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26/10/2010 | FRANCE | N°09-41044;09-41045;09-41046;09-41047

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2010, 09-41044 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° Z 09-41.044, n° A 09-41.045, n° B 09-41.046 et n° C 09-41.047 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 7 janvier 2009), que MM. X..., Y..., Z... et A... sont salariés de la société National starch et chemical (NSC) dont l'activité relève de la Convention collective nationale des industries chimiques ; que jusqu'à la fin du mois de novembre 2000, leur durée mensuelle de travail était fixée à 165,23 heures incluant les vingt minutes de

pause légale ; que dans une note du 30 novembre 2000 intitulée "Application ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° Z 09-41.044, n° A 09-41.045, n° B 09-41.046 et n° C 09-41.047 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 7 janvier 2009), que MM. X..., Y..., Z... et A... sont salariés de la société National starch et chemical (NSC) dont l'activité relève de la Convention collective nationale des industries chimiques ; que jusqu'à la fin du mois de novembre 2000, leur durée mensuelle de travail était fixée à 165,23 heures incluant les vingt minutes de pause légale ; que dans une note du 30 novembre 2000 intitulée "Application des 35 heures - Modification du bulletin de salaire", la direction a informé le personnel posté que le salaire mensuel serait désormais ventilé en "salaire de base pour 152,18 h de travail effectif par mois" et "pause lissée pour 10,88 h par mois", le total représentant "exactement le salaire mensuel correspondant auparavant à l'horaire conventionnel de 38 heures incluant les pauses payées" ; que les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de majorations pour heures supplémentaires ainsi que de dommages-intérêts pour non-respect des repos compensateurs ;
Attendu que la société National starch et chemical fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur peut, à l'occasion du passage aux 35 heures, dénoncer un usage dès lors que la décision de l'employeur qui résulte de l'application de cette nouvelle législation porte sur le même objet que l'usage ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que jusqu'en octobre 2000, s'était instauré un usage consistant à intégrer les temps de pause dans l'horaire mensuel de travail et, partant, à en tenir compte pour déterminer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ; que la cour d'appel a encore constaté qu'à l'occasion du passage aux 35 heures, le personnel avait été informé qu'à compter de novembre 2000, les bulletins de salaire distingueraient le salaire de base, calculé sur la durée légale du travail, des temps de pause, rémunérés au taux normal, ce dont il résultait que ces temps de pause n'étaient plus intégrés dans l'horaire mensuel de travail ; qu'en affirmant péremptoirement et par principe que l'application des 35 heures ne pouvait s'analyser en une dénonciation d'un tel usage, sans mieux justifier sa décision dont il résultait que la décision de l'employeur portait sur le même objet que l'usage litigieux, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en tout état de cause que l'application de la loi sur les 35 heures ouvre seulement droit, pour le salarié, au maintien du niveau de sa rémunération ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que jusqu'au passage aux 35 heures, la rémunération allouée au salarié était calculée sur la base d'une durée mensuelle de travail de 165, 23 heures intégrant 10H88 de temps de pause et que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires était ainsi fixé à 165, 23 heures d'une part, qu'à compter de la mise en oeuvre de la législation sur les 35 heures, la rémunération du salarié était calculée sur la base d'une durée mensuelle de travail de 152, 18 heures auxquelles venaient s'ajouter 10H88 d'heures de pause, toujours rémunérées au taux normal, en sorte que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires était désormais fixé à 163,06 heures d'autre part; qu'en décidant que les 10H88 de temps de pause devaient être rémunérées au taux majoré au prétexte inopérant qu'elles avaient été intégrées dans l'horaire légal de travail et avaient ainsi servi à déterminer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, quand il résultait de ses propres constatations que le niveau de la rémunération du salarié avait été maintenu, la cour d'appel a violé les articles L. 1222-7 et L.1221-1 du code du travail ;
