LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 9 septembre 2008) que la Fédération départementale des artisans boulangers et boulangers-pâtissiers de l'Orne (la Fédération) a fait assigner devant le juge des référés la société Normandie "la Mie Câline" afin qu'il lui soit fait interdiction, en application de l'arrêté du 19 juillet 1996 du Préfet de l'Orne, sous astreinte, d'ouvrir tous les jours de la semaine son établissement d'Argentan ;
Attendu que la Fédération fait grief à l'arrêt d'avoir rejeter sa demande, alors, selon le moyen, qu'il ressort de l'arrêt du Conseil d'Etat du 30 mars 2005 que ce n'est que lorsque l'accord prévu par l'article L. 221-17 du code du travail n'a pas pris la forme « d'un document écrit et signé» qu'il doit résulter «d'échanges et de discussions menés simultanément et collectivement» entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs ; qu'ainsi, la circonstance que « l'ensemble des parties prenantes n'a pas été convoqué pour mener simultanément et collectivement les échanges et discussions préalables à l'intervention du protocole d'accord» intervenu le 10 mai 1996 n'était pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté préfectoral du 19 juillet 1996 pris au vu dudit accord dont l'arrêté constate qu'il exprimait «la volonté de la majorité indiscutable des professionnels, à titre principal ou accessoire, concernés par la fabrication, la vente et/ou la distribution de pain et viennoiseries dans le département de l'Orne » ; qu'ainsi, en déboutant la Fédération départementale des artisans boulangers et boulangers-pâtissiers de l'Orne de ses demandes, alors que les éléments par elle retenus ne conféraient pas un caractère sérieux à l'exception d'illégalité de l'arrêté soulevé par l'EURL de Normandie et que constitue un trouble manifestement illicite la violation d'un arrêté préfectoral de fermeture hebdomadaire, la cour d'appel a violé les articles L. 221-17 du code du travail et 809 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêté préfectoral sur lequel la Fédération fonde ses prétentions a été annulé par arrêt de la cour administrative de Nantes du 28 février 2002 ; que cette annulation est définitive, le Conseil d'Etat ayant déclaré le 30 avril 2003 non admis le pourvoi formé contre cet arrêt ; que par ce motif substitué à celui retenu par la cour d'appel, sa décision se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Fédération départementale des artisans boulangers et boulangers-pâtissiers de l'Orne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Fédération à payer à la société de Normandie "la Mie Câline" la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Jacoupy, avocat aux conseils pour la Fédération départementale des artisans boulangers-pâtissiers de l'Orne
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront et d'avoir rejeté les demandes de la Fédération Départementale des Artisans Boulangers et Boulangers-Pâtissiers de l'Orne tendant notamment à ce qu'il soit fait interdiction à l'EURL de Normandie, sous astreinte, d'ouvrir tous les jours de la semaine son établissement d'ARGENTAN,
AUX MOTIFS QUE
« Par arrêt lu le 30 mars 2005, mentionné dans les tables du recueil Lebon (et versé par l'intimée), le Conseil d'Etat statuant au contentieux sur la contestation afférente à un arrêté similaire du Préfet du Vaucluse en date du 6 juin 1996, a notamment retenu, en référence aux termes cités de l'article L 227-17 du Code du Travail, que « les dispositions de cet article impliquent que l'accord à intervenir entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs résulte d'échanges et de discussions menés simultanément et collectivement entre ces différents organismes et non de simples avis recueillis séparément auprès de chacun d'entre eux ».
En l'espèce, selon les termes de l'arrêté du Préfet de l'Orne en date du 19 juillet 1996, le protocole d'accord intervenu le 10 mai 1996 entre certaines organisations professionnelles, s'est formé après que d'autres groupements également concernés, ainsi désignés, « ont été régulièrement invités à la négociation ou consultés ».
Il résulte des termes mêmes de l'arrêté que l'ensemble des parties prenantes n'a pas été convoqué pour mener simultanément et collectivement les échanges et les discussions préalables à l'intervention du protocole d'accord, fondant l'arrêté préfectoral sur lequel s'appuie l'appelante.
Pour ce seul motif ainsi substitué à celui du premier juge, il est justifié d'une difficulté sérieuse conduisant à la confirmation de l'ordonnance entreprise, ce qui rend sans objet l'examen des demandes plus subsidiaires de l'intimée
ALORS QUE
Il ressort de l'arrêt du Conseil d'Etat du 30 mars 2005 que ce n'est que lorsque l'accord prévu par l'article L. 221-17 du code du travail n'a pas pris la forme « d'un document écrit et signé» qu'il doit résulter «d'échanges et de discussions menés simultanément et collectivement» entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs ; qu'ainsi, la circonstance que « l'ensemble des parties prenantes n'a pas été convoqué pour mener simultanément et collectivement les échanges et discussions préalables à l'intervention du protocole d'accord» intervenu le 10 mai 1996 n'était pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté préfectoral du 19 juillet 1996 pris au vu dudit accord dont l'arrêté constate qu'il exprimait «la volonté de la majorité indiscutable des professionnels, à titre principal ou accessoire, concernés par la fabrication, la vente et/ou la distribution de pain et viennoiseries dans le département de l'Orne » ; qu'ainsi, en déboutant la Fédération départementale des artisans boulangers et boulangers-pâtissiers de l'Orne de ses demandes, alors que les éléments par elle retenus ne conféraient pas un caractère sérieux à l'exception d'illégalité de l'arrêté soulevé par l'EURL de Normandie et que constitue un trouble manifestement illicite la violation d'un arrêté préfectoral de fermeture hebdomadaire, la cour d'appel a violé les articles L. 221-17 du code du travail et 809 du code de procédure civile ;