LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 19 décembre 2007), que M. X... a été engagé en 1977 par la société Transports Cyrille, aux droits de laquelle se trouve la société BM chimie ; qu'il exerçait les fonctions de chef comptable à Marcq-en-Baroeul, lorsque la société a été cédée à la société Royer, par un accord du 27 septembre 2001 prévoyant la reprise du personnel et comportant les stipulations suivantes : «Il est spécialement convenu… que M. Etienne X..., chef comptable travaillant à Marc-en-Baroeul et Mme F.W…, bénéficieront d'une garantie d'emploi dans leurs fonctions actuelles jusqu'à l'âge de la pré-retraite, à moins que les conditions soient telles que la société… propose à M. Etienne X... et à Mme F.W… un autre accord qu'ils acceptent. Le lieu de travail de M. Etienne X... pourra être modifié… ». ; que la société Transports Cyrille a été absorbée par la société Royer à effet rétroactif au 1er janvier 1992 ; que le 16 avril 1992, dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise, il a été demandé à M. X... de poursuivre ses fonctions à Fagnière (51) ; que le salarié n'a pas rejoint sa nouvelle affectation ; qu'en mars 1993, la société Royer a été elle-même absorbée par la société Innocenti avec effet rétroactif au 1er octobre 1992 ; qu'à la suite du transfert des services comptables au Pontet (84) il a été proposé au salarié, le 21 janvier 1994, un poste de responsable de la section «comptabilité client» dans cette ville ; que le salarié ne s'est pas présenté à sa nouvelle affectation, malgré une mise en demeure ; qu'ayant été pour ce motif licencié pour faute grave le 16 mai 1994, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement reposait sur une faute grave et de le débouter de ses demandes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour non-respect de la garantie d'emploi alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur qui propose au salarié d'accepter une mutation à un autre poste et sollicite sa réponse reconnaît, en formulant une telle demande, qu'elle a pour objet une modification du contrat de travail ; qu'en considérant en l'espèce que la mutation de M. X..., selon lettre du 21 janvier 1994 (et non 2004) ne constituait pas une modification de son contrat de travail tout en constatant que dans cette lettre, l'employeur avait «proposé une mutation à un poste de responsable de la section Comptabilité Client» et attendu sa réponse, ce dont il résultait qu'en formulant une telle demande devant recueillir l'accord du salarié, l'employeur reconnaissait qu'elle avait pour objet une modification du contrat de travail, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que pour statuer sur l'existence d'une modification du contrat de travail, les juges doivent rechercher concrètement quelles sont les nouvelles fonctions confiées au salarié afin de déterminer si ces fonctions correspondent à sa qualification, entrent dans ses attributions initiales et n'entraînent pas une réduction des responsabilités initiales ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que la mutation de M. X... qui était chef comptable à un poste de responsable de la section comptabilité client ne constituait pas une modification de son contrat de travail, les fonctions proposées relevant de sa qualification et de sa compétence ; qu'en se déterminant ainsi sans à aucun moment préciser en quoi consistaient ces nouvelles fonctions, ce qui ne permettait pas de vérifier qu'elles correspondaient à sa qualification et à ses attributions initiales et n'entraînaient aucune réduction de responsabilités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ qu'il y a modification du contrat de travail lorsque le salarié ne conserve ni sa qualification, ni son niveau hiérarchique et que ses responsabilités sont réduites ; qu'en considérant que la mutation de M. X... ne constituait pas une modification de son contrat de travail tout en constatant qu'il occupait auparavant un poste de chef comptable, et assurait à ce titre l'entière comptabilité de l'entreprise sous le seul contrôle du commissaire au compte de la société, et qu'il avait été muté à un poste de rResponsable de la section comptabilité client pour travailler sous la direction de M. Franck Z..., ce dont il résultait qu'il ne conservait ni sa qualification de chef comptable, ni son niveau hiérarchique et que ses responsabilités comptables étaient réduites à la comptabilité client, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
