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09/06/2010 | FRANCE | N°09-40203

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 juin 2010, 09-40203


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 18 novembre 2008), que M. X... a été engagé le 20 juillet 1987 par les établissements J. et J. Desjonquères en qualité de preneur d'ordre puis de VRP ; que le contrat de travail s'est poursuivi avec la société France boissons Haute-Normandie aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Entrepôts réunis du Val-de-Marne – Robert frères ; que le 1er janvier 2001, le salarié est devenu responsable commercial en charge des secteurs de Di

eppe, Neuchâtel-en-Bray, la vallée de l'Hyères et Le Tréport ; qu'ayant ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 18 novembre 2008), que M. X... a été engagé le 20 juillet 1987 par les établissements J. et J. Desjonquères en qualité de preneur d'ordre puis de VRP ; que le contrat de travail s'est poursuivi avec la société France boissons Haute-Normandie aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Entrepôts réunis du Val-de-Marne – Robert frères ; que le 1er janvier 2001, le salarié est devenu responsable commercial en charge des secteurs de Dieppe, Neuchâtel-en-Bray, la vallée de l'Hyères et Le Tréport ; qu'ayant été en arrêt de travail pour maladie à compter du 16 août 2003, l'employeur, qui avait engagé le 2 février 2004 M. Y... selon contrat à durée indéterminée pour le remplacer, l'a licencié le 6 octobre 2004 ; que le salarié, qui avait saisi la juridiction prud'homale, étant décédé en cours de procédure, ses ayants droits sont intervenus à l'instance ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré nul le licenciement et de l'avoir condamné à payer aux ayants droits diverses sommes alors, selon le moyen :

1° / que l'article L. 122-45, devenu L. 1132-1, du code du travail faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II de ce même code, ne s'oppose pas au licenciement motivé, non pas par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié ; qu'en l'espèce, en l'état de l'absence prolongée pour maladie de M. X... à compter du 16 août 2003, la société France boissons Haute-Normandie a licencié ce salarié par lettre du 6 octobre 2004, soit après plus de treize mois d'absence, au motif suivant : « Compte tenu de votre poste, il nous est impossible de laisser vacant votre secteur sans prendre le risque majeur d'une forte perte de clientèle et d'activité. … Votre remplacement définitif devenant inévitable, nous sommes dans l'obligation de prononcer votre licenciement » ; que viole le texte susvisé et l'article L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, du code du travail l'arrêt attaqué qui, pour vérifier si l'employeur aurait agi avec une hâte excessive, se place à la date de l'engagement d'un salarié par contrat de travail à durée indéterminée à effet du 2 février 2004 pour remplacer le salarié absent et non à la date du 6 octobre 2004 de la notification du licenciement de ce dernier qui était demeuré à l'effectif jusqu'à cette dernière date ;

2° / que si la société France boissons Haute-Normandie avait engagé un salarié par contrat de travail à durée indéterminée du 19 janvier 2004 à effet du 2 février 2004 pour remplacer M. X..., elle faisait valoir dans ses conclusions (p. 14) qu'elle avait pris toutes dispositions pour que, jusqu'au prononcé du licenciement survenu plus de treize mois après le début de son absence, le salarié absent pour maladie pût réintégrer son poste de travail si son état de santé le lui permettait, en énonçant « que, dans cette hypothèse, il est bien évident que M. X... aurait aussitôt retrouvé son poste de responsable commercial des secteurs de Dieppe, Neufchâtel-en-Bray, la vallée de l'Hyères et Tréport, sachant qu'il avait naturellement été convenu lors de l'embauche de M. Y... que ce dernier pourrait, le cas échéant, être muté sur un autre secteur » ; que prive sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, et L. 122-45, devenu L. 1132-1, du code du travail, l'arrêt attaqué qui retient que le remplacement définitif de M. X... et la perte définitive pour lui de son poste étaient intervenus cinq mois après son premier arrêt de travail, soit dès l'engagement de son remplaçant, et non le 6 octobre 2004, à la date de la notification de son licenciement, sans s'expliquer sur ce moyen déterminant des conclusions de la société exposante qui démontrait que le remplacement du salarié absent ne devait devenir définitif à son égard qu'à compter de son licenciement ;

3° / que l'article L. 122-45, devenu L. 1132-1, du code du travail faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II de ce même code, ne s'oppose pas au licenciement motivé, non pas par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié ; que c'est à la date du licenciement que doit être appréciée la perturbation de l'absence prolongée du salarié sur le fonctionnement de l'entreprise ; que viole le texte susvisé et l'article L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, du code du travail l'arrêt attaqué qui vérifie l'existence de la perturbation causée par l'absence prolongée de M. X... au début de l'année 2004 seulement, sans s'interroger sur la situation dans laquelle se serait trouvée l'entreprise à la date du licenciement en octobre 2004 si la société France boissons Haute-Normandie n'avait pas embauché un salarié en janvier 2004 pour remplacer le salarié absent ;

