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30/05/2012 | FRANCE | N°11-17654

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 30 mai 2012, 11-17654


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Attendu qu'il n'appartient qu'à la juridiction administrative de se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public ; qu'en cas de contestation sérieuse à ce sujet, les tribunaux de l'ordre judiciaire, compétemment saisis par un particulier d'une revendication immobilière, doivent surseoir à statuer jusqu'à ce que soit tranchée par la juridiction administrative la question préjudiciel

le de l'appartenance du bien au domaine public ;
Attendu, selon l'arrêt a...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Attendu qu'il n'appartient qu'à la juridiction administrative de se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public ; qu'en cas de contestation sérieuse à ce sujet, les tribunaux de l'ordre judiciaire, compétemment saisis par un particulier d'une revendication immobilière, doivent surseoir à statuer jusqu'à ce que soit tranchée par la juridiction administrative la question préjudicielle de l'appartenance du bien au domaine public ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., propriétaire de plusieurs parcelles sur le territoire de la commune du Crozet (la commune), l'a fait assigner en revendication de la propriété d'une cour, dépendant selon cette dernière du domaine public routier ;
Attendu que pour rejeter l'exception préjudicielle de domanialité publique et la demande de sursis à statuer formulées par la commune, l'arrêt retient que le juge judiciaire est compétent pour trancher le litige lorsqu'une personne privée conteste le droit de propriété de la collectivité et soutient qu'elle est propriétaire du bien en cause ;
Qu'en statuant ainsi, tout en constatant, par motifs adoptés, que la fixation de la limite de propriété entre la cour litigieuse et le domaine public nécessiterait "vraisemblablement" un arrêté d'alignement pris par l'autorité administrative, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour la commune de Le Crozet
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir décidé n'y avoir lieu à surseoir à statuer dans l'attente d'une décision de la juridiction administrative sur l'appartenance d'une cour au domaine public routier et, en conséquence, d'avoir déclaré qu'une parcelle située sur le territoire d'une commune (celle du CROZET, l'exposante) appartenait à un particulier (M. X...) et comprenait la cour litigieuse située au sud des bâtiments édifiés sur ladite parcelle, en conséquence, d'en avoir interdit l'accès à la commune de quelque manière que ce soit avec défense de troubler la jouissance paisible de son propriétaire ;
AUX MOTIFS QUE si la juridiction administrative pouvait seule apprécier si un bien appartenant à une personne publique relevait de son domaine public ou de son domaine privé, le juge judiciaire était compétent pour trancher le litige lorsqu'une personne privée contestait le droit de propriété de la collectivité et soutenait qu'elle était propriétaire du bien en cause ; qu'il n'y avait dès lors pas lieu en l'espèce à question préjudicielle ou à sursis à statuer dans l'attente d'une décision de la juridiction administrative ; que la configuration des lieux, tels qu'ils résultaient des plans et photographies produits aux débats, faisait apparaître que la cour litigieuse s'insérait, sur trois côtés, dans les parcelles qui l'entouraient, qu'elle ne se situait pas à proximité immédiate du chemin départemental dont elle était séparée par une bande de terrain et qu'elle ne pouvait, compte tenu de son emplacement, être assimilée à une dépendance du domaine public routier ; qu'il n'était pas établi non plus qu'elle fût affectée à l'usage du public (arrêt attaqué, p. 3, 2ème attendu et p. 4, 5ème attendu) ;
ALORS QUE le juge administratif étant seul compétent pour se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public, le juge judiciaire saisi par une personne privée d'une revendication immobilière, ne peut statuer sur l'exception de domanialité publique opposée par la personne publique défenderesse dès lors que cette exception soulève une contestation sérieuse, laquelle est caractérisée si le litige nécessite une délimitation du domaine public par l'autorité administrative ; qu'en l'espèce, à la revendication de propriété formée par la personne privée sur la cour litigieuse, la personne publique avait opposé l'appartenance de celle-ci au domaine public routier dont l'arrêt attaqué a relevé, par motifs adoptés, que sa limite avec le bien revendiqué nécessitait un arrêté d'alignement pris par l'autorité administrative ; qu'en écartant, dans ces conditions, la compétence du juge administratif pour se prononcer sur l'appartenance du bien litigieux à un domaine public dont elle a constaté la nécessaire délimitation par l'autorité administrative, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, par motifs propres et adoptés, l'arrêt attaqué a constaté, tout à la fois, que la cour litigieuse ne se situait « pas à proximité immédiate » du domaine public routier et que « la fixation de la limite » entre ladite cour et ce même « domaine public voisin » devrait être déterminée par arrêté d'alignement ; que la cour d'appel a ainsi statué par des motifs contradictoires en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en outre, le juge administratif étant seul compétent pour se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public, le juge judiciaire est incompétent pour statuer sur l'exception de domanialité publique par laquelle la personne publique oppose à une revendication immobilière l'appartenance au domaine public routier d'un bien immobilier, dès lors que l'exception soulève une contestation sérieuse née de l'affectation matérielle au public du bien revendiqué, susceptible de correspondre à son incorporation dans le domaine public ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué ayant constaté par motifs adoptés l'utilisation par le public, non contestée et pendant une longue période, de la cour revendiquée par le particulier, l'exception d'appartenance de ce bien au domaine public routier soulevait ainsi une contestation sérieuse ; qu'en écartant cependant la compétence du juge administratif pour statuer sur cette exception, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ALORS QUE, en tout état de cause, par motifs propres et adoptés, l'arrêt a constaté, d'un côté, qu'il n'était « pas établi (...) que la cour litigieuse (eût) été affectée au public », de l'autre, qu'il n'était « pas contesté » qu'elle avait pu « être utilisée par le public pendant une longue période » ; qu'en statuant de la sorte par des motifs entachés de contradiction, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-17654
Date de la décision : 30/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Lyon, 1 mars 2011, 09/04162

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 01 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 30 mai. 2012, pourvoi n°11-17654


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17654
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