4°/ que le salarié qui bénéficie d'une garantie d'emploi dans ses fonctions « actuelles » jusqu'à l'âge de sa pré-retraite, sauf accord contraire, ne peut se voir imposer sans son accord des fonctions différentes de celles qu'il exerçait, peu important que ces nouvelles fonctions soient proches des fonctions antérieures et qu'elles relèvent de sa qualification et de ses compétences ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. X..., engagé en qualité de chef comptable bénéficiait d'une garantie d'emploi «dans ses fonctions actuelles» jusqu'à l'âge de la préretraite sauf accord contraire ; qu'en considérant que cette garantie ne pouvait avoir pour effet de figer la situation et partant, que l'employeur avait pu lui imposer une mutation au poste de responsable de la section comptabilité client pour effectuer des fonctions qui différaient quelques peu de ses fonctions antérieures mais relevaient de sa qualification et de ses compétences, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
5°/ que le refus du salarié d'accepter un changement de ses conditions de travail, même sans motif légitime, s'il rend le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave ; qu'en considérant que le refus sans motif légitime d'occuper le poste proposé justifiait le licenciement pour faute grave de M. X..., la cour d'appel qui n'a pas caractérisé une faute grave, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du code du travail ancien, devenus les articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1234-13 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que les nouvelles fonctions, précisément décrites, qui ont été proposées à l'issue de longues discussions au salarié dont le contrat comportait une clause de mobilité, relevaient de la compétence d'un chef comptable expérimenté, peu important la terminologie employée pour qualifier le poste, et ne différaient pas de celles qu'il exerçait auparavant ; que si le salarié bénéficiait d'une garantie d'emploi, celle-ci ne pouvait avoir pour effet de figer la situation à la date de la cession et ne l'autorisait pas à poser ses conditions, notamment de retour à son poste lors de la cession en cas d'échec dans ses nouvelles fonctions ; enfin que les doutes émis quant à son avenir et à son poste dans ses lettres, qui ne faisaient état d'aucun déclassement ni d'aucune modification de son contrat de travail, ne relevaient en l'état que du procès d'intention ; qu'elle a pu en déduire que le refus du salarié de rejoindre ses nouvelles fonctions, qui était dépourvu de motif légitime, constituait une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que le salarié fait encore grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral alors, selon le moyen, que le harcèlement moral est constitué par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté d'une part, que M. X... était passé de «chef comptable» à simple «chef de bureau» à compter de la cession de son entreprise, d'autre part, que selon instruction du 17 mars 1992, l'employeur lui avait attribué un bureau (dont il n'est pas contesté qu'il ne comportait plus de téléphone) et une mission précise (consistant à recenser les accidents de la circulation ou de travail et les infractions au code de la route alors qu'il était en charge de la comptabilité de l'entreprise) et enfin, que ses primes de bilan ne lui avaient pas été payées en 1992 et 1993, l'employeur reconnaissant par ailleurs dans ses écritures qu'il ne lui avait été donné aucun travail pendant près de deux ans ; qu'en écartant néanmoins l'existence d'actes de harcèlement moral sans justifier autrement sa décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-49 du code du travail ancien, devenu les articles L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a constaté qu'aucun élément ne permettait de retenir que le salarié s'était vu imposer, en exécution des instructions de 1992 qu'il dénonce comme étant constitutives de harcèlement moral, des conditions dégradantes ou incompatibles avec ses fonctions et que la mise à l'écart invoquée n'était pas établie en l'état des