4° / que subsidiairement, ayant constaté qu'au début janvier 2004, les baisses du chiffre d'affaires, des ventes et de la marge avaient été plus importantes sur le secteur de M. X... et considéré qu'il n'était pas possible d'imputer ces baisses à la seule absence du salarié, ce qui était reconnaître que l'absence de l'intéressé avait bien eu une incidence sur lesdites baisses de l'activité et des résultats de l'entreprise, prive sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, et L. 122-45, devenu L. 1132-1, du code du travail l'arrêt attaqué qui omet de déduire les conséquences légales s'évinçant de cette constatation et ne recherche pas la portée de l'impact négatif de l'absence du salarié sur le fonctionnement de l'entreprise, lors de l'appréciation de la justification du licenciement de l'intéressé ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé que l'article L. 122-45 dans sa rédaction alors applicable n'interdit pas que le licenciement soit motivé par la situation objective de l'entreprise qui se trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement d'un salarié dont l'absence prolongée perturbe le fonctionnement, la cour d'appel, qui ne s'est pas placée à la date de l'engagement du salarié par contrat de travail à durée indéterminée à effet du 2 février 2004, a constaté que si les éléments produits par l'employeur faisaient apparaître une diminution du chiffre d'affaires, une chute des ventes et une baisse de la marge plus importante sur le secteur de M. X..., il n'était pas pour autant possible d'imputer cette baisse à la seule absence du salarié ; que faisant ainsi ressortir que l'absence prolongée de ce dernier ne perturbait pas le fonctionnement de l'entreprise, elle a, par ces seuls motifs et sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Entrepôts réunis du Val-de-Marne-Robert frères aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Entrepôts réunis du Val-de-Marne-Robert frères à payer aux consorts X... la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Entrepôts réunis du Val-de-Marne-Robert frères

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR partiellement infirmé le jugement du conseil de prud'hommes de DIEPPE du 22 février 2006, D'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... nul et D'AVOIR condamné la société FRANCE BOISSONS HAUTE NORMANDIE à payer aux ayants droit de Monsieur X... les sommes de 25. 000 euros à titre de dommages et intérêts, de 800 euros à titre de réparation d'un préjudice distinct (indemnité compensatrice de congés payés), de 4. 712 euros au titre de l'indemnité de préavis et de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, en plus de la somme de 800 euros alloués sur ce dernier fondement par les premiers juges ;

