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10/01/2006 | FRANCE | N°162

France | France, Cour d'appel de Pau, Ct0055, 10 janvier 2006, 162


JP/CDNuméro /06COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre ARRET DU 10/01/2006

Dossier : 04/01989 Nature affaire :Demande tendant à faire cesser et/ou à sanctionner une contrefaçon ou une atteinte illicite au droit de l'auteur, à un droit voisin du droit d'auteur ou à un droit de producteur de base de données Affaire :Robert X... C/ASSOCIATION COMPETITION EQUESTRE PAU PYRENEES - CEPP,

RÉPUBLIQUE FRANOEAISEAU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS ARRET prononcé par Madame RACHOU, Conseiller,en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile,assistée de Madame PEYRON, Greff

ier,à l'audience publique du 10 janvier 2006date à laquelle le délibéré a été...

JP/CDNuméro /06COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre ARRET DU 10/01/2006

Dossier : 04/01989 Nature affaire :Demande tendant à faire cesser et/ou à sanctionner une contrefaçon ou une atteinte illicite au droit de l'auteur, à un droit voisin du droit d'auteur ou à un droit de producteur de base de données Affaire :Robert X... C/ASSOCIATION COMPETITION EQUESTRE PAU PYRENEES - CEPP,

RÉPUBLIQUE FRANOEAISEAU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS ARRET prononcé par Madame RACHOU, Conseiller,en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile,assistée de Madame PEYRON, Greffier,à l'audience publique du 10 janvier 2006date à laquelle le délibéré a été prorogé. APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 15 Novembre 2005, devant :Monsieur PIERRE, PrésidentMadame RACHOU, ConseillerMadame PERRIER, Conseillerassistés de Madame PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes.Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi. dans l'affaire opposant :APPELANT :Monsieur Robert X... ... 64160 MAUCOR représenté par la SCP MARBOT / CREPIN, avoués à la Courassisté de Me LASSERRE, avocat au barreau de BORDEAUXINTIMEE :ASSOCIATION COMPETITION EQUESTRE PAU PYRENEES - CEPP, représentée par son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siègeMairie de Lons64140 LONSreprésentée par la SCP LONGIN, avoués à la Courassistée de Me RUCCELLA, avocat au barreau de TOULOUSE

sur appel de la décision en date du 02 MARS 2004rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU

Monsieur Robert X..., photographe professionnel spécialisé dans la réalisation de clichés équestres, a été à partir de 1991 le photographe officiel et exclusif du concours complet international organisé chaque année à PAU par l'association COMPETITION EQUESTRE PAU-PYRENEES - dite CEPP.

Un accord de réciprocité de services a été conclu verbalement entre les parties et aux termes duquel Monsieur X... s'engageait à remettre des clichés à l'association CEPP, à charge pour elle de lui fournir pendant les compétitions un certain nombre de prestations lui permettant d'y accomplir son métier de photographe.

Cet accord de réciprocité s'est tacitement renouvelé d'année en année jusqu'en 1999.

Postérieurement à la rupture de l'accord, l'association CEPP a utilisé des photographies de Monsieur X... pour réaliser l'affiche de la manifestation d'octobre 1999.

Le 18 mai 2000, Monsieur X... a fait assigner l'association CEPP devant le tribunal de grande instance de PAU aux fins de voir constater l'utilisation abusive et sans son autorisation de ses oeuvres photographiques et voir la défenderesse condamner à réparer son préjudice économique et moral.

Par jugement en date du 02 mars 2004, ce tribunal a débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes.

