur le bien financé, le passage d'une sûreté à l'autre ne peut toutefois intervenir à l'insu de l'emprunteur.

La clause qui prévoit la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien, est présumée abusive, sauf preuve contraire, par l'article R. 132-2, 6°, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016. Elle laisse de surcroît l'emprunteur, s'il n'est pas tenu informé d'une telle renonciation, dans l'ignorance de l'évolution de sa situation juridique, ce qui est de nature à entraver l'exercice de son droit de propriété. Elle a donc pour effet de créer,au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance précitée.

3e demande d'avis :

Lorsqu'un bien faisant l'objet d'une clause de réserve de propriété au bénéfice du prêteur est repris, la valeur du bien, au sens de l'article 2371 du code civil, imputée à titre de paiement sur le solde de la créance garantie, peut correspondre au prix de revente de ce bien.

De même est-il possible de laisser au prêteur le libre choix du moment de la revente, sans risque de voir s'accroître exagérément les intérêts de retard, dès lors qu'il est de son intérêt de disposer au plus vite du bien.

En revanche, le prix obtenu par le prêteur à l'occasion de cette revente étant généralement inférieur à celui qui pouvait être escompté, le fait de l'autoriser à réaliser le bien repris, sans permettre à l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre, a pour effet d'aggraver la situation financière du débiteur et de créer un déséquilibre significatif à son détriment, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance précitée.

En conséquence,

LA COUR EST D'AVIS QUE :

1°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, prévoyant la subrogation du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur en application des dispositions de l'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, sauf preuve contraire, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, prévoyant la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété grevant le bien financé et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien ; au surplus, doit-elle être réputée non écrite, au sens du même texte, dès lors qu'elle ne prévoit pas d'informer l'emprunteur d'une telle renonciation ;

3°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, ne prévoyant pas, en cas de revente par le prêteur du bien financé grevé d'une réserve de propriété, la possibilité pour l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre.

Fait à Paris, le 28 novembre 2016, au cours de la séance où étaient présents :

M. Louvel, premier président, Mme Flise, M. Guérin, M. Jean, Mme Batut, M. Frouin, Mme Mouillard, M. Chauvin, présidents de chambre, Mme Ladant, conseiller, M. Vitse, conseiller référendaire, rapporteur, assisté de Mme Legohérel, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, M. Sassoust, avocat général, Mme Marcadeux, directeur de greffe.

Le présent avis a été signé par le premier président et le directeur de greffe.

Le directeur de greffe Le premier président

Claire Marcadeux Bertrand Louvel


Synthèse
Formation : Avis
Numéro d'arrêt : 16-70009
Date de la décision : 28/11/2016
Sens de l'arrêt : Avis sur saisine

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Clauses abusives - Définition - Clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties - Applications diverses - Clause ne prévoyant pas, en cas de revente par le prêteur du bien financé grevé d'une réserve de propriété, la possibilité pour l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre

Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, ne prévoyant pas, en cas de revente par le prêteur du bien financé grevé d'une réserve de propriété, la possibilité pour l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre


Références :

article R. 132-2, 6°, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Villefranche-sur-Saône, 06 septembre 2016

Sur le N1 Sur la subrogation conventionnelle en application de l'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, à rapprocher :Com., 28 juin 2011, pourvoi n° 10-20420, Bull. 2011, IV, n° 112 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Avis, 28 nov. 2016, pourvoi n°16-70009, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (premier président)
Avocat général : M. Sassoust
Rapporteur ?: M. Vitse, assisté de Mme Legohérel, auditeur au service de documentation, des études et du rapport

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.70009
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