pourparlers ayant eu lieu concernant ses nouvelles fonctions dans la société et au cours desquels il n'a pas fait état de déclassement ; qu'elle a pu en déduire que les faits ainsi allégués n'étaient pas établis ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que le salarié avait invoqué le non-paiement de ses primes de bilan en 1992 et 1993 comme des éléments constitutifs du harcèlement moral allégué ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR, dit que le licenciement de X... reposait sur une faute grave et de l'avoir débouté de ses demandes d'indemnité de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour non respect de la garantie d'emploi
AUX MOTIFS QUE Etienne X... a été engagé le 20 mai 1977 par la Société Transports Cyrille en qualité de comptable, ses attributions étant ainsi définies : « Comptabilité générale » : - toutes les opérations depuis la passation des écritures jusqu'à l'établissement de la balance générale, des bilans, compte d'exploitation, inventaires et stocks, - toutes déclarations et tous calculs fiscaux et sociaux – suivi de toutes les opérations de contrôle par les administrations fiscales et sociales, - prévisions de travaux et liaison avec les offres et…- présentation annuelle de la comptabilité au commissaire au compte » ; qu'en ce qui concerne la rémunération, la lettre d'engagement indiquait : « Vous bénéficierez d'un salaire mensuel brut de 4.400 F ainsi que le 31 décembre de chaque année d'un 13ème mois et le 31 mars de chaque année d'un quatorzième mois (prime de bilan) »; qu'un avenant au contrat de travail était signé le 27 mai 1977 indiquant : « Nous nous engageons en cas de licenciement ou de rupture de notre fait de votre contrat de travail, sauf faute lourde, à ajouter aux droits et indemnités auxquelles vous pourriez prétendre une indemnité complémentaire égale au dixième de votre rémunération annuelle par année de présence (les avantages annexes de votre contre de travail devant être inclus dans le calcul). Cette indemnité sera doublée si le licenciement intervenait dans les 3 années suivant un changement de majorité de notre capital social actuellement contrôlé par la Société Lesaffre et Cie (Groupe Lesaffre). Elle serait doublée si elle intervenait après votre 45ème anniversaire et dans les deux cas, si la majorité du capital social actuellement contrôlé par Lesaffre et Cie (Groupe Lesaffre) venait à changer de mains. En cas de rupture du contrat de travail votre préavis sera de 6 mois et de 12 au cas où la majorité du capital social actuellement contrôlé par Lesaffre et Cie (Groupe Lesaffre) changeait de mains » ; qu'alors que Etienne X... qui travaillait à MARCQ EN BAREUIL (Nord) avait été promu chef comptable, la société Transports Cyrille était cédée par le Groupe Lesaffre auquel elle appartenait, à la société Transports ROYER dont le siège social était à FAGNIERES (51), par accord du 27 septembre 2001 ; que cet accord qui prévoyait la cession des actions, notamment celles des consorts X... (l'entreprise étant dirigée par Monsieur Charles X..., frère d'Etienne X...), indiquait en ce qui concerne le personnel : « La reprise du personnel avec tous ses droits et avantages constitue aux yeux des vendeurs un élément essentiel du présent accord. La société acquéreuse des titres Transports Cyrille ou toute société qui vendrait à lui succéder, s'engage à maintenir lesdits droits et avantages et à faire évoluer les rémunérations de façon normale, c'est-à-dire à garantir au minimum le maintien du pouvoir d'achat. Il est spécialement convenu…b) que Monsieur Etienne X..., chef comptable, travaillant à MARCQ EN BAREUIL et Madame…bénéficieront d'une garantie d'emploi dans leurs fonctions actuelles jusqu'à l'âge de la préretraite, à moins que le conditions soient telles que la société ROYER et Cie propose à Monsieur Etienne X... ou à Madame … un autre accord qu'ils acceptent. Le lieu de travail de Monsieur Etienne X... pourra être modifié, celui de Madame A... ne devrait normalement pas l'être » ; qu'en janvier 1992, il était demandé à Etienne X... qui avait été muté à THIANT, de transférer la comptabilité à FAGNIERES (51) ; que suite au rapprochement des sociétés INNOCENTI et ROYER, une réorganisation de l'entreprise était décidée prévoyant le regroupement à CHALONS SUR MARNE