3°/ que subsidiairement, que le temps de pause n'est considéré comme du temps de travail effectif que lorsque le salarié est, pendant cette période, à la disposition de son employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a seulement constaté la volonté initiale de l'employeur d'intégrer les temps de pause à l'horaire mensuel de travail et, partant, de les rémunérer à un taux normal ; que la cour d'appel n'a ainsi à aucun moment constaté la volonté de l'employeur de rémunérer les temps de pause à un taux majoré dans l'hypothèse où ils dépasseraient l'horaire mensuel de travail effectif ; que dès lors, en condamnant l'employeur à payer ces temps de pause à un taux majoré lorsqu'ils n'étaient plus intégrés à l'horaire légal de travail, sans constater que les salariés étaient effectivement, pendant l'intégralité de ces temps de pause, à la disposition de leur employeur et devaient se conformer à ses directives la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.3121-2 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté l'existence, jusqu'au mois de novembre 2000, d'un usage dans l'entreprise consistant à assimiler les temps de pause à du temps de travail effectif, la cour d'appel, qui a exactement retenu que l'application du régime des 35 heures ne pouvait valoir dénonciation régulière d'un tel usage, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société National starch et chemical aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à MM. X..., Y..., Z... et A... la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit aux pourvois n° Z 09-41.044, n° A 09-41.045, n° B 09-41.046 et n° C 09-41.047 par de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux conseils pour la société National starch et chemical,
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le temps de pause était constitutif d'un temps de travail effectif qui devait être rémunéré comme tel à compter du mois de novembre 2000, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société NATIONAL STARCH ET CHEMICAL à payer à Monsieur Christian X... pour la période de novembre 2000 à décembre 2006, d'une part, les sommes respectives de 2.490, 84 à titre de majorations légales des heures supplémentaires effectuées et de 249, 08 € au titre des congés payés afférents, celles de 107, 49 € et de 10, 75 € pour la période de janvier 2007 à mars 2007, celles de 437, 88 € et de 43,79 € pour la période d'avril 2007 à mars 2008, celles de 337, 14 € et de 33, 71 € pour la période d'avril à décembre 2008, et, d'autre part, pour la période de novembre 2000 à décembre 2006, les sommes respectives de 339, 50 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives aux repos compensateurs, pour l'année 2007 celle de 72, 66 €, et pour l'année 2008, celle de 74, 44 € et d'AVOIR ordonné la remise des bulletins de salarie rectifiés ;
AUX MOTIFS QUE «dans une note datée du 30 novembre 2000 intitulée « Applications des 35 Heures - Modification du bulletin de salaire », la direction de cette société informait son personnel posté, alors qu'il n'est pas discuté que jusqu'au mois de novembre 2000 la durée du travail était fixée à 165,23 heures, que le salaire mensuel serait désormais détaillé comme suit :- salaire de base : 152,18 h de travail effectif par mois,- pause lissée : 10,88 h par mois le total représentant exactement le salaire mensuel correspondant auparavant à l'horaire conventionnel de 38 heures incluant les pauses payées. Les heures supplémentaires sont calculées sur le cycle de travail par rapport à un temps de travail effectif hebdomadaire moyen de 35 heures et non plus sur la semaine calendaire. Attention : en 2001 (comme en 2000) le contingent d'HS reste fixé à 150 par an et maintien du calcul du repos compensateur (…).En application de l'article L.212-4 alinéa 2 du code du travail devenu l'article L.3121-2, le temps consacré aux pauses est considéré comme du temps de travail effectif lorsque le salarié est à la disposition de l'employeur et qu'il doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; il en résulte que les temps d'inaction ne peuvent être pris en considération pour l'appréciation du droit aux majorations pour heures supplémentaires que si une convention collective ou un usage prévoit leur assimilation à un temps de travail effectif ; dans le compte-rendu de réunion des délégués du personnel du 12 juillet 1994, il est rappelé que le travail posté comporte trois pauses par poste : une de trente minutes pour le repas (pause conventionnelle) et une pause de dix minutes par demi journée (usage interne) ; Monsieur X... soutient qu'antérieurement au passage aux 35 heures, il existait un usage jamais dénoncé ayant consisté à considérer les pauses comme du travail effectif et à les prendre en compte pour le paiement des heures supplémentaires ce dont il estime fondé à se prévaloir ; il n'est pas contesté comme cela peut être vérifié à l'examen des bulletins de salaires produits que jusqu'au passage aux 35 heures intervenu au mois d'octobre 2000, la rémunération allouée était calculée sur la base d'une durée mensuelle de travail de 165, 23 heures intégrant alors les 10,88 h de pause, date à compter de laquelle l'employeur a introduit une distinction en faisant apparaître séparément sur les bulletins de salaire le salaire mensuel fixé à 152, 18 h et la pause lissée fixée à 10h88 ; il convient ainsi de constater, alors même qu'en application des dispositions du chapitre III article IX de l'avenant n° 1 de la convention collective de la chimie rappelées dans le compte-rendu de la réunion du 3 juin 1992 avec les délégués du personnel l'employeur avait comme seule obligation de rémunérer comme temps effectif de travail la pause conventionnelle, qu'au titre de la période ayant couru jusqu'au passage des 35 heures non seulement la totalité des heures de pause ont été payées à l'identique des heures normales de travail effectif mais qu'au surplus elles ont été intégrées dans l'horaire légal