Par déclaration en date du 04 mai 2004, Monsieur X... a relevé appel de cette décision.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 septembre 2005.* * *

Par ses dernières conclusions déposées le 22 mars 2005, Monsieur Robert X... demande à la cour :

- vu les articles L. 112-2, L. 122-4 et L.131-2 du Code de la propriété intellectuelle,

- de réformer le jugement déféré ;

- de condamner l'association CEPP à lui payer la somme de 30.503,80 euros en réparation de son préjudice économique et celle de 7.625,95 euros en réparation de son préjudice moral ;

- de condamner l'association CEPP aux dépens de première instance et d'appel et à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il fait valoir :

- que depuis l'intervention de la loi du 03 juillet 1985 la photographie est une oeuvre protégée dès lors qu'elle est originale et qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur ;

- qu'en ce qui le concerne, l'originalité réside dans le choix des sujets, de l'angle des prises de vue ou de l'éclairage ; que ses photographies, qui reflètent l'effort de la monture, la maîtrise du cavalier ou encore son expression de concentration, sont le résultat d'une recherche créative artistique qui ne saurait être niée du seul fait que le cheval et le cavalier arrivent sur l'obstacle à une vitesse certaine ;

- que, si son travail s'était assimilé à une simple opération technique, l'association CEPP n'aurait d'ailleurs pas cherché à le confier à un spécialiste comme lui de ce type d'événement ;

- qu'il n'a remis à l'association CEPP que des tirages authentiques signés dont il a conservé les négatifs et que toute représentation

faite sans son consentement a été illicite ;

- que l'association CEPP n'était pas ainsi qu'elle le prétend autorisée à utiliser des clichés libres de droits ; qu'elle n'est pas non plus fondée à invoquer l'existence d'un contrat d'édition, de représentation ou de production de visuel qui doit nécessairement être passé par écrit et préciser les conditions de la cession des droits d'exploitation, ce qui ne saurait résulter de la simple remise des clichés ou de l'envoi d'une facture ;

- que l'association CEPP a donc violé tant ses droits patrimoniaux que son droit moral ;

- que le nombre exact de publications abusives n'est pas connu de lui ; que, toutefois, les seuls chiffres de l'année 1999 en démontrent l'importance puisque ce sont 15.000 tracts, 8.000 billets d'entrée, 25.000 dépliants publicitaires, outre des annonces qui ont été diffusés pour la manifestation d'octobre 1999 ;

- qu'enfin l'association CEPP sollicite le remboursement de dépenses qu'elle aurait engagées dans son intérêt de 1991 à 1998, mais que cette demande ne peut prospérer alors que les avantages qui lui ont été consentis l'ont été en sa qualité de photographe officiel et non en contrepartie de la cession de droits d'auteur. * * *

Par ses dernières conclusions déposées le 22 mars 2005, l'association COMPETITION EQUESTRE PAU-PYRENEES -CEPP- demande la confirmation de la décision entreprise et la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 1.600 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle répond :

- qu'elle ne s'est rendue coupable d'aucune utilisation abusive des photographies, et ce à double titre ;

- qu'en effet et en premier lieu ainsi qu'il l'est dit à l'article L.

131-2 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle, l'accord conclu en 1991 entre dans la catégorie de ceux pour lesquels l'écrit n'est pas requis à titre de validité mais uniquement à titre probatoire puisqu'il n'a porté ni sur une matière théâtrale (contrat de représentation), ni sur une matière littéraire (contrat d'édition) ou encore audiovisuelle (contrat de production) ; que la preuve de la cession des droits d'auteur peut donc être rapportée selon les règles de droit commun et par tous moyens puisque le prix de vente de chaque cliché a été inférieur à 800 euros ; qu'or la remise volontaire par Monsieur X... et en toute connaissance de cause des négatifs des clichés a clairement manifesté son intention d'autoriser leur utilisation sur tous les supports de communication de la compétition ; qu'au demeurant, l'utilisation qui en a été faite pendant huit années sans aucune protestation de sa part démontre de manière flagrante que la cession s'est opérée libre de droits ;

- qu'au surplus et en second lieu, les clichés en cause, pris pendant le déroulement de la compétition, ne sont pas d'une originalité telle qu'ils permettent de distinguer une action ou une pensée intellectuelle protégeable au sens de l'article L. 112-2 du Code de la propriété intellectuelle ; que si, depuis la loi du 03 juillet 1985, il n'est plus exigé que ces oeuvres, pour être protégées, présentent un caractère artistique ou documentaire, elles ne font toutefois naître au profit de leur auteur un droit de propriété intellectuelle qu'à la condition qu'elles soient le fruit d'une création originale, qui fait totalement défaut en l'espèce.

