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05/11/2014 | FRANCE | N°13-19666

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 novembre 2014, 13-19666


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article L. 1233-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagée le 1er décembre 1995 en qualité de responsable promotion par la société Jacques Jaunet, aux droits de laquelle se trouve la société New Man, Mme X..., qui exerçait en dernier lieu les fonctions de directrice de la communication, a été licenciée pour motif économique par une lettre du 5 février 2010 en même temps que trente huit autres salariés de l'entrepr

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Attendu que pour déclarer nul le licenciement de cette salariée et con...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article L. 1233-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagée le 1er décembre 1995 en qualité de responsable promotion par la société Jacques Jaunet, aux droits de laquelle se trouve la société New Man, Mme X..., qui exerçait en dernier lieu les fonctions de directrice de la communication, a été licenciée pour motif économique par une lettre du 5 février 2010 en même temps que trente huit autres salariés de l'entreprise ;
Attendu que pour déclarer nul le licenciement de cette salariée et condamner l'employeur à lui verser une somme à titre de dommages-intérêts de ce chef, la cour d'appel énonce que la société New Man est mal fondée à soutenir que, s'agissant de procéder au licenciement de l'intéressée, elle n'avait pas à mettre en oeuvre un ordre des licenciements au motif qu'elle aurait été la seule dans sa catégorie professionnelle pour être l'unique directeur de la communication alors qu'il y avait au sein de l'entreprise plusieurs cadres de direction ou cadres supérieurs responsables d'un service et que la salariée détenait une formation de haut niveau en marketing et management permettant de considérer qu'elle pouvait remplir des fonctions d'encadrement de services ressortant d'une autre spécialité que la communication ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'appartiennent à une même catégorie professionnelle les salariés qui exercent dans l'entreprise des activités de même nature supposant une formation professionnelle commune, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si la salariée, directrice de la communication, exerçait des fonctions de même nature que celles exercées par les autres chefs de service, n'a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare nul le licenciement de Mme X... et condamne la société New Man à lui payer de ce chef une indemnité de 100 000 euros avec intérêts au taux légal, l'arrêt rendu le 16 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société New Man.
Il EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré nul le licenciement de Madame Karine X... et d'avoir condamné la société New Man à lui payer de ce chef une indemnité de 100.000 euros avec intérêts ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... estime son licenciement nul car discriminatoire dans la mise en oeuvre de l'ordre des licenciements ; qu'aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte en raison, notamment, de son sexe, de sa situation de famille ou de sa grossesse ; qu'aux termes de l'article L.1134-1 du code du travail, il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte de présenter des éléments de fait laissant supposer son existence ; qu'il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'une telle discrimination, et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la discrimination procède d'un traitement différent en raison de l'un des motifs prohibés par la loi ; que faisant valoir que parmi les cadres de son niveau responsables de service, elle a été la seule à être licenciée alors que parmi eux, elle était la seule à être de sexe féminin et qu'elle revenait d'un congé de maternité, Madame X... invoque une discrimination liée à son sexe et au fait qu'elle reprenait son travail après avoir bénéficié d'un congé de maternité ; que parmi le personnel de l'ensemble de l'entreprise, c'est par catégorie professionnelle que s'établit l'ordre des licenciements ; que constituent une catégorie professionnelle l'ensemble des salariés qui, au sein de l'entreprise, exercent des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'en l'espèce, aux termes du projet de licenciement collectif pour motif économique concernant 39 salariés soumis le 27 novembre 2009 au comité d'entreprise, la société New Man a d'ailleurs expressément indiqué que les critères d'ordre des licenciements s'apprécieraient par catégorie professionnelle définie comme l'ensemble des salariés qui exercent des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'elle a ensuite précisé que les critères d'ordre seraient classés comme suit : en premier lieu les qualités professionnelles développées dans le poste occupé avec une évaluation de 1 à 6, en second lieu les charges de famille évaluées par enfant en charge, en troisième lieu l'ancienneté évaluée 0,1 point par année avec un maximum de 3 points pour 30 ans et plus d'ancienneté, en quatrième lieu une attribution supplémentaire de points pour les personnes présentant des caractéristiques sociales particulièrement difficiles ; qu'il ressort de la définition ci-dessus rappelée que contrairement aux allégations de l'intimée, la catégorie professionnelle ne se réduit pas à un emploi déterminé avec ses missions spécifiques, en l'occurrence l'emploi de directrice de la communication ; que dotée d'une formation en management et marketing acquise, notamment, dans le cadre d'une formation continue suivie au sein de grandes écoles de commerce telles HEC et l'école Audencia de Nantes, et chargée de diriger le service communication de la société Newman Madame X... est bien fondée à soutenir