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30/05/1892 | FRANCE | N°JURITEXT000006952701

France | France, Cour de cassation, Chambre civile, 30 mai 1892, JURITEXT000006952701


ANNULATION, sur le pourvoi de la Société générale de fournitures militaires, d'un Arrêt rendu, le 15 mars 1889, par la Cour d'appel de Paris, au profit du sieur X....

LA COUR,

Ouï, en l'audience publique de ce jour, M. le conseiller Faure-Biguet, en son rapport ; Mes Sabatier et Barry, avocats de la société demanderesse, en leurs observations, ainsi que M. l'avocat général Desjardins, en ses conclusions, et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Statuant par défaut à l'égard de X... ;

Vu l'article 31 de la loi du 24 juillet 1867 ;
>Attendu, d'une part, qu'aux termes de l'article 31 de la loi du 24 juillet 1867 il appartient...

ANNULATION, sur le pourvoi de la Société générale de fournitures militaires, d'un Arrêt rendu, le 15 mars 1889, par la Cour d'appel de Paris, au profit du sieur X....

LA COUR,

Ouï, en l'audience publique de ce jour, M. le conseiller Faure-Biguet, en son rapport ; Mes Sabatier et Barry, avocats de la société demanderesse, en leurs observations, ainsi que M. l'avocat général Desjardins, en ses conclusions, et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Statuant par défaut à l'égard de X... ;

Vu l'article 31 de la loi du 24 juillet 1867 ;

Attendu, d'une part, qu'aux termes de l'article 31 de la loi du 24 juillet 1867 il appartient aux assemblées générales, constituées conformément aux dispositions de cet article, de délibérer souverainement sur les modifications des statuts ; que, d'autre part, l'article 40 des statuts de la Société générale de fournitures militaires ne se borne pas seulement à reproduire cette disposition de la loi ; qu'il décide, en outre, que, d'une manière générale, l'assemblée extraordinaire délibère sur tous les cas non prévus ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, par délibération du 25 juillet 1884, les actionnaires de la société susdite, réunis en assemblée générale extraordinaire, ont décidé de réduire l'évaluation du capital social en le ramenant du chiffre originaire de 19 millions à celui de 10 millions auquel il a été fixé pour l'avenir ; qu'afin de supprimer un nombre d'actions correspondant à l'importance de la dépréciation subie par le capital, les actionnaires ont décidé d'annuler d'abord 8000 actions, dont le groupe des fondateurs faisait abandon, et de substituer ensuite aux 30000 actions que cette annulation laissait subsister 20000 actions nouvelles à répartir entre les associés à raison de deux nouvelles en échange de trois anciennes ;

Attendu que la cour d'appel a prononcé la nullité des résolutions dont s'agit, en se fondant sur ce qu'elles porteraient atteinte aux bases essentielles de la société, et excéderaient, par suite, les pouvoirs de l'assemblée ;

Mais attendu qu'on ne saurait attribuer un semblable caractère à des décisions qui, suivant les constatations mêmes de l'arrêt, tendaient uniquement à mettre l'estimation du fonds social d'accord avec la réalité des faits ; que l'assemblée extraordinaire avait pouvoir de faire cette estimation et de prescrire les mesures qui pouvaient en être la conséquence, à moins qu'une prohibition expresse insérée dans les statuts n'y mît obstacle ; mais qu'il ressort des constatations de l'arrêt que cette prohibition n'existe pas ;

Attendu qu'on ne saurait considérer davantage comme portant atteinte aux bases essentielles de la société, ainsi que l'arrêt attaqué l'a décidé à tort, la sujétion imposée par les résolutions susdites à tout actionnaire ne possédant pas un nombre d'actions divisible par trois, de compléter ou de réduire le nombre de ses titres afin d'en opérer l'échange contre des titres nouveaux ; qu'il appartenait à l'assemblée extraordinaire de prescrire une semblable mesure, comme conséquence de la réduction du capital, si le pacte social ne contenait aucune interdiction à cet égard ;

Attendu que l'arrêt se fonde, en outre, sur une prétendue inégalité que la délibération du 25 juillet 1884 aurait créée, suivant lui, au préjudice des propriétaires d'actions émises en représentation des apports ; que ce grief pourrait être, en effet, de nature à vicier la délibération dont s'agit, s'il était vrai que l'assemblée générale eût méconnu le principe de l'égalité de traitement des associés ; mais que la cour d'appel ne s'est pas, en fait, assez nettement expliquée à cet égard pour qu'il soit possible de vérifier si son appréciation est fondée en droit ; que, par suite, l'arrêt attaqué ne saurait échapper à la cassation, même sur ce dernier point, faute d'avoir mis la Cour de cassation à même d'exercer son contrôle sur le bien-fondé de la décision rendue ;

D'où il suit qu'en prononçant, dans ces circonstances, la nullité de la délibération du 25 juillet 1884, l'arrêt attaqué a violé l'article 31 ci-dessus visé, soit en ne l'appliquant pas, soit en ne justifiant pas légalement son refus de l'appliquer ;

Par ces motifs, CASSE,


Synthèse
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952701
Date de la décision : 30/05/1892
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SOCIETE ANONYME - Assemblées générales des actionnaires - Modifications des statuts - Réduction du capital social

Les actionnaires d'une société anonyme, délibérant en assemblée générale, conformément à l'article 31 de la loi du 24 juillet 1867, ont le droit, sauf prohibition contraire insérée dans les statuts, d'apporter au pacte social toute modification qui ne touche ni à la nature ni à l'objet de la société et qui n'en altère pas les conditions essentielles. N'altère pas les bases essentielles de la société une délibération qui réduit le chiffre du capital social, en supprimant un nombre d'actions correspondant à l'importance de la dépréciation que les apports ont subie depuis la constitution de la société, et qui décide qu'en conséquence de cette suppression chaque associé recevra deux actions nouvelles en échange de trois actions anciennes. Ne porte pas davantage atteinte aux bases essentielles de la société la sujétion qu'une semblable délibération impose à tout actionnaire qui ne possède pas un nombre d'actions divisible par trois, de compléter ou de réduire le nombre de ses titres afin d'en opérer l'échange. Encourt la cassation l'arrêt qui, pour annuler une délibération de l'assemblée générale, se fonde sur ce que cette délibération créerait une inégalité de traitement entre deux catégories d'actionnaires, mais sans justifier cette assertion par des détails permettant à la Cour de cassation de vérifier si l'appréciation de l'arrêt est fondée en droit.


Références :

LOI du 24 juillet 1867 ART. 31

Décision attaquée : Cour d'appel Paris, 15 mars 1889


Publications
Proposition de citation : Cass. Chambre civile, 30 mai. 1892, pourvoi n°JURITEXT000006952701, Bull. civ. des arrêts Cour de Cassation Chambre civile N. 124
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles des arrêts Cour de Cassation Chambre civile N. 124

Composition du Tribunal
Avocat général : Av.Gén. M. Desjardins
Rapporteur ?: Rpr M. Faure-Bignet
Avocat(s) : Av. Demandeur : M. Sabatier, M. Barry

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1892:JURITEXT000006952701
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