A titre subsidiaire, l'association CEPP met en avant le caractère excessif des demandes indemnitaires formées par Monsieur X....

Elle demande enfin, dans l'hypothèse où la cour ne retiendrait pas l'existence d'un contrat de réciprocité de services, la condamnation de Monsieur X... à lui rembourser les dépenses qu'elle a engagées

pour lui permettre l'exercice de sa profession de photographe pendant le déroulement des manifestations et qui ont consisté en la mise à disposition d'un stand, en l'insertion d'une publicité dans le programme officiel des compétitions, en la diffusion de messages publicitaires sonores et en la fourniture de repas.

SUR CE LA COUR

Attendu que des relations contractuelles ont existé entre les parties de 1991 à 1998 inclus et que Monsieur X... reproche à l'association CEPP d'avoir reproduit sans son autorisation sur divers documents ou supports publicitaires, pendant le cours et après la rupture de ces relations, des photographies qu'il avait réalisées au cours des manifestations hippiques organisées par l'association ;

Que Monsieur X... fonde son action sur les dispositions du Code de la propriété intellectuelle qui reconnaissent à l'auteur d'une oeuvre de l'esprit un droit de propriété incorporelle et exclusif sur celle-ci, et en particulier sur l'article L. 112-2 de ce code qui fait figurer l'oeuvre photographique au nombre des oeuvres protégées ;

Attendu que depuis l'entrée en vigueur le 01 janvier 1986 de la loi du 03 juillet 1985, les photographies sont une oeuvre protégée à la condition qu'elles soient originales et qu'elles portent l'empreinte de la personnalité de leur auteur ;

Qu'en l'espèce, les photographies litigieuses sont constituées pour une première série de scènes saisies lors d'exercices de sauts en extérieur, montrant de profil ou de semi-profil le cavalier et sa monture en plein effort en train de s'élever au dessus de l'obstacle, et pour une seconde série de la pose des lauréats avec leur monture après la remise des prix ;

Que seule le première série prête à discussion puisque la seconde est

d'une évidente extrême banalité ;

Que cette première série est certes le résultat d'une maîtrise technique de son auteur, photographe professionnel de son état ; qu'elle a cependant été réalisée sans que le photographe, qui n'a joué aucun rôle dans la phase préparatoire à la prise des clichés, n'ait pu vraiment décidé ni du lieu, ni du moment où la photographie devait être prise, ni de l'élaboration du cadre ou d'un éclairage particulier, ni encore de la position du cavalier et de sa monture ; que la représentation qui en est donnée n'est donc ni particulièrement originale, ni révélatrice d'une véritable création ;

Qu'il convient donc de dire que ces photographies ne peuvent bénéficier de la protection du droit d'auteur et de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes ;

Attendu qu'il est établi, malgré l'absence d'écrit, qu'en contrepartie de la fourniture à l'association CEPP de clichés de la compétition libres de droit de reproduction, celle-ci s'est engagée à fournir gracieusement à Monsieur X... un certain nombre de prestations ; qu'elle doit par conséquent et au plus fort voir rejeter sa demande indemnitaire présentée à titre subsidiaire ;

Attendu qu'il est de l'équité de condamner Monsieur X... qui succombe en son appel et doit en supporter les entiers dépens, de payer à l'association CEPP la somme de 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de PAU en date du 02 mars 2004.

Y ajoutant,

Condamne Monsieur X... à payer à l'association COMPETITION EQUESTRE PAU-PYRENEES la somme de mille deux cents euros (1.200 ç) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne Monsieur X... aux dépens de l'appel.LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,

Mireille PEYRON

Bernard PIERRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Ct0055
Numéro d'arrêt : 162
Date de la décision : 10/01/2006

Analyses

PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droit d'auteur - Objet - Oeuvre protégée

L'application de l'article L.112-2 du code de propriété intellectuelle et de la loi du 03 avril 1986 n'est pas fondée dès lors que l'oeuvre n'est ni originale, ni révélatrice d'une véritable création


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. Pierre, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.pau;arret;2006-01-10;162 ?
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