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05/03/2015 | FRANCE | N°14-14198

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 mars 2015, 14-14198


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 706-3 du code de procédure pénale et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;
Attendu qu'en cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant en compte comme élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe en tenant compte de la part

de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 706-3 du code de procédure pénale et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;
Attendu qu'en cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant en compte comme élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe en tenant compte de la part de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou le concubin survivant ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 29 mars 2012, pourvoi n° 10-25.614), que Gaston X... a trouvé la mort par noyade, le 20 juin 2004, lors du naufrage d'un bateau appartenant à un tiers ; que l'enquête pénale ayant révélé le défaut d'entretien du bateau, son propriétaire a été déclaré coupable d'homicide involontaire et condamné à payer diverses sommes aux ayants droit de la victime ; que ceux-ci ont saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infraction pour obtenir le paiement des condamnations civiles prononcées à l'encontre de ce dernier ; que le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, contestant le mode de calcul et le montant du préjudice économique de la veuve, Mme X..., a formé un recours devant la cour d'appel ;
Attendu que pour fixer le montant de l'indemnité réparant le préjudice économique de Mme X... à une certaine somme, l'arrêt énonce, après avoir évalué les ressources annuelles de Gaston X... à la somme de 1 000 000 francs CFP, que compte tenu de la faiblesse des revenus de la veuve (425 916 francs CFP), la part des revenus du défunt réservée aux dépenses du ménage doit être fixée à 60 % (soit 600 000 francs CFP) ; que compte tenu de l'âge de la victime au moment du décès, 52 ans, et d'un taux de capitalisation de 10,328 le préjudice économique de la veuve s'élève à 600 000 francs CFP X 10,328 = 6 196 800 francs CFP ;
Qu'en statuant ainsi, en se fondant sur les seuls revenus du défunt, et non sur le revenu annuel du foyer avant le décès de la victime, déduction faite de la part de consommation personnelle du défunt, et sans procéder à la comparaison de cette somme avec les revenus que continuait de percevoir Mme X... après le décès de son époux, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à la somme de 6 196 800 francs CFP le préjudice économique subi par Mme X... et condamne le Fonds de garantie des victimes et des actes de terrorisme et d'autres infractions à lui payer cette somme, au titre de son préjudice économique, en denier ou quittances, l'arrêt rendu le 31 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir alloué à Mme Monique X... la somme de 6 196 800 Frs CFP au titre de son préjudice économique ;
Aux motifs que « le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a affirmé à tort que les ressources exactes de la victime n'étant pas connues, la commission s'en tenait par conséquent à une estimation forfaitaire des revenus de la victime décédée correspondant aux 2/3 d'un SMIG ; que de façon surprenante le Fonds se réfère encore dans ses ultimes conclusions à une évaluation forfaitaire en proposant de prendre pour base le 1/3 du SMIG annuel soit 480.000 F CFP annuels, pour évaluer les revenus de la victime et le préjudice économique de sa veuve, en réitérant dans ses propres conclusions l'erreur de droit qu'il reproche au premier juge, comme à l'arrêt de la cour d'appel objet de la cassation ; que compte tenu du mode de vie en autosubsistance de la victime, mais encore en fonction des activités de vente de poisson qui ne sont pas contestables, que la cour dispose des éléments suffisants pour évaluer les ressources de la victime directe à 1 million de francs annuels ; qu'ainsi, et compte tenu de la faiblesse des revenus de la veuve (425 916 FCFP), la part des revenus du défunt réservée aux dépenses du ménage doit être fixée à 60% (soit 600 000 F CFP) ; que compte tenu de l'âge de la victime au moment du décès (52 ans), et d'un taux de capitalisation de 10,328 le préjudice économique de la veuve s'élève à 600 000 FCFP X 10,328 = 6 196 800 F CFP ; qu'il convient sur cet autre point d'infirmer le jugement entrepris » ;
Alors d'une part que l'indemnisation allouée aux victimes d'infraction doit être calculée suivant les règles du droit commun de la responsabilité civile, sans perte ni profit pour aucune des parties ; que toute évaluation forfaitaire du préjudice découlant de l'infraction est par conséquent prohibée ; que pour évaluer à 1 000 000 Frs CFP les ressources annuelles de la victime directe décédée, et calculer sur cette base le préjudice économique du conjoint survivant, l'arrêt attaqué se borne à faire référence au « mode de vie en autosubsistance » de la victime directe et à ses « activités de vente de poisson », sans donner aucune autre précision sur ces deux éléments ; qu'en statuant de la sorte, par un motif qui ne met pas la Cour de cassation en mesure de s'assurer que l'évaluation n'a pas été forfaitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 706-3 du code de procédure pénale, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
Alors d'autre part qu'en cas de décès de la victime directe, le préjudice économique subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant comme élément de référence le revenu annuel du foyer avant le fait dommageable, puis en tenant compte de la part de consommation personnelle de la victime directe décédée et des ressources que continue à percevoir le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou le concubin survivant ; qu'en évaluant le préjudice économique de la veuve en fonction du seul revenu annuel de Gaston X... avant le fait dommageable, et de la part qui était consacrée aux dépenses du ménage sur ce revenu, la cour d'appel a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
Alors enfin que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'il ressort des propres énonciations de l'arrêt attaqué (p. 3, § 3 à p. 4, § 1) que Mme veuve X... demandait la fixation de son préjudice économique à la somme de 6 058 333 Frs CFP ; qu'en fixant ce préjudice à la somme supérieure de 6 196 800 Frs CFP, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-14198
Date de la décision : 05/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Nouméa, 31 octobre 2013, 12/00255

Décision attaquée : Cour d'appel de Nouméa, 31 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 mar. 2015, pourvoi n°14-14198


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.14198
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