des centres administratifs, comptables et informatiques ; qu'après échange entre les parties d'un abondant courrier, Etienne X... se disant victime de harcèlement et estimant manquer de garanties quant au maintien de son emploi, de ses fonctions, de ses droits et avantages, son employeur lui écrivait le 09 avril 1992 : « C'est avec mon accord qu'à compter du 15 avril 1992 vous êtes dispensé de vous rendre à THIANT et ce jusqu'au 2 août 1992, date prévue de votre arrivée à FAGNIERES » ; que la société ROYER était absorbée avec effet au 1er octobre 1992 par la Société INNOCENTI et devenait la Société INNOCENTI-ROYER, que le 21 février 1994, le siège social de la société était transféré de FAGNIERES (51) à LE PONTET dans le Vaucluse ; que l'échange de correspondance ayant persisté entre les parties et après des discussions l'employeur écrivait à Etienne NOEL le 14 avril 1994 ; « Je vous rappelle que le 21 janvier 2004 (sic) nous vous avons fait connaître votre mutation à un poste de responsable de la section Comptabilité Client au PONTET et ce à compter du 1er février 1994. Vous n'avez pas cru déférer à cette mutation. Nous vous mettons par la présente en demeure de vous présenter dans nos bureaux au PONTET pour prendre vos fonctions le lundi 2 mai prochain à 9 heures. Il s'agit là de notre dernière mise en demeure d'avoir à occuper votre poste » ; que Etienne X... n'ayant pas déféré à cette mise en demeure, il était convoqué par lettre en date du 3 mai 1994 à un entretien préalable au licenciement, entretien fixé au 11 mai 1994 ; qu'il était licencié pour faute grave par une lettre en date du 16 mai 1994 ainsi rédigée : « Nous vous reprochons de ne pas avoir repris votre activité de chef comptable, le 12 mai 1994, à 9 heures, comme nous vous l'avions spécifié par notre courrier le 14 avril 1994. Nous avons été contrainte d'embaucher une autre personne pour pallier votre absence » ; que contestant son licenciement intervenu selon lui en violation de la clause de garantie d'emploi dont il bénéficiait et soutenant que l'employeur avait voulu lui imposer une modification substantielle de son contrat de travail qu'il était en droit de refuser, Etienne X... a saisi de diverses demandes le Conseil de Prud'hommes qui a statué dans les termes ci-dessus indiqués par un jugement en date du 13 septembre 2004 dont il a été régulièrement interjeté appel ; qu'en vertu de l'accord du 27 septembre 1991 concernant la cession de la SA Transports Cyrille à la Société ROYER, Etienne X..., devenu chef comptable, bénéficiait d'une garantie d'emploi dans « ses fonctions actuelles jusqu'à l'âge de la préretraite », assortie d'une clause de mobilité puisqu'il y était précisé que son lieu de travail pourrait être modifié ; que cette garantie d'emploi assurée jusqu'à l'âge de la préretraite devait assurer au salarié la garantie de son emploi durant cette période, sauf cas de faute grave ou force majeure ; que Etienne X... ayant été licencié durant cette période de garantie d'emploi, il convient de rechercher à qui en incombe le non-respect ; qu'en présence d'une clause de mobilité indissociable de la garantie d'emploi, l'employeur ne peut se voir reprocher d'avoir proposé à Etienne X... un poste d'abord à FAGNIERES (51), puis à LE PONTET (84), ces propositions s'inscrivant dans le cadre de la nécessaire réorganisation de l'entreprise à la suite des cessions d'actions et de sociétés ; qu'initialement Etienne X... avait été embauché comme comptable ; que ses fonctions relevaient, selon la lettre d'engagement du 20 mai 1977 valant contrat de travail, de la comptabilité générale ; qu'il est devenu chef comptable sans que ses nouvelles fonctions aient été contractuellement définies ; qu'elles ont cependant été nécessairement élargies par rapport à ses fonctions initiales ; que la mention « Chef de bureau » apposée sur les bulletins de salaire après la cession est insuffisante à établir qu'il aurait été déclassé, son salaire ayant été maintenu ;(…) que dès le 16 avril 1992, l'employeur adressait à Etienne X... une proposition à laquelle celui-ci n'a répondu que le 20 mai 1992 en réclamant des avantages nullement prévus par les clauses de garantie d'emploi et de mobilité : location d'un logement, prise en charge des frais de transport ; que la liste des tâches