LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (Limoges, 12 novembre 2009), que Mme X..., engagée en 1969 en qualité de secrétaire par la société Dong Trieu, devenue la société Total, puis la Société des mines de Jouac (la SMJ), filiale de la société Cogema, a adhéré en novembre 2002 à un plan de départ à la retraite anticipée lui garantissant notamment une allocation égale à 70 % de son salaire brut d'activité ; que la salariée a cessé de faire partie des effectifs le 1er avril 2003 pour percevoir dès cette date une pension de retraite anticipée ; qu'un accord salarial collectif a été conclu le 18 juin 2003 au sein de la société Cogema prévoyant diverses mesures d'augmentation salariales applicables au 1er janvier 2003 pour le personnel relevant du secteur des mines ; que par note d'information du 21 août 2003, la SMJ a réservé l'application de cet accord aux agents présents dans l'effectif au 2 septembre 2003 ; qu'estimant devoir bénéficier de l'accord du 18 juin 2003 pour sa présence dans l'entreprise jusqu'au 31 mars 2003, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que la SMJ fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à Mme X... une somme au titre de l'augmentation de salaire par application de l'accord salarial Cogema du 18 juin 2003, une autre somme à titre de dommages-intérêts et une indemnité pour frais irrépétibles, alors, selon le moyen :
1°/ que, faute d'indiquer en quoi Mme X... relèverait de l'accord salarial de la Cogema conclu au sein de cette entreprise le 18 juin 2003 pour le personnel du secteur des mines, le conseil des prud'hommes, qui écarte de ce fait l'engagement unilatéral particulier du 21 août 2003 s'appliquant au sein de la SMJ, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 2232-30, L. 2254-1 et L. 2261-3 du code du travail ;
2°/ qu'en réduisant la "note d'information du 21 août 2003" distribuée par elle-même à une simple mesure d'application de l'accord Cogema sans répondre à ses conclusions faisant valoir qu'il s'agissait d'un engagement unilatéral autonome, le conseil des prud'hommes a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que sa "note d'information" du 21 août 2003 précisait qu'au titre de l'année 2003, les modalités salariales étaient arrêtées pour les agents présents le 2 septembre 2003 et qu'elle était destinée "au personnel en activité" de sorte que viole cet engagement unilatéral ainsi que l'article L. 2254-1 du code du travail, le jugement qui décide de faire bénéficier du mode de calcul rétroactif des augmentations octroyées aux salariés, les retraités ne se trouvant plus, de ce fait, dans le champ d'application de cet acte ;
4°/ que très subsidiairement, et à le supposer applicable, l'accord Cogema du 18 juin 2003 ne pouvait davantage, à défaut de stipulation prévoyant son extension au-delà du personnel lié à l'entreprise par un contrat de travail, s'appliquer à des personnes ne faisant plus partie des effectifs lors de sa signature ; qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil des prud'hommes a violé les articles 1134 et 1165 du code civil et L. 2254-1 du code du travail ;
Mais attendu que la SMJ s'étant elle-même prévalue devant les juges du fond de son engagement unilatéral du 4 juin 2002 aux termes duquel elle s'était engagée à faire bénéficier son personnel à compter du 1er janvier 2003 des augmentations accordées à celui de la société Cogema, le conseil de prud'hommes a exactement décidé que la salariée, dont la préretraite devait être égale à 70 % de son salaire d'activité, était fondée, nonobstant la clause de la note du 21 août 2003 limitant ce bénéfice au seul personnel présent dans l'entreprise qui, en l'absence de dénonciation régulière de l'engagement précédent, était dépourvue d'effet, à revendiquer pour sa présence dans l'entreprise jusqu'au 31 mars 2003 l'augmentation salariale prévue par l'accord collectif de la société Cogema du 18 juin 2003 ; que le moyen, irrecevable en sa première branche comme étant contraire à ce qui était soutenu devant les juges du fond, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société des mines de Jouac aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Société des mines de Jouac à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la Société des mines de Jouac