qu'elle relevait de la catégorie professionnelle des cadres de direction ou cadres supérieurs responsables d'un service ; qu'elle n'est pas contredite lorsqu'elle soutient qu'il y a au sein de l'entreprise d'autres cadres de direction responsables d'un service mais que parmi eux, elle était la seule la femme, l'employeur n'alléguant pas le contraire ; que la société Newman est donc mal fondée à soutenir que s'agissant de procéder au licenciement de Madame X..., elle n'avait pas à mettre en oeuvre un ordre des licenciements au motif qu'elle aurait été seule dans sa catégorie professionnelle pour être l'unique directeur de la communication ; que la salariée n'est pas plus contredite lorsqu'elle soutient avoir été la seule cadre de direction responsable d'un service concernée par le licenciement économique collectif dont s'agit mis en oeuvre à la fin de l'année 2009 ; qu'établissant que il y avait, au sein de l'entreprise, plusieurs cadres de direction ou cadres supérieurs responsables d'un service, - tous les autres étaient des hommes - elle détenait une formation de haut niveau en marketing et management permettant de considérer qu'elle pouvait remplir des fonctions d'encadrement de services ressortant d'une autre spécialité que la communication, ce que l'employeur ne discute pas ¿ néanmoins, de son propre aveu, ce dernier n'a pas mis en oeuvre d'ordre des licenciements de sorte qu'elle a été désignée d'autorité pour être licenciée, alors qu'elle était la seule femme cadre de direction ou cadre supérieure responsable d'un service et qu'elle revenait d'un congé de maternité, Madame X... présente des éléments de fait laissant supposer l'existence à son égard dans le cadre de son licenciement d'une discrimination liée à son sexe, voire à sa récente grossesse ayant donné lieu à un congé de maternité jusqu'au 17 décembre 2009 ; qu'attendu que la société Newman est défaillante à prouver que sa décision de licencier Madame X... serait justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en effet, comme la cour l'a précédemment relevé, c'est à tort qu'elle soutient qu'elle n'avait pas à mettre en oeuvre un ordre des licenciements au motif que l'appelante aurait constitué une catégorie professionnelle à elle toute seule ; qu'il est en outre inopérant de sa part de soutenir que d'autres femmes ont été concernées par le licenciement économique dont s'agit mis en oeuvre à la fin de l'année 2009 dès lors qu'elle ne conteste pas que Madame X... était la seule femme licenciée dans sa catégorie professionnelle ; qu'il est donc indifférent à la solution du présent litige qu'aient été concernées par ce licenciement collectif d'autres femmes appartenant à une autre ou à d'autres catégories professionnelles ; qu'il est tout aussi indifférent que d'autres directrices aient pu être licenciées antérieurement ; que l'intimée n'apportant aucun élément objectif afin de justifier que sa décision de licencier Madame X... serait étrangère à toute discrimination, il convient de déclarer le licenciement nul en application de l'article L.1152-3 ;
1. ALORS QUE le caractère économique du licenciement et son caractère réel et sérieux peuvent constituer la démonstration de ce que la discrimination alléguée tirée du prétendu choix d'une femme parmi les cadres de haut niveau, n'existe pas, la suppression du poste de directrice de la communication étant rendue nécessaire par les difficultés de l'entreprise et étant totalement étrangère à la personnalité de sa titulaire ; qu'en s'abstenant totalement de s'expliquer sur la cause économique du licenciement, sur son caractère réel et sérieux, et donc sur la totale absence de prise en compte du moindre élément personnel propre à Madame X..., la cour d'appel n'a pas examiné l'ensemble des éléments apportés par l'employeur en réponse à l'allégation de discrimination, et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1132-1, L.1132-4 et L.1134-1 du code du travail ;
2. ALORS QUE la méconnaissance de l'ordre des licenciements, quelle qu'en soit la cause, n'affecte pas la validité du licenciement ; qu'en jugeant que l'existence d'une discrimination dans l'ordre des licenciements rendait nul le licenciement de Madame X..., et en faisant application, pour l'indemnisation de son préjudice, des principes applicables en cas de nullité du licenciement, à savoir l'octroi d'une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaires, la cour d'appel a violé l'article L.1233-5 du code du travail ;
3. ALORS, en tout état de cause, QUE la catégorie professionnelle qui sert de base à l'établissement de l'ordre des licenciements regroupe l'ensemble des salariés qui exercent dans l'entreprise des activités de même nature supposant une formation professionnelle commune et qui sont ainsi interchangeables ; qu'en affirmant que les cadres de direction ou les cadres supérieurs responsables d'un service forment une même catégorie professionnelle, quand les fonctions de chef de service impliquent des compétences et une formation spécifiques selon le service concerné, la cour d'appel a violé l'article L.1233-5 du code du travail ;
4. ALORS QU'en se déterminant comme elle l'a fait sans vérifier si, compte tenu de la réalité des tâches effectuées et de l'organisation de l'entreprise, les responsables de service exerçaient des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, quel que soit le service concerné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du même texte.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-19666
Date de la décision : 05/11/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel d'Angers, 16 avril 2013, 11/01063

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 16 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 nov. 2014, pourvoi n°13-19666


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19666
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