AUX MOTIFS QUE « l'article L. 122-45 du Code du travail n'interdit pas que le licenciement soit motivé par la situation objective de l'entreprise qui se trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement d'un salarié dont l'absence prolongée perturbe le fonctionnement ; que la lettre de licenciement en date du 6 octobre 2004 est ainsi libellée : « Par un précédent courrier en date du 11 août 2004, nous vous avions demandé, comme le prévoit la convention collective, de nous préciser si vous étiez en mesure d'envisager un retour sous 10 jours. Malheureusement en l'état actuel de votre santé, votre retour n'est pas envisageable. Compte tenu de votre poste de commercial, il nous est impossible de laisser vacant votre secteur sans prendre le risque majeur d'une forte perte de clientèle et d'activité. C'est donc dans cet esprit que nous avons été amenés à réorganiser nos secteurs commerciaux et à pourvoir à votre remplacement. Votre remplacement définitif devenant inévitable, nous sommes dans l'obligation de prononcer votre licenciement. » ; que M. X... qui exerçait en dernier lieu les fonctions de responsable commercial pour le secteur de NEUFCHÂTEL-EN-BRAY, DIEPPE, la Vallée de l'HYERES et LE TREPORT a été en arrêt pour maladie à partir du 16 août 2003 ; que son remplacement a été assuré, selon les documents produits par M. Z..., responsable vins du site des ESSARTS, pour la période de septembre 2003 à janvier 2004 et à compter du 2 février 2004 par M. Y..., engagé selon contrat à durée indéterminée du 19 janvier 2004, soit 5 mois après le premier arrêt de travail de M. X... ; que, pour démontrer la nécessité d'un remplacement définitif de M. X..., la société verse aux débats des documents qui font apparaître une diminution du chiffre d'affaires de 10 %, une chute des ventes de 12, 01 % ainsi qu'une baisse de la marge de 7, 44 %, baisse plus importante sur le secteur de M. X... en particulier, mais qu'il n'est pas pour autant possible d'imputer cette baisse à la seule absence du salarié ; que la hâte avec laquelle société a agi pour remplacer définitivement M. X... ne saurait être justifiée par la spécificité des fonctions du salarié, compte tenu de la taille de la société ; qu'en outre, et même si M. X... n'a pas donné de réponse précise au courrier de l'employeur du 19 août 2004 lui demandant sa date de reprise prévisible, cette considération n'est pas déterminante dans la mesure où M. X... était déjà remplacé ; que c'est pourquoi, le licenciement est nul ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'article L. 122-45, devenu L. 1132-1, du Code du travail faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II de ce même code, ne s'oppose pas au licenciement motivé, non pas par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié ; qu'en l'espèce, en l'état de l'absence prolongée pour maladie de Monsieur X... à compter du 16 août 2003, la société FRANCE BOISSONS HAUTE NORMANDIE a licencié ce salarié par lettre du 6 octobre 2004, soit après plus de 13 mois d'absence, au motif suivant : « Compte tenu de votre poste, il nous est impossible de laisser vacant votre secteur sans prendre le risque majeur d'une forte perte de clientèle et d'activité. … Votre remplacement définitif devenant inévitable, nous sommes dans l'obligation de prononcer votre licenciement » ; que viole le texte susvisé et l'article L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, du Code du travail l'arrêt attaqué qui, pour vérifier si l'employeur aurait agi avec une hâte excessive, se place à la date de l'engagement d'un salarié par contrat de travail à durée indéterminée à effet du 2 février 2004 pour remplacer le salarié absent et non à la date du 6 octobre 2004 de la notification du licenciement de ce dernier qui était demeuré à l'effectif jusqu'à cette dernière date ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE, si la société FRANCE BOISSONS HAUTE NORMANDIE avait engagé un salarié par contrat de travail à durée indéterminée du 19 janvier 2004 à effet du 2 février 2004 pour remplacer Monsieur X..., elle faisait valoir dans ses conclusions (p. 14) qu'elle avait pris toutes dispositions pour que, jusqu'au prononcé du licenciement survenu plus de 13 mois après le début de son absence, le salarié absent pour maladie pût réintégrer son poste de travail si son état de santé le lui permettait, en énonçant « que, dans cette hypothèse, il est bien évident que Monsieur X... aurait aussitôt retrouvé son poste de Responsable commercial des secteurs de DIEPPE, NEUFCHÂTEL-EN-BRAY, la vallée de l'HYERES et TREPORT, sachant qu'il avait naturellement été convenu lors de l'embauche de Monsieur Y... que ce dernier pourrait, le cas échéant, être muté sur un autre secteur » ; que prive sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, et L. 122-45, devenu L. 1132-1, du Code du travail, l'arrêt attaqué qui retient que le remplacement définitif de Monsieur X... et la perte définitive pour lui de son poste étaient intervenus 5 mois après son premier arrêt de travail, soit dès l'engagement de son remplaçant, et non le 6 octobre 2004, à la date de la notification de son licenciement, sans s'expliquer sur ce moyen déterminant des conclusions de la société exposante qui démontrait que le remplacement du salarié absent ne devait devenir définitif à son égard qu'à compter de son licenciement ;
ALORS EN OUTRE QUE l'article L. 122-45, devenu L. 1132-1, du Code du travail faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II de ce même code, ne s'oppose pas au licenciement motivé, non pas par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié ; que c'est à la date du licenciement que doit être appréciée la perturbation de l'absence prolongée du salarié sur le fonctionnement de l'entreprise ; que viole le texte susvisé et l'article L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, du Code du travail l'arrêt attaqué qui vérifie l'existence de la perturbation causée par l'absence prolongée de Monsieur X... au début de l'année 2004 seulement, sans s'interroger sur la situation dans laquelle se serait trouvée l'entreprise à la date du licenciement en octobre 2004 si la société FRANCE BOISSONS HAUTE NORMANDIE n'avait pas embauché un salarié en janvier 2004 pour remplacer le salarié absent ;
ALORS ENFIN ET SUBSIDIAIREMENT QUE, ayant constaté qu'au début janvier 2004, les baisses du chiffre d'affaires, des ventes et de la marge avaient été plus importantes sur le secteur de Monsieur X... et considéré qu'il n'était pas possible d'imputer ces baisses à la seule absence du salarié, ce qui était reconnaître que l'absence de l'intéressé avait bien eu une incidence sur lesdites baisses de l'activité et des résultats de l'entreprise, prive sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-4, devenu L. 1235-3, et L. 122-45, devenu L. 1132-1, du Code du travail l'arrêt attaqué qui omet de déduire les conséquences légales s'évinçant de cette constatation et ne recherche pas la portée de l'impact négatif de l'absence du salarié sur le fonctionnement de l'entreprise, lors de l'appréciation de la justification du licenciement de l'intéressé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40203
Date de la décision : 09/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 18 novembre 2008, 08/01190

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 18 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jui. 2010, pourvoi n°09-40203


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40203
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