Le pourvoi reproche au jugement attaqué d'avoir condamné la SMJ à verser à Madame X..., retraitée, les sommes de 583, 94 euros brut au titre d'augmentation de salaire par application de l'accord salarial COGEMA du 18 juin 2003, 500 euros à titre de dommages et intérêts et 750 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE «La Société DONG TRIEU est devenue pour sa part en 1986 la Société TOTAL compagnie minière de France, puis la Société des mines de Jouac en 1993. Cette dernière a du supporter l'effondrement des cours de l'uranium, la recherche n'ayant pu confirmer de nouvelles réserves d'uranium, la Société SMJ a été contrainte d'élaborer un plan social. C'est dans le cadre de ce plan social qu'est intervenue la rupture du contrat de travail de Madame X... le 31 mars 2003. Madame X... a bénéficié d'une retraite anticipée. La SMJ n'a pas appliqué l'accord salarial ratifié le 18 juin 2003, qui prévoyait une augmentation de 0,7% au 1er janvier 2003 et 0,7% au 1er septembre 2003. Cet accord précisait qu'une prime de 40 euros sera versée à l'ensemble du personnel en activité à la date de signature de l'accord. La direction de la société SMJ s'est crue obligée le 21 août 2003 de produire une note d'information qu'elle a rappelée dans le courrier du 8 novembre 2004 à Madame X... précisant « au titre de l'année 2003 les mesures salariales suivantes sont arrêtées pour les agents présents le 2 septembre 2003. » En l'espèce, l'accord ratifié en date du 18 juin 2003 précise qu'une augmentation générale uniforme de 3 euros sera appliquée au 1er janvier 2003 au titre de l'exercice 2002. Au titre de l'exercice 2003, les mesures d'augmentation générale seront appliquées de la façon suivante : 0,7% au 1er janvier 2003, 0,7% au 1er septembre 2003. En aucun cas l'article 1 appelé « augmentations générales » ne fait référence à l'état de présence ou de non présence des salariés au moment de sa conclusion soit le 18 juin 2003. Ce qui est par contre le cas dans l'article 3 appelé « prime ». Une prime uniforme sera versée à l'ensemble du personnel en activité à la date de signature de l'accord ». En conséquence, Madame X... est bien fondée en sa demande et le Conseil lui accorde la somme de 583,94 euros brut. »
ALORS D'UNE PART QUE faute d'indiquer en quoi Madame X..., ancienne salariée de la Société SMJ, relèverait de l'accord salarial « COGEMA 2003 secteurs mines » conclu au sein de cette entreprise le 18 juin 2003, la Cour d'appel, qui écarte de ce fait l'engagement unilatéral particulier du 21 août 2003 s'appliquant au sein de la SMJ a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1, L.2232-30, L.2254-1 et L.2261-3 du code du travail.
ALORS D'AUTRE PART, QU'en réduisant la "note d'information du 21 août 2003" distribuée par la SMJ à une simple mesure d'application de l'accord COGEMA sans répondre aux conclusions de la société exposante (p. 8 et p. 9) faisant valoir qu'il s'agissait d'un engagement unilatéral autonome, le Conseil des Prud'hommes a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS DE TROISIEME PART, que la "note d'information" de la SMJ en date du 21 août 2003 précisait qu'au titre de l'année 2003, les modalités salariales étaient arrêtées pour les agents présents le 2 septembre 2003 et qu'elle était destinée "au personnel en activité" de sorte que viole cet engagement unilatéral ainsi que l'article L.2254-1 du Code du travail, le jugement qui décide de faire bénéficier du mode de calcul rétroactif des augmentations octroyées aux salariés, les retraités ne se trouvant plus, de ce fait, dans le champ d'application de cet acte ;
ALORS DE QUATRIEME PART ET TRES SUBSIDIAIREMENT, qu'à le supposer applicable, l'accord COGEMA du 18 juin 2003, ne pouvait davantage, à défaut de stipulation prévoyant son extension au-delà du personnel lié à l'entreprise par un contrat de travail, s'appliquer à des personnes ne faisant plus partie des effectifs lors de sa signature ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1165 du Code civil et L.2254-1 du Code du travail.