à charge des différents services comptables adressée par l'employeur à Etienne X... jointe à la proposition du 16 avril 1992 n'est aucunement incompatible avec des fonctions de chef comptable et relève de ces fonctions ; qu'en outre il résulte d'un courrier en date du 5 juin 1992 de Etienne X... qu'un entretien a eu lieu avec l'employeur le 22 mai 1992 où il lui aurait été proposé les fonctions suivantes : - facturation, - comptabilité clients, - recouvrement clients, - clients (et tractionnaires) douteux et interdits ; fonctions relevant des compétences d'un chef comptable ; que dans ce courrier Etienne X... qui n'y a pas invoqué un déclassement, a soumis son acceptation à des conditions fixées par lui : prise en charge par l'employeur d'un logement, de frais de transport, insertion d'une clause prévoyant, en cas d'échec dans ses nouvelles fonctions, son retour dans son poste occupé à la date de cession de l'entreprise ; que l'employeur a répondu à ses courriers de réclamations portant sur sa rémunération, ses salaires, sa prime de bilan, ses bulletins de salaires… ; que Etienne X... n'a pas considéré ses reproches à ces divers titre suffisamment sérieux pour justifier la rupture puisqu'à aucun moment il n'a pris acte de la rupture, ni même envisagé de le faire ; qu'après de longues discussions, et un entretien le 20 janvier 2004 à MARCQ EN BAREUIL, l'employeur écrivait le 21 janvier 2004 à Etienne X... : « L'ensemble des services comptables et administratifs de la société sont centralisées au PONTET (Vaucluse) et nous stoppons toute activités comptables tant à FAGNIERES que dans tout autre centre. En conséquence, je vous propose une mutation à un poste de responsable de la section Comptabilité Client au PONTET, sous la direction de Monsieur Franck Z..., à compter du 1er février 1994. Conformément à nos accords, via la Société Lesaffre, nous maintiendrons votre rémunération actuelle » ; que Etienne X... rappelait alors ses courriers antérieurs et faisait part de sa méfiance à l'égard de son employeur compte tenu de son attitude dans la relation contractuelle ; qu'après un nouvel échange de correspondance, l'employeur mettait en demeure Etienne X..., par courrier du 14 avril 1994, de se présenter pour prendre ses fonctions le lundi 2 mai 1994 ; que si la garantie accordée à Etienne X... était de le maintenir dans ses fonctions actuelles, les fonctions qui lui étaient proposées, précisément décrites par l'employeur, relevaient de la compétence d'un chef comptable expérimenté, peu important la terminologie employée pour qualifier le poste ; que cette garantie qui visait à assurer la stabilité de l'emploi du salarié, ne pouvait avoir pour effet de figer la situation, d'autant que la cession des actions et de l'entreprise à une autre société qui avait déjà des services administratives et comptables, allait nécessairement entraîner une réorganisation des ces services dans lesquels Etienne X..., bénéficiant d'une garantie d'emploi, devait être incorporé ; que dès lors que les fonctions confiées à Etienne X... relevaient de sa qualification de chef comptable et ne différaient pas réellement et fondamentalement de celles exercées auparavant, il n'y avait pas changement de ses fonctions actuelles ; que s'il bénéficiait d'une garantie d'emploi, il n'était pas aux termes de l'accord du 24 septembre 1991 autorisé à poser ses conditions, et les doutes émis dans ses courriers quant à son avenir et à son poste ne relevaient en l'état que du procès d'intention ; que d'ailleurs dans ses derniers courriers, il n'alléguait nullement une modification de son contrat de travail ; que n'ayant pas rejoint le poste qui lui avait été proposé à l'issue de longues discussions, le non respect de la clause de garantie d'emploi lui est donc imputable ; que dans ces conditions son refus d'occuper le poste proposé était constitutif d'une faute grave justifiant son licenciement immédiat ; qu'en effet l'employeur ne pouvait conserver davantage, même pendant la durée limitée du préavis, un salarié qui, sans motif légitime, refusait d'occuper son poste, faisant ainsi preuve d'insubordination ; qu'en conséquence Etienne X... doit être débouté de ses demandes d'indemnité de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour non respect de la garantie d'emploi.