de travail et ont ainsi servi à déterminer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ce qui caractérise la volonté de l'employeur de créer un droit au profit du salarié ; la société NATIONAL STARCH ET CHEMICAL ne conteste pas que la pratique ainsi instituée a bénéficié à l'ensemble des salariés postés, qu'elle a été mise en ..uvre sur une période importante pour avoir perduré jusqu'à la réduction du temps de travail et qu'enfin elle n'a pas varié dans ses modalités de mise en oeuvre, ce dont il se déduit qu'elle répond aux critères de constance, de généralité et de fixité exigés pour caractériser l'existence d'un usage ; l'application des 35 heures ne pouvant s'analyser en une dénonciation d'un tel usage, Monsieur X... est donc bien fondé à se prévaloir d'un usage ayant considéré les temps de pause comme du temps de travail effectif et à demander en conséquence que le paiement des heures de pause suive le régime des heures supplémentaires, celles-ci étant en effet payées depuis le mois d'octobre 2000 en sus de celles effectuées dans le cadre de la durée légale de travail ; en l'absence de contestation quant aux modalités de calcul réclamées, il sera fait droit au plein des demandes de Monsieur X... » ;
1) ALORS QUE l'employeur peut, à l'occasion du passage aux 35 heures, dénoncer un usage dès lors que la décision de l'employeur qui résulte de l'application de cette nouvelle législation porte sur le même objet que l'usage ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a considéré que jusqu'en octobre 2000, s'était instauré un usage consistant à intégrer les temps de pause dans l'horaire mensuel de travail et, partant, à en tenir compte pour déterminer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ; que la Cour d'appel a encore constaté qu'à l'occasion du passage aux 35 heures, le personnel avait été informé qu'à compter de novembre 2000, les bulletins de salaire distingueraient le salaire de base, calculé sur la durée légale du travail, des temps de pause, rémunérés au taux normal, ce dont il résultait que ces temps de pause n'étaient plus intégrés dans l'horaire mensuel de travail ; qu'en affirmant péremptoirement et par principe que l'application des 35 heures ne pouvait s'analyser en une dénonciation d'un tel usage, sans mieux justifier sa décision dont il résultait que la décision de l'employeur portait sur le même objet que l'usage litigieux, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS en tout état de cause QUE l'application de la loi sur les 35 heures ouvre seulement droit, pour le salarié, au maintien du niveau de sa rémunération ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que jusqu'au passage aux 35 heures, la rémunération allouée au salarié était calculée sur la base d'une durée mensuelle de travail de 165, 23 heures intégrant 10H88 de temps de pause et que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires était ainsi fixé à 165, 23 heures d'une part, qu'à compter de la mise en oeuvre de la législation sur les 35 heures, la rémunération du salarié était calculée sur la base d'une durée mensuelle de travail de 152, 18 heures auxquelles venaient s'ajouter 10H88 d'heures de pause, toujours rémunérées au taux normal, en sorte que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires était désormais fixé à 163,06 heures d'autre part ;qu'en décidant que les 10H88 de temps de pause devaient être rémunérées au taux majoré au prétexte inopérant qu'elles avaient été intégrées dans l'horaire légal de travail et avaient ainsi servi à déterminer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, quand il résultait de ses propres constatations que le niveau de la rémunération du salarié avait été maintenu, la Cour d'appel a violé les articles L. 1222-7 et L.1221-1 du code du travail ;
3) ALORS, subsidiairement, QUE le temps de pause n'est considéré comme du temps de travail effectif que lorsque le salarié est, pendant cette période, à la disposition de son employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a seulement constaté la volonté initiale de l'employeur d'intégrer les temps de pause à l'horaire mensuel de travail et, partant, de les rémunérer à un taux normal ; que la Cour d'appel n'a ainsi à aucun moment constaté la volonté de l'employeur de rémunérer les temps de pause à un taux majoré dans l'hypothèse où ils dépasseraient l'horaire mensuel de travail effectif ; que dès lors, en condamnant l'employeur à payer ces temps de pause à un taux majoré lorsqu'ils n'étaient plus intégrés à l'horaire légal de travail, sans constater que les salariés étaient effectivement, pendant l'intégralité de ces temps de pause, à la disposition de leur employeur et devaient se conformer à ses directives la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.3121-2 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-41044;09-41045;09-41046;09-41047
Date de la décision : 26/10/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Lyon, 7 janvier 2009, 07/06806

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 07 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2010, pourvoi n°09-41044;09-41045;09-41046;09-41047


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.41044
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