1° - ALORS QUE l'employeur qui propose au salarié d'accepter une mutation à un autre poste et sollicite sa réponse reconnaît, en formulant une telle demande, qu'elle a pour objet une modification du contrat de travail ; qu'en considérant en l'espèce que la mutation de Monsieur X..., selon lettre du 21 janvier 1994 (et non 2004) ne constituait pas une modification de son contrat de travail tout en constatant que dans cette lettre, l'employeur avait « proposé une mutation à un poste de responsable de la section Comptabilité Client » et attendu sa réponse, ce dont il résultait qu'en formulant une telle demande devant recueillir l'accord du salarié, l'employeur reconnaissait qu'elle avait pour objet une modification du contrat de travail, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du Code du travail.
2° - ALORS QUE pour statuer sur l'existence d'une modification du contrat de travail, les juges doivent rechercher concrètement quelles sont les nouvelles fonctions confiées au salarié afin de déterminer si ces fonctions correspondent à sa qualification, entrent dans ses attributions initiales et n'entraînent pas une réduction des responsabilités initiales ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a affirmé que la mutation de Monsieur X... qui était Chef Comptable à un poste de Responsable de la section Comptabilité Client ne constituait pas une modification de son contrat de travail, les fonctions proposées relevant de sa qualification et de sa compétence; qu'en se déterminant ainsi sans à aucun moment préciser en quoi consistaient ces nouvelles fonctions, ce qui ne permettait pas de vérifier qu'elles correspondaient à sa qualification et à ses attributions initiales et n'entraînaient aucune réduction de responsabilités, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du Code du travail.
3° - ALORS QU'il y a modification du contrat de travail lorsque le salarié ne conserve ni sa qualification, ni son niveau hiérarchique et que ses responsabilités sont réduites; qu'en considérant que la mutation de Monsieur X... ne constituait pas une modification de son contrat de travail tout en constatant qu'il occupait auparavant un poste de Chef Comptable, et assurait à ce titre l'entière comptabilité de l'entreprise sous le seul contrôle du commissaire au compte de la société, et qu'il avait été muté à un poste de Responsable de la section Comptabilité Client pour travailler sous la direction de Monsieur Franck Z..., ce dont il résultait qu'il ne conservait ni sa qualification de Chef Comptable, ni son niveau hiérarchique et que ses responsabilités comptables étaient réduites à la Comptabilité Client, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du Code du travail.
4° - ALORS, en tout état de cause, QUE le salarié qui bénéficie d'une garantie d'emploi dans ses fonctions « actuelles » jusqu'à l'âge de sa pré-retraite, sauf accord contraire, ne peut se voir imposer sans son accord des fonctions différentes de celles qu'il exerçait, peu important que ces nouvelles fonctions soient proches des fonctions antérieures et qu'elles relèvent de sa qualification et de ses compétences ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que Monsieur X..., engagé en qualité de Chef comptable bénéficiait d'une garantie d'emploi « dans ses fonctions actuelles » jusqu'à l'âge de la préretraite sauf accord contraire ; qu'en considérant que cette garantie ne pouvait avoir pour effet de figer la situation et partant, que l'employeur avait pu lui imposer une mutation au poste de Responsable de la section Comptabilité Client pour effectuer des fonctions qui différaient quelques peu de ses fonctions antérieures mais relevaient de sa qualification et de ses compétences, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ancien devenu l'article L. 1221-1 du Code du travail.
5° - ALORS subsidiairement QUE le refus du salarié d'accepter un changement de ses conditions de travail, même sans motif légitime, s'il rend le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave ; qu'en considérant que le refus sans motif légitime d'occuper le poste proposé justifiait le licenciement pour faute grave de Monsieur X..., la Cour d'appel qui n'a pas caractérisé une faute grave, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ancien, devenus les articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1234-13 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR, dit que Monsieur X... pouvait seulement prétendre à une indemnité contractuelle de licenciement de 129.167 euros
AUX MOTIFS QUE l'avenant du 27 mai 1977 prévoyait en cas de licenciement, sauf faute lourde du salarié, non retenue en l'espèce, ni d'ailleurs alléguée, d'une indemnité contractuelle de licenciement ; que si cette indemnité pouvait être doublée si le licenciement intervenait après le 45ème anniversaire du salarié et s'il intervenait dans les 3 ans de la cession, l'avenant ne fait état que d'un doublement et non d'un triplement, de sorte qu'il ne peut être appliqué deux fois un doublement ; que dans ces conditions, il convient d'allouer de ce chef à Etienne X... qui avait 17 années d'ancienneté la somme de 847.820 F, soit 129.167 euros ; que les sommes ainsi allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 1995 date de réception par la société INNOCENTI ROYER de sa convocation en conciliation.
1° - ALORS QUE l'avenant du 27 mai 1977 au contrat de travail de Monsieur X... prévoyait que l'indemnité contractuelle de licenciement à laquelle il pouvait prétendre serait doublée si le licenciement intervenait dans les trois années suivant un changement de majorité de capital, et encore doublée si le licenciement intervenait après le 45ème anniversaire de Monsieur X..., ce qui lui permettait, si les deux conditions étaient remplies, d'obtenir deux fois le doublement de l'indemnité contractuelle de licenciement; qu'en considérant que cet avenant ne faisait état que d'un doublement de l'indemnité de licenciement, de sorte qu'il ne pouvait être appliqué deux fois un doublement, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
2° - ALORS QUE les jugements doivent être motivées ; qu'en allouant à Monsieur X... une indemnité contractuelle de licenciement fixée à 129.167 euros sans s'expliquer sur ce chiffrage, qui ne correspondait nullement à celui invoqué par le salarié ou par l'employeur, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR, débouté Monsieur X... de sa demande de rappel de salaire au titre de l'absence de maintien de son pouvoir d'achat.
AUX MOTIFS QUE dans l'accord du 27 septembre 2001, la Société ROYER s'était engagée à faire évoluer les rémunérations du personnel repris « de façon normale, c'est-à-dire à garantir au minimum le maintien du pouvoir d'achat » ; que cet accord ne précisait nullement le mode de calcul de la réévaluation du salaire ; qu'Etienne X... prétend que son salaire n'a pas été revalorisé depuis 1991 ; que le coefficient de revalorisation qu'il applique de son propre chef au soutien de sa demande de rappel de salaire, obtenu en se fondant sur la revalorisation du plafond de sécurité sociale sur la même période, soit 11,15%, ne saurait être retenu dès lors qu'il ne correspond pas à la perte d'un pouvoir d'achat dont l'intéressé ne justifie par aucun élément de référence ou de comparaison ; que dans son courrier du novembre 1993, il n'allègue d'ailleurs qu'une diminution de sa rémunération nette.
1° - ALORS QUE il appartient à celui qui se prétend libéré d'une obligation de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que l'employeur s'était engagé par accord du 27 septembre 2001, à faire évoluer les rémunérations du personnel de façon normale, c'est-à-dire à garantir au minimum le maintien du pouvoir d'achat ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande de rappel de salaire au titre de cette garantie de maintien du pouvoir d'achat au prétexte qu'il ne justifiait pas d'une perte d'un pouvoir d'achat depuis 1991, lorsqu'il appartenait à l'employeur de justifier avoir garanti au minimum au salarié le maintien de son pouvoir d'achat, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil.
2° - ALORS QUE le salarié qui subi une diminution de sa rémunération nette ne conserve pas son pouvoir d'achat ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande de rappel de salaire au titre de sa perte de pouvoir d'achat au prétexte qu'il n'alléguait qu'une diminution de sa rémunération nette dans son courrier du 20 novembre 1993, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral subi du fait des actes de harcèlement moral de son employeur.
AUX MOTIFS QU'il est devenu chef comptable sans que ses nouvelles fonctions aient été contractuellement définies ; qu'elles ont cependant été nécessairement élargies par rapport à ses fonctions initiales ; que la mention « Chef de bureau » apposée sur les bulletins de salaire après la cession est insuffisante à établir qu'il aurait été déclassé, son salaire ayant été maintenu ; que les instructions qui lui ont été adressées le 17 mars 1992 et le 18 mars 1992 par notes écrites ayant pour objet l'attribution d'un bureau, l'exécution d'une mission précise, les horaires, les absences, une formation, ne peuvent être analysées comme des actes de harcèlement, Etienne X... étant en effet soumis en raison du lien salarial au pouvoir de direction de l'employeur et aucun élément objectif ne permettant de retenir qu'il se serait vu imposer des conditions de travail dégradantes ou incompatibles avec l'exécution de ses fonctions ; que Etienne X... ne peut davantage se dire victime d'une mise à l'écart concernant ses fonctions au sein de la société ROYER, que celle-ci lui a écrit le 9 avril 1992, révélant ainsi l'existence d'un accord : « C'est avec mon accord qu'à compter du 15 avril 1992 vous êtes dispensé de vous rendre à THIANT et ce jusqu'au 3 août 1992 date prévue de votre arrivée à FAGNIERES. J'ai pris bonne note que vous prendrez vos congés en Juillet à des dates qu'il vous reste à m'indiquer » ; (…) qu'il n'est pas établi que la plainte pénale invoquée par Etienne X... à l'appui de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ait été portée avec intention de nuire ou relève au regard des circonstances de l'espèce d'un abus de droit ; que dès lors, le salarié doit être débouté également de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ; (…) que la prime du bilan arrêtée en 1991 a été versée en 1992 ; que l'employeur ne justifie pas avoir versé celles de 1992 et de 1993 ; que Etienne X... ayant été licencié le 16 mai 1994, il ne peut revendiquer une prime de bilan 1994 ; qu'il convient donc de lui allouer la somme de 29.160 F, soit 5.969, 90 euros, au titre des primes de bilan 1992 et 1993 et des congés-payés y afférents (…)
ALORS QUE le harcèlement moral est constitué par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ; qu'en l'espèce la Cour d'appel a constaté d'une part, que Monsieur X... était passé de « Chef comptable » à simple « Chef de bureau » à compter de la cession de son entreprise, d'autre part, que selon instruction du 17 mars 1992, l'employeur lui avait attribué un bureau (dont il n'est pas contesté qu'il ne comportait plus de téléphone) et une mission précise (consistant à recenser les accidents de la circulation ou de travail et les infractions au code de la route alors qu'il était en charge de la comptabilité de l'entreprise) et enfin, que ses primes de bilan ne lui avaient pas été payées en 1992 et 1993, l'employeur reconnaissant par ailleurs dans ses écritures qu'il ne lui avait été donné aucun travail pendant près de deux ans ; qu'en écartant néanmoins l'existence d'actes de harcèlement moral sans justifier autrement sa décision, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-49 du Code du travail ancien, devenu les articles L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1